III Pars (Drioux 1852) 1282

ARTICLE ii. — LES SACREMENTS SONT-ILS  UNIQUEMENT une institution DIVINE (1)?

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1 Il semble que les sacrements ne soient pas uniquement d'institution divine. Car les choses qui ont été établies par Dieu nous sont transmises par l'Ecriture. Or, on fait dans les sacrements des choses dont il n'est fait dans l'Ecriture aucune mention, comme le chrême par lequel on continue, l'huile dont les prêtres sont oints; ainsi que beaucoup d'autres paroles et d'autres actions dont nous faisons usage dans les sacrements. Les sacrements ne sont donc pas seulement d'institution divine.

2
Les sacrements sont des signes. Or, les choses sensibles ont naturellement une certaine signification. Cependant on ne peut pas dire que Dieu soit réjoui par certaines significations, et qu'il ne le soit pas par d'autres ; parce qu'il approuve toutes les choses qu'il a faites. Mais il semble que ce soit le propre des démons d'être attirés vers certaines choses par des signes. Car saint Augustin dit (De ci c. Dei, lib. xxi, cap. 6) : Les démons sont attirés pour habiter en elles par des créatures qu'ils n'ont pas faites, mais que Dieu a créées, et ils sont séduits par des agréments divers selon la diversité de leur nature, non comme les animaux le sont par les aliments, mais comme les esprits le sont par les signes. Il ne semble donc pas que les sacrements aient besoin d'être d'institution divine.

3
Les apôtres ont tenu la place de Dieu sur la terre. D'où l'Apôtre dit (2Co 2,10): Ce que je vous ai accordé, si j'ai accordé quelque chose, je l'ai fait à cause de vous dans la personne du Christ; c'est-à-dire, comme si le Christ vous l'eût accordé lui-même. Par conséquent il semble que les apôtres et leurs successeur puissent établir de nouveaux sacrements.

20 Mais c'est le contraire. Celui qui établit une chose, c'est celui qui lui donne de la force et de la vertu, comme on le voit à l'égard de ceux qui font des lois. Or, la vertu d'un sacrement vient de Dieu seul ( art. préc., et quest. lxii, art. 1 et 5). Il n'y a donc que lui qui puisse établir un sacrement.


CONCLUSION. — Puisque la vertu des sacrements ne vient quo de Dieu, il n'y a que lui qui les ait établis.

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Il faut répondre que, comme on le voit d'après ce que nous avons dit (ibid.), les sacrements contribuent instrumentalement à produire des effets spirituels. Un instrument tire sa vertu d'un agent principal. Par rapport aux sacrements il y a deux sortes d'agent: celui qui établit le sacrement et celui qui se sert du sacrement établi, en l'appliquant pour lui faire produire son effet. Or, la vertu du sacrement ne peut venir de celui qui en use, parce qu'il n'opère que comme ministre. Il  faut donc que la vertu du sacrement vienne de celui qui l'a établi; et puisqu'elle ne vient que de Dieu, il s'ensuit qu'il n'y a que lui qui ait institué les sacrements.

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Il faut répondre au premier argument, que les choses qui se font dans les sacrements et que les hommes ont établies ne sont pas nécessaires au sacrement. mais elles y ajoutent une certaine solennité qu'on aime à déployer pour exciter la dévotion et le respect dans ceux qui les reçoivent; tandis que les choses qui sont nécessaires au sacrement, ont été établies par le Christ lui-même qui est Dieu et homme. Et quoiqu'elles ne soient pas toutes contenues dans l'Ecriture, l'Eglise néanmoins les a reçues oralement de la tradition des apôtres (I). C'est ainsi que saint Paul dit (1Co 11,34) : Je réglerai les autres choses quand je serai arrivé.

(t) Le concile do Trente a décidé que tous les sacrements avaient été institués par Jésus-Christ (sess. VII, can. -I) : Si quit dixerit sacramenta novae legis non fuisse omnia à Jesu Christo instituta... anathema sit¦ Mais it n'a pas décidé s'ils l'avaient été immédiatement ou m.'Jia- tement. Hugues de Saint-Victor et le Maître des sentences ont pensé que l'Extrdmc-Onction n'avait été établie parles apôtres qu'après l'ascension du Clwist, et, d'après Alexandre de llalès et saint Bonaveiiture, la Confirmation n'aurait été instituée que longtemps après les apôtres. C'est par ménagement pour eus théologiens, que le eoncilea évité le mot immédiatement.

21 Il faut répondre les choses au second, que sensibles ont une certaine aptitude pour signifier des effets spirituels d'après leur nature ; mais cette aptitude est déterminée à une signification spéciale d'après l'institution divine. C'est ce qui fait dire à Hugues de Saint-Victor (Lib. i de sacr. p. ix, cap. 2) que le sacrement tire sa signification de son institution. Cependant Dieu a choisi certaines choses plutôt que d'autres pour la signification des sacrements, non parce qu'il a pour elles une certaine affection, mais pour que cette signification fût plus convenable.

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Il faut répondre au troisième, que les apôtres et leurs successeurs sont les vicaires de Dieu par rapport à l'administration de l'Eglise établie par la foi et les sacrements. Par conséquent, comme il ne leur est pas permis d'établir une autre Eglise, de même il ne leur est pas permis de transmettre une autre foi, ni d'instituer d'autres sacrements (2). D'ailleurs on dit que l'Eglise a été formée par les sacrements qui sont sortis du côté du Christ attaché à la croix.



ARTICLE iii. — LE CHRIST, COMME HOMME . A-T-IL EL' LA PUISSANCE D'OPÉRER L'EFFET INTÉRIEUR DES SACREMENTS (3) ?

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1 Il  semble que le Christ, comme homme, ait eu la puissance d'opérer l'effet intérieur des sacrements. Car saint Jean Baptiste dit (
Jn 1,33) : Celui qui m'a envoyé baptiser dans Veau, celui-là m'a dit : Celui sur qui vous verrez- descendre et demeurer l'Esprit, c'est celui-là qui baptise dans l'Esprit-Saint. Baptiser dans l'Esprit-Saint c'est «conférer intérieurement sa grâce. Or, l'Esprit-Saint est descendu sur le Christ considéré comme homme, et non comme Dieu, parce que comme Dieu il donne l'Esprit-Saint lui- même. Il semble donc que le Christ, comme homme, ait eu la puissance de produire l'effet intérieur des sacrements.

2 Le Seigneur dit (Mt 9,6) : Sachez que le Fils de l'homme a le pouvoir de remettre sur la terre les péchés. Or, la rémission des péchés est l'effet intérieur d'un sacrement. Il semble donc que le Christ, comme homme, opère cet effet intérieur.

3 L'institution des sacrements appartient à celui qui opère comme agent principal leur effet intérieur. Or, il est évident que le Christ a institué les sacrements. C'est donc lui qui opère leur effet intérieur.

Personne ne peut conférer l'effet du sacrement sans le sacrement, à moins qu'il ne l'opère par sa vertu propre. Or, le Christ a conféré l'effet du sacrement sans le sacrement, comme on le voit à l'égard de Madeleine, à laquelle il a dit (
Lc 7,48) : J os péchés vous sont remis. Il semble donc que le Christ, comme homme, opère l'effet intérieur du sacrement.

S. La cause en vertu de laquelle le sacrement opère est l'agent principal qui produit son effet intérieur. Or, les sacrements tirent leur vertu de la passion du Christ et de l'invocation de son nom, d'après ces paroles de l'Apôtre (1Co 1,12) : Est-ce que Paul a été crucifié pour vous? ou bien avez-vous été baptisés en son nom ? Le Christ, comme homme, opère donc l'effet intérieur du sacrement.

(Il Indépendamment des traditions écrites, te concile de Trente reconnaît qu'il y a des traditions orales qui remontent aux apôtres, et il ana- tlu mntise ceux qui ne les respectent pas : Si quit autem traditiones proedictas sriens et prudens contempserit, anathema sit.

<2i Le concile de Trente le reconnaît, en décidant (sess, xxi, cap. 2) que l'Eglise a le pouvoir de changer les rites dis sacrements, pourvu qu'elle respecte ce qu'il y a en eux de substantiel : Satvd eorum substantia.

o) ( et ARTICLE est une réfutation de l'erreur d'Arnauld de \ illeneuve, qui prétendait que la nature humaine prise par le Verbe divin était en tout éiiale à Dieu, de telle sorte que l'humanité du Christ égalait sa divinité.

20 Mais c'est le contraire. Saint Augustin dit (implic. Tract, lxxx in Jean, et Cont. Donat. lib. m, cap. 10, sed expi es. Isid. lib. vi, cap. 18) que dans les sacrements la vertu divine opère plus saintement le salut. Or, la vertu divine appartient au Christ, comme Dieu, mais non comme homme. Le Christ n'opère donc pas l'effet intérieur du sacrement comme homme, mais comme Dieu.


CONCLUSION. — Le Christ, comme Dieu, a eu dans les sacrements une puissance d'autorité, mais comme homme il a eu la puissance d'excellence ou celle de ministre principal, en tant que c'est lui qui a opéré par sa passion, d'une manière méritoire et efficiente, le salut de tous les hommes et qui a mérité que les sacrements fussent sanctifiés et institués en son nom, et qu'il a pu seul justifier les hommes sans les sacrements.

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Il faut répondre que le Christ opère l'effet intérieur des sacrements comme Dieu et comme homme, mais non de la même manière. Car, comme Dieu, il opère dans les sacrements par son autorité, au lieu que comme homme il opère leurs effets intérieurs comme cause méritoire et efficiente, mais d'une manière instrumentale. En effet, nous avons dit (quest. xlviii et quest. xlix) que la passion du Christ, qui lui convient selon la nature humaine, est cause de notre justification d'une manière méritoire et efficiente, mais non à titre d'agent principal ou par autorité, mais à la façon d'un instrument, en tant que l'humanité est l'instrument de sa divinité, comme nous l'avons vu (quest. xiii, art. 1 et 3). Cependant, comme cet instrument est uni à la divinité en personne, il a une certaine supériorité et une certaine causalité par rapport aux instruments extrinsèques, qui sont les ministres de l'Eglise, ainsi qu'on le voit d'après ce que nous avons dit (art. 1 huj. quaest.). C'est pourquoi, de même que le Christ, comme Dieu, a une puissance d'autorité dans les sacrements; ainsi, comme homme, il a une puissance de ministre principal ou une puissance d'excellence qui consiste en quatre choses : 1° en ce que le mérite et la vertu de sa passion opèrent dans les sacrements, comme nous l'avons dit (quest. lxii, art. 5). Et parce que la vertu de la passion nous est communiquée par la foi, d'après ces paroles de saint Paul (Rm 3,25), qui dit que Dieu a destiné le Christ pour être la victime de propitiation, par la foi qu'on aurait en son sang, et que nous protestons de notre foi en invoquant son nom, il s'ensuit: 2° qu'il appartient à la puissance d'excellence que le Christ possède dans les sacrements qu'ils soient sanctifiés en son nom. Et parce que les sacrements tirent leur vertu de son institution, il en résulte: 3° qu'il appartient à l'excellence de sa puissance qu'ayant donné aux sacrements leur vertu, il ait pu les instituer. Et enfin parce que la cause ne dépend pas de l'effet, mais que c'est plutôt le contraire, il arrive ¦4° qu'il a pu conférer l'effet des sacrements sans le sacrement extérieur (1).

La réponse aux objections est par là même évidente. Car les objections faites dans les deux sens contraires ont quelque chose de vrai, comme

nous l'avons dit (in corp. art.).

(1) Comme on voit dans l'Evangile qu'il a remis lis péchés d'un grand nombre, et qu'il a ainsi conféré la grâce par sa seule parole.


ARTICLE IV. — le christ a-t-il pu communiquer à ses ministres LA puissance qu'il a eue dans les sacrements?

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1 Il semble que le Christ n'ait pas pu communiquer à ses ministres la puissance qu'il a eue dans les sacrements. Car, comme le dit saint Augustin (Maxim, lib. iii, cap. 7), s'il l'a pu et qu'il ne l'ait pas voulu, il a été un envieux. Or, l'envie a été loin du Christ, qui a eu en lui la plénitude souveraine de la charité. Par conséquent, puisque le Christ n'a pas communiqué sa puissance à ses ministres, il semble qu'il n'ait pas pu le faire.

2
Sur ces paroles (Jn 14) : Majora horum faciet, saint Augustin dit (Tract, lxxii in ) : Je considérerais cela, c'est-à-dire la justification de l'impie, comme une chose plus grande que la création du ciel et de la terre. Or, le Christ n'a pas pu communiquer à ses ministres le pouvoir de créer le ciel et la terre. Il ne leur a donc pas communiqué celui de justifier l'impie. Par conséquent, puisque la justification de l'impie est produite par la puissance que le Christ possède dans les sacrements, il semble qu'il n'ait pu communiquer celte puissance à ses ministres.

3 Il  convient au Christ, comme chef de l'Eglise, que la grâce découle de lui sur les autres, d'après ces paroles de l'Evangile (Jn 2,16) : Nous avons tous reçu de sa plénitude. Or, ce titre n'a pu être communiqué aux autres, parce*que, dans ce cas, l'Eglise serait monstrueuse, ayant beaucoup de tètes. Il semble donc quo le Christ n'ait pu communiquer à ses ministres sa puissance.

20 Mais c'est le contraire. Sur ces paroles (Jean,1, 31) : Ego nesciebam eum, saint Augustin dit (Tract, v in ) qu'il ne savait pas que le Seigneur aurait la puissance de baptiser, et qu'il la conserverait. Or, Jean ne l'aurait pas ignoré, si cette puissance n'était pas communicable. Le Christ a donc pu communiquer à ses ministres sa puissance.


CONCLUSION. — Le Christ n'a pu conférer à personne sa puissance d'autorité, pas plus que son essence divine, mais il a pu communiquer à ses ministres sa puissance d'excellence, en leur donnant une telle plénitude de grâce que leur mérite opère l'effet des sacrements, et que par leur seul commandement, sans le rite des sacrements, ils en produisent l'effet.

21
Il faut répondre que, comme nous l'avons dit (art. préc.), le Christ a eu dans les sacrements une double puissance : l'une d'autorité, qui lui convient comme Dieu : celle-là ne peut être communiquée à aucune créature, pas plus que l'essence divine; l'autre d'excellence, qui lui convient comme homme. Il a pu communiquer cette puissance à ses ministres, en leur donnant, par exemple, une telle plénitude de grâce, que leur mérite opère les effets des sacrements, de manière qu'à l'invocation de leurs noms, les sacrements soient sanctifiés, qu'ils puissent les instituer, et que, sans avoir recours au rite des sacrements, par leur ordre seul ils en confèrent les effets. Car, plus l'instrument uni a de puissance, et plus il peut communiquer de vertu à l'instrument séparé, comme la main au bâton.

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Il faut répondre au premier argument, que ce n'est pas par envie, si le Christ n'a pas communiqué sa puissance d'excellence aux ministres de l'Eglise; mais il ne l'a pas fait dans l'intérêt des fidèles, dans la crainte qu'ils ne missent leur espérance dans un homme et qu'il n'y eût divers sacrements qui introduisissent une division dans l'Eglise; comme ceux qui disaient : Moi je suis à Paul, moi à Apollon, moi à Céphas, selon le langage de saint Paul (1Co 1,12).

32 Il faut répondre au second, quo cette objection repose sur la puissance d'autorité qui convient au Christ, comme Dieu -, quoique la puissance d'excellence puisse aussi recevoir le nom d'autorité par rapport aux autres ministres. Ainsi sur ces paroles (1Co 1) : Le Christ a été divisé, la glose dit (ord. sup. illud : Ego vero Cephae ): qu'il a pu donner l'autorité de baptiser à ceux à qui il a conféré ce ministère.

33 Il faut répondre au troisième, que pour éviter l'inconvénient qui résulterait de la multiplicité de chefs dans l'Eglise, le Christ n'a pas voulu communiquer à ses ministres sa puissance d'excellence. Toutefois, s'il l'eût communiquée, il aurait été le chef principalement et les autres ne l'auraient été que secondairement (i).



ARTICLE v. — les sacrements peuvent-ils être conférés par de mauvais ministres (2)?

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1 Il semble que les sacrements ne puissent pas être conférés par de mauvais ministres. Car les sacrements de la loi nouvelle ont pour but de purifier du péché et de donner la grâce. Or, les méchants, puisqu'ils sont immondes, ne peuvent pas purifier les autres du péché, d'après ces paroles de l'Ecriture (
Si 34,4) : Comment ce qui est impur peut-il rendre pur? et d'ailleurs puisqu'ils n'ont pas la grâce, il semble qu'ils ne puissent pas la conférer, car personne ne donne ce qu'il n'a pas. Il semble donc que les sacrements ne puissent être conférés par les méchants.

2 La vertu entière des sacrements découle du Christ, comme nous l'avons dit (art. 3 huj. quaest.). Or, les méchants sont séparés du Christ, parce qu'ils n'ont pas la charité par laquelle les membres sont unis au chef, d'après ces paroles de saint Jean (1. Epist, 4, 16) : Celui qui demeure dans la charité, demeure en Dieu et Dieu demeure en lui. Il semble donc que les sacrements ne puissent pas être conférés par les méchants.

3
S'il manque quelqu'une des choses qui doivent avoir lieu dans les sacrements, le sacrement est nul; comme quand la forme ou la matière qu'ils doivent avoir fait défaut. Or celui qui doit être le ministre du sacrement c'est celui qui n'a pas de tâche, d'après ces paroles de la loi (Lv 21,17) : Tout homme de votre race dans la suite des générations qui aura quelque défaut, ri approchera point de l'autel pour offrir l'aliment consacré à Dieu. Il semble donc que si le ministre est méchant il ne puisse conférer un sacrement.

20 Mais c'est le contraire. Saint Augustin dit à l'occasion de ces paroles de saint Jean (Jn 1, Super quem videris Spiritum, etc. tract, v ) : Qu'est-ce que Jean ne savait pas dans le Christ ? c'est que le Seigneur aurait la puissance du baptême et qu'il la conserverait, mais que le ministère passerait certainement dans les bons et les méchants. Car, ajoute-t-il, que vous fait un mauvais ministre, dès que le Seigneur est bon?


CONCLUSION. — Puisque les ministres de l'Eglise opèrent instrumentalement dans les sacrements, ils peuvent les conférer, soit qu'ils soient bons, soit qu'ils soient mauvais.

(1) Il est à remarquer que les apôtre» ne prennent jamais que le titre de ministres (1Co 3) : Quid igitur est Apollo? Quid ter à Paulus'! Ministri ejus cui credidistis. (Ibid, iv) : Sic nos existimet homo ut ministros Christi et dispensatores mysteriorum Dei.

(2)Il est de foi, contre les donatistes, les vau- dois et les vvideflistes, que les sacrements conféré» par de mauvais ministres sont valides ; c'est ce que le concile de Trente a défini en ces termes (sejs. vii, can. 12) : Si quis dixerit ministrum in peccato mortali existentem, modi) omnia essentialia, quae ad sacramentum conficiendum aut conferendum pertinent, servaverit, non conficere aut non conferre sacramentum; anathema sit.

21 Il faut répondre que, comme nous l'avons dit (art. 1 et 3 huj. quaest.), les

ministres de l'Eglise opèrent instrumentalement dans les sacrements, parce qu'il en est en quelque sorte d'un ministre comme d'un instrument. Or. comme nous l'avons vu (quest. lxii, art. 1 et 4), l'instrument n'agit pas selon sa propre forme ou sa propre vertu, mais selon la vertu de celui qui le meut. C'est pourquoi il arrive que l'instrument, considéré comme tel, a une forme ou une vertu quelconque, indépendamment de ce qui est exigé pour sa nature d'instrument. C'est ainsi que le corps du médecin qui est l'instrument de l'âme qui possède la science est sain ou infirme, et que le tuyau par lequel l'eau passe est d'argent ou de plomb. Les ministres de l'Eglise peuvent donc conférer les sacrements, quand même ils seraient mauvais.

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Il faut répondre au premier argument, que les ministres de l'Eglise ne purifient pas de leurs fautes ceux qui s'approchent des sacrements et ils ne leur confèrent pas la grâce par leur propre vertu. Mais le Christ le fait par sa puissance, en se servant d'eux comme d'instruments. C'est pourquoi l'effet produit dans ceux qui reçoivent les sacrements, ne les rend pas semblables aux ministres, mais il leur imprime la ressemblance du Christ.

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Il faut répondre au second, que par la charité les membres du Christ sont unis à son chef pour qu'ils en reçoivent la vie-, parce que selon l'expression de saint Jean fi. Jean,3, 14) : Celui qui n'aime pas reste dans la mort. Mais on peut opérer par un instrument inanimé et séparé de soi quant à l'union du corps, pourvu qu'on lui soit uni d'une certaine manière: car l'artisan opère par la main autrement que par la hache. Ainsi le Christ opère donc dans les sacrements au moyen des bons comme par des membres vivants, et au moyen des méchants comme par des membres morts.

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Il faut répondre au troisième, qu'une chose est exigée pour les sacrements de deux manières: 1° Selon qu'elle est nécessaire aux sacrements; alors si une chose de cette nature manque il n'y a pas de sacrement. C'est ce qui arrive quand la forme ou la matière qui doit exister fait défaut. 2° Une chose peut être exigée dans les sacrements sous le rapport de la convenance; c'est dans ce sens qu'il faut que les ministres des sacrements soient bons.



ARTICLE vi. — i.es méchants pèchent-ils en administrant les sacrements?

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1 Il semble que les méchants ne pèchent pas en administrant les sacrements. Car comme on est le ministre de Dieu dans les sacrements, de même on l'est par les oeuvres de charité qu'on fait. D'où l'Apôtre dit (
He 13 He 16): N'oubliez pas de faire part de vos biens aux autres ; car c'est par de semblables hosties qu'on se rend Dieu favorable. Or, les méchants ne pèchent pas, s'ils se rendent les ministres de Dieu pour des oeuvres de charité, et même on doit le leur conseiller, d'après ces paroles de Daniel (Da 4,24) : Suivez mon conseil, rachetez vos péchés par des aumônes. Il semble donc que les méchants ne pèchent pas en administrant les sacrements.

2 Celui qui communique avec quelqu'un pour un péché en est lui-même coupable, d'après ces paroles de saint Paul (Rm 1,32) : Ils sont dignes de mort non-seulement ceux qui font le péché, mais encore ceux qui approuvent ceux qui le font. Or, si les mauvais ministres pèchent en administrant les sacrements, ceux qui les reçoivent d'eux communiquent avec eux dans le péché. Ils seraient donc coupables ; ce qui semble répugner.

3 Personne ne parait être perplexe ; parce qu'alors l'homme serait obligé de désespérer, comme étant incapable d'échapper au péché. Or. si les méchants péchaient en administrant les sacrements, ils seraient perplexes; parce qu'alors ils pécheraient quelquefois en ne pas les administrant, comme quand ils v sont contraints par devoir; car il est dit (1Co 11,16): Malheur à moi si je n’évangélise pas. puisque c'est pour moi une nécessité; d'autres fois ils pécheraient encore parce qu'il y aurait péril; comme si l'on présentait à un pécheur un enfant qui est en danger de mort pour le baptiser. Il semble donc que les méchants ne pèchent pas en administrant les sacrements.

20 Mais c'est le contraire. Saint Denis dit (De coetest. hier. cap. 4) : qu'il n'est pas permis aux méchants de toucher les symboles, c'est-à-dire les signes sacramentels; et dans son épitre à Démophile, il ajoute (Ep 8) : Le pécheur paraît audacieux en mettant la main aux choses sacerdotales, il ne craint pas et il n'a pas honte d'exécuter les choses divines contrairement à la divinité, et pensant que Dieu ignore ce qu'il voit lui-même au fond de son âme, il croit le tromper en lui donnant faussement le nom de Père, et il ose prononcer, je ne dirai pas des prières, mais des paroles impures et infâmes sur des signes divins tout en tenant la place du Christ.


CONCLUSION. — Puisque les ministres doivent ressembler au Seigneur, les méchants pèchent en se faisant les ministres de Dieu et de l'Eglise dans l'administration des sacrements; leur péché se rapportant à l'irrévérence envers Dieu, est mortel dans son genre.

21 Il faut répondre que l'on pèche en agissant par là même qu'on n'agit pas de la manière qu'il faut, comme le prouve Aristote (Eth. lib. ii, cap. 3 et 5). Or, nous avons dit(art.préc. ad3jqu'il convient que les ministres des sacrements soient justes ; parce que les ministres doivent ressembler au Seigneur, d'après ces paroles de la loi (Lv 19,2) : Vous serez saints parce que je suis saint. Et ailleurs (Si 10,2) : Tel est te juge du peuple, tels sont ses ministres. C'est pourquoi il n'est pas douteux que les méchants qui se rendent les ministres de Dieu et de l'Eglise, dans la dispensation) des sacrements, pèchent. Et parce que ce péché est une irrévérence envers Dieu et une profanation des sacrements, du moins de la part du pécheur (car les sacrements ne peuvent pas en eux-mêmes ôtre profanés), il s'ensuit que ce péché est, dans son genre, un péché mortel (4).

31 Il faut répondre au premier argument, que les oeuvres de charité ne sont pas des choses qui aient été sanctifiées par une consécration ; mais elles appartiennent à la sainteté de la justice, comme des parties de cette vertu. C'est pourquoi l'homme qui se rend le ministre de Dieu pour des oeuvres de charité, s'il est juste, se sanctifie davantage; mais s'il est pécheur il est par là disposé à la sainteté : au lieu que les sacrements ont en eux-mêmes une sanctification qu'ils doivent à leur consécration mystique. C'est pourquoi la sainteté de la justice est préalablement exigée dans le ministre, pour qu'il remplisse convenablement ses fonctions : par conséquent il fait une mauvaise action et il pèche si, étant dans le péché, il se présente pour un semblable ministère.

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II faut répondre au second, que celui qui s'approche des sacrements les reçoit du ministre de l'Eglise, considéré comme tel, mais non comme individu. C'est pourquoi, tant que l'Eglise le tolère dans son ministère (2), celui qui reçoit de lui les sacrements ne communique pas avec son péché, mais avec l'Eglise qui le présente comme son ministre. Mais si l'Eglise ne le tolère pas, et qu'elle le dégrade, ou l'excommunie, ou le suspende, celui qui reçoit de lui les sacrements pèche, parce qu'il communique avec son péché.

(I, C'est ce qu'exprime ainsi te catéchisme du coniile do Trente : Sacramenta impie ea ministrantibus mortem aeternam afferunt De sacram. $*U1), et le Iiituel romain dit : Impure et indigne sacramenta ministrantes in oeternae mortis reatum incurrunt.

(2, On doit croire que le ministre qu'il doit être, tant qu'on n'a pas de preuves certaines du contraire, et on peut demander les sacrements à son curé, quand même on le saurait en état de péché mortel, si on ne peut commodément les recevoir d'un autre prêtre, parce qu'on a, à son égard, un droit dont on peut user.

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Il faut répondre au troisième, que celui qui est dans le péché mortel n'est pas absolument perplexe, si par devoir il est chargé de dispenser les sacrements, parce qu'il peut se repentir de son péché (1) et les administrer licitement. Mais il ne répugne pas qu'il soit perplexe, si l'on suppose qu'il veuille rester dans le péché. Cependant, il ne pécherait pas en baptisant à l'ARTICLE de la mort, dans le cas où un laïc pourrait aussi le faire (2); car il est évident qu'alors il ne se montrerait pas ministre de l'Eglise, mais il subviendrait à celui qui serait dans un besoin extrême. Cependant il n'en est pas de même des autres sacrements qui ne sont pas aussi nécessaires que le baptême, comme nous le verrons (quest. lxvii, art. 3).




ARTICLE vii. — les anges peuvent-ils administrer les sacrements?

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1 Il semble que les anges puissent administrer les sacrements. Car tout ce que peut un ministre inférieur, un ministre supérieur le peut aussi, comme tout ce que peut le diacre, le prêtre le peut, mais non réciproquement. Or, les anges sont, dans l'ordre hiérarchique, des ministres supérieurs à tous les hommes, comme on le voit (De coelest. hier. cap. 9). Par conséquent, puisque les hommes peuvent administrer les sacrements, il semble qu'à plus forte raison les anges.

2
Les saints ressemblent aux anges dans le ciel, comme on le voit (Mt 22). Or, il y a des saints dans le ciel qui peuvent administrer les sacrements, carie caractère sacramentel est ineffaçable, comme nous l'avons dit (quest. préc. art. 5). Il semble donc que les anges puissent aussi les administrer.

3 Comme nous l'avons dit (quest. viii, art. 7), le diable est le chef des méchants et les méchants sont ses membres. Or, les méchants peuvent administrer les sacrements. Il semble donc que les démons le puissent aussi.

20
Mais c'est le contraire. Saint Paul dit (He 5,1) : Tout pontife étant pris d'entre les hommes est établi pour les hommes en ce qui regarde le culte de Dieu. Or, les anges bons ou mauvais ne viennent pas des hommes. Ils ne sont donc pas établis comme ministres erí*ce qui appartient à Dieu, c'est- à-dire à l'égard des sacrements.


CONCLUSION. — Puisqu'il n'y a que les hommes qui ressemblent au Christ, il n'appartient qu'à eux et non aux anges d'administrer les sacrements, quoique le pouvoir de les conférer puisse être accordé aux anges.

21 Il faut répondre que, comme nous l'avons dit (art. 3 huj. quaest.), toute la vertu des sacrements découle de la passion du Christ, qui appartient au Christ comme homme, auquel les hommes ressemblent par leur nature, tandis qu'il n'en est pas de même des anges par rapport auxquels l'Apôtre dit que par sa passion il est descendu un peu au-dessous d'eux, ainsi qu'on le voit (He 2). C'est pourquoi il appartient aux hommes de dispenser les sacrements et de les administrer, tandis que cela n'appartient pas aux anges. Cependant il faut savoir que comme Dieu n'a pas attaché sa vertu aux sacrements au point de ne pouvoir sans eux produire leur effet, de même il n'a pas non plus enchaîné sa vertu aux ministres de l'Eglise, de manière qu'il ne puisse pas donner aux anges la puissance de les administrer. Et parce que les bons anges sont les messagers de la vérité, s'ils remplissaient un ministère sacramentel, on devrait croire le sacrement valide (1), car il devrait être constant que cet acte s'est fait par la volonté de Dieu. C'est ainsi qu'on dit qu'il y a des temples qui ont de consacrés par le ministère des anges (2). Mais si les démons qui sont des esprits de mensonge remplissaient un ministère semblable, on ne devrait pas croire à sa validité.

(I) Sit y a nécessité d'administrer un sacrement, il faut qu'il s'eicitc à la contrition parfaite, et qu'il prenne la résolution de se confesser le plus tôt possible.

- O sentiment est controversé. L'opinion de saint 1 humas a pour clic un très-grand nombre de docteurs, mais il nous semble qu'elle doit être rest re in te au cas où l'on serait tellement pressé, qu’ on croirait n'avoir pas le temps de s'exciter à la contrition parfaite (\ oy. saint Alphonse, Théol. morale, liv. vii, n' 52).

31 II faut répondre au premier argument, que ce que les hommes font d'une manière inférieure, c'est-à-dire par des sacrements sensibles qui sont proportionnés à leur nature, les anges le font comme ministres supérieurs d'une manière plus élevée, c'est-à-dire en purifiant, en illuminant et en perfectionnant invisiblement.

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Il faut répondre au second, que les saints qui sont dans le ciel ressemblent aux anges quant à la participation de la gloire, mais non quant à la condition de la nature, et par conséquent ils ne doivent pas leur ressembler non plus relativement aux sacrements.

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Il faut répondre au troisième, que les méchants n'ont pas le pouvoir d'administrer les sacrements, parce que leur malice les rend membres du diable (3). C'est pour cela qu'on ne peut pas dire que le diable qui est leur chef le peut à plus forte raison.



ARTICLE viii. — l'intention du ministre est-elle requise pour la confection du sacrement (4) ?

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1 Il semble que l'intention du ministre ne soit pas requise pour la confection du sacrement. Carie ministre opère dans les sacrements d'une manière instrumentale. Or, l'action n'est pas rendue parfaite selon l'intention de l'instrument, mais selon l'intention de l'agent principal. L'intention du ministre n'est donc pas requise pour la confection du sacrement.

2
L'intention d'un individu ne peut être connue d'un autre. Si donc l'intention du ministre était requise pour la confection du sacrement, celui qui s'approche d'un sacrement ne pourrait savoir s'il l'a reçu, et par conséquent il ne pourrait être certain de son salut, surtout quand il s'agit de sacrements qui sont de nécessité de salut, comme nous le dirons (quest. lxv, art. 3 et 4).

3
L'intention de l'homme ne peut se porter sur une chose à laquelle il n'est pas attentif. Or, quelquefois ceux qui administrent les sacrements ne sont pas attentifs à ce qu'ils disent, ni à ce qu'ils font, mais ils pensent à d'autres choses. Par conséquent d'après cette doctrine le sacrement ne serait l'as conféré à cause du défaut d'intention.

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Mais c'est le contraire. Les choses qui sont en dehors de l'intention sont éventuelles; ce qu'on ne doit pas dire de l'opération des sacrements. Ils requièrent donc l'intention du ministre.


CONCLUSION. — Puisque les choses qui se font dans les sacrements peuvent être faites de différentes maniérés et par des causes différentes, l'intention du ministre ou de l'Eglise est nécessaire dans l'administration des sacrements.

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Il faut répondre que quand une chose se rapporte à plusieurs autres, il faut qu’ elle soit déterminée par quelque moyen à une seule, pour que celle- ce soit faite. Or, les choses qui se font dans les sacrements peuvent être faites de différentes manières. Ainsi l'ablution de l'eau qui a lieu dans le baptême peut avoir pour but de purifier le corps, d'être utile à la santé, de servir d'amusement et de produire beaucoup d'autres effets semblables. C'est pourquoi il faut qu'elle soit appliquée à une fin, c'est-à-dire à l'effet sacramentel par l'intention de celui qui en fait usage : et cette intention est exprimée par les paroles que l'on prononce dans les sacrements, comme quand on dit : Au nom du Père, etc.

(1) Nicéphore rapporte (Ilitt. ccdes. lib ii cap. 20) que saint Amphiloquc fut consacré évêque par tics anges, et que les autres évêques considérèrent son ordination comme valide. ]),,„» |„ bulle de canonisation de sainte Agnès de Monte- puleiano, on lit qu'un ange lui a souvent donné l'eucharistie.
(2) On rapporte que la basilique de Saint-Michel fut ainsi consacrée.
(5) S'ils administrent validement les sacrements, c'est comme ministres du Christ, et non parce que leur malice les rend membres du démon.
(4) Il  est de foi que l'intention du ministre est requise pour la validité dit sacrement. C'est ce qu'expriment positivement le concile de Florence ¦ (Décret. sup. armeniuMt i) et le concile de Trente ^scís. vii, can. 2).

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Il faut répondre au premier argument, que l'instrument inanimé n'a pas d'intention par rapport à l'effet qu'il produit, mais à la place de l'intention se trouve le mouvement que l'agent principal lui communique. Mais un instrument animé, comme l'est le ministre, n'est pas seulement mû, il se meut encore lui-même d'une certaine manière, en ce sens que par sa volonté il meut ses membres pour qu'ils opèrent. C'est pourquoi il faut qu'il ait l'intention de se soumettre à l'agent principal, c'est-à-dire de faire ce que font le Christ et l'Eglise (1).

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Il faut répondre au second, qu'à cet égard il y a deux sortes d'opinion . Car les uns disent qu'il faut dans le ministre une intention mentale -, que si cette intention fait défaut le sacrement est nul ; mais que pour les enfants qui n'ont pas l'intention de s'approcher du sacrement, le Christ qui baptise intérieurement y supplée ; au lieu que dans les adultes qui ont l'intention de recevoir le sacrement, c'est la foi et la dévotion qui suppléent à ce défaut. Cette opinion serait assez plausible quant au dernier effet qui est la justification des péchés; mais quant à l'effet qui est la chose et le sacrement, c'est-à-dire quant au caractère, il ne semble pas qu'il puisse être suppléé par la dévotion de celui qui reçoit le sacrement ; parce que le caractère n'est jamais imprimé que par un sacrement. — C'est pourquoi d'autres disent avec plus de raison que le ministre du sacrement agit au nom de toute l'Eglise qu'il représente; et que dans les paroles qu'il prononce se trouve exprimée l'intention de l'Eglise, qui Suffit pour la perfection du sacrement (2), si le contraire n'est exprimé extérieurement de la part de celui qui l'administre ou de celui qui le reçoit.

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Il faut répondre au troisième, que quoique celui qui pense autre chose n'ait pas d'intention actuelle, il a néanmoins l'intention habituelle (3) qui suffit pour la perfection du sacrement. Par exemple, quand le prêtre se présente pour baptiser, il a l'intention de faire à l'égard de celui qui doit recevoir le baptême ce que fait l'Eglise. Par conséquent si dans le cours de l'action sa pensée est emportée ailleurs, le sacrement est néanmoins conféré en vertu de l'intention première. Cependant celui qui administre les sacrements doit faire tous ses efforts pour avoir l'intention actuelle; mais cela n'est pas totalement au pouvoir de l'homme, parce que, contre son intention, quand il veut beaucoup s'appliquer, il commence à penser à d'autres choses, d'après ces paroles (Ps 39,13) : Mon coeur m'a abandonné.

(t) Ce sont les expressions qu'emploie le concile de Trente : Si quit dixerit, in miniitrit, dum sacramenta conficiunt et conferunt, non requiri intentionem laltem faciendi quod facit Ecdesia ; anathema tit.
(2) Cette opiuionest controversée. Plusieurs docteurs pensent que le sacrcment est valide quand in fait extérieurement ce que l'Eglise fait, quand même on dirait intérieurement qu'on ne veut pas conférer le sacrement. Mais le sentiment contraire est suivi par un plus grand nombre de théologiens, et il parait plus probable, surtout d'après cette proposition, condamnée par Alexandrc\ III. Valet baptismus collatus à ministro qui omnem actum externum formamque baptizandi observat, intus vero in corde suo apud se revolvit : Non intendo quod facit Ecdesia.
(5) Par l'intention habituelle, saint Thomas entend ici ce que les théologiens appclleut l'intention virtuelle.




III Pars (Drioux 1852) 1282