I pars (Drioux 1852) Qu.98 a.2


QUESTION XC1X. : DE LÀ CONDITION DES ENFANTS PAR RAPPORT AU CORPS.


Après avoir parlé de la conservation de l'espèce par la génération, nous avons maintenant à nous occuper de la condition des enfants qui auraient été alors engendrés. Nous en parlerons : 1" par rapport au corps ; 2" par rapport à la justice ; 3° par rapport à la science. — Par rapport au corps deux questions sont à faire: 1" Dans l'état d'innocence les enfants auraient-ils eu immédiatement après leur naissance tout leur développement corporel? — 2° Auraient-ils été de différents sexes?

ARTICLE I. — DANS L'ÉTAT D'INNOCENCE LES ENFANTS AURAIENT-ILS EU IMMÉDIATEMENT APRÈS LEUR NAISSANCE TOUT LEUR DÉVELOPPEMENT CORPOREL, COMME UN HOMME FAIT (1) ?


(1) Saint Augustin a lai-sé cette question douteuse. La plupart des théologiens scolastiques l'ont traitée et l'ont résolue dans le sens de saint Thomas.

Objections: 1.. Il semble que dans l'état d'innocence les enfants auraient pu jouir, immédiatement après leur naissance, du libre mouvement de leurs membres. Car saint Augustin dit (Lib. de bapt. parv.lib. i, cap. 38) que la faiblesse corporelle qui se manifeste dans l'enfant est en harmonie avec la faiblesse de son esprit. Or, dans l'état d'innocence il n'y aurait pas eu d'infirmité intellectuelle. Donc il n'y aurait pas eu non plus dans les enfants une faiblesse de corps analogue à celle qui existe maintenant.

2.. Il y a des animaux qui peuvent se servir de leurs membres aussitôt après qu'ils sont nés. Or, l'homme est plus noble que les autres animaux. Donc il était plus naturel pour lui que pour tout autre de se servir librement, immédiatement après sa naissance, de tous ses membres, et s'il ne lui est pas possible de le faire maintenant on ne peut voir en cela que le châtiment de son péché.

3.. L'impossibilité d'atteindre une chose qui ferait plaisir estime cause de chagrin. Or, si les enfants n'avaient pas eu la faculté de mouvoir librement leurs membres, ils auraient été souvent dans l'impossibilité d'atteindre ce qui aurait pu leur être agréable. Ils auraient donc eu du chagrin, ce qui ne pouvait avoir lieu avant le péché. Donc dans l'état d'innocence les enfants n'auraient pas été privés de la faculté de se mouvoir.

4.. Les défauts de la vieillesse semblent correspondre à ceux de l'enfance. Or, dans l'état d'innocence on n'aurait pas éprouvé les défauts de la vieillesse; on n'aurait donc pas non plus connu ceux de l'enfance.


Mais c'est le contraire. En effet, tout être engendré est imparfait avant d'être parfait. Or, dans l'état d'innocence les enfants auraient été produits par voie de génération. Donc ils auraient été d'abord imparfaits sous le rapport de la grandeur et de la force de corps.

CONCLUSION. — Dans l'état d'innocence les enfants n'auraient pas eu immédiatement après leur naissance ta facul.lé de mouvoir leurs membres pour produire toutes les oeuvres dont un homme mûr est capable; ils auraient eu seulement la force de produire les actes qui sont en rapport avecles besoins de leur âge ; c'est du moins ce que la nature nous apprend, et l'Ecriture ne contredit en rien son témoignage.

Il faut répondre que nous tenons de la foi seule la connaissance des choses surnaturelles, et ce qui est de foi nous est manifesté par l'autorité. Par conséquent, nous devons nous en rapporter aux lois de la nature pour toutes les choses qui sont en dehors de la science surnaturelle que l'autorité divine nous a transmises. Or, il est évidemment conforme aux lois de la nature humaine que les enfants n'aient pas Immédiatement après leur naissance la faculté de mouvoir leurs membres. Car l'homme a naturellement le cerveau plus développé relativement au reste du corps que les autres animaux. D'où il résuite qu'en raison de l'extrême humidité du cerveau des enfants, leurs nerfs qui sont les instruments du mouvement ne sont pas propres à mouvoir leurs membres. D'un autre côté aucun catholique ne doute que Dieu n'ait pu donner aux enfants, immédiatement après leur naissance, la faculté de mouvoir librement leurs membres il). L Ecriture nous apprend d'ailleurs que Dieu a fait l'homme droit, et d'après saint Augustin cette rectitude consistait dans la soumission parfaite du corps à l'égard de l'âme. Ainsi donc comme dans l'état primitif de l'homme il ne pouvait rien y avoir dans ses membres qui fût en opposition avec la raison, de même ses membres ne devaient pas faire défaut à la volonté qui les dominait. Mais la volonté droite de l'homme ne pouvant se rapporter qu'à des actes convenables, et la convenance des actes variant selon l'âge des individus, on doit donc conclure que les enfants, immédiatement après leur naissance, n'auraient pas eu les forces nécessaires pour produire les mêmes actes qu'un homme fait, mais ils auraient pu faire toutes les actions propres à leur âge. Ainsi ils auraient pu d'eux-mêmes prendre le sein de leur mère, en exprimer le lait, etc.

(1) Comme l'observe saint Augustin, Dieu pouvait donner immédiatement à l'homme sa taille ordinaire (loc. cit.), mais il ne s'agit pas ici de ce qui est possible à la puissance divine, il s'agit seulement de ce qui devait être selon l'ordre de la nature.


Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, que saint Augustin parle en cet endroit de l'infirmité corporelle qui existe maintenant dans les enfants, même relativement aux actes qui sont de leur âge. Car l'illustre docteur dit dans la phrase précédente qu'en présence du sein de leur mère ils pleurent de besoin plutôt que de se satisfaire.

2. Il faut répondre au second, que s'il y a des animaux qui peuvent immédiatement après leur naissance faire usage de leurs membres, cela ne tient pas à la perfection de leur nature, puisqu'il y a des animaux plus parfaits qui n'ont pas cet avantage, mais cela tient à la sécheresse du cerveau. D'ailleurs cela peut tenir aussi à l'imperfection des actes qui leur sont propres et qui ne demandent pour être produits qu'une puissance très-res-treinte.

3. La réponse au troisième est évidente d'après ce que nous avons dit [in corp. art.), ou bien on peut dire que leur volonté droite n'aurait désiré que ce qui aurait été conforme à leur état.

4. Il faut répondre au quatrième, que dans l'état d'innocence l'homme aurait été engendré, mais il ne serait pas tombé en dissolution. C'est pourquoi il aurait pu avoir les défauts de l'enfance qui sont une conséquence de la génération, mais il n'aurait pas connu ceux de la vieillesse qui sont les avant-coureurs de la corruption.


ARTICLE II. — les enfants auraient-ils été de différents sexes (2)?


(2) Cette question paraît étrange; mais l'hérésie n'ayant pas craint de la poser et de la résoudre dans un sens Funeste, saint Thomas entre à ce sujet dans tous les détails les plus minutieux, parce qu'il tient à ne pas laisser une seule erreur sans réponse,

Objections: 1.. Il semble qu'il n'y aurait pas eu dans l'état primitif d'enfants du sexe féminin. Car Aristote dit (De Gen. anim. lib. u, cap. 3) que la femelle n'est qu'un être imparfait qui est produit contrairement à l'intention de la nature. Or, dans cet état la génération de l'homme n'aurait rien pu produire qui ne fût naturel. Donc aucun enfant n'aurait été du sexe féminin.

2.. Tout être générateur engendre son semblable à moins qu'il n'en soit empêché par l'imperfection de sa puissance ou par un défaut de disposition dans la matière, comme un petit feu ne peut brûler du bois vert. Or, dans la génération la force active est dans le mâle. Par conséquent, comme dans l'état d'innocence il n'y aurait eu de défauts ni sous le rapport de la puissance active ni sous le rapport de la puissance passive qui réside dans la femme, tous les enfants auraient été du sexe masculin.

3.. Dans l'état d'innocence la génération avait pour objet de multiplier les hommes. Or, puisque le premier homme et la première femme devaient vivre éternellement, ils auraient pu suffire à la multiplication de l'espèce, et il n'était pas nécessaire qu'ils missent au monde des filles.


Mais c'est le contraire. Car la nature aurait procédé dans la génération conformément à ce que Dieu l'avait faite en la créant. Or, la Genèse nous apprend [Gen. n, 2) qu'il avait fait un homme et une femme et qu'il avait ainsi formé la nature humaine. 11 y aurait donc eu dans l'état d'innocence comme maintenant des enfants de différents sexes.

CONCLUSION. — La diversité des sexes étant une condition delà perfection de la nature humaine, la génération dans l'état d'innocence aurait produit des enfants de l'un et de l'autre sexe.

Il faut répondre que dans l'état d'innocence il ne devait rien manquer de ce qui appartient à ressence et à la perfection de la créature humaine. Car comme il faut pour la perfection de l'univers des êtres de divers degrés, de même la perfection de la nature humaine requiert la différence des sexes. C'est pourquoi dans l'état d'innocence la génération aurait produit des enfants de l'un et de Vautre sexe.

Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, qu'on dit que la femelle est imparfaite parce qu'elle est produite contrairement à l'intention de la nature en particulier, mais non contrairement à l'intention de la nature en général, comme nous l'avons dit (quest. xix. art. \).

2. Il faut répondre au second, que la production de la femelle ne provient pas seulement des causes que l'objection énumère. Aristote en reconnaît lui-même d'autres [De Gen. anim. lib. iv, cap. 2), et il désigne en particulier plusieurs accidents extrinsèques (1). On pourrait dire aussi qu'elle est quelquefois l'effet de l'âme qui, en raison de ses idées, peut exercer une certaine influence sur le corps. Cette dernière raison eût été surtout applicable à l'état d'innocence quand Je corps était alors absolument soumis à l'âme. Or, la différence des sexes aurait été la conséquence de la volonté du père.

(1) Tl parle en particulier de l'influence des divers venis, du vent du nord et du vent du midi. I\lais ' i cause véritable de ce phénomène est elicere inconnue à la science actuelle, quoiqu'il semble que l'Age relatif des parents exerce quelque influence à cet égard Mulier, Manuel de Physiologie, t. il, p. 759).

3. Il faut répondre au troisième, que les enfants auraient vécu de la vie animale qui comprend la faculté d'engendrer aussi bien que la faculté de se nourrir d'aliments. Par conséquent il était convenable qu'il n'y eût pas cpie le premier homme et la première femme qui eussent engendré. Cette vertu devait être commune à tous leurs descendants, et c'est ce qui porte à croire qu'il y aurait eu autant d'hommes que de femmes (2).

(2) Cette égalité de répartition existe d'ailleurs à peu près maintenant : c'est une chose dont on obtient la preuve en opérant, non sur quelques familles, mais sur de grands nombres (Millier, ibid.).


QUESTION C. : DE LA CONDITION DES ENFANTS PAR RAPPORT A LA JUSTICE.


Nous avons maintenant à examiner quelle eût été la condition des enfants par rapport à la justice.— A cet égard deux questions se présentent : 1" Les hommes seraient-ils nés dans la justice ? — 2" Auraient-ils été confirmés dès leur naissance dans cet état au point d'y être inébranlables?

ARTICLE I. —les hommes seraient-ils nés avec la justice (1) ?


(1) Saint Thomas établit que les enfants seraient nés dans le même état do grâce et de jus-lice que le premier homme a été créé. Saint Paul paraît exprimer celte même pensée, quand il dit (Rom. xi) : Si radix sancta et rayni. Le concile de Trente suppose cette doctrine, quand il dit que par son péché Adam a perdu la sainteté et la justice pour ini et pour nous ; ce qui indique que nous aurions eu sans cela ses dons : Si quis Adae praevaricationem sibi soli elnon ejus propagini asserit nocuisse; acceptamá Deo sanctitatem et justitiam quam perdidit siLi soli, et non nobis cum perdidisse.... anathema iit.

Objections: 1.. Il semble que les hommes ne seraient pas nés avec lajusfice. Car Hugues de Saint-Victor (De Sac?-, lib. i, part, vi, cap. 21) dit que le premier homme avant son péché aurait engendré des enfants qui auraient été à la vérité sans péché, mais qui n'auraient pas été les héritiers de la justice de leur père.

2.. La justice est l'effet de la grâce, comme le dit saint Paul (Hom. v). Or, la grâce ne se transmet pas, parce que si elle se transmettait elle serait naturelle ; il n'y a que Dieu qui la donne. Donc les enfants ne seraient pas nés avec la justice.

3.. La justice est dans l'âme. Or, l'âme ne se produit pas par transmission. Donc les parents n'auraient pas pu non plus transmettre à leurs enfants la justice qui était en eux.


Mais c'est le contraire. Car saint Anselme ù)t(De concept, f irg. cap. 10) : Les enfants auraient été justes aussitôt qu'ils auraient eu une âme raisonnable, si leur père n'avait péché.

CONCLUSION. — Puisque le semblable engendre son semblable, et que dans l'état d'innocence il ne pouvait rien y avoir d'anormal, tous les hommes devaient nécessairement naitre avec la justice originelle dont la Providence eût gratifié toute l'espèce humaine.

Il faut répondre que l'homme engendre naturellement son semblable sous le rapport de l'espèce. Par conséquent il faut que pour tous les accidents qui sont une conséquence de l'espèce, les enfants ressemblent aux parents, à moins d'une déviation dans les fonctions de la nature, ce qui ne pouvait arriver dans l'état d'innocence. Mais pour les accidents propres aux individus il n'est pas nécessaire que les enfants ressemblent aux parents. Or, la justice originelle dans laquelle le premier homme fut créé était un accident qui se rattachait à la nature de l'espèce, non qu'il eût pour causes les principes constitutifs de l'espèce elle-même, mais uniquement parce que c'était un don que Dieu avait fait à la nature ou à l'humanité entière. En effet, les contraires sont toujours du même genre. Or, le péché originel, qui est le contraire de la justice originelle, est appelé le péché de la nature, et c'est pour cela qu'il se transmet du père à ses descendants, Les enfants auraient donc été également assimilés à leurs pères relativement à la justice originelle.


Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, que les paroles de Hugues de Saint-Victor ne doivent pas [s'entendre de la justice habituelle, mais de la justice actuelle (1).

(2) D'après Hugues de Saint-Victor, les enfants auraient possédé la justice d'une manière habituelle, comme ils possè.lent le libre arbitre dont ils ne peuvent faire usage et qu'ils ne peuvent rendre aetuel, pour parler la langue de l'école, que quand ils sont développés, et qu'ils arrivent à l'ûge de raison.

2. Il faut répondre au second, qu'il y en a qui disent que les enfants ne seraient pas nés avec la justice gratuite qui est le principe du mérite, mais avec la justice originelle. Mais la racine de la justice originelle dans laquelle l'homme a été créé consistant dans la soumission surnaturelle delà raison envers Dieu, soumission qui est l'effet de la grâce sanctifiante, comme nous l'avons dit (quest. xcv, art. I), il est nécessaire de reconnaître que si les enfants sont nés dans la justice ils sont nés aussi avec la grâce, c'est-à-dire dans l'état où nous avons dit (quest. xcv, art. 1) que le premier homme a été créé. La grâce n'aurait pas été pour cela une chose naturelle, parce qu'elle n'aurait pas été transmise à l'homme par voie de génération, mais elle lui auraitété conférée aussitôt qu'il .aurait reçu une âme raisonnable, de lamême manière que Dieu lui accorde aujourd'hui cette âme dès que le corps est convenablement formé pour la mouvoir, ce qui n'a pas lieu par transmission.

3. La solution du troisième argument est par là même évidente.


ARTICLE II. — les enfants nés dans l'état d'innocence auraient-ils été confirmés dans la justice immédiatement après leur naissance (1)?


(1) Cette question grave revient à celle-ci : les descendants d'Adam auraient-ils été soumise l'épreuve ?

Objections: 1.. Il semble que dans l'état d'innocence les enfants seraient nés affermis dans la justice. Car à l'occasion de ces paroles de Job (Job, m) : Je reposerais dans mon sommeil, saint Grégoire dit 'Moral, lib. iv, cap. 28) : Si la souillure du péché n'avait corrompu le premier homme, il n'aurait pas engendré des enfants de colère. Mais ceux qui doivent être maintenant sauvés par le Rédempteur seraient nés avec leur caractère d'élus. Donc tous les hommes seraient nés affermis dans la justice.

2.. Saint Anselme dit [Cur Deus homo, lib. ii, cap. 48) : Il semble que si nos premiers parents avaient vécu de manière à ne pas succomber à la tentation, ils auraient été affermis dans le bien avec toute leur race au point de ne pouvoir plus pécher désormais. Donc les enfants seraient nés affermis dans la justice.

3.. Le bien est plus puissant que le mal. Or, en raison du péché du premier homme tous ses descendants ont été dans la nécessité de pécher aussi. Donc si le premier homme eût été inébranlable dans le bien ses descendants auraient été dans la nécessité d'observer aussi la justice.

4.. L'ange, en s'attaehant à Dieu au mêment où les autres péchaient, a été immédiatement confirmé dans la justice au point de ne pouvoir plus pécher désormais. Donc 1 homme aurait été également affermi dans le bien s'il eût résisté à la tentation, et il eût engendré les autres dans l'état où il auraitété lui-même. Par conséquent ses enfants seraient nés affermis dans la justice.


Mais c'est le contraire. Saint Augustin dit [De civ. Dei, lib. xiv, cap. 40) : « Alors toute la société humaine eût été heureuse, si nos premiers ancêtres n'avaient transmis leur faute à leurs descendants et si aucun de leurs enfants n'avait commis de péché qui méritât damnation. » D'où nous devons penser que, quand même les premiers hommes n'auraient pas péché, il aurait toujours pu se faire que quelques-uns de leurs descendants péchassent. Ce qui prouve qu'ils n'auraient pas été affermis dans la justice dès leur naissance.

CONCLUSION. — L'homme est inébranlablement affermi dans la justice par la pure vision de Dieu, dont nos ancêtres n'auraient pu jouir tant qu'ils auraient engendré, par conséquent leurs enfants n'auraient pu naître dans l'état d'innocence affermis delà sorte dans le bien.

Il faut répondre qu'il ne semble pas possible que les enfants dans l'étal d'innocence fussent nés confirmés dans la justice. Car il est évident que les enfants à leur naissance ne pouvaient avoir plus de perfection que leurs parents dans l'étatde génération. Or, les parents tant qu'ils auraient engendré n'auraient pas été confirmés dans la justice. Car la créature raisonnable est affermie dans la justice par le bonheur que lui procure la vision claire de Dieu. Quand elle le voit, elle ne peut s'empêcher de s'attacher à lui, puisqu'il est l'essence même de la bonté que tous les êtres recherchent et aiment en tout et dont personne ne peut se détourner. Je parle toutefois selon la loi commune ; car par un privilège spécial il peut en arriver autrement, comme on le voit de la Vierge, mère de Dieu. Mais aussitôt que Adam serait parvenu à cette béatitude et qu'il aurait vu Dieu dans son essence, il serait devenu spirituel de corps et d'esprit-, la vie animale aurait cessé en lui et par conséquent il n'aurait plus engendré. Donc il est évident que les enfants ne seraient pas nés affermis dans la justice (1).

(1) Notre salut n'aurait donc pas été1 certain, quand même Adam n'eût pas prévariqué. Nous aurions pu pécher nous-mêmes, et dans ce cas aurions-nous pu compter sur la miséricorde divine qui a suivi la faute de noire premier père? d'après saint Thomas, les enfants de relui qui serait tombé auraient été engendrés dans un péché originel, de sorte qu'en péchant nous ne nous serions pas seulement nuis à nous-mêmes, mais nous aurions fait tort à tous nos descendants (Voy. De malo, quest. v. art. î ad 8, t. XV. edit. Venet.


Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, que si Adam n'eût pas péché il n'aurait pas engendré de lui-même des enfants de damnation, c'est-à-dire qu'ils n'auraient pas reçu de lui la souillure qui est la cause de la réprobation. Néanmoins ils auraient pu devenir des enfants de colère en faisant mauvais usage de leur libre arbitre. Ou bien s'ils n'étaient devenus enfants de colère, ce n'eût pas été parce qu'ils étaient affermis dans la justice, mais c'eût été par l'effet de la providence divine qui les aurait conservés purs de tout péché.

2. Il faut répondre au second, que saint Anselme n'est pas affirmatif sur ce point, il exprime seulement une opinion. Car il emploie cette locution : 77 semble que si....

3. Il faut répondre au troisième, que cette raison n'est pas concluante bien qu'elle ait paru avoir touché saint Anselme, comme on le voit par ses propres paroles. Car le péché du premier homme ne met pas ses descendants dans la nécessité de pécher aussi-, cette nécessité n'existe que chez les damnés. Par conséquent, s'il fût resté fidèle il ne les aurait pas mis non plus dans la nécessité absolue de ne pouvoir pécher, il n'y a que les bienheureux qui soient en cet état.

4. Il faut répondre au quatrième, qu'il n'y a pas de ressemblance sous ce rapport entre l'homme et l'ange- Car l'homme a un libre arbitre qui est changeant avant comme après que son choix est fait. Mais il n'en est pas de même de l'ange, comme nous l'avons dit (quest. lxiv, art. 2).

QUESTION CI. : DE LA CONDITION DES ENFANTS PAR RAPPORT A LA SCIENCE.


Après avoir parlé de la condition des enfants par rapport à la justice, nous avons à nous occuper de leur condition par rapport à la science. — A cet égard deux questions se présentent : i* Les enfants seraient-ils nés parfaits sous le rapport de la science? — 2" Auraient-ils eu immédiatement après leur naissance le plein usage de leur raison i'

ARTICLE I. — \Bdans l'état d'innocence les enfants seraient-ils nés parfaits sols le rapport de la science\b (1)?


(1) Cet article et le suivant sont le développement de ceux qui précèdent. Ils achèvent d'établir la différence qu'il y a entre la nature intègre et la nature déchue.

Objections: 1.. Il semble que dans l'état d'innocence les enfants seraient nés parfaits sous le rapport de la science. Car Adam eût engendré des enfants semblables à lui. Or, Adam était parfait sous le rapport de la science, comme nous l'avons dit (quest. xciv, art. 3). Par conséquent les enfants qui seraient nés de lui auraient eu également une science parfaite.

2.. L'ignorance est un effet du péché, comme le dit Bède à l'occasion de ces paroles de saint Paul: Propter quod inexcusabilis es, (Hom. u). Or l'ignorance est la privation de la science. Donc les enfants qui seraient nés avant le péché auraient possédé toute science immédiatement après leur naissance.

3.. Les enfants auraient été justes immédiatement après leur naissance. Or, la justice requiert la science qui dirige l'homme dans ses actions. Donc ils auraient eu du moins cette science.


Mais c'est le contraire. Car notre àme est naturellement comme une table rase sur laquelle il n'y arien d'écrit, selon l'expressiond'Aristote (Deanima, lib. m, text. 14). Or, la nature de l'âme est aujourd'hui la même qu'elle aurait été alors. Donc les âmes des enfants auraient été d'abord sans connaissance.

CONCLUSION. — 11 est naturel à l'homme de s'instruire au moyen des sens; les enfants qui seraient nés dans l'état d'innocence n'auraient donc pas été immédiatement parfaits sous le rapport de la science, mais ils n'auraient pas eu de peine pour s'instruire à mesure qu'ils auraient vieilli.

Il faut répondre que, comme nous l'avons dit (quest. xcix, art. 4), quand il s'agit de choses surnaturelles on ne doit croire qu'à l'autorité. Et quand l'autorité ne se prononce pas, il faut s'en rapporter à ce que dit la nature. Or, il est naturel à l'homme de s'instruire au moyen des sens, comme nous l'avons dit (quest. lv, art. 2, et quest. lxxxiv, art. 6). L'âme est unie au corps parce qu'elle a besoin de lui pour ses propres fonctions ; ce qui n'aurait pas lieu si elle ne recevait dès le principe ses connaissances au moyen des facultés sensitives. C'est pourquoi il faut reconnaître que dans l'état d'innocence les enfants ne seraient pas nés parfaits sous le rapport de la science, mais ils l'auraient acquise facilement avec le temps, soit par eux-mêmes, soit avec le secours des maîtres qui la leur auraient enseignée.


Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, que la perfection d'Adam sous le rapport de la science était un accident individuel dans le sens qu'il avait reçu ce privilège en sa qualité de père du genre humain tout entier, parce qu'il devait instruire ses descendants. Il ne devait donc pas engendrer des enfants qui fussent semblables à lui sous ce rapport, mais seulement par rapport aux accidents naturels ou gratuits qui étaient propres à sa nature entière.

2. Il faut répondre au second, que l'ignorance est la privation de la science que l'on devrait avoir à une époque donnée ; ce qui n'aurait pas eu lieu dans les enfants qui venaient de naître. Car ils auraient eu la science qui convenait à leur âge, par conséquent on n'aurait pas pu dire qu'ils étaient ignorants. Il y aurait eu en eux un défaut de science analogue à celui que saint Denis reconnaît pour certaines choses dans les anges eux-mêmes (De cal. hier. cap. 6).

3. Il faut répondre au troisième, que les enfants auraient eu la science suffisanté pour se conduire conformément à la justice, ils auraient mieux possédé que maintenant les principes universels du droit qui nous sont naturellement connus. Il en eût été de même des autres principes généraux.

Article II. — les enfants auraient-ils eu immédiatement après leur naissance le plein usage de leur raison?


Objections: 1.. Il semble que dans l'état d'innocence les enfants auraient eu immédiatement après leur naissance le plein usage de leur raison. Car maintenant les enfants n'ont pas le plein usage de leur raison, parce que l'âme est appesantie par le corps. Or, il n'en était pas alors ainsi. Car, comme le dit la Sagesse (Sap. ix, 18), le corps qui est corrompu appesantit rame. Donc 'avant le péché et la corruption qui en a été la suite, les enfants immédiatement après leur naissance auraient eu le plein usage de leur raison.

2.. Il y ades animaux qui aussitôt qu'ils sont nés font usage de leur instinct naturel; ainsi l'agneau fuit le loup immédiatement. Donc à plus forte raison dans l'état d'innocence les hommes auraient-ils eu le plein usage de leur raison.


Mais c'est le contraire. Car pour tous les êtres qui sont engendrés la nature va de l'imparfait au parfait. Donc les enfants n'auraient pas eu immédiatement dès le commencement le plein usage de leur raison.

CONCLUSION. — Dans l'état d'innocence les enfants n'auraient pas eu immédiatement après leur naissancele plein usage de leur raison, mais ils n'auraient eu quel'in-telligence nécessaire aux actions propres à leur âge, parce que leur cerveau aurait eu trop peu de consistance pour être capable d'idées plus sérieuses.

Il faut répondre que, comme nous l'avons dit (quest. lxxxiv, art. 7), l'usage de la raison dépend en quelque sorte de l'usage que l'on fait des puissances sensitives. Ainsi quand les sens sont enchaînés et que les puissances inférieures ne fonctionnent pas librement, l'homme ne jouit pas pleinement de sa raison , comme on le voit chez ceux qui dorment et dans les frénétiques. Or, les puissances sensitives dépendent des organes corporels. C'est pourquoi du mêment que les organes ne fonctionnent plus il est nécessaire que leurs actes soient entravés aussi et que par conséquent l'homme n'ait pas l'usage de sa raison. Dans les enfants ce qui empêche les puissances sensitives d'agir, c'est l'extrême humidité du cerveau. C'est ce qui fait qu'ils n'ont le libre usage ni de leur raison, ni de leurs membres. Ainsi donc dans l'état d'innocence les enfants n'auraient pas joui aussi pleinement de leur raison que dans un âge plus avancé. Ils auraient eu cependant plus d'intelligence qu'ils n'en ont maintenant, surtout pour les choses qui se rapportent à leur âge. C'est d'ailleurs ce que nous avons dit (quest. xcix, art. I) en parlant de l'usage qu'ils auraient fait de leurs membres.


Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, que l'appesantissementde l'âme est l'effet de la corruption du corps, en ce sens qu'il entrave l'action de la raison par rapport aux choses qui sont propres à l'homme dans ses différents âges.

2. Il faut répondre au second, que l'instinct naturel des animaux n'est pas aussi développé immédiatement après leur naissance que plus tard. Ainsi les oiseaux apprennent à leurs petits à voler, et dans les autres animaux on ]leurrait trouver des faits analogues. Toutefois il y a dans l'homme un obstacle particulier au développement immédiat de toutes ses facultés intellectuelles, c'est l'humidité extrême du cerveau, comme nous l'avons dit (quest. xcix, art. I).

QUESTION CII. : DU LIEU OU FUT ÉTABLI LE PREMIER HOMME, C'EST-A-DIRE DU PARADIS.


Nous n'avons plus à nous occuper que du lieu où fut établi le premier homme, c'est-à-dire du paradis. — A cet égard quatre questions se présentent : 1° Le paradis est-il un lieu matériel? — 2" Etait-ce un lieu convenable à l'habitation de l'homme? — 3" Dans quel but l'homme fut-il placé dans le paradis? — 4" A-t-il dù être créé dans le paradis ?

ARTICLE I. — le paradis est-il en lieu matériel (1)?


(1) Parmi les auteurs qui ont voulu entendre (ont le récit de la Genèse dans un sens parement allégorique, nous citerons Philon et Origène, que saint Bpiphane réfute [Ifoeres. 64,n.47).

Objections: 1.. Il semble que le paradis ne soit pas un lieu matériel. Car Bède dit à propos de ces paroles de saint Paul (II. Cor. xii) : Raptus est in paradisi/m, que le paradis touche à l'orbite de la lune. Or, il n'y a là aucune terre, parce qu'il est contraire à la nature de la terre d'être aussi élevée, et parce que sous l'orbite de la lune il y a une région de feu qui la consumerait. Le paradis n'est donc pas un lieu corporel.

2.. L'Ecriture dit qu'il y avait quatre fleuves qui sortaient du paradis (Gènes, h). Or, les fleuves que l'Ecriture désigne en cet endroit ont évidemment leurs sources ailleurs, comme on le voit (Meteor. lib. i). Donc le paradis n'est pas un lieu matériel.

3.. Il y a des auteurs qui ont recherché avec le plus grand soin tous les lieux habitables de la terre, et ils ne font aucune mention du paradis. Donc ce n'était pas un lieu terrestre.

4.. On place dans le paradis l'arbre de vie. Or, cet arbre de vie est quelque chose de spirituel. Car il est dit dans les Proverbes (Prov. m, 18) que la sagesse est l'arbre de vie pour ceux qui s'y attachent. Donc le paradis n'est pas un lieu matériel, mais un lieu spirituel.

5.. Si le paradis est un lieu matériel, il faut que les arbres qui y étaient soient matériels aussi. Mais cela ne paraît pas admissible; car les arbres en général ont été produits au troisième jour, tandis que la Genèse ne parle de la plantation des arbres du paradis qu'après l'oeuvre des six jours. Donc le paradis n'est pas un lieu matériel.


Mais c'est le contraire. Saint Augustin dit(Sup. Gen. ad litt. lib. viii, in princ.) : Il y a sur le paradis trois sentiments généraux. Le premier est celui des interprètes qui le regardent uniquement comme un lieu corporel; le second appartient à ceux qui veulent que ce soit un lieu purement spirituel, et enfin le troisième, que je partage volontiers, est celui qui attache au paradis les deux sens.

CONCLUSION. — Le paradis est un lieu qui existe en Orient et que Dieu avait con-venahlement préparé.

Il faut répondre avec saint Augustin (De civ. Dei, lib. xiii, cap. 21) quo ceux qui entendent le paradis dans un sens spirituel, en peuvent penser tout ce que leur imagination leur fournira de beau, pourvu qu'ils respectent ce que nous en apprend le fidèle exposé des faits (2). Car ce que l'Ecriture nous dit du paradis, elle nous le raconte sous la forme d'un récit historique. Or, à l'égard de tout ce que l'Ecriture expose de la sorte, il faut avant tout prendre pour base la vérité historique, sauf à y ajouter ensuite les sens spirituels qu'on peut s'ingénier à découvrir. Ainsi, le paradis, comme le dit saint Isidore (Et. lib. xiv, cap. 3), est un lieu placé du côté de l'Orient, el ce mot traduit du grec(l) signifie jardin. Il était d'ailleurs convenable qu'il fût placé du côté de l'Orient, parce qu'il devait être naturellement dans le lieu le plus noble de la terre. D'après Aristote (De caelo, lib. ii, text. Io), l'Orient étant la droite du ciel, et la droite étant plus noble que la gauche, il était convenable que Dieu le plaçât de préférence de ce côté (2).

(2) Saint Augustin voulait que ^'interprétation allégorique eùl toujours pour base le sens littéral, et qu'elle le respectât. C'est en effet le moyen d'éviter une foule d'erreurs, quand il s'agit de l'explication de l'Ecriture.

(1) Ce mot signifia en grec, parc, enclos, mais dans l'hébreu, il veut dire simplement jardin.

(2) Saint Basile dit que les chrétiens ont conservé l'habitude de prier, le visage tourné vers l'orient, parce que le paradis avait été placé de ce coté [De Spir. sanct. cap. 27). Saint [Grégoire de Nysse et saint Jean Daniascène sont de ce même sentiment.


Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, que les paroles de Bède ne sont pas exactes si on les entend dans leur sens propre. On peut cependant dire métaphoriquement que le paradis s'élève jusqu'à l'orbite de la lune, dans le sens que la pureté perpétuelle de l'air dont on y jouissait ressemblait, dit saint Isidore, à la température qui règne dans les régions supérieures (3), et que sous ce rapport on pouvait l'assimiler aux corps célestes qui ne connaissent pas de contrariété. Il parle de l'orbite de la lune plutôt que des autres sphères, parce que la lune est par rapport à nous le dernier des corps célestes, et que cet astre est d'ailleurs celui de tous qui a le plus de rapport avec la terre. C'est pour cela qu'il est ténébreux et opaque, à peu près comme la terre. D'autres disent que le paradis s'élevait jusqu'à l'orbite de la lune, c'est-à-dire jusqu'à cet espace intermédiaire de l'atmosphère où se forment les pluies et les vents, parce que c'est la lune qui exerce principalement son action sur les vapeurs qui remplissent cette région. Mais d'après ce système ce lieu n'eût pu être habité par l'homme, soit parce qu'il y aurait eu là trop de tempêtes, soit parce que cette partie de l'atmosphère n'est pas appropriée à sa constitution, comme l'air qui est plus rapproché de la terre.

(3) Saint Ilasilc exprime ta même pensée (Hom. de Paradiso).

2. Il faut répondre au second, avec saint Augustin rSup. Gen. ad litt. lib. viii, cap. 7), qu'il est à présumer que les hommes ignorent complètement le lieu oû était le paradis, et que les fleuves dont on indique les sources sont cachés sous terre et sortent dans d'autres lieux après avoir parcouru de longs espaces. Car qui ne sait qu'il y a des fleuves qui dissimulent ainsi leur cours (4)?

(4) Les anciens ont été très-divisés sur cette question, parce qu'ils ne connaissaient pas suffisamment la forme de la terre. On croit communément aujourd'hui que le paradis terrestre devait être situé dam; l'Arménie, vers les sources de l'Eqpbrate, du'tigre, du l'hase et de l'Araxe ou du Cvmis. On prend ce dernier fleuve pour le Géhon. Voyez la Dissertation sur le Paradis terrestre, qui se trouve dans la Bible de Vence.

3. Il faut répondre au troisième, que ce lieu a été séparé des endroits de la terre que nous habitons maintenant soit par des montagnes, soit par des mers, soit par des régions infranchissables. C'est pourquoi les géographes n'en font aucunement mention.

(5) Dans toute hypothèse il faut faire la part des changements produits à la suite du péché originel et par le déluge.

4. Il faut répondre au quatrième, que l'arbre de vie est un arbre matériel, ainsi appelé parce que ses fruits avaient la vertu de conserver la vie, comme nous l'avons dit (quest. xcvn, art. 4). Cependant il avait une signification spirituelle, comme la pierre du désert, qui était quelque chose de matériel et qui signifiait néanmoins le Christ. De même l'arbre de la science du bien et du mal était un arbre matériel qui avait reçu ce nom à cause de l'événement qui devait arriver. Car, après avoir mangé de son fruit, l'homme a appris par l'expérience du châtiment toute la différence qu'il y avait entre la vertu d'obéissance et le crime de rébellion; par conséquent on peut dire avec quelques interprètes qu'il désignait spirituellement le libre arbitre.

5. Il faut répondre au cinquième, que, d'après saint Augustin (Sup. Gen. ad litt. lib. v, cap. 5, et lib. viii, cap. 3), les plantes n'ont pas été produites en acte au troisième jour, mais qu'elles n'ont alors existé que virtuellement. Ce n'est qu'après l'oeuvre des six jours que les plantes ont été produites réellement dans le paradis aussi bien qu'ailleurs. Mais, suivant les autres Pères, il faut admettre que toutes les plantes ont été produites en acte au troisième jour, même celles du paradis. Quant à ce que l'Ecriture dit de la plantation des arbres du paradis après l'oeuvre des six jours, il faut l'entendre par manière de récapitulation (1). Aussi la Vulgate dit-elle : Le Seigneur Dieu avaitplanté ce paradis de délices dès le commencement.

(1) Moïse fait cette récapitulation pour suppléer à ce qu'il avait omis ou qu'il n'avait dit qu'en 'passant, au chapitre 2. C'est une des remarques de la liilde de ^ eneo.



I pars (Drioux 1852) Qu.98 a.2