III Pars (Drioux 1852) 1526

ARTICLE VI. — le corps du christ est-il dans l'eucharistie d'une manière mobile (2)?

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1 Il semble que le corps du Christ soit dans l'eucharistie d'une manière mobile. Car Aristote dit (Top. lib. n, cap. 3) que quand nous sommes mus, les choses qui sont en nous le sont aussi; ce qui est vrai aussi de la substance spirituelle de l'âme. Or, le Christ est dans ce sacrement, comme nous l'avons vu (art. 1 huj. quaest.). Il est donc dû à son mouvement.

2
La vérité doit répondre à la figure. Or, de l'agneau pascal qui était la figure de l'eucharistie il ne restait rien jusqu'au matin, d'après le précepte de la loi (Ex 12). Par conséquent, si on conserve l'eucharistie jusqu'au lendemain, le corps du Christ n'y est plus, et ainsi il n'est pas d'une manière immobile dans ce sacrement.

3 Si le corps du Christ reste sous ce sacrement jusqu'au lendemain, pour la même raison il y restera pendant tout le temps suivant; car on ne peut pas dire qu'il cesse d'y être, du moment que les espèces cessent d'exister, parce que l'être du corps du Christ ne dépend pas de ces espèces. Cependant le Christ ne subsiste pas sous ce sacrement à tout jamais. Il semble donc qu'immédiatement dès le lendemain ou peu de temps après, il cesse d'être dans l'eucharistie, et par conséquent il semble qu'il soit dans ce sacrement d'une manière mobile.

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Mais c'est le contraire. Il  est impossible que le même être soit en retrouvement et en repos, parce qu'alors les contradictoires seraient vraies du même sujet. Or, le corps du Christ est en repos dans le ciel, il n'est donc pas en mouvement dans l'eucharistie.

(I) Le corps du Christ est dans le sacrement avec tous les accidents intérieurs qui adhèrent à son corps, mais il n'y est pas avec ses accidents extérieurs. Et être dans un lieu par rapport à la quantité commensurable n'est qu'une chose accidentelle, parce que c'est un de ses effets qui peut être séparé d'elle, comme nous l'avons observé plus haut, pag. 52.
(2) Cet ARTICLE est une conséquence du précédent, Car le corps du Christ n'étant pas dans l'eucharistie comme dans un lieu proprement dit, il s'ensuit qu'il n'y est d'une manière mobile que par accident : Modo quo convenit corporis Christi esse in loco ratione dimensionum sacramentalium, convenit sibi moveri in loco, dit saint Thomas (Opusc. xi, art. 54).


CONCLUSION. — Puisque le Christ n'est pas dans l'eucharistie comme dans un lieu, il est évident qu'il y est d'une manière immobile par lui-même, mais d'une manière mobile par accident.

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Il faut répondre que quand une chose est une subjectivement et multiple selon son être, rien n'empêche qu'elle ne soit mue sous , un rapport et qu'elle reste immobile sous un autre. Ainsi, pour un corps autre chose est d'être blanc et autre chose d'être grand; par conséquent, il peut être mû selon la blancheur et rester immobile selon la grandeur. — Mais pour le Christ ce n'est pas la même chose d'exister en lui-même et d'exister dans l'eucharistie ; parce que par là même que nous disons qu'il est dans l'eucharistie, on désigne un certain rapport qu'il a avec ce sacrement. Par rapport à cet être le Christ n'est pas mû par lui-même selon le lieu, mais il est mû seulement par accident; parce qu'il n'est pas dans ce sacrement, comme dans un lieu, ainsi que nous l'avons dit (art. préc.), et ce qui n'est pas dans un lieu, n'est pas mû par lui-même dans le lieu, mais il est mû seulement au mouvement de la chose dans laquelle il est (I). Il n'est pas dû non plus par lui-même selon l'être qu'il a dans le sacrement et il ne subit aucun changement; comme celui, par exemple, par lequel il cesserait d'être sous ce sacrement; parce que ce qui a de lui-même un être indéfectible ne peut être un principe de défaillance. Mais si l'autre (2) vient à manquer il cesse d'être en lui ; comme Dieu, dont l'être est indéfectible et immortel, cesse d'être dans une créature corruptible par là même que cette créature cesse d'exister. Ainsi puisque le Christ a de lui-même un être indéfectible et incorruptible, il ne cesse d'être dans l'eucharistie, ni parce qu'il cesse lui-même d'y être, ni par son mouvement local, comme on le voit d'après ce que nous avons dit (art. préc.), mais seulement parce que les espèces de ce sacrement cessent d'exister. D'où il est évident que le Christ absolument parlant est dans ce sacrement d'une manière immobile (3).

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Il faut répondre au premier argument, que cette raison repose sur le mouvement par accident qui fait que ce qui est en nous se meut avec nous. Cependant, il n'en est pas des choses qui peuvent être par elles-mêmes dans un lieu, telles que les corps, comme des choses qui ne peuvent y être par elles-mêmes, telles que les formes et les substances spirituelles. On peut ramener à ce dernier mode ce que nous disons du Christ, quand nous reconnaissons qu'il est mû par accident, selon l'être qu'il a dans l'eucharistie où il n'existe pas comme dans un lieu.

(5) Ainsi le corps du Christ dans l'eucharistie n'est susceptible ni de nourriture, ni d'accroissement, ni de diminution.
(1) Ainsi le corps du Christ dans l'eucharistie n'est mû qu'autant qu'on meut les espèces sous lesquelles il existe réellement.
(2) C'est-à-dire la chose dans laquelle il est

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Il faut répondre au second, qu'il y a des auteurs qui paraissent avoir été frappés de cette raison et qui ont supposé que le corps du Christ ne subsiste pas dans l'eucharistie, si on réserve les espèces pour le lendemain. Saint Cyrille les attaque en disant (hab. in Cat. D. Thomae, sup. illud Luc. xxii: Hoc est corpus meum,)-. Il y en a qui délirent en prétendant que les espèces cessent d'être consacrées, s'il en reste pour le jour suivant; car le corps du Christ ne change pas quand il a été consacré, mais il conserve toujours en lui la vertu de ses bénédictions et sa grâce vivifiante. Il en est de cette consécration comme de toutes les autres qui subsistent d'une manière immuable, tant que les choses consacrées subsistent elles- mêmes, et c'est pour cela qu'on ne les réitère pas. D'ailleurs quoique la vérité réponde à la figure, cependant la figure ne peut pas l'égaler.

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Il faut répondre au troisième, que le corps du Christ reste dans l'eucharistie non-seulement jusqu'au lendemain, mais encore tous les jours suivants tant que les espèces sacramentelles restent (1); du moment qu'elles cessent d'exister, le corps du Christ cesse; aussi d'être sous elles, non parce qu'il en dépend, mais parce que le rapport qu'il avait avec elles est détruit, comme Dieu cesse d'être le Seigneur d'une créature qui n'existe plus.



ARTICLE VII.—le corps du christ, selon qu'il est dans l'eucharistie, peut-il être vu au moins par l'oeil d'un corps glorifié?

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l Il semble que le corps du Christ, selon qu'il existe dans l'eucharistie, puisse être vu par un oeil corporel, du moins par un oeil glorifié. Car notre oeil est empêché de voir le corps du Christ qui existe dans l'eucharistie à cause des espèces sacramentelles qui le voilent. Or, un oeil glorifié ne peut être empêché par rien de voir tous les corps selon qu'ils existent. Un oeil glorifié peut donc voir le corps du Christ selon qu'il existe dans le sacrement.

2
Les corps glorieux des saints seront conformes au corps glorieux du Christ, selon l'expression de saint Paul (Philip. m, 21). Or, l'oeil du Christ se voit lui-même, selon qu'il est dans l'eucharistie. Pour la même raison tout oeil glorifié peut donc le voir aussi.

3
Les saints dans la résurrection seront égaux aux anges, comme le dit l'Evangile (Luc. xx). Or, les anges voient le corps du Christ, selon qu'il existe dans l'eucharistie : car on trouve que les démons eux-mêmes témoignent leur respect à ce sacrement et qu'ils le craignent. Pour la même raison, l'oeil glorifié peut donc voir le Christ, selon qu'il est dans ce sacrement.

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Mais c'est le contraire. La même chose ne peut être vue simultanément par le même sujet sous des espèces diverses. Or, l'oeil glorifié voit toujours le Christ, selon qu'il existe dans son espèce propre, d'après ces paroles (Is 38,17, Ils verront le roi dans sa gloire. Il  semble donc qu'il ne voie pas le Christ, selon qu'il existe sous les espèces sacramentelles.


CONCLUSION. —Le Christ étant dans l'eucharistie à la manière de la substance, il ne peut être vu ni par les yeux du corps, ni par l'entendement de l'homme ici-bas; on ne peut le voir que par la foi. Cependant l'entendement des bienheureux peut le voir par la vision de l'essence divine.

21 Il faut répondre que l'oeil s'entend de deux manières : il y a l'oeil corporel qui s'entend dans le sens propre et l'oeil intellectuel qui s'entend par analogie. Le corps du Christ selon qu'il existe dans l'eucharistie ne peut être vu d'aucune manière par l'oeil corporel. 1° Parce qu'un corps visible change le milieu par ses accidents. Or, les accidents du corps du Christ sont dans l'eucharistie par l'intermédiaire de la substance, de telle sorte qu'ils n'ont de rapport immédiat ni avec ce sacrement, ni avec les corps qui environnent celui du Christ. C'est pourquoi ils ne peuvent modifier le milieu par lequel la vision s'opère et se rendre ainsi perceptibles à un oeil corporel. 2° Parce que, comme nous l'avons dit (art. 4 huj. quaest. ad 3), le corps du Christ est dans l'eucharistie à la manière de la substance. Or, la substance comme telle n'est pas visible à l'oeil corporel, et n'est soumise à aucun sens; elle échappe même à l'imagination et ne peut être perçue que par l'intellect qui a pour objet l'essence des choses (1) (De anima, lib. iii, text. 26).—C'est pourquoi, à proprement parler, le corps du Christ selon le mode d'ôtre qu'il a dans l'eucharistie ne peut être perçu ni parles sens, ni par l'imagination; il ne peut l'être que par l'intellect ou l'entendement qu'on appelle l'oeil de l'esprit. Mais il est perçu de différentes manières par les divers entendements. Car le mode d'être par lequel le Christ est dans ce sacrement, étant absolument surnaturel, il est visible en lui-même pour l'entendement surnaturel, c'est-à-dire pour l'entendement divin. Par conséquent, il peut être vu aussi par l'entendement bienheureux de l'ange ou de l'homme, qui, selon qu'il participe à la lumière de l'entendement divin, voit les choses qui sont surnaturelles par la vision de l'essence divine (2). Mais l'entendement de l'homme ici-bas ne peut le voir, sinon par la foi, comme toutes les autres choses surnaturelles. L'entendement de l'ange n'est pas non plus capable par ses moyens naturels de le voir. Par conséquent, les démons ne peuvent le voir dans ce sacrement par leur entendement qu'au moyen de la foi (3), à laquelle ils ne donnent pas volontairement leur assentiment, mais dont ils sont convaincus par l'évidence des preuves, d'après cette expression de saint Jacques (Jc 2,19) : Les démons croient et ils tremblent.

(0 Ce point de doctrine foi. et il a été ainsi décidé par le concile de Trente i Si quis dixerit, peracta consecratione, in admirabili Eucharistiae sacramento non esse corpus et sanguinem Domini nostri Jesu Christi, sed tantum in usu, dum sumitur, non autem ante vel post, et in hostiis seu particulis consecratis , quae post communionem reservantur vel supersunt , non remanere verum corpus Domini; anathema sit (sess, xiii, can. 4).

31 Il faut répondre au premier argument, que notre oeil corporel est empêché par les espèces sacramentelles de voir le corps du Christ qui existe sous elles, non-seulement parce qu'elles le couvrent ( comme nous sommes empêchés de voir ce qui est couvert d'un voile quelconque); mais parce que son corps n'est pas en rapport avec le milieu qui environne ce sacrement par l'intermédiaire de ses accidents propres, mais par l'intermédiaire des espèces sacramentelles.

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Il faut répondre au second, que l'oeil corporel du Christ se voit lui-même existant sous le sacrement (4). Cependant, il ne peut pas voir la manière d'être par laquelle il y est, ce qui n'appartient qu'à l'entendement. Il n'y a d'ailleurs pas de ressemblance à établir entre l'oeil du Christ et celui d'un bienheureux dans la gloire. Car l'oeil du Christ est lui-même dans le sacrement, et un autre oeil glorifié ne lui ressemble en rien sous ce rapport.

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Il faut répondre au troisième, qu'un ange bon ou mauvais ne peut voir quelque chose avec l'oeil corporel, mais seulement avec l'oeil intellectuel. Il n'y a donc pas de parité, comme on le voit d'après ce que nous avons dit (in corp. art.).

(1) Ces arguments démontrent clairement que l'oeil corporel ne peut pas voir naturellement le corps du Christ dans l'eucharistie, et à cet égard tous les théologiens sont d'accord.
(2) Ainsi toute intelligence créée a besoin d'une lumière surnaturelle pour le voir, parce que, par là même que cet objet est surnaturel, il surpasse la portée de tout entendement créé.
(5) Il ne s'agit pas du don gratuit et infus de la foi qui n'existe pas dans les démens, mais de cette croyance qui résulte des preuves extérieures qui obligent l'entendement à donner son assentiment à une chose.
(4) 1) après ce passage de saint Thomas, les thomistes prétendent généralement que par la puissance absolue de Dieu l'oeil corporel pourrait voir le corps du Christ dans l'eucharistie. Cependant quelques-uns d'entre eux ne sont pas de ce sentiment, entre autres Jean de Saint- Thomas.



ARTICLE VIII. — QUAND PAR MIRACLE ON VOIT DANS L'EUCHARISTIE DE LA CHAIR OU UN ENFANT, LE CORPS DU CHRIST Y EST-I1, VÉRITABLEMENT?

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1 Il semble que quand dans l'eucharistie on voit par mirade de la chair ou un enfant, le corps du Christ n'y soit pas véritablement. Car le corps du Christ cesse d'être sous ce sacrement, quand les espèces sacramentelles cessent d'exister, comme nous l'avons dit (art. 6 huj. quaest.). Or, quand on voit de la chair ou un enfant, les espèces sacramentelles cessent d'exister. Le corps du Christ n'est donc plus là véritablement.

2
Partout où est le corps du Christ, il est là, ou sous son espèce propre, ou sous l'espèce du sacrement. Or, quand ces apparitions ont lieu, il est évident que le Christ n'est pas là sous son espèce propre ; parce que l'eucharistie renferme le Christ tout entier, qui reste dans son intégrité avec la forme sous laquelle il est monté au ciel. Et comme ce que l'on voit miraculeusement dans ce sacrement paraît être, tantôt un peu de chair et tantôt un petit enfant, il est évident qu'il n'est pas là non plus sous l'espèce sacramentelle qui est l'espèce du pain ou du vin. Il semble donc que le corps du Christ ne soit là d'aucune manière.

3
Le corps du Christ commence à être dans l'eucharistie par la consécration et la conversion, comme nous l'avons dit (quest. lxxv, art. 2, 3 et 4), Or, la chair et le sang qu'on voit miraculeusement n'ont pas été consacrés, ni convertis au corps véritable et au sang du Christ. Le corps et le sang du Christ n'existent donc pas sous ces espèces.

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Mais c'est le contraire. Quand une pareille apparition a lieu, on témoigne le même respect à ce qui apparaît qu'à ce qui existait d'abord; ce qu'on ne ferait pas, s'il n'y avait pas là le Christ, pour lequel nous avons un culte de latrie. Quand cette apparition a lieu, le Christ existe donc dans l'eucharistie.


CONCLUSION. — Tant que les dimensions qui existaient auparavant subsistent dans l'eucharistie, quoiqu'on y voie miraculeusement un enfant ou de la chair pour montrer la vérité du corps du Christ, néanmoins le corps du Christ y est contenu.

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Il faut répondre qu'il y a deux sortes d'apparition par lesquelles on voit par mirade de la chair, ou du sang, ou un enfant dans l'eucharistie. Car quelquefois celte apparition provient de ceux qui la voient. Leurs yeux sont impressionnés comme s'ils voyaient extérieurement, d'une manière positive, de la chair, du sang ou un enfant, sans cependant qu'il y ait rien de changé du côté du sacrement. C'est ce qui a lieu quand l'un voit le sacrement sous l'apparence de la chair ou d'un enfant, tandis que les autres le voient comme il était auparavant sous l'espèce du pain; ou quand la même personne le voit dans un moment sous l'espèce de la chair ou d'un enfant, et qu'ensuite elle le voit sous l'espèce du pain (1). Il n'y a pas cependant en cela d'erreur, comme il arrive dans les prestiges des magiciens. Car cette apparence se forme surnaturellement dans l'oeil pour figurer une vérité, c'est-à-dire pour manifester que le corps du Christ est véritablement dans l'eucharistie. C'est ainsi que le Christ apparut aux disciples qui allaient à Emmaus sans les tromper. Car saint Augustin dit (Lib. de quaest. Evang. lib. n) que quand une fiction se rapporte à une signification, ce n'est pas un mensonge, mais elle est une figure de la vérité. Et comme dans ce cas il n'y a rien de changé du côté du sacrement, il est évident que le Christ n'a pas cessé d'y être, pendant que cette apparition s'est faite.—D'autres fois cette apparition ne résulte pas seulement du changement qui s'opère dans la vue, mais de l'espèce qu'on voit et qui existe réellement à l'extérieur. Il en est ainsi quand tout le monde voit le sacrement sous cette espèce, et qu'il n'y reste pas seulement un instant, mais pendant un long temps. Dans ce cas, il y en a qui disent que c'est l'espèce propre du corps du Christ. Ce n'est pas une difficulté, disent-ils, si quelquefois on ne voit pas là le Christ tout entier, mais seulement une portion de chair, ou si on ne le voit pas sous la forme d'un jeune homme, mais sous celle d'un enfant, parce qu'il est au pouvoir d'un corps glorieux d'être vu par l'oeil qui n'est pas glorifié, soit dans sa totalité, soit en partie, soit sous sa propre figure, soit sous une figure étrangère, comme nous le dirons (sup. quest. Lxxxv,art. 2 et 3). Mais ce sentiment ne paraît pas admissible: Parce que le corps du Christ ne peut être vu sous sa propre espèce que dans un seul lieu qui le renferme d'une manière définie. Par conséquent, puisqu'on le voit sous sa propre espèce et qu'on l'adore dans les cieux, on ne le voit pas ainsi dans le sacrement de l'autel (1). 2° Parce que le corps glorieux, qui apparaît comme il veut, disparait aussi quand il veut après son apparition. C'est ainsi que l'Evangile nous dit (Lc 24) que le Seigneur s'évanouit aux yeux de ses disciples. Au contraire, ce qui apparaît sous l'espèce de la chair dans l'eucharistie reste longtemps, et on fit même qu'on l'a quelquefois renfermé, et que, d'après le conseil de beaucoup d'évêques, on l'a conservé dans un vase, ce qu'il ne serait pas permis de penser du Christ selon sa propre espèce. C'est pourquoi il faut dire que les dimensions qui avaient auparavant existé subsistant, il se fait miraculeusement un changement à l'égard des autres accidents, comme la figure, la couleur et les autres manières d'être semblables, de telle sorte qu'on voit de la chair, ou du sang, ou un enfant (2). Et comme nous l'avons dit plus haut, ce n'est pas une tromperie, parce que ce changement se produit pour figurer une vérité ; par exemple, pour montrer par cette apparition miraculeuse que le corps et le sang du Christ existent véritablement dans le sacrement. Par conséquent les dimensions qui sont, comme nous le dirons (quest. seq. art. 2), les fondements des autres accidents restant, le corps du Christ reste véritablement dans l'eucharistie.

(I) Jean Diacre rapporte un fait semblable dans la vie de saint Grégoire (lib. u, cap. 41). Il raconte qu’une hostie parut être de la chair, à la prière du saint, et qu'ensuite on la vit sous l'apparence ou l'espèce du pain, telle qu'elle était auparavant.

31 Il faut répondre au premier argument, que cette apparition ayant lieu, les espèces sacramentelles restent quelquefois totalement en elles-mêmes, et d'autres fois elles subsistent selon ce qu'il y a de principal en elles, comme nous l'avons dit (in corp. art.).

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Il faut répondre au second, que dans ces apparitions, comme nous l'avons dit (in corp. art.), on ne voit pas l'espèce propre du Christ, mais une espèce miraculeusement formée, soit dans les yeux des spectateurs, soit aussi dans les dimensions sacramentelles elles-mêmes (3), comme nous l'avons observé (ibid.).

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Il faut répondre au troisième, que les dimensions du pain et du vin consacré subsistent, mais un changement se fait à leur égard par mirade, quant aux autres accidents, comme nous l'avons dit (quest. lxxv, art. 5).

(1) Saint Thomas n'admet pas qu'un corps puisse être d'une manière circonscrite dans plusieurs lieux; et d'ailleurs, quand la chose serait possible, elle demanderait un mirade qu'il n'est nullement nécessaire d'admettre ici.
(2) Mais, d'après saint Thomas, cette chair ou ce sang n'est ni la chair ni le sang du Christ ; elle est seulement le signe de sa présence, et le corps du Christ n'est véritablement alors sous l'espèce qu'autant que l'espèce subsiste elle-même malgré ces changements extérieurs.
(5) Si ce sang ou cette chair sont conservés, on ne doit pas leur rendre les mêmes honneurs qu'au corps du Christ lui-même; on doit seulement les honorer comme son signe ou son vêlement.




QUESTION 77:des accidents qui restent dans l'eucharistie.

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Nous devons maintenant nous occuper des accidents qui restent dans l'eucharistie. — A cet égard huit questions se présentent: 1° Les accidents qui restent sont- ils sans sujet P — 2° La quantité commensurable est-elle le sujet des autres accidents P — 3° Ces accidents peuvent-ils modifier un corps extérieur? — 4* Peuvent-ils être corrompus? — 5° Peuvent-ils engendrer quelque chose? — 6° Peuvent-ils nourrir P — 7° Du fractionnement du pain consacré. — 8" Peut-on mêler quelque chose au vin qui est consacré?


ARTICLE I.—les accidents restent-ils sans sujet dans l'eucharistie (4)?

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1 Il semble que les accidents ne demeurent pas dans l'eucharistie sans sujet. Car il ne doit rien y avoir de désordonné ou de trompeur dans ce sacrement de vérité. Or, il est contraire à Tordre de choses que Dieu a établi dans la nature que les accidents existent sans sujet, et il semble qu'il y ait en cela une certaine fausseté, puisque les accidents sont naturellement les signes de la nature du sujet. Il n'y a donc pas dans l'eucharistie d'accidents sans sujet.

2
Il ne peut se faire, même par mirade, que la définition d'une chose en soit séparée, ou que la définition d'une chose convienne à une autre -, par exemple, que l'homme, tout en restant homme, soit un animal irraisonnable. Car il s'ensuivrait que les contradictoires existeraient simultanément, puisque ce que signifie le nom est la définition de la chose, comme on le voit (Met. lib. iv, text. 28). Or, il appartient à la définition de l'accident qu'il existe dans un sujet, tandis qu'il appartient à la définition de la substance qu'elle subsiste par elle-même, non dans un sujet. Il ne peut donc pas se faire par mirade que les accidents existent dans l'eucharistie sans sujet.

3
L'accident est individualisé d'après le sujet. Si donc les accidents demeuraient dans l'eucharistie sans sujet, ils ne seraient pas des individus, mais des universaux ; ce qui est faux évidemment, parce qu'alors ils ne seraient pas des choses sensibles, mais seulement des choses intelligibles.

4
Les accidents n'acquièrent pas par la consécration une composition. Or, avant la consécration ils n'étaient composés ni de matière et de forme, ni de l'essence et du mode. Ils ne sont donc pas non plus composés de l'une de ces manières après la consécration, ce qui répugne ; parce qu'alors ils seraient plus simples que les anges, tandis qu'ils sont des choses sensibles. Les accidents ne demeurent donc pas dans l'eucharistie sans sujet.

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Mais c'est le contraire. Saint Grégoire dit (Homil. pasch. id. hab. Lan- franc. in Lib. de corp. et sang. Dom. cap. 20) que les espèces sacramentelles sont les noms de ces choses qui ont existé auparavant, c'est-à-dire du pain et du vin. Et puisque la substance du pain et du vin ne subsiste plus, il semble que ces espèces demeurent sans sujet.


CONCLUSION. — Les accidents du pain et du vin demeurent dans l'eucharistie sans exister dans un sujet, mais ils existent sans sujet par la seule puissance de Dieu.

l'étendue est de l'essence des corps, sont obligés de donner d'autres explications que Billuart expose et réfute très-longuement (Dissert, i, art. 6,12).

(D) Il y a sur cette question différents sentiments- Saint Thomas et tous les théologiens scolastiques qui suivent la doctrine péripatéticienne distinguent la substance et les accidents qu'ils appellent absolus. Les cartésiens, qui croient que

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Il faut répondre que les accidents du pain et du vin qui existent dans l'eucharistie après la consécration d'après la perception des sens, ne sont pas, comme dans un sujet, dans la substance du pain et du vin qui ne subsiste plus, comme nous l'avons vu (quest. lxxv, art. 2 et 6) ; ils ne sont pas non plus dans la forme substantielle qui ne subsiste plus et qui, quand même elle subsisterait, ne pourrait être leur sujet, comme le prouve Boëee (De Trin. lib. i). Il est évident aussi que ces accidents ne sont pas dans la substance du corps et du sang du Christ, comme dans un sujet, parce que la substance du corps humain ne peut être affectée par ces accidents d'aucune manière, et il n'est pas non plus possible que le corps du Christ qui est glorieux et impassible soit modifié de manière à recevoir des qualités semblables. — II y en a qui disent qu'ils sont dans l'air environnant comme dans un sujet. Mais il ne peut en être ainsi. 1 ° Parce que l'air n'est pas susceptible de ces accidents. 2° Parce que ces accidents ne sont pas où l'air existe; et même l'air se déplace au mouvement de ces espèces. 3° Parce que les accidents ne passent pas d'un sujet dans un autre, de manière que le même accident numériquement qui a été d'abord dans un sujet passe ensuite dans un autre. Car l'accident tire son nombre du sujet ; par conséquent, il ne peut se faire que tout en restant le même numériquement il soit tantôt dans un sujet et tantôt dans un autre, i" Parce que l'air n'étant pas dépouillé de ses accidents propres, il aurait tout à la fois ses accidents propres et des accidents étrangers. On ne peut pas dire que cela se fasse miraculeusement par la vertu de la consécration, parce que les paroles de la consécration ne le signifient pas et qu'elles ne produisent cependant que ce qu'elles signifient.— C'est pourquoi il reste à dire que les accidents demeurent dans l'eucharistie sans sujet; ce qui peut se faire en effet par la puissance divine. Car, puisque l'effet dépend plus de la cause première que de la cause seconde; Dieu qui est la cause première de la substance et de l'accident peut conserver par son infinie vertu l'accident, en faisant disparaître la substance par laquelle il le conservait, comme par sa propre cause; comme il peut aussi produire les autres effets des causes naturelles sans ces causes elles-mêmes (1). C'est ainsi qu'il a formé un corps humain dans le sein de la Vierge sans le sperme de l'homme.

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Il faut répondre au premier argument, que rien n'empêche qu'une chose soit ordonnée selon la loi commune de la nature, et que cependant son contraire soit ordonné selon un privilège spécial de la grâce, comme on le voit pour la résurrection des morts et pour la vue rendue aux aveugles. C'est ainsi que dans les choses humaines on accorde également à certaines personnes des faveurs d'après un privilège spécial en dehors de la loi commune. De même aussi, quoiqu'il soit conforme à l'ordre commun de la nature que l'accident existe dans un sujet, cependant, d'après une disposition spéciale selon l'ordre de la grâce, les accidents existent dans l'eucharistie sans sujet, pour les raisons que nous avons données (in corp. art.).

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Il faut répondre au second, que l'être n'étant pas un genre, ce qu'est l'être ne peut être l'essence de la substance ou de l'accident. Par conséquent, on ne peut définir la substance, un être par soi-même sans sujet, ni l'accident un être dans un sujet. Mais il convient à la quiddité ou à l'essence de la substance d'avoir l'être non dans un sujet; et il convient au contraire à la quiddité ou à l'essence de l'accident de l'avoir dans un sujet. Or, dans l'eucharistie les accidents n'ont pas par la force de leur essence la propriété de n'être pas dans un sujet, mais ils la tiennent delà puissance divine qui les supporte. C'est pourquoi ils ne cessent pas d'être des accidents ; parce qu'on peut toujours leur appliquer la définition de l'accident qui est l'aptitude qu'ils ont pour un sujet. Cette aptitude

(1) Lsihnitz donne à peu près la même explication que saint Thomas (Syst. theolog. p. 228).

reste toujours en eux, quoiqu'ils ne soient pas actuellement inhérents à un sujet, et la définition de la substance ne leur convient pas (i).

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Il faut répondre au troisième, que ces accidents ont acquis l'être individuel dans la substance du pain et du vin. Cette substance étant changée au corps et au sang du Christ, ils restent par la vertu divine dans cet être individualisé (2) qu'ils avaient auparavant. Par conséquent, ils n'en sont pas moins singuliers et sensibles.

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Il faut répondre au quatrième, que ces accidents, tant que la substance du pain et du vin est restée, n'avaient pas eux-mêmes l'être, ni les autres accidents, mais leurs sujets avaient un certain être par eux ; comme la neige est blanche par la blancheur. Mais, après la consécration, les accidents eux- mêmes qui restent ont l'être ; par conséquent ils sont composés de l'être et de ce qui est, comme nous l'avons dit des anges (part. I, quest. l, art. 2 ad 3), et de plus ils sont composés départies qui ont une certaine quantité (3).



 ARTICLE II.—dans l'eucharistie la quantité commensurable du pain ou du vin est-elle le sujet des autres accidents (4)?

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1 Il semble que dans l'eucharistie la quantité commensurable du pain ou du vin ne soit pas le sujet des autres accidents. En effet le sujet d'un accident n'est pas un accident. Car aucune forme ne peut être un sujet; ce rôle est une des propriétés qui appartiennent à la matière. Or, la quantité commensurable est un accident. Elle ne peut donc être le sujet des autres accidents.

2
Comme la quantité s'individualise d'après la substance, ainsi il en est des autres accidents. Si donc la quantité commensurable du pain ou du vin reste individualisée selon l'être qu'elle a eu auparavant et dans lequel elle est conservée, pour la même raison les autres accidents restent aussi individualisés selon l'être qu'ils avaient auparavant dans la substance. Ils ne sont donc pas dans la quantité commensurable, comme dans leur sujet, puisque tout accident est individualisé par son sujet.

3
Parmi les autres accidents du pain et du vin qui restent, les sens perçoivent la rareté et la densité, qui ne peuvent être dans la quantité commensurable qui existe indépendamment de la matière. Car, ce qui est rare c'est ce qui a peu de matière sous de grandes dimensions ; et ce qui est dense c'est ce qui a beaucoup de matière sous un petit volume, comme le dit Aristote (Phys. lib. iv, text. 84). Il ne semble donc pas que la quantité commensurable puisse être le sujet des accidents qui demeurent dans l'eucharistie.

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La quantité séparée du sujet paraît être la quantité mathématique qui n'est pas le sujet des qualités sensibles. Par conséquent, puisque les accidents qui restent dans l'eucharistie sont sensibles, il semble qu'ils ne puissent pas y exister dans la quantité commensurable du pain et du vin qui subsiste après la consécration, comme dans leur sujet.

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Mais c'est le contraire. Les qualités ne sont divisibles que par accident, c'est-à-dire en raison du sujet. Or, les qualités qui restent dans l'eucharistie sont divisées par la division de la quantité commensurable, comme les sens le prouvent. Cette quantité est donc le sujet des accidents qui restent dans ce sacrement.

(1) L'essence de l'accident, d'après saint Thomas, consiste à être apte à exister dans un sujet, mais non à exister réellement et actuellement de la sorte, comme il est de la nature de la substance d'être apte à exister naturellement sans sujet.
(2) Les accidents se trouvent individualisés à cause du rapport qu'ils conservent avec le même sujet.
(3) C'est ce qui fait qu'ils ne sont pas aussi simples que les anges.
(4) D'après saint Thomas, la quantité commensurable est le principe et la source de tous les autres accidents. Ainsi c'est un mirade qu'elle subsiste séparée de la substance ; mais une fois que la quantité commensurable existe, les autres accidents en découlent naturellement.


CONCLUSION. — Tous les autres accidents qui restent dans l'eucharistie, quoiqu'ils ne soient dans aucune substance, sont cependant dans la quantité commensurable du pain et du vin comme dans leur sujet.

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Il faut répondre qu'il est nécessaire de dire que les autres accidents qui restent dans l'eucharistie sont dans la quantité commensurable du pain et du vin comme dans leur sujet. 4° Parce que d'après nos sens il y a là une étendue qui est colorée et qui est affectée des autres accidents, et que dans ce cas. les sens ne nous trompent pas. 2° Parce que la première disposition de la matière est la quantité commensurable. Ce qui a fait supposer à Platon (Met. Arist. lib. i, text. 6 et 7) que les premières différences delà matière sont la grandeur et la petitesse; et parce que la matière est le premier sujet, il s'ensuit que tous les autres accidents se rapportent au sujet, par l'intermédiaire de la quantité commensurable, comme on dit que le premier sujet de la couleur est la surface, et c'est pour ce motif qu'il y a des philosophes qui ont cru que les dimensions étaient les substances des corps, comme on le voit (Met. lib. i, text. 19 et seq.). Et comme en enlevant le sujet les accidents restent selon l'être qu'ils avaient auparavant, il en résulte que tous les accidents demeurent fondés sur la quantité commensurable. 3° Parce que le sujet étant le principe de l'individualisation des accidents, il faut que ce qu'on pose comme le sujet de quelques accidents soit un principe d'individualisation de quelque manière. Or, il est de l'essence de l'individu qu'il ne puisse exister dans plusieurs, ce qui arrive de deux manières. 4° Parce qu'il n'est pas fait pour être dans un autre : c'est ainsi que les formes immatérielles séparées qui subsistent par soi, sont individuelles par elles-mêmes. 2° Parce qu'une forme substantielle ou accidentelle est à la vérité faite pour être dans quelque chose, mais non dans plusieurs (4) : telle est la blancheur particulière qui se trouve dans un corps déterminé. Sous le premier rapport, la matière est un principe d'individualisation pour toutes les formes qui lui sont inhérentes; car ces formes étant d'elles-mêmes faites pour être dans quelque chose comme dans un sujet, du moment que l'une d'elles est reçue dans une matière qui n'est pas dans un autre être, alors cette forme ainsi existante ne peut plus être dans un autre sujet. Sous le second rapport, on doit dire que la quantité commensurable est un principe d'individualisation. Car une chose est faite pour être dans un seul sujet, par là même que ce sujet est indivis en lui-même et divisé de tout autre. Or, la division ne se rapporte à la substance qu'en raison de la quantité, comme le dit Aristote (Phys. lib. i, text. 1S et 16). C'est pourquoi la quantité commensurable est un principe d'individualisation pour ces formes, entant qu'il y’a des formes numériquement diverses dans les différentes parties de la matière. Par conséquent, la quantité commensurable a par elle-même une certaine individualisation; de telle sorte que nous pouvons imaginer plusieurs lignes de la même espèce, mais différentes de position (2), ce qui rentre dans la nature de cette quantité. Car il convient à la dimension d'être une quantité ayant une position. C'est pourquoi la quantité commensurable peut être le sujet des autres accidents plutôt que réciproquement.

par conséquent elles n'existent individuellement qu'en raison de leur position, et leur position se rapporte à la quantité commensurable.

(1) Comme les natures générales qui peuvent exister clans plusieurs sujets, comme la nature humaine qui existe dans une foule d'individus.

(2) Elles ne sont différentes et distinctes, et

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Il faut répondre au premier argument, qu'un accident ne peut pas être par lui-même le sujet d'un autre accident, parce qu'il n'existe pas par lui-même. Mais selon qu'il existe dans un autre, on dit qu'un accident est le sujet d'un autre, en ce sens qu'un accident est reçu dans un sujet par l'intermédiaire d'un autre accident ; comme on dit que la surface est le sujet de la couleur. Par conséquent, quand Dieu fait qu'un accident existe par lui-même, il peut aussi faire qu'il soit par lui-même le sujet d'un autre accident (1).

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Il faut répondre au second, que les autres accidents, selon qu'ils étaient dans la substance du pain, étaient individualisés par l'intermédiaire de la quantité commensurable, comme nous l'avons dit (in corp. art.). C'est pourquoi la quantité commensurable est le sujet des autres accidents qui restent dans le sacrement plutôt que réciproquement.

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Il faut répondre au troisième, que la rareté et la densité sont des qualités qui résultent des corps, parce qu'ils ont beaucoup ou peu de matière sous leurs dimensions; comme tous les autres accidents résultent aussi des principes de la substance. C'est pourquoi, comme après que la substance est retirée, la vertu divine conserve les autres accidents ; de même, après que la matière a été soustraite, elle conserve par la vertu divine les qualités qui en sont la conséquence, comme la rareté et la densité (2).

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Il faut répondre au quatrième, que la quantité mathématique n'abstrait pas de la matière intelligible, mais de la matière sensible, comme le dit Aristote (Metaphys. lib. vii, text. 35). Or, on dit que la matière est sensible parce qu'elle est soumise aux qualités sensibles. C'est pourquoi il est évident que la quantité commensurable qui reste dans l'eucharistie sans sujet n'est pas une quantité mathématique (3).




III Pars (Drioux 1852) 1526