Chrysostome sur Héb. I 500

HOMÉLIE 5

500
CAR IL N'A PAS PRIS LA NATURE DES ANGES, MAIS IL A PRIS CELLE DE LA RACE D'ABRAHAM. C'EST POURQUOI IL A FALLU QU'IL FUT EN TOUT SEMBLABLE A SES FRÈRES. (
He 2,16-18 He 3,1-6)

Analyse.
1. Dieu s'est montré libéral envers le genre humain.
2. Jésus, apôtre et pontife de notre religion.
3. Exhortation à s'affermir dans l'espérance et dans la foi.
4. Du bonheur des méchants.
5. Il faut, pour la religion, être prêt à tout souffrir.

501 1. Afin de montrer toute la bonté et toute la tendresse de Dieu pour le genre humain, après avoir dit : « Parce que ses enfants avaient une nature composée de chair et de sang, il s'est fait participant de cette même nature », Paul explique ce passage et continue en ces termes. « Car il ne prend pas la nature des anges ». Pour que l'on fasse une sérieuse attention à ces paroles, pour que l'on ne regarde pas comme un léger bienfait cette faveur qu'il nous a faite de se revêtir de notre chair, faveur qu'il n'a pas faite aux anges, il dit: « Il n'a pas pris la nature des anges, mais il a pris celle de la race d'Abraham ». Que signifient ces mots : « Il n'a pas pris la nature de l'ange; il a pris celle de l'homme? » Pourquoi cette expression : « Il a pris ? » Pourquoi ne pas dire : « Il s'est revêtu », mais : «Il a pris? » C'est une métaphore empruntée à l'homme qui court après un autre, quand celui-ci se détourne : c'est une métaphore empruntée à cet homme qui fait tous ses efforts pour saisir le fuyard et pour prendre celui qui s'échappe. Il a pris la nature de l'homme qui le fuyait et qui s'éloignait de lui. « Car nous nous étions éloignés de Dieu, et nous étions dans le monde, sans connaître Dieu ». (Ep 2,12) Dieu a poursuivi l'homme qui le fuyait et il a pris sa nature. Il montre que cette conduite de Dieu à notre égard est un effet de sa bonté, de sa tendresse et de sa sollicitude pour nous. C'est comme lorsqu'il dit : « Est-ce que tous les esprits, ministres de Dieu, n'ont pas été envoyés pour prêter leur ministère aux héritiers du salut?» (He 1,14) Il montre par là toute la sollicitude de Dieu pour la nature humaine, et tous les égards qu'il a pour nous. Ainsi dans le passage qui nous occupe, il met cette vérité dans un jour plus grand encore, au moyen d'une comparaison conçue,en ces termes : « Il ne prend pas la nature des anges ». C'est qu'il y a là un miracle bien capable de nous remplir, d'étonnement; c'est notre chair qui se trouve élevée à ce degré de grandeur et qui devient l'objet de l'adoration des anges, des archanges, des séraphins et des chérubins.

Que de fois, en réfléchissant à ce prodige, j'ai été ravi en extase et quelle haute idée j'ai conçue alors de la nature humaine ! voilà un magnifique et brillant privilège ! Voilà une sollicitude singulière de Dieu pour l'homme ! Et Paul ne dit pas simplement : Il prend la nature de l'homme ; mais, pour élever l'âme de ses auditeurs, pour leur montrer toute la grandeur et toute la splendeur de leur naissance, il leur dit: « Il prend la nature de la race d'Abraham; il fallait donc qu'il fût en tout semblable à ses frères ». Ces mots « en tout», que veulent-ils dire? Ils signifient que le Christ a été enfanté et élevé, qu'il a, grandi, qu'il a souffert tout ce qu'il fallait souffrir, et qu'enfin il est mort. En un mot, il a été en tout semblable à ses frères. Après avoir longtemps entretenu son auditoire de la grandeur du Christ, de sa gloire suprême, il parle de sa Providence. Et voyez comme sa parole est adroite et puissante, comme il fait ressortir l'attention que le Christ apporte à nous ressembler complètement. O sollicitude de Dieu à notre égard ! Après avoir dit: « Parce que ses enfants ont une nature composée de chair et de sang, il s'est fait participant de cette même nature », il insiste et dit ici : « Il est devenu semblable en tout à ses frères ». C'est comme s'il disait. Lui qui est si grand, lui qui est la splendeur de la gloire, le caractère de la substance divine, (474) lui qui a fait les siècles, lui qui est à la droite du Père, il a consenti, il s'est étudié à devenir notre frère en tout, et c'est pour cela qu'il a envoyé ses anges et les puissances d'en-haut, qu'il est venu à nous et qu'il a pris notre nature. Voyez tous les bienfaits dont il nous a comblés : il a détruit la mort, il nous a affranchis de la tyrannie du démon, il nous a délivrés de la servitude, il nous a fait l'honneur de devenir notre frère, et il nous a honorés, non-seulement de ce bienfait, mais d'une foule d'autres bienfaits. Il a bien voulu devenir notre grand pontife auprès de son père. Car saint Paul ajoute : « Pour être envers Dieu un pontife compatissant et fidèle (17) ». C'est pour cela, dit Paul, que le Christ a pris notre chair. C'est un effet de sa bonté pour les hommes; il voulait que Dieu eût pitié de nous. Voilà le motif, l'unique motif de sa conduite providentielle. Il nous a vus abattus, mourants, tyrannisés par la mort, et il nous a pris en pitié. « Afin d'expier les péchés du, peuple », dit l'apôtre, « afin d'être un pontife compatissant et fidèle ». — « Fidèle », que veut dire ce mot? Il veut dire: sincère et puissant médiateur. Car le seul pontife fidèle, c'est le fils. Il peut, en sa qualité de pontife, absoudre son peuple de ses péchés. C'est donc pour offrir à Dieu une victime capable de nous purifier et d'expier nos fautes, qu'il s'est fait homme; voilà pourquoi l'apôtre a ajouté : «Envers Dieu », c'est-à-dire « nos fautes envers Dieu ». Nous étions, dit-il, les ennemis de Dieu, nous étions condamnés, nous étions notés d'infamie; il n'y avait personne pour offrir, en notre faveur, le sacrifice. Il nous a vus en cet état et il nous a pris en pitié. Il ne nous a pas donné un pontife; mais il s'est constitué lui-même notre pontife fidèle. Puis nous faisant voir en quoi c'est un pontife fidèle, l'apôtre a ajouté : « Afin d'expier les péchés du peuple ». — « Car c'est des souffrances mêmes par lesquelles il a été éprouvé, qu'il tire la force de secourir ceux qui sont éprouvés (18) ».

502 2. Voilà le comble, de l'humiliation ! Voilà un abaissement indigne d'un Dieu ! « De ses souffrances mêmes ». C'est de l'Incarnation. 'qu'il parle ici, et peut-être avait-il pour but de raffermir ces âmes faibles. Toujours est-il que voici ce qu'il veut dire : C'est pour souffrir ce que nous souffrons qu'il est venu, et maintenant il tonnait nos souffrances, et il les connaît non-seulement comme Dieu, mais comme homme, par l'expérience qu'il en a faite; ses nombreuses souffrances lui ont appris à compatir aux nôtres. Pourtant Dieu ne tonnait point la souffrance; mais Paul aborde ici le mystère de l'incarnation; c'est comme s'il disait: Le corps du Christ lui-même a été en proie à la souffrance. Il sait ce que c'est que l'affliction; il sait ce que c'est que la tentation et il le sait aussi bien que nous qui avons souffert; car il a souffert lui-même. Mais que signifient ces mots : « Il a la force de secourir ceux qui sont éprouvés ? » C'est comme s'il disait : C'est avec ardeur qu'il nous tendra la main ; car il est compatissant. Comme les Hébreux voulaient avoir sur les gentils une supériorité quelconque, il leur montre, sans blesser les gentils, que voilà précisément ce qui les rend supérieurs à eux. C'est d'eux que vient le salut; c'est leur nature qu'il a prise d'abord, puisque c'est chez eux qu'il s'est incarné. Car, dit-il, « il ne prend pas la nature des anges; il prend la nature de la race d'Abraham ». C'est un honneur qu'il fait au patriarche, et il montre aussi ce que c'est que la race d'Abraham. Il leur rappelle cette promesse qui leur a été faite : « Je donnerai cette terre à toi et à ta race». (Gn 13,15) Un petit mot lui suffit pour leur montrer leur parenté avec le Christ: « Ils sont tous les enfants d'un même père ». Mais, comme cette parenté, n'était pas grande, il y revient et s'arrête sur cette incarnation providentielle, en ces termes : « Afin d'expier les péchés du peuple ».

Consentir à devenir un homme, c'était nous donner une grande preuve de sollicitude et d'amour. Mais tout n'est pas là ; il y a en outre les biens impérissables qui nous ont été donnés par son moyen. « Pour expier les péchés du peuple ». Pourquoi pas « de la terre ? » N'a-t-il pas porté les péchés de tout le monde? C'est qu'il parlait aux Hébreux des Hébreux. L'ange ne disait-il pas à Joseph : « Tu l'appelleras Jésus, car il sauvera son peuple ? » (Mt 1,21) Voilà en effet ce qui devait avoir lieu d'abord : il est venu pour sauver d'abord ce peuple, et par lui les autres hommes; quoique le contraire ait eu lieu. C'est ce que disaient aussi les apôtres, dès le commencement : « Par amour pour vous, il a suscité son Fils et l'a envoyé pour vous bénir ». (Ac 3,26) Et ailleurs : « Le Verbe du salut vous a été envoyé », (Ac 13,26) Il montre la noblesse du peuple, juif, lorsqu'il dit : « Pour expier les péchés de son peuple ». C'est ici qu'il tient ce langage; car qu'il ait effacé les péchés du monde entier, c'est ce que prouvent ces mots adressés au paralytique: « Vos péchés vous sont remis », c'est ce que prouvent ces paroles adressées à ses disciples, à propos du baptême: «Allez et instruisez toutes les nations, et baptisez-les au nom du Père et du Fils et: du Saint-Esprit ». (Mt 9,5) Après avoir abordé le chapitre de l'Incarnation, Paul entre sans crainte dans les moindres et dans les plus humbles détails ; voyez plutôt: « Ainsi, mes saints frères, qui avez part à la vocation céleste, considérez l'apôtre et le pontife de notre confession dans la personne de Jésus, qui est fidèle à celui qui l'a établi, comme Moïse lui a été fidèle en toute sa maison ». (He 3,1-2)

Il va le comparer et le préférer à Moise, et il parle en premier lieu des devoirs du sacerdoce; car tous ses auditeurs avaient de Moise une haute opinion. Il commence par jeter les germes delà supériorité de Jésus, et part de son incarnation pour arriver à sa divinité ; là nécessairement s'arrêtait la comparaison. Il commence par les mettre comme « hommes» sur la même ligne, et il dit : « Comme Moïse en toute sa maison ». Il ne montre pas tout d'abord la supériorité de Jésus; il craindrait que son auditoire ne se révoltât et ne se bouchât les oreilles. Car ses auditeurs avaient beau être des fidèles, le souvenir de Moïse était (475) encore profondément gravé dans leur coeur. « Qui est fidèle à celui qui l'a établi ». Dans quelle charge l'avait-il établi ? Dans la charge d'apôtre et de pontife. Passant ici sous silence son essence et sa divinité, il ne parle que de ses dignités, au point de vue purement humain. « Comme Moïse en toute sa maison », c'est-à-dire au milieu de son peuple ou bien dans le temple. Il dit ici : « En sa maison », et c'est comme s'il disait : « Au milieu de ceux qui sont dans cette maison ». Car Moïse était pour le peuple Hébreux comme un intendant, comme un économe. Et, pour, prouver qu'il s'agit ici de ce peuple, il a ajouté : « C'est nous qui sommes sa maison », c'est-à-dire sa chose. Puis voici la supériorité de Jésus mise en pleine lumière : « Il a été jugé digne d'une gloire a d'autant plus grande que celle de Moïse, que « celui qui a bâti la maison est plus estimable que la maison même (He 3,3) ».

503 3. Et lui-même, dit-il, était de la maison. Il n'a pas dit : L'un était l’esclave, l'autre était le maître; mais il l'a fait entendre discrètement. Si maison, veut dire ici peuple; et si Jésus était du peuple, c'est qu'il était de la maison. Nous aussi nous avons l'habitude de dire : Voilà un homme qui est de la maison. Il dit ici « maison » et non pas « temple », car le temple avait été construit non par Dieu lui-même, mais parles hommes. Quant il celui qui l'a établi, c'est Dieu; il est ici question de Moïse. Voyez comme la supériorité de Dieu est indiquée. Il était fidèle, dit-il, en toute sa maison, et il était de cette maison, c'est-à-dire du peuple. Or, l'ouvrier est plus estimable que l'ouvrage, et l'architecte que la maison. « Et l'architecte de toutes choses, c'est Dieu (4)». Vous voyez qu'il est question ici du peuple tout entier; et non du temple. « Quant à Moïse, il a été fidèle dans toute la maison de Dieu, comme un serviteur envoyé pour annoncer au peuple tout ce qu'il lui était ordonné de dire (5)». Voilà encore une autre différente qui résulte de l'état de fils et de celui de serviteur. Voyez-vous comme par ce nom de fils il fait entendre que le titre de Fils de Dieu appartient à Jésus en toute propriété ? « Mais le Christ, comme Fils, a l'autorité dans sa maison (6) ». Voyez-vous comme il distingue et sépare l'oeuvre de l’ouvrier, le serviteur du Fils? Celui-ci entre dans le bien de son père, comme Fils de la maison, celui-là comme serviteur. « Et c'est nous qui sommes sa maison, pourvu que nous conservions jusqu'à la fin une ferme confiance et l'espoir glorieux des biens qui nous attendent ».

Ici nouvelle exhortation à résister fortement, à ne pas tomber dans le découragement. Comme Moïse, dit-il, nous serons de la maison de Dieu, si nous conservons jusqu'à la, fin une- ferme confiance et un glorieux espoir. Celui que la douleur abat dans les épreuves et' qui sent son coeur défaillir, n'est pas glorifié; celui qui; tout couvert de confusion, va se cacher, n'a pas la confiance; celui qui est triste n'est pas glorifié. Et plus c'est faire leur éloge que de dire: « Si nous conservons jusqu'à la fin une ferme confiance et l'espérance de la gloire qui nous attend ». C'est montrer que cette confiance et cet espoir sont déjà entrés dans leur coeur. Mais c'est jusqu'à la fin qu'il faut persévérer; il faut savoir non-seulement résister mais avoir une confiance ferme et stable fortement appuyée sur la foi, sans jamais se laisser ébranler par les épreuves. Ne vous étonnez pas si ce mot: «Il a été éprouvé lui-même », rappelle un peu trop la nature humaine. Si, en parlant du Père qui n'a pourtant pas été incarné, l'Ecriture dit : « Le Seigneur a regardé du haut des cieux et il a vu tous les enfants des hommes » (
Ps 14,2); c'est-à-dire, il s'est rendu de toutes choses un compté fidèle et exact : si elle dit : « Je descendrai des cieux et je verrai si leurs plaintes sont légitimes » (Gn 18,21); si elle dit : « Dieu ne peut supporter les vices des hommes», pour exprimer la grandeur de la colère divine, on peut parler à plus forte raison « des épreuves » du Christ dont la chair a connu la souffrance. Comme beaucoup d'hommes pensent que l'épreuve des maux est le meilleur moyen de les connaître, il veut montrer que celui qui a souffert, tonnait lés souffrances de la nature humaine. « Vous donc, mes saints frères » (donc, c'est-à-dire « par ce motif) vous qui avez part à la vocation céleste ». N'en demandez pas davantage, si vous êtes appelés à cette vocation voilà la récompense! voilà la rémunération ! Ecoutez ce qui suit : « Considérez l'apôtre et le pontife de notre confession dans la personne de Jésus-Christ qui est fidèle à celui qui l'a établi, comme Moïse lui a été fidèle en toute sa maison ». Que signifient ces mots : « Qui est fidèle à celui qui l’a établi ? » Ils signifient : qui pourvoit à tout, qui conduit les siens, qui ne les laisse ni errer au hasard ni s'égarer. « Comme Moïse, en toute sa maison », c'est-à-dire: Apprenez à connaître ce pontife et vous n'aurez pas besoin d'autre consolation, d'autre exhortation. Il l'appelle apôtre, parce qu'il a été envoyé; il l'appelle pontife de « notre confession », c'est-à-dire de « notre foi ». Il a eu raison de dire : « Comme Moïse ». Car, comme lui, Jésus a été chargé de conduire et de gouverner son peuple ;mais sa mission était plus haute et plus importante. Moïse n'était qu'un serviteur; le Christ est le Fils de Dieu. Celui-là avait sous sa tutelle des étrangers; celui-ci est le tuteur des siens.

« Pour annoncer tout ce qu'il lui était ordonné de dire ».Que dites-vous, Paul? Dieu accepte-t-il le témoignage des hommes? Sans doute, il l'accepte. S'il prend à témoin le ciel, la terre et les collines, en disant par la bouche des prophètes « Cieux, entendez-moi; terre, écoute; car le Seigneur a parlé; écoutez, vallées et fondements de la terre » (Is 1,2 Mi 6,2), parce que le Seigneur porte son jugement contre son peuple, à plus forte raison peut-il prendre les hommes à témoin. Que veulent dire ces mots: « Pour annoncer, pour rendre témoignage? » C'est qu'il faut à Dieu des témoins contre des hommes qui ont abjuré la pudeur. « Le Christ gouverne comme Fils». Moïse était tuteur d'enfants étrangers; le Christ est le tuteur de sa famille. « Et la glorieuse espérance ». C'est bien dit : car les biens qui leur étaient promis n'étaient encore que des (476) espérances. Or il faut conserver l'espérance et nous glorifier de ces promesses, comme si elles s'étaient réalisées déjà. C'est pour cela qu'il parle « des espérance glorieuse »; c'est pour cela qu'il ajoute Conservons-la fermement jusqu'au bout; car c'est l'espérance qui nous a sauvés. Si donc nous lui devons notre salut, et si nous savons attendre patiemment, ne nous affligeons pas des maux présents et ne cherchons pas à voir l'effet des promesses divines ; « car lorsque l'on voit ce qu'on a espéré, ce n'est plus espérance ». (Rm 8,24) Ils sont grands les biens qui nous sont promis, et ce n'est point dans cette vie passagère et périssable que nous pouvons les goûter. Mais pourquoi donc alors nous prédire un bonheur qui ne doit pas être ici-bas notre partage? C'est que Dieu, au moyen de cette promesse, veut ranimer notre âme, affermir et fortifier notre ardeur, relever et fortifier nos esprits. Voilà le but véritable de toutes ces promesses.

504 4. Gardons-nous donc de nous troubler ; n'éprouvons aucun trouble à l'aspect du bonheur des méchants ; ce n'est point ici-bas que le vice et la vertu sont rémunérés; si cela arrive quelquefois, ce n'est pas pour que justice soit faite; c'est un avant-goût du jugement, c'est pour que ceux qui ne croient pas à la résurrection rentrent en eux-mêmes. Quand donc nous voyons le méchant dans l'opulence, ne tombons pas dans le découragement; quand nous voyons l'homme de bien dans le malheur, ne nous troublons pas; c'est là-bas que sont les couronnes; c'est là-bas, que sont les supplices. D'ailleurs, il est impossible que le méchant soit complètement méchant; il peut avoir quelques qualités : il est impossible aussi que le bon soit parfait; il peut avoir quelques défauts. Quand donc le méchant est dans la prospérité, c'est pour son malheur, sachez-le bien ; c'est pour qu'après avoir reçu ici-bas la récompense du peu de mérite qu'il peut avoir, il reçoive là-bas son châtiment plein et entier. Le plus heureux est celui qui est puni ici-bas de manière à sortir de cette vie éprouvé par la souffrance, pur et irréprochable, après avoir déposé le fardeau de ses péchés. Et c'est aussi-ce que nous enseigne Paul, en ces termes : « C'est pour cela qu'il y a parmi vous bien des malades, bien des infirmes, et que beaucoup dorment du dernier sommeil » ; et ailleurs: « Livrez cet homme à Satan, pour mortifier sa chair, afin que son âme soit sauvée, au grand jour du jugement ». () Et le Prophète dit : « Il a reçu de la main du Seigneur un double fardeau de péchés. » (Is 11,2) Et David dit ailleurs: « Voyez mes ennemis; ils se sont multipliés plus que les cheveux de ma tête, et ils me poursuivent de leur injuste haine; pardonnez-moi tous mes péchés ». (Ps 24) Et nous lisons ailleurs:« Seigneur, notre Dieu, donnez-nous la paix; car vous nous avez rendu tout le mal que nous avons fait ». (Is 26,12) Voilà ce qui prouve que les bons expient ici-bas leurs péchés. Pour vous convaincre maintenant que bien des méchants favorisés ici-bas reçoivent dans l'autre vie un châtiment complet, écoutez ces paroles d'Abraham : « Vous avez reçu votre part de bonheur dans votre vie, et Lazare n'a eu que le malheur en partage ». (Lc 16,25) De quels biens s'agit-il ici? Ces mots : « Vous avez reçu votre part », montrent que le bonheur de l'un, comme le malheur de l'autre, était le paiement d'une dette. Aussi ajoute-t-il : « C'est pourquoi il est dans la consolation ». Car vous le voyez, il est purifié de ses péchés, « et vous » vous êtes dans les tourments.

Ne nous attristons donc pas, lorsque nous voyons les pécheurs favorisés ici-bas; mais quand nous sommes dans le malheur, réjouissons-nous, car ce malheur est le paiement de nos fautes. Ne cherchons pas le repos; car le Christ a promis l'affliction à ses disciples : et Paul dit : « Tous ceux qui, veulent vivre pieusement en Jésus-Christ, souffrent la persécution». (2Tm 3,12) Un courageux athlète, au moment du combat, ne, recherché pas les biens, les tables bien servies; une pareille conduite n'est pas celle d'un athlète, mais celle d'un homme -mou et efféminé. Un athlète qui tombât est tout frotté d'huile, il supporte la poussière, la chaleur, la sueur, les perplexités, les angoisses de la lutte. Voici le moment du combat; donc voici le moment des blessures, de l'effusion du sang; de la douleur! Ecoutez les paroles de saint Paul : « Je ne combats pas en lutteur qui frappe dans le vide ». (1Co 9,26) Songeons que notre vie n'est qu'un combat et jamais nous ne chercherons le repos; jamais nous ne regarderons l'affliction comme un accident nouveau et extraordinaire de notre existence; nous ressemblerons à l'athlète qui ne regarde pas la lutte comme un accident; nouveau et extraordinaire pour lui. Il n'est pas temps encore de nous reposer; il faut que nous soyons perfectionnés parla souffrance. Quoique;, nous ne soyons pas en butte à la persécution, aux, vexations, il y a cependant des afflictions journalières qui nous éprouvent; si nous ne savons pas les supporter, comment supporterions-nous la persécution ? « Vous n'avez eu », dit-il, « que des persécutions humaines ». (1Co 10,13) Ainsi prions Dieu de ne pas subir la persécution; mais si nous la subissons, sachons la supporter avec courage. Il appartient au sage qui sait garder une, juste mesure, de ne pas se jeter à la légère dans le péril; mais il appartient à l'homme courageux, au philosophe de se raidir contre le péril, quand il y tombe. N'allons donc pas nous y jeter légèrement;, il y aurait là une audace téméraire, mais, quand nos chefs, quand les circonstances nous appellent, ne reculons pas, il y aurait là de là lâcheté. En un mot, ne courons pas au danger en téméraires, sans cause, sans profit, sans une pieuse nécessité; il y aurait de l'ostentation, un amour de la gloire vain et superflu. Mais pour défendre la religion, bravons mille morts, s'il le faut. N'appelez pas les persécutions, si votre piété né rencontre rien qui l'arrête. A quoi bon attirer sur vous des dangers superflus et inutiles ?

505 5. Ce qui me dicte ce langage, c'est le désir que j'ai de vous voir observer les lois du Christ qui nous ordonne de prier Dieu, de ne pas entrer en (477) tentation, qui nous ordonne aussi de prendre notre croix et de le suivre. Ce ne sont pas là des ordres contradictoires; ce sont des ordres qui s'accordent et qui sont en parfaite harmonie. Préparez-vous, équipez-vous comme un vaillant soldat, soyez toujours en armes, toujours sobre, toujours vigilant, toujours attendant l'ennemi ; mais n'allumez pas le flambeau de la guerre : ce ne serait pas d'un soldat, ce serait d'un séditieux. Mais la trompette de la foi vous appelle-t-elle? marchez aussitôt, ne tenez plus à la vie, marchez avec ardeur au combat, enfoncez-les bataillons ennemis, frappez le démon au visage, élevez un trophée. Mais si la religion ne reçoit aucune atteinte, si nos dogmes spirituels ne sont point attaqués, si l'on ne vous force point à faire ce qui déplait à Dieu, ne prenez point de peine superflue. Il faut que la vie d'un chrétien soit une vie sanglante. Oui, il doit être toujours prêt à verser le sang, non pas celui d'autrui, mais le sien: quand il s'agit de verser son sang pour le Christ, il faut être prêt à le verser comme de l'eau; car ce sang qui circule dans nos veines n'est que de l'eau; il faut se dépouiller de sa chair avec autant de facilité que d'un vêtement. Et c'est ce que nous ferons, si nous ne nous attachons pas aux richesses, si nous ne sommes pas esclaves des beaux édifices, de la volupté et des biens de ce monde. Si ceux qui passent leur vie sous les drapeaux mènent une vie d'abnégation, vont où la guerre les appelle, entrent en campagne et supportent de bon coeur toutes les fatigues, ne devons-nous pas, nous soldats du Christ, trous tenir toujours prêts et équipés, et nous ranger en bataille pour faire la guerre aux vices ?

La persécution n'existe plus aujourd'hui, et à Dieu ne plaise qu'elle revienne ! Mais nous avons à soutenir d'autres guerres, la guerre de l'avarice, la guerre de l'envie, la guerre des autres passions. C'est à cette guerre que Paul fait allusion, en ces termes : « Nous n'avons pas à lutter contre des hommes de chair et de sang ». (
Ep 6,12) Cette guerre-là nous menace toujours. C'est pourquoi il veut que nous restions toujours en armes « Soyez donc », dit-il, « toujours armés ». Cette recommandation s'applique même à l'heure présente, et il montre pourquoi il faut toujours être armé. Nous avons une grande guerre à soutenir contre notre langue, contre nos yeux; cette guerre, repoussons-la. Nous avons une grande guerre à soutenir contre nos passions, c'est pourquoi il s'occupe de l'armure du soldat du Christ. « Restez fermes », dit-il, « ceignez vos reins », et il ajouté: « Avec la ceinture de la vérité ». Pourquoi ? C'est que les passions ne sont qu'illusion et mensonge; comme dit quelque part David : « Mes reins étaient remplis d'illusions ». (Ps 107,8) Ce n'est pas la volupté, ce n'est que l'ombre de la volupté. C'est pourquoi, dit-il, ceignez vos reins avec la ceinture de la vérité, c'est-à-dire de la vraie volupté, de la sagesse, de l'honnêteté.

De là ces conseils qu'il nous donne, en voyant combien le péché est déraisonnable, et dans son désir que tous nos membres soient bien munis de toutes parts: « La colère injuste », dit-il, « ne sera jamais innocente aux yeux de Dieu ». (Si 1,22) Il veut dire que nous prenions la cuirasse et le bouclier: C'est que la colère est une bête féroce toujours prête à s'élancer. Pour la vaincre, pour la contenir, nous avons besoin de mille fossés, de mille barrières. Voilà pourquoi Dieu a construit avec des os presque aussi durs que la pierre, cette partie de l'édifice humain où la colère cherche à se glisser. Il lui a donné une base solide, il l'a entourée d'un rempart; il ne fallait pas qu'en rompant et en brisant tous les obstacles, la colère détruisît tout l'édifice animé. C'est un feu, dit-il, c'est une tempête et, sans toutes ces précautions, aucun de nos membres ne pourrait soutenir ses assauts. Les médecins disent aussi que, pour ce motif, le poumon a été placé au-dessous du coeur. Il fallait que le coeur, environné de parties molles, se reposât en rencontrant ce poumon spongieux, et non les parois dures et résistantes de la poitrine sur lesquelles, dans ses bonds précipités, il aurait pu se blesser. Nous avons donc besoin d'une forte cuirasse, pour tenir continuellement en respect la bête féroce. Il nous faut aussi un casque; c'est sous le casque qu'est le siége du raisonnement d'où dépend notre salut, quand nous agissons bien, et qui fait notre perte, quand nous agissons mal. Voilà pourquoi il dit : « Le casque du salut » ; car le « cerveau est mou de sa nature », et voilà pourquoi il est protégé par une sorte de test appelé crâne. La source de tous nos biens et de tous nos maux c'est d'avoir ou de n'avoir pas la connaissance de ce qui nous est utile ou nuisible. Nos pieds et nos mains aussi ont besoin d'armures; mais il ne s'agit pas ici des mains et des pieds du corps ; il s'agit des mains et des pieds de l'âme; les unes doivent s'efforcer de remplir leur tâche, les autres doivent aller où il faut. Armons-nous donc ainsi et nous pourrons vaincre nos ennemis et Ceindre la couronne de gloire par la grâce de Jésus-Christ Notre-Seigneur. A lui, au Père et au Saint-Esprit, gloire, puissance et honneur, maintenant et toujours et dans tous les siècles des siècles! Ainsi soit-il!


HOMÉLIE 6 - C'EST POUR CELA QUE LE SAINT-ESPRIT DIT : SI VOUS ENTENDEZ AUJOURD'HUI SA VOIX, N'ENDURCISSEZ POINT VOS COEURS,

600
COMME AU TEMPS DE MA COLÈRE ET AU JOUR DE LA TENTATION DANS LE DÉSERT, OU VOS PÈRES ME TENTÈRENT, OU ILS VOULURENT ÉPROUVER MA PUISSANCE, ET OU ILS VIRENT LES CHOSES QUE JE FIS PENDANT QUARANTE ANNÉES. AUSSI ME SUIS-JE IRRITÉ CONTRE CETTE GÉNÉRATION, ET J'AI DIT : ILS SE LAISSENT TOUJOURS EMPORTER PAR L'ÉGAREMENT DE LEURS COEURS, ILS NE CONNAISSENT POINT MES VOIES ; C'EST POURQUOI J'AI JURÉ, DANS MA COLÈRE, QU'ILS N'ENTRERAIENT POINT DANS LE LIEU DE MON REPOS. (
He 3,7-19 He 4,1-10)

Analyse.
1. Repos du sabbat, représentation temporelle du repos éternel.
2. L'incrédulité attire la colère de Dieu.
3. Conservons l'espoir tant que nous vivons.
4. Bonheur réservé aux élus dans le royaume des cieux.

601 1. Après avoir parlé de l'espérance, après avoir dit : « Nous serons de sa maison, si nous conservons une ferme confiance en lui et la glorification de l'espérance », Paul nous montre qu'il faut savoir attendre avec confiance, et il le prouve par les Écritures. Mais faites attention; car ce passage est tant soit peu difficile et obscur; c'est pourquoi nous devons vous exprimer notre opinion et vous exposer en peu de mots le sujet dans son ensemble, avant d'arriver au texte. Vous n'aurez plus besoin de nous une fois que vous connaîtrez le but et le plan de l'apôtre. C'était de l'espérance qu'il parlait; il nous disait qu'il faut espérer dans l'avenir, et que ceux qui auront souffert ici-bas trouveront ailleurs leur récompense, le fruit de leurs fatigues et le repos. Il le prouve en se servant des paroles du prophète, et en nous disant: « C'est pour cela que le Saint-Esprit dit : Si vous entendez aujourd'hui sa voix, n'endurcissez pas votre coeur, comme au temps de ma colère et au jour de la tentation dans le désert, où vos pères me tentèrent, où ils voulurent éprouver ma puissance, et où ils virent les choses que je fis pendant quarante jours. Aussi me suis-je irrité contre cette génération, et j'ai dit : Ils se laissent toujours emporter par l'égarement de leurs coeurs, ils ne connaissent point mes voies ; c'est pourquoi je leur ai juré, dans ma colère, qu'ils n'entreraient point dans le lieu de mon repos ». (Ps 94) Il y a, dit-il, trois sortes de repos. Il y a le repos de Dieu après la création, le repos de la Palestine où les Juifs devaient entrer, pour se reposer de tant de jours d'afflictions et de leurs travaux, enfin (et c'est bien là le repos), il y a le royaume des cieux où les élus se reposent éternellement de leurs travaux et de leurs afflictions. C'est de ces trois sortes de repos qu'il fait ici mention. Et pourquoi cette mention, s'il ne parle que d'un seul? C'est pour montrer que le prophète parle de cette troisième espèce de repos. Le premier, dit-il, il ne s'en occupe pas. Pourquoi remonter jusqu'aux premiers temps? Le repos de la Palestine, il n'en,parle pas non plus, puisqu'il est arrivé à sa fin. Reste le troisième repos, et ici nous devons ouvrir l'histoire, pour que nos paroles soient plus claires.

Après la sortie d'Égypte, et les fatigues d'une longue route, après avoir en Egypte, sur la mer Rouge et dans le désert, reçu d'innombrables témoignages de la puissance divine, les Juifs se décidèrent à envoyer des éclaireurs, chargés d'explorer la nature du sol. Les éclaireurs revinrent et, pleins d'admiration pour la contrée qu'ils avaient parcourue, ils se répandaient en éloges sur la fertilité du sol, tout en disant qu'il était habité par une nation courageuse et indomptable. Alors les Juifs, peuple ingrat et insensible, au lieu de se souvenir des anciens bienfaits de Dieu qui,lorsqu'ils étaient cernés partant d'armées égyptiennes leur barrant le passage, les avait arrachés aux périls ; au lieu de penser au rocher du désert, ouvert par la baguette de Moïse, à l'eau jaillissante, à la manne, et à tant d'autres miracles bien faits pour affermir leur foi, perdirent complètement la mémoire. Frappés d'étonnement et de stupeur, ils voulaient revenir en Egypte en disant : Dieu nous a amenés ici, pour nous faire périr avec nos femmes et nos enfants. Dieu donc, dans sa colère contre ces ingrats qui avaient sitôt oublié ses bienfaits, jura que la génération qui avait proféré de telles paroles n'entrerait pas dans le lieu du repos, et tous périrent dans le désert. Plus tard, quand cette génération n'était plus, David disait : « Aujourd'hui, si vous écoutez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs, comme autrefois dans des jours de colère ». Pourquoi ? — C'est pour que vous ne soyez pas punis comme vos pères, c'est pour que vous ne soyez pas privés du repos. — Il parle ainsi, sans doute en faisant allusion à l'asile du repos véritable. Car, s'ils avaient déjà trouvé le repos, pourquoi leur dirait-il encore : « Aujourd'hui, si vous écoutez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs, comme autrefois, en des jours de colère?»

Quel est donc ce lieu de repos, si ce n'est le royaume des cieux dont l'image et la représentation est le jour du sabbat? Il cite donc, je le répète, le témoignage du prophète en ces termes: « Aujourd'hui, si vous écoutez sa voix, ne vous, endurcissez pas comme en des jours de colère, comme à l'époque de la tentation dans le désert, lorsque vos aïeux me tentèrent, firent l'épreuve de mes puissances et virent, durant quarante ans, ce que je pouvais faire; c'est pour cela que je me suis irrité contre cette génération, et j'ai dit : Leurs coeurs sont toujours égarés :ils n'ont pas connu mes voies ; et je leur ai juré, dans ma colère, qu'ils n'entreraient pas dans mon lieu de repos ». Puis il ajoute : « Prenez garde, mes frères, que quelqu'un de vous ne tombe dans un dérèglement de coeur et dans une incrédulité qui le sépare du Dieu vivant (12) ». Car c'est la dureté du coeur qui produit l'incrédulité. Semblables à ces membres raides et couverts d'un talus, qui résistent à la main du médecin, les âmes endurcies résistent à la parole de Dieu. Car il y a (479) probablement des hommes qui ne croient plus et pour qui les miracles opérés sont comme s'ils n'avaient pas eu lieu ; c'est pour cela qu'il dit «Prenez garde que quelqu'un d'entrevous ne tombe dans un dérèglement de coeur, et dans « une incrédulité qui le sépare du Dieu vivant ». Quand on parle de l'avenir, on rencontre plus d'incrédules que lorsqu'on. parle du passé. Voilà pourquoi il leur rappelle l'histoire et les circonstances dans lesquelles ils ont manqué de foi. Si vos pères, dit-il, ont souffert pour n'avoir pas espéré comme ils le devaient, à plus forte raison, vous, vous souffrirez; car il s'adresse à eux, aux hommes du temps présent. C'est toujours ce que veut dire ce mot « aujourd'hui ». — « Mais exhortez-vous chaque jour les uns les autres, pendant ce temps que l'Ecriture appelle aujourd'hui (13)»; c'est-à-dire; édifiez-vous les uns les autres, encouragez-vous pour qu'il ne vous arrive pas la même chose qu'à vos pères, « de peur que quelqu'un de vous, étant séduit par lé péché, ne tombe dans l'endurcissement ».

602 2. Voyez-vous comme le péché engendre l'incrédulité? Si l'incrédulité produit la vie criminelle, l’âme, arrivée au fond de l'abîme, méprise, et dans son dédain elle ne veut plus rien croire, pour se délivrer de toute crainte. Nous lisons dans le Psalmiste : « Ils ont dit : Le Seigneur ne nous verra pas, et le Dieu de Jacob n'en saura rien ». (Ps 93,7) Et ailleurs : « Nos lèvres sont à nous, qui donc est notre Seigneur? » (Ps 11,5) Et encore : «Pourquoi l'impie a-t-il irrité Dieu? » (Ps 10,13) Et ailleurs : « L'insensé a dit en son coeur : Il n'y a pas de Dieu. Ils se sont corrompus et ils ont contracté des penchants abominables ». (Ps 13,1) Et ailleurs : « La crainte de Dieu n'est plus devant leurs yeux ». Et ailleurs : «Il a usé de ruse devant lui; Dieu a découvert et détesté l’iniquité de l'impie ». (Ps 35) Le Christ aussi parle en ces termes : « Tout homme qui agit mal craint la lumière et la fuit ». (Jn 3,20) Puis il ajoute : « Nous sommes entrés dans la participation du Christ » : que veut dire ce mot? Nous ne faisons qu'un, lui et nous. Il est la tête, nous sommes le corps, nous sommes ses cohéritiers et nous ne faisons avec lui qu'un même corps. Nous ne sommes qu'un seul corps, dit-il, formé de sa chair. et de ses os; « à condition toutefois de conserver jusqu'à la fin ce commencement de substance nouvelle qu'il a mis en nous ». — « Qu'est-ce que ce commencement de substance nouvelle? » C'est la foi par laquelle nous subsistons, par laquelle nous avons été régénérés, par laquelle nous sommes consubstantiels au Christ. Puis il ajoute : « Pendant que l'on «nous dit : aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs comme il arriva au temps du murmure qui excita ma colère. »(15) . — Il y a ici une transposition, voici quelle est la suite des idées : « Craignons donc que, négligeant la promesse qui nous est faite d'entrer dans le repos de Dieu, il n'y ait quelqu'un d'entre vous qui en soit exclu? » (4, 1.) — « Car on nous l'a annoncé aussi bien qu'à eux (2)». — « Pendant que l'on nous dit : Aujourd'hui si vous entendez sa voix». — «Aujourd'hui » signifie « en tout temps » : ensuite il dit : « Mais la parole qu'ils entendirent ne leur servit de rien, n'étant pas accompagnée de la foi dans ceux qui l'entendirent(2)».Il montre pourquoi cette parole est restée inutile; c'est qu'elle n'était point accompagnée de la foi. Il prouve cette vérité par les exemples qu'il expose : « Quelques-uns », dit-il, « ayant entendu sa voix, irritèrent Dieu par leurs murmures; mais cela n'arriva pas à tous ceux que Dieu avait fait sortir de l'Egypte (16) ». — « Or qui sont ceux que Dieu supporta avec peine pendant quarante ans, sinon ceux qui avaient péché, dont les corps demeurèrent étendus dans le désert (17) ? » — « Et qui sont ceux à qui Dieu jurait qu'ils n'entreraient jamais dans son repos, sinon ceux qui ne crurent pas en lui (18) ? ». — « En effet, nous voyons qu'ils ne purent y entrer, à cause de leur incrédulité (19) ».

Après avoir cité le témoignage de l'histoire, il emploie la forme interrogative, pour donner plus d'éclat à sa parole. « Il a dit, en effet, » s'écrie-il, « aujourd'hui si vous écoutez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs, comme au jour de sa colère ». Quels sont ces coeurs endurcis dont il se souvient? Quels sont ceux qui n'ont pas cru en lui? Ne sont-ce pas les Juifs? Voici le sens de ces paroles : Ils ont entendu comme nous; mais cela ne leur a servi de rien. N'allez donc pas croire qu'il vous suffira d'entendre la parole de Dieu pour en profiter! Eux aussi, ils l'ont entendue, mais sans profit, parce qu'ils n'ont pas cru. Chaleb et Jésus n'ayant pas fait cause commune avec les incrédules, ont évité le châtiment qui leur a été infligé. Et voyez ce qu'il y a ici d'admirable. Il n'a pas dit : Ils n'ont pas fait cause commune ; il a dit « Ils ne se sont pas mêlés à eux ». Ils se sont séparés de ces séditieux unis dans une même pensée. Ici, selon moi, il nous fait entendre que cette pensée était une pensée de révolte.

« Nous entrerons dans son repos », dit-il, « nous qui avons cru » He 4,3; et pour confirmer cette proposition, il ajoute : « Dans ce repos dont il parle en disant : J'ai juré dans ma colère qu'ils n'entreraient pas dans mon repos », et Dieu parle du repos qui suivit l'accomplissement de ses ouvrages, dans la création du monde (He 4,3). On pouvait peut-être lui dire: Cela ne signifie pas que nous n'entrerons pas dans le repos; cela signifie que ces hommes d'autrefois n'y sont pas entrés. Que fait-il, pour prévenir cette objection? Il s'étudie à prouver que ce repos des premiers temps n'empêche pas de parler d'un autre; que ce repos n'empêche pas de parler du repos qui nous attend au royaume des cieux. Il veut donc montrer qu'ils n'ont point obtenu ce lieu du repos. Pour que vous sachiez que c'est bien là ce qu'il veut dire, il ajoute : « Car l'Ecriture dit en quelque lieu, parlant du septième jour : Dieu se reposa le septième jour, après avoir achevé toutes ses oeuvres (He 4,4) ». Et il est dit encore ici :« Ils n'entreront point dans mon repos (He 4,5) ». Vous voyez qu'un repos n'exclut pas l'autre. « Puisqu'il faut donc », dit-il, « que quelques-uns y entrent, et que ceux à qui la parole en fut premièrement portée, n'y sont (480) point entrés à cause de leur incrédulité (He 4,6), Dieu a déterminé encore un jour particulier qu'il appelle aujourd'hui, en disant tant de temps après par David, ainsi que je viens de dire (He 4,7) ». Que veut-il dire ici? Puisque, dit-il, quelques élus doivent entrer dans le repos de Dieu et que les anciens Hébreux n'y sont pas entrés, voici une troisième espèce de repos qu'il établit. Mais comment prouve-t-il que certains élus doivent entrer dans ce repos de Dieu ? Ecoutons-le : « C'est que », dit-il, « après tant d'années », voilà David qui répète : « Aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs, comme aux jours de sa colère. Car, si Jésus les avait établis dans ce repos, l'Ecriture n'aurait jamais parlé, après cela, d'un autre jour (He 4,8) ». Ce langage est clair et nous fait entrevoir quelqu'autre récompense. « Il y a donc encore un sabbat réservé au peuple de Dieu (He 4,9) »; d'où résulte cette conclusion, ce précepte : « N'endurcissez pas vos coeurs ». Car si un sabbat n'existait pas, et s'ils n'étaient pas exposés à subir les mêmes châtiments, à quoi bon ce précepte, à quoi bon cette recommandation de ne pas retomber dans les mêmes fautes, pour ne pas retomber dans le même abîme de souffrances? Et comment ceux qui étaient en Palestine pouvaient-ils subir les mêmes supplices, s'il n'y avait pas encore un repos?

603 3. C'est bien conclure que d'employer le mot de « sabbat » He 4,9, et non celui de « repos», que d'employer ici le nom du jour où le peuple de Dieu courait se réjouir. Le sabbat, selon l'apôtre, c'est le royaume des cieux. Au jour du sabbat, les Hébreux doivent se garder de tout péché, ils ne doivent songer qu'à adorer Dieu, comme faisaient les prêtres; ils ne doivent songer qu'aux oeuvres spirituelles. Voilà quelle doit être leur occupation au jour du sabbat : voilà quelle sera l'occupation des élus dans le royaume des cieux. Paul n'a pas précisément tenu ce langage, mais voici ce qu'il a dit : « Celui qui est entré dans le repos de Dieu se repose aussi lui-même, en cessant de travailler, comme Dieu s'est reposé après ses ouvrages (He 4,10)». Dieu, dit-il, s'est reposé après ses ouvrages, et l'homme qui est entré dans le repos de Dieu, se repose comme lui ; il leur parlait du repos, et ils voulaient savoir quand ce repos aurait lieu. Il répond donc à leurs désirs, en finissant.

Quant à ce mot « aujourd'hui » He 4,7), il le leur dit pour les sauver du désespoir. Exhortez-vous les uns les autres, dit-il, exhortez-vous chaque jour, tant que vous pouvez dire : « Aujourd'hui ». Cela veut dire que le pécheur même, tant qu'il peut dire « aujourd'hui », doit espérer. Loin de nous le désespoir, tant que nous vivons! Veillons seulement, dit-il, à ce que notre coeur ne soit jamais en proie à l'incrédulité He 4,11. Et encore, si cela arrive, ne nous désespérons pas; mais ranimons-nous. Tant que nous sommes de ce monde; tant que nous pouvons dire «aujourd'hui », nous avons du temps devant nous. Dans ce passage, il parle non-seulement de l'incrédulité, mais des murmures. « Des murmures de ces hommes dont les cadavres sont étendus dans le désert». (He 3,17) Puis, pour que ses auditeurs n'aillent pas s'imaginer que le châtiment du coupable se bornera à la privation du repos, il met devant leurs yeux le supplice gui lui est réservé et il ajoute : « La parole de Dieu est vivante et efficace, et elle perce plus qu'une épée à deux tranchants; elle pénètre jusque dans les replis de l'âme et de l'esprit, jusque, dans les jointures et la moelle des os; et elle démêle les pensées et les mouvements du coeur (He 4,12) »; c'est du supplice de la géhenne qu'il parle ici. C'est un supplice, dit-il, qui pénètre jusque dans les replis de notre coeur et qui dessèche notre âme. Il ne s'agit point ici de cadavres étendus dans le désert, sans sépulture; ils ne sont pas privés de la terre ; ils sont privés du royaume des cieux; ils sont livrés pour toujours à la géhenne ; ils sont livrés à une peine, à un supplice qui n'aura pas de fin.

Mais exhortez-vous les uns les autres ». (He 3,13) Remarquez la douceur de ce langage. Il ne dit pas : Adressez-vous des réprimandes, mais exhortez-vous les uns les autres. C'est ainsi que nous devons nous comporter envers ceux que le chagrin accable : c'est ce qu'il dit dans sa lettre aux habitants de Thessalonique: « Donnez des avis à ceux dont l'âme est inquiète ». Quant aux esprits pusillanimes, voici ce qu'il dit : « Consolez ceux qui ont l'esprit abattu; supportez les faibles; soyez patients envers tous ». (1Th 5,14) Que veut dire ce mot « consolez? » Il veut dire: Ne les faites pas tomber dans le désespoir; ne leur faites pas perdre courage; car ne pas consoler l'homme que l'affliction accable, c'est le jeter dans l'endurcissement. Il ne faut pas, dit-il, que vous vous endurcissiez, dans les piéges du péché. Les piéges du péché sont peut-être les piéges du démon, car c'est tomber dans le piège et l'erreur que de ne rien attendre de l'avenir, que de croire que nous n'avons pas de comptes à rendre; que nous n'expierons pas nos fautes, que nous ne ressusciterons pas un jour. Une erreur encore, c'est l'indifférence ou le désespoir. Une erreur c'est de tenir ce langage: J'ai péché et il n'y a plus d'espoir pour moi. Puis il les fait espérer en leur disant : « Nous sommes entrés dans la participation de Jésus-Christ ». (He 3,14) C'est comme s'il leur disait : Celui qui nous a assez aimés, celui qui nous a assez estimés pour se revêtir de notre chair, ne nous laissera pas, périr. Réfléchissons, dit-il, à l'honneur qu'il a daigné nous faire. Le Christ et nous, nous ne faisons qu'un ; gardons-nous donc de ne pas croire en lui.

Et il revient encore sur ce qu'il a dit ailleurs:, « Si nous souffrons avec lui, nous régnerons avec lui » (2Tm 2,12), c'est-à-dire : Nous sommes entrés en « participation avec lui », en participation des biens du Christ. Après avoir exhorté ses auditeurs par ces paroles qui leur montrent la récompense et le prix, après nous avoir dit: « Nous sommes entrés en participation avec le Christ», il les exhorte, en les affligeant et en les inquiétant : « Craignons », dit-il, « que négligeant la promesse qui nous est faite d'entrer dans le repos de Dieu, il n'y ait quelqu'un d'entre nous (481) qui en soit exclu ». Voici en effet qui est clair et certain. « Ils voulurent éprouver ma puissance et me virent à l’oeuvre durant quarante jours ». Voyez-vous ? Il ne faut pas demander de comptes à Dieu, qu'il nous défende, ou non telle ou telle chose, il faut le croire, car Paul accusé ici ceux;qui ont tenté Dieu. Exiger de lui dés preuves de son pouvoir, de sa Providence, de sa sollicitude, . c'est n'être pas, encore bien sûr de sa puissance, de sa bonté et de sa clémence: C'est ce qu'il fait entendre aux Hébreux dans cette épître. Peut-être, voulaient-ils dans leur tentation, peser et mettre à l'épreuve son pouvoir, sa sollicitude et sa Providence. Voyez-vous aussi comme l'incrédulité irrite Dieu et attire sa colère? Que dit-il maintenant ? « Il y a donc encore un sabbat réservé au peuple de Dieu ». Voyez comme il raisonne et comme il conclut. Il a juré, dit-il, que vos pères n'entreraient pas dans son repos, et ils n'y sont pas entrés. Puis, longtemps après, il s'adresse aux Juifs et leur dit : « N'endurcissez pas vos coeurs comme vos pères ». C'est une preuve évidente qu'il s'agit ici d'une nouvelle espèce de repos. Car le repos de la Palestine, nous ne pouvons plus en parler; les Hébreux y étaient arrivés. Quant au repos du septième jour, il ne peut ici en être question; c'était une histoire des anciens jours. Il est donc ici question d'un autre repos qui est le repos véritable. 4. Oui : c'est bien là le lieu de repos d'où la tristesse, la douleur et les gémissements sont bannis, où l'on ne connaît plus les soucis, les fatigues, les angoisses, les craintes qui frappent et ébranlent l'âme. En fait de crainte, il n'y a là que la crainte de Dieu, crainte pleine dé charmés. On n'entendra point en ce lieu retentir ces paroles : « Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front ». il n'y a là ni épines, ni ronces. Là, on n'entend pas répéter : « Tu enfanteras dans la douleur. Tu te tourneras vers ton époux et il sera ton maître ». (Gn 3,18-19 Gn 3,16) Là tout respire la paix, la joie, la gaieté, le plaisir, la bonté, la douceur, l'équité, la charité. Il n'y a là ni rivalité, ni jalousie, ni maladie, ni mort corporelle, ni mort spirituelle, ni ténèbres, ni nuit partout le jour, partout la lumière, partout le repos. Là point de fatigues, point de dégoût, là toujours un bonheur nouveau en perspective. Voulez-vous que je vous trace ici l'image du sort réservé aux élus, en ce lieu? C'est impossible; mais je m'efforcerai de vous en offrir une ombre. Levons les yeux au ciel, quand il n'y a pas de nuages à l'horizon, quand le ciel nous montre sa coupole azurée; puis, après avoir longtemps contemplé dans l’immobilité de l'extase ce ravissant spectacle, considérons le sol que nous aurons sous nos pieds, sol aussi supérieur à notre sol, que l'or est supérieur à la boue; puis élevons encore nos yeux vers le pavillon qui s'étend au-dessus de nos têtes. Contemplons là-haut les anges, les archanges, la foule innombrable des puissances immatérielles, le palais même de Dieu, le trône du Père. Mais ici, je le répète, la parole est impuissante à tout décrire, à tout peindre. Il faudrait ici l'expérience et la connaissance qui en est le fruit. Vous figurez-vous, dites-moi, l'existence d'Adam, au milieu du Paradis? Entre cette existence et la nôtre, il y a la distance du ciel à la terre. Mais cherchons une autre comparaison. Que l'empereur aujourd'hui régnant ait le bonheur de soumettre à son sceptre l'univers entier, qu'il soit affranchi des maux de la guerre et des soucis, qu'il soit entouré d'honneurs, qu'il passe sa vie dans les délices, qu'il ait une foule de satellites, que l’or afflue vers lui de tous côtés, qu'il commande l'admiration, quel sera, selon vous, la joie de ce souverain qui verra la guerre disparaître de la surfacé du globe? voilà ce qui aura lieu alors. Mais nous ne sommes pas encore parvenus à donner une. idée exacte du bonheur céleste ; il faut chercher une autre image.

Figurez-vous donc un fils d'empereur qui, après avoir été enfermé dans le sein de sa mère, après être resté dans un état complet d'insensibilité, parait. tout à coup à la lumière, monte sur le trône impérial et se trouve en état de goûter non successivement, mais tout à coup et à la fois toutes les joies du rang suprême : tel sera l'élu de Dieu. Il sera encore comme un captif qui, après avoir été chargé de fer, après avoir été en proie à d'innombrables souffrances, se verrait tout à coup transporté dans un palais. Mais non : cette image n'est pas encore fidèle. Ce bonheur, quoique ce soit un bonheur de roi, celui qui le possède le goûtera avec délices deux ou trois jours; avec le temps, il y trouvera encore du plaisir; mais ce plaisir sera moins vif, car ici-bas le sentiment de la félicité, quelle qu'elle soit, s'émousse par l'habitude, là-haut ce sentiment, loin de diminuer, ne fait,que croître. Réfléchissez en effet au bonheur de l’âme parvenue à ce séjour où elle a devant elle une félicité sans fin, une félicité immuable et toujours croissante, une immortalité qui ne connaît ni les chagrins, ni les périls, une immortalité pleine de joies spirituelles et de délices innombrables.

Quand nous voyons dans la plaine les tentes des soldats formées de riches tapisseries, quand nous voyons briller les lances, les casques et les boucliers, nous voilà; tout ébahis et immobiles d'étonnement ; quand nous voyons le roi traverser le camp avec son armure d'or, et pousser son cheval avec ardeur, rien ne manque à notre admiration. Qu'éprouverons-nous donc, je vous le demande, quand-nous verrons les tabernacles des saints dressés pour toujours dans le ciel ? « Ils vous recevront », dit l'Evangile, « dans leurs tabernacles éternels ». Que direz-vous, quand vous verrez tous ces saints plus resplendissants que les rayons du soleil, et environnés non pas de l'éclat. du bronze ou du fer, mais de cette gloire dont 1'oeil de l'homme ne peut supporter les lueurs? Je parle ici des saints, c'est-à-dire des hommes. Mais que direz-vous à l'aspect de ces milliers d'anges, d'archanges, de chérubins, de séraphins, de trônes, de dominations de principautés, de puissances dont la beauté surpasse l'imagination? Mais quand cesserai-je d'énumérer des merveilles que l'on ne peut comprendre?, « Jamais l'oeil n'a vu, jamais l'oreille n'a entendu, jamais l'esprit n'a pénétré ce que Dieu prépare à ceux qui l'aiment ». (1Co 11,9) (482) Qu'ils sont donc malheureux ceux qui n'obtiennent pas ce bonheur! Qu'ils sont heureux ceux qui l'obtiennent ! Soyons donc du nombre des heureux, pour acquérir la félicité éternelle en Jésus-Christ Notre-Seigneur, auquel conjointement avec lé Pète et le Saint-Esprit, gloire, honneur et puissance, maintenant et toujours et dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.




Chrysostome sur Héb. I 500