Discours 2003 - Jeudi 27 mars 2003


AUX PARTICIPANTS À UN COURS SUR LE FOR INTERNE ORGANISÉ PAR LA PÉNITENCERIE APOSTOLIQUE

Vendredi 28 mars 2003

  1. Très chers amis, le cours sur le for interne, organisé chaque année par la Pénitencerie apostolique, m'offre l'opportunité de vous accueillir en audience spéciale. J'adresse un salut cordial au Pro-Pénitencier majeur, Mgr Luigi De Magistris, que je remercie des paroles respectueuses qu'il m'a adressées. Je salue ensuite les prélats et les membres du même Tribunal et les Pères pénitenciers des basiliques patriarcales de l'Urbs, ainsi que les jeunes prêtres et les candidats au sacerdoce, qui prennent part à cette occasion traditionnelle d'approfondissement doctrinal.

En diverses occasions, j'ai exprimé ma satisfaction pour ceux qui se consacrent au ministère pénitentiel dans l'Eglise: le prêtre catholique, en effet, est tout d'abord le ministre du sacrifice rédempteur du Christ dans l'Eucharistie, et le ministre du pardon divin dans le sacrement de la Pénitence.

2. J'ai à coeur, en cette circonstance, de m'arrêter en particulier sur la relation privilégiée qui existe entre le sacerdoce et le sacrement de la Réconciliation, qui doit en premier lieu être reçu par le prêtre avec foi et humilité, ainsi qu'avec une fréquence assidue. En effet, le Concile Vatican II enseigne à propos des ecclésiastiques: "Les ministres de la grâce sacramentelle s'unissent intimement au Christ Sauveur et Pasteur lorsqu'ils reçoivent avec fruit les sacrements, spécialement par la confession sacramentelle fréquente: préparée par l'examen de conscience quotidien, celle-ci est un soutien très précieux pour l'indispensable conversion du coeur à l'amour du Père des miséricordes" (Décret Presbyterorum Ordinis PO 18 CIC 276,2, 5° et, également, CIO 369,1).

A la valeur intrinsèque du sacrement de la Pénitence, que l'on reçoit du prêtre en tant que pénitent, s'ajoute sa vertu ascétique comme occasion d'examen de soi-même, et donc de contrôle, heureux ou douloureux, de son propre niveau de fidélité aux promesses. Il s'agit, en outre, d'un moment ineffable d'"expérience" de la charité éternelle que le Seigneur nourrit pour chacun de nous dans son individualité unique; c'est un épanchement pour les déceptions et les amertumes qui nous ont peut-être été injustement infligées: c'est le baume consolateur pour les multiples formes de souffrance dont la vie est jalonnée.

3. Ensuite, en tant que ministre du sacrement de la Pénitence, le prêtre, conscient du précieux don de grâce placé entre ses mains, doit offrir aux fidèles la charité de l'accueil attentif, sans être avare de son temps, et sans irritation ou froideur dans ses manières. Dans le même temps, il doit user de charité, ou plutôt de justice, en transmettant, sans variations idéologiques et sans remises arbitraires, l'enseignement authentique de l'Eglise, en se gardant des profanas vocum novitates, concernant leurs problèmes.

Je désire ici attirer en particulier votre attention sur l'adhésion qui est due au Magistère de l'Eglise à propos des problèmes complexes qui se posent dans le domaine de la bioéthique et des règles morales et canoniques dans le cadre du mariage. Dans ma Lettre, adressée aux prêtres pour le Jeudi Saint 2002, j'observais: "Il arrive parfois, sur des questions éthiques d'actualité, que les fidèles sortent de la confession avec des idées plutôt confuses, entre autres raisons parce qu'ils ne trouvent pas chez les confesseurs la même ligne de jugement. En réalité, ceux qui accomplissent au nom de Dieu et de l'Eglise ce délicat ministère ont le devoir précis de ne pas cultiver, et plus encore de ne pas manifester dans le ministère sacramentel, des appréciations personnelles qui ne correspondent pas à ce que l'Eglise enseigne et proclame. On ne peut pas par amour manquer à la vérité au profit d'une compréhension faussée du pénitent" (Lettre aux prêtres, 17 mars 2002, n. 10; cf. ORLF n. 13 du 26 mars 2002).

4. Le sacrement de la Pénitence, s'il est bien administré et reçu, se révèle un excellent instrument de discernement pour les vocations. Celui qui travaille dans le domaine du for interne doit parvenir personnellement à une certitude morale à propos de l'aptitude et de l'intégrité de ceux qu'il dirige spirituellement, afin de pouvoir licitement approuver et encourager leur intention d'accéder aux Ordres. Par ailleurs, on ne peut atteindre cette certitude morale que lorsque la fidélité du candidat aux exigences de la vocation a été prouvée par une expérience continue.

Le directeur spirituel doit non seulement offrir aux candidats au sacerdoce le discernement, mais également l'exemple de sa vie, en cherchant à reproduire en lui le Coeur du Christ.

5. Le ministère pénitentiel juste et fructueux et l'amour pour le recours personnel à la pratique du sacrement de la Pénitence dépendent surtout de la grâce du Seigneur. Pour que le prêtre obtienne ce don, la médiation de Marie, Mère de l'Eglise et Mère des prêtres, est d'une singulière importance, parce qu'elle est la Mère de Jésus, Prêtre suprême et éternel. Qu'Elle veuille obtenir de son Fils pour chaque prêtre le don de la sainteté, à travers le sacrement de la Pénitence humblement reçu et généreusement offert.

Que sur vos convictions, vos intentions, et vos espérances descende, propitiatoire des bénédictions de Dieu, la Bénédiction apostolique que je donne à tous avec affection.



AUX ÉVÊQUES D'INDONÉSIE EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Samedi 29 mars 2003



Chers frères évêques!

1. "A vous grâce et paix de par Dieu, notre Père, et le Seigneur Jésus-Christ!" (1Co 1,3). Avec ces paroles de saint Paul, et avec affection dans le Seigneur, je vous souhaite la bienvenue Evêques de l'Indonésie, à l'occasion de votre visite ad limina Apostolorum. A travers vous, j'embrasse également en esprit les prêtres, les religieux et les laïcs de vos Eglises particulières. Avoir accompli un aussi long voyage pour vous agenouiller devant les tombes des Apôtres, pour vous unir dans la prière avec le Successeur de Pierre et le rencontrer, témoigne du caractère universel de l'Eglise. En tant que Successeurs des Apôtres, dont le témoignage du Christ crucifié et Ressuscité est le fondement solide de la proclamation, de la part de l'Eglise, de l'Evangile à chaque époque et en chaque lieu, vous êtes venus pour confirmer votre communion dans la foi et dans la charité. Je rends grâce à Dieu car, en ces temps difficiles, vous avez réussi à accomplir ce pèlerinage pour partager la foi, l'expérience et les choix de vos communautés locales, ainsi que les défis que vous devez affronter. Puissent les fruits de nos rencontres enrichir l'Eglise qui est en Indonésie et nourrir votre ministère pastoral!

2. Votre enseignement contribue à faire en sorte que l'Eglise se trouve en première ligne dans la promotion de la paix et de l'harmonie, dans un pays composé de nombreux groupes différents. En effet, votre Conférence cherche à refléter la devise Bihneka Tungal Ika, "unité dans la diversité", qu'on retrouve sur vos armes nationales. Vos origines ethniques et culturelles diverses, rassemblées dans une atmosphère de foi, de dialogue et de confiance réciproque, peuvent représenter un modèle d'espérance pour toute l'Indonésie. Au début d'une nouvelle ère, l'Indonésie doit affronter le défi de construire une société fondée sur les principes démocratiques de la liberté et de l'égalité de tous les citoyens, quelle que soit leur langue, leur race, leur origine ethnique, leur héritage culturel ou leur religion. Je n'ai aucun doute quant au fait que l'Eglise continuera à être activement engagée dans cet effort, en encourageant tous les peuples à s'unir pour faire face à leurs responsabilités civiques à travers le dialogue et l'ouverture, en évitant tout type de préjugé ou de sectarisme. Le développement d'une société qui incarne ces idéaux démocratiques aidera à freiner la violence préoccupante qui a malheureusement frappé votre pays au cours des dernières années.

La liberté religieuse, qui a toujours été une caractéristique traditionnelle de la société indonésienne, est garantie par la Constitution de la Nation. L'Eglise doit toujours demeurer vigilante, dans le but d'assurer que ce principe soit respecté, aussi bien au niveau fédéral que local. Je souhaite que ces efforts aident à créer une atmosphère dans laquelle le respect pour la souveraineté du droit devienne la nouvelle mentalité dans l'objectif de parvenir à une société démocratique tolérante et non violente. Ce premier pas important commence par une formation humaine adaptée. Comme je l'ai dit dans ma Lettre encyclique Centesimus annus, assister "l'individu à travers l'éducation et la formation dans les idéaux authentiques" est un élément nécessaire pour la création d'un ordre civique caractérisé par une authentique préoccupation pour le bien commun (cf. CA CA 46). A ce propos, il faut prêter une attention particulière aux pauvres. L'Eglise est profondément concernée car "le progrès des pauvres est une grande chance pour la croissance morale, culturelle et même économique de toute l'humanité" (ibid., CA CA 28). Le message du Christ étant un message d'espérance, ses disciples doivent toujours faire en sorte que les moins chanceux parmi nous, quelle que soit leur religion ou leurs origines ethniques, soient traités avec la dignité et le respect que l'Evangile exige. Promouvoir les droits fondamentaux des faibles est un chemin qui a fait ses preuves pour aller vers une société stable et productive. L'Eglise est appelée à "rester aux côtés des foules pauvres, à discerner la justice de leurs revendications, à contribuer à les satisfaire, sans perdre de vue le bien des groupes dans le cadre du bien commun" (cf. Sollicitudo rei socialis, n. 39).

3. L'une des méthodes la plus efficace par laquelle la communauté chrétienne peut aider les pauvres est l'éducation. Dans ce domaine, ainsi que face à son système impressionnant d'organismes de charité, on doit faire l'éloge de l'Eglise d'Indonésie. Bien que les catholiques ne représentent qu'une petite partie de la population, ils ont développé un système scolaire vaste et respecté. L'engagement de l'Eglise dans le domaine de l'éducation est reconnu comme l'une des plus grandes contributions que vous ayez apportée à la société indonésienne, et il demeure certainement un moyen efficace pour transmettre les valeurs évangéliques. L'éducation catholique, en tant que partie importante de la mission catéchétique et évangélisatrice de l'Eglise, doit se fonder sur une philosophie dans laquelle la foi et la culture soient réunies en une unité harmonieuse. (cf. Congrégation pour l'Education catholique, La dimension religieuse de l'éducation dans l'école catholique, n. 34). Vos efforts afin de préserver les écoles catholiques, en particulier dans les régions pauvres non catholiques, tout en faisant face aux difficultés économiques, démontrent votre ferme engagement pour une solidarité pluriculturelle et l'exigence de l'amour évangélique pour tous. Bien qu'il soit encourageant d'observer le taux élevé d'alphabétisation de la population, on ne peut qu'être alarmé par le grand nombre de jeunes qui ne poursuivent pas leurs études dans les écoles secondaires. Vos jeunes doivent être encouragés a ne pas renoncer à l'instruction pour suivre l'appel d'un matérialisme superficiel et éphémère. A ce propos, je désire également souligner le travail essentiel accompli par les catéchistes dans des pays comme l'Indonésie, où les fidèles constituent une toute petite minorité. L'impossibilité d'accéder à l'éducation catholique dans certaines régions pauvres, ainsi qu'un milieu parfois en conflit avec le christianisme, voire hostile, fait apparaître l'exigence d'offrir des programmes sérieux de formation catéchétique pour les jeunes et les personnes âgées. La communauté ecclésiale a la responsabilité d'assurer que ses membres soient accueillis dans "un milieu où ils pourront vivre le plus pleinement possible ce qu'ils ont appris" (Catechesis tradendae, n. 24). La catéchèse est un devoir de toute la communauté de foi et une extension du ministère de la Parole confié à l'Evêque et à son clergé. Il s'agit d'une responsabilité ecclésiastique qui exige une formation doctrinale et pédagogique adaptée. Je vous encourage à offrir tout le soutien possible à ceux qui ont assumé volontairement la tâche difficile d'offrir ce service fondamental, pour lequel l'Eglise tout entière est reconnaissante.

4. Depuis longtemps, votre Conférence épiscopale a reconnu que l'évangélisation va de pair avec l'oeuvre profonde, graduelle et exigeante de l'inculturation. La vérité de l'Evangile doit toujours être proclamée de façon persuasive et incisive. Cela est particulièrement important dans une société complexe comme la vôtre où, dans certaines zones, le catholicisme est parfois considéré avec méfiance par certains groupes. Vous avez la tâche délicate de faire en sorte que l'Evangile conserve sa signification profonde, valable pour chaque peuple et chaque culture, tout en le communiquant d'une façon qui soit attentive aux valeurs traditionnelles et à la famille. Comme je l'ai dit à l'occasion de ma visite pastorale en Indonésie en 1989, "l'exemple du Christ et le pouvoir de son Mystère pascal imprègnent, purifient et élèvent toutes les cultures" (Homélie à Yogyakarta, le LE 10 octobre 1989).

Le succès de l'inculturation dépend des couples et des familles qui incarnent la vision chrétienne de leur vocation et de leur responsabilité. Je vous encourage donc à continuer à promouvoir les valeurs traditionnelles de la famille si étroitement liées à la culture asiatique (cf. Ecclesia in Asia ), en communiquant aux couples et aux familles la vie nouvelle qui vient de l'Evangile. Les graves préoccupations pour les menaces croissantes contre la vie familiale que vous avez exprimées en de nombreuses occasions ne doivent pas être négligées. Une véritable "conjuration contre la vie" (cf. Evangelium vitae EV 17) et contre la famille apparaît sous de multiples formes: avortement, permissivité sexuelle, pornographie, abus de drogues et pressions pour adopter des méthodes moralement inacceptables de contrôle démographique. Malgré les difficultés pour faire obstacle à ces tendances dans une société non chrétienne, vous êtes les premiers appelés, en tant qu'évêques, à devenir les "annonciateurs inlassables de l'Evangile de la vie" (Evangelium vitae EV 82). A chaque époque, la voix prophétique de l'Eglise doit proclamer avec force l'exigence de respecter et de promouvoir la loi divine écrite dans chaque coeur (cf. Rm 2,15). A travers l'écoute, le dialogue et le discernement, les évêques doivent aider leur troupeau à vivre l'Evangile de façon à ce qu'il soit pleinement compatible avec le dépôt de la foi et les liens de communion ecclésiale (cf. Redemptoris missio RMi 54).

5. Comme certains d'entre vous l'ont observé, l'Eglise qui est en Indonésie est une Eglise qui vit et qui souffre avec la population, en affrontant les défis qui naissent du contact quotidien avec une société non chrétienne. Il s'agit d'une communauté qui cherche une voie de développement humain dans le contexte de l'harmonie et de la tolérance religieuse, en offrant et en recevant beaucoup dans un milieu culturel complexe. Dans votre pays, il existe déjà un niveau louable de dialogue interreligieux sur le plan institutionnel. Cet échange réciproque d'expériences religieuses a trouvé son expression concrète dans les projets caritatifs interreligieux et dans la collaboration qui a commencé, en particulier à la suite des catastrophes naturelles. Même dans les régions à majorité musulmane l'Eglise est activement présente dans les orphelinats, dans les cliniques et dans les institutions consacrées à l'aide des opprimés. Il s'agit d'une merveilleuse expression de la nature infinie de l'amour de Dieu; un amour qui s'adresse à tous et non à quelques-uns.

Je désire vous assurer ici de ma profonde sollicitude à l'égard du bien-aimé peuple indonésien, en ce moment de tension accrue dans toute la Communauté internationale. Il ne faut jamais permettre à la guerre de diviser les religions du monde. Je vous encourage à accueillir ce moment bouleversant comme une occasion pour travailler ensemble, comme des frères engagés pour la paix, avec votre peuple, avec ceux qui appartiennent à d'autres confessions religieuses et avec tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté, dans le but d'assurer la compréhension, la collaboration et la solidarité. Ne permettons pas à une tragédie humaine de devenir également une catastrophe religieuse (cf. Discours à la délégation interreligieuse de l'Indonésie, 20 février 2003)!

Dans le même temps, je suis bien conscient que certains secteurs de la communauté chrétienne de votre pays ont subi des discriminations et sont l'objet de préjugés, alors que d'autres ont été victimes d'actes de destruction et de vandalisme. Dans certaines régions, on a refusé aux communautés chrétiennes le permis de construire des lieux de dévotion et de prière. L'Indonésie, en même temps que la Communauté internationale, a récemment été horrifiée face aux nombreuses victimes provoquées par un attentat terroriste à la bombe, à Bali. Mais il faut faire attention à ne pas céder à la tentation de définir des groupes entiers de personnes en fonction des actions d'une minorité extrémiste. La religion authentique ne soutient pas le terrorisme ou la violence, mais cherche à promouvoir de toutes les façons possibles l'unité et la paix de toute la famille humaine.

6. Du fait que les chrétiens représentent une très petite minorité dans votre pays, ils sont appelés de façon particulière à être le "levain dans la pâte" (cf. Mt 13,33). Malgré les difficultés et les sacrifices, vos prêtres et vos religieux continuent à témoigner chaque jour de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, en rapprochant de nombreuses personnes de l'Evangile. Du fait que "l'Eglise en Asie se trouve parmi les peuples qui témoignent d'un intense désir de Dieu" (Ecclesia in Asia ), vous êtes appelés à trouver des façons concrètes de répondre à ce désir. En effet, vos efforts pour promouvoir les vocations au sacerdoce et à la vie religieuse reflètent votre conscience de ce devoir. Je désire vous féliciter pour votre constance qui vise à préserver les niveaux élevés de l'éducation et de la formation dans les séminaires et dans les maisons religieuses. La sollicitude et l'attention démontrées dans le choix et dans la formation des candidats au sacerdoce et à la vie religieuse s'effectuent toujours au bénéfice de l'Eglise locale.

La formation et le développement spirituel étant des processus qui se poursuivent pendant toute la vie, les évêques ont la responsabilité fondamentale d'aider leurs prêtres en mettant à leur disposition des programmes de formation permanente, des retraites et des temps de prière et de fraternité. Un élément important de cette formation, qu'elle soit initiale ou permanente, est une préparation adaptée dans le domaine de la théologie et de la spiritualité de la liturgie. "La liturgie est la source et le sommet de toute vie et de toute mission chrétiennes; c'est un moyen fondamental d'évangélisation, spécialement en Asie où les adeptes de diverses religions sont si attirés par le culte, par les festivités religieuses et par des dévotions populaires" (Ecclesia in Asia ). Il faut donner à vos prêtres l'opportunité d'être nourris par cette liturgie, ainsi que la capacité à apporter sa richesse aux autres, afin que sa profondeur, sa beauté et son mystère continuent à resplendir.

Le soutien spirituel et moral que vous donnez aux religieux et aux religieuses de vos diocèses représente également une partie significative de votre ministère épiscopal. Les membres des Instituts religieux ont joué un rôle indispensable en apportant la Bonne Nouvelle aux hommes et aux femmes de l'Indonésie et, en particulier, aux pauvres et aux laissés-pour-compte. Dans ce travail important, ils doivent toujours être aidés à renforcer leur con-sécration au Seigneur à travers leur façon de vivre quotidiennement les con-seils évangéliques. "Tous ceux qui se sont engagés dans la vie consacrée sont appelés à devenir des guides sur les chemins de la recherche de Dieu, une recherche qui a toujours rendu inquiet le coeur de l'homme et qui est particulièrement perceptible en Asie à travers les nombreuses voies spirituelles et ascétiques" (Ecclesia in Asia ). C'est pour cette raison que les religieux jouent un rôle essentiel dans l'engagement total de l'Eglise au service de l'évangélisation.

7. Chers évêques, c'est dans un esprit de foi et de communion que je vous ai fait part de ces réflexions sur certains aspects de la sollicitude pour le bien-aimé Peuple de Dieu en Indonésie. A travers votre présence, je me sens très proche des fidèles indonésiens et, en ce moment d'incertitude, ma prière fervente est que ces derniers soient affermis dans le Christ. Je vous confie tous à l'intercession de Marie, Reine du Rosaire, qui embrasse tous ceux qui s'adressent à Elle dans l'affliction et qui ne manque jamais de demander qu'ils soient libérés du mal. Dans l'amour de Jésus-Christ, je vous donne, ainsi qu'aux fidèles de vos diocèses, ma Bénédiction apostolique.



Avril 2003



MESSAGE DU PAPE JEAN-PAUL II AU SUPÉRIEUR GÉNÉRAL DE L’ORDRE DES MINIMES


Au Révérend Père
Giuseppe FIORINI MOROSINI
Supérieur général de l'Ordre des Minimes

1. J'ai appris avec plaisir que le 2 avril prochain aura lieu dans la ville de Paola, avec l'approbation de l'Archevêque diocésain, Mgr Giuseppe Agostino, la première "Marche de la Pénitence", organisée par le Conseil pour la Pastorale des Jeunes de cet Ordre, et à laquelle les jeunes sont invités de façon particulière. Je suis heureux de vous adresser mon salut cordial et mes voeux, cher Père, ainsi qu'aux organisateurs, à vos Confrères et à ceux qui prendront part à cette initiative louable, qui se répétera chaque année à l'occasion de l'anniversaire de la mort de saint François de Paule.

2. Cette manifestation opportune se déroule cette année à une période marquée par un grand nombre de préoccupations et de souffrances, également en raison de la guerre en cours. Elle constitue donc une manifestation plus que jamais nécessaire pour inviter à réfléchir et à implorer pour l'humanité le don fondamental de la paix. Elle se place, d'une certaine façon, dans une continuité d'esprit avec la "Journée de prière et de jeûne", avec laquelle ce Carême a commencé. Ces moments spirituels forts aident à prendre toujours davantage conscience de l'urgente nécessité de construire la paix, également au prix de sacrifices personnels. Il faut être disposé à renoncer à quelque chose, même de légitime, en vue d'un bien supérieur. Il faut surtout être conscient que l'on peut tout obtenir de Dieu par la prière. Dans le même temps, la Marche peut devenir une école de vie, car elle permet de faire référence aux exemples et aux enseignements lumineux du saint de Paola, qui n'hésita pas à mettre son propre choix de pénitence évangélique au service de l'Eglise et de la société.

3. Ayant vécu à une époque non exempte de difficultés et de problèmes, en raison de la poursuite de divers conflits, il s'engagea à oeuvrer au service de la paix, en faisant pénitence, ainsi qu'en servant de médiateur entre les factions en lutte. En 1494, alors que de sombres nuées s'amoncelaient sur l'Italie, il confiait: "Je consacre tous mes efforts à prier pour la paix". Il définissait la paix comme "le plus grand trésor que les peuples peuvent posséder" et "une sainte marchandise qui mérite d'être acquise à cher prix".

Révérend Père, je vous encourage, ainsi que vos confrères et les jeunes participants à la Marche, à accueillir docilement, à l'école du saint de Paola, la "douce pédagogie" de la pénitence évangélique, afin d'apprendre le véritable secret de la paix. Comme le saint l'enseigne lui-même, l'obtention de la paix à tous les niveaux est liée à la conversion du coeur et à un réel changement de vie.

Je souhaite de tout coeur que la "Marche de la Pénitence" puisse contribuer à faire mûrir dans les consciences des nouvelles générations une intention sincère de paix, qui devra être nourrie par un itinéraire d'abnégation personnelle dans un esprit de pénitence.

Avec ces sentiments, alors que j'invoque l'intercession céleste de la Vierge Marie, Reine de la Paix, et de saint François de Paule, je donne avec affection au Pasteur de l'archidiocèse, à vous, Révérend Père, à tout l'Ordre des Minimes, aux organisateurs, aux jeunes et à tous les participants à la marche de la pénitence, une Bénédiction apostolique particulière.

Du Vatican, le 29 mars 2003



IOANNES PAULUS II




DISCOURS DU PAPE JEAN-PAUL II AUX ÉVÊQUES DE SCANDINAVIE EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Samedi 5 avril 2003




Chers frères évêques,

1. "Grâce, miséricorde, paix, de par Dieu le Père et le Christ Jésus notre Seigneur" (1Tm 1,2). Avec une affection fraternelle, je vous souhaite une cordiale bienvenue, évêques de Scandinavie. Votre première visite ad limina Apostolorum de ce nouveau millénaire représente une occasion pour renouveler votre engagement à proclamer avec un courage toujours plus grand l'Evangile de Jésus-Christ dans la vérité et dans l'amour. En tant que pèlerins auprès des tombes des Apôtres Pierre et Paul, vous venez "rendre visite à Pierre" (cf. Ga 1,18) et à ses collaborateurs au service de l'Eglise universelle. Vous confirmez ainsi "l'unité dans la même foi, espérance et charité" et vous connaissez et appréciez "toujours davantage l'immense patrimoine des valeurs spirituelles et morales que toute l'Eglise, en communion avec l'Evêque de Rome, a diffusé dans le monde entier" (Pastor bonus, Annexe I, 3).

2. En tant qu'évêques vous avez été revêtus de l'autorité du Christ (cf. Lumen gentium LG 25) et on vous a confié la tâche de rendre témoignage de son Evangile salvifique. Les fidèles de Scandinavie, qui attendent beaucoup, se tournent vers vous pour que vous soyez de solides témoins de la foi, altruistes dans votre disponibilité à proclamer la vérité "à temps et à contretemps" (2Tm 4,2). A travers votre témoignage personnel du mystère vivant de Dieu (cf. Catechesi tradendae CTR 7), vous faites connaître l'amour sans limites de celui qui s'est révélé et qui a fait connaître son dessein pour l'humanité à travers Jésus-Christ. C'est ainsi qu'est rendu un témoignage éloquent du "oui" extraordinaire de Dieu aux hommes (cf. 2Co 1,20) et que vous êtes vous-mêmes soutenus dans votre prédication de Jésus-Christ qui est "le chemin, la vérité et la vie" (Jn 14,6).

C'est ce message qui doit être aujourd'hui proclamé avec clarté et sans ambiguïté. Dans un monde plein de scepticisme et de confusion, certains pourraient penser que la lumière du Christ a été obscurcie. En effet, les sociétés et les cultures modernes sont souvent caractérisées par un sécularisme qui conduit facilement à la perte du sens de Dieu, et sans Dieu on perd également le véritable sens de l'homme. "Lorsque l'on oublie le Créateur, la créature elle-même devient incompréhensible" (cf. Gaudium et spes GS 36): les être humains ne sont plus capables de se percevoir comme "mystérieusement différents" des autres créatures terrestres et ils perdent de vue le caractère transcendant de l'existence humaine. Tel est le contexte dans lequel doit retentir le message libérateur du Christ: "Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous libérera" (Jn 8,32). Nous parlons ici de la plénitude de la vie, qui va bien au-delà des dimensions de l'existence terrestre et qui constitue la base de l'Evangile que nous prêchons, l'"Evangile de la vie". En effet, c'est l'écho profond et persuasif de cette vérité sublime dans le coeur de chaque personne - croyante ou non - qui, "dépassant infiniment ses attentes, y correspond de manière surprenante" (Evangelium vitae EV 2).

3. Un aspect fondamental de la "nouvelle évangélisation", à laquelle j'ai appelé l'Eglise tout entière, est l'évangélisation de la culture. Car "au centre de toute culture se trouve l'attitude que l'homme prend devant le mystère le plus grand, le mystère de Dieu (...) quand on élimine cette question, la culture et la vie morale des nations se désagrège" (Centesimus annus CA 24). Le défi que vous devez relever, chers frères, est de faire en sorte que la voix du christianisme soit entendue dans le débat public et que les valeurs de l'Evangile portent leurs fruits dans vos sociétés et vos cultures. Je suis heureux d'observer, à ce propos, les retombées positives de vos lettres pastorales et de vos déclarations sur des questions concernant les préoccupations existant dans vos pays.

Dans votre récente Lettre pastorale sur le mariage et la vie familiale, vous avez, par exemple, traité des nombreuses difficultés qui frappent les familles chrétiennes. En observant la façon dont le caractère sacré du mariage a été réduit par son assimilation à diverses formes de cohabitation, et en notant les effets négatifs du divorce dans vos sociétés, vous encouragez les couples mariés à persévérer et développer la valeur de l'indissolubilité du mariage. De cette façon, vous les aidez à devenir un signe précieux de la fidélité absolue et de l'amour altruiste du Christ lui-même (cf. Familiaris consortio FC 20).

En effet, l'institution du mariage a été voulue par Dieu dès le début et elle trouve sa signification la plus pleine dans l'enseignement du Christ. Existe-t-il un moment plus merveilleux et plus joyeux pour les couples mariés que de participer à l'acte créateur de Dieu, qui est celui de la naissance de leurs enfants? Et existe-t-il un plus grand signe d'espérance pour les hommes que celui de la vie nouvelle? La vérité de la sexualité humaine devient clairement visible dans l'amour réciproque des conjoints et dans leur acceptation de la "donation plus grande qui soit, par laquelle ils deviennent coopérateurs avec Dieu pour donner la vie à une autre personne humaine" (Ibid., FC FC 14). Encourager les fidèles à promouvoir la dignité du mariage et leur enseigner à apprécier sa nature indissoluble, signifie les aider à participer à l'amour de Dieu, qui est parfait, complet, et qui donne toujours la vie.

4. Les peuples scandinaves sont bien connus pour leur participation aux missions de maintien de la paix, pour leur sens profond de responsabilité face aux drames écologiques et pour leur générosité à offrir des aides humanitaires. Toutefois, l'humanisme authentique inclut toujours Dieu. Autrement, même si ce n'est pas de façon intentionnelle, il finit par nier aux êtres humains la place qui leur revient dans la création et il ne réussit pas à reconnaître pleinement la dignité propre à chaque personne (cf. Christifideles laici CL 5). C'est pourquoi, vous devez aider vos cultures respectives à puiser à leur riche héritage chrétien, dans l'élaboration de leur compréhension de la personne humaine. Dans le Christ, tous les êtres humains sont frères et soeurs, et nos gestes de solidarité à leur égard deviennent des actes d'amour et de fidélité au Christ, qui a dit que tout ce que nous faisons au plus petit de ses frères, c'est à lui que nous le faisons (cf. Mt 25,45). Tels sont les fondements de la culture de la vie et de la civilisation de l'amour que nous cherchons à construire, et c'est également la perspective qui se trouve à la base de nos efforts pour accueillir un nombre toujours croissant de migrants dans les terres du Nord.

5. Vos programmes oecuméniques locaux représentent eux aussi une source d'encouragement, car le témoignage commun de tous les chrétiens contribuera à faire en sorte que les valeurs de l'Evangile portent leurs fruits dans la société et que le Royaume de Dieu progresse parmi nous. La conscience de l'histoire commune des chrétiens a donné vie à une "fraternité redécouverte", de laquelle naissent de nombreux fruits de dialogue oecuménique: des déclarations communes (dont la Déclaration commune sur la Doctrine de la Justification), une prière partagée, la solidarité dans le service à l'humanité. Correctement compris, l'oecuménisme constitue une partie de l'engagement de tous les chrétiens à témoigner de leur foi. Alors que le chemin oecuménique se concentre à juste titre sur ce que nous possédons en commun, il ne doit naturellement pas négliger ou dissimuler les difficultés très concrètes que nous devons encore affronter sur la voie vers l'unité. Même si la pleine communion dans la foi n'existe pas encore, cela ne doit pas susciter le désespoir mais bien inciter tous les croyants à approfondir leur engagement à prier avec ferveur et à agir de façon résolue pour cette unité que le Christ désire pour son Eglise (cf. Jn 17,20-21).

6. Chers frères, le nouveau millénaire exige un "élan renouvelé dans la vie chrétienne" (Novo Millennio ineunte NM 29). Les hommes et les femmes du monde entier cherchent à donner un sens à leur vie; ils ont besoin de croyants qui ne leur "parlent" pas seulement du Christ, mais qui le leur "montrent" également. C'est dans notre contemplation du visage du Christ (cf. ibid., NM NM 16) que nous faisons resplendir sa lumière toujours plus lumineuse pour les autres. Il est indispensable, à ce propos, d'offrir des programmes de formation pour les enfants, les jeunes et les adultes. Ces initiatives pastorales, adaptées aux caractéristiques particulières de votre population, produiront de grands fruits de sainteté parmi eux et aideront ceux qui ne connaissent pas bien le Christ, mais cherchent une orientation dans leur vie.

La formation permanente du clergé diocésain et des religieux, ainsi qu'une formation adaptée pour les séminaristes, est fondamentale pour votre mission. En outre, la promotion des vocations au sacerdoce et à la vie religieuse doit être considérée comme une priorité alors que vous affrontez les défis de l'évangélisation du troisième millénaire chrétien. De cette façon, vous oeuvrerez pour assurer qu'un nombre suffisant d'hommes et de femmes répondent à l'appel du Christ. Plusieurs de vos Eglises locales vivent même l'expérience d'une croissance des vocations à la vie consacrée. Il s'agit d'un signe évident d'un intérêt renouvelé pour la spiritualité et il reflète le désir, en particulier chez les jeunes, d'approfondir la conscience et la compréhension de la foi. Je vous encourage, dans votre rôle de pasteur, à nourrir cette croissance, en faisant tout votre possible pour faciliter la présence dynamique des communautés religieuses et contemplatives parmi votre population et offrir le soutien humain et spirituel nécessaire à vos prêtres diocésains.

7. Chers frères dans l'épiscopat, c'est avec une affection fraternelle que je vous fais part de ces réflexions, et que je vous encourage dans l'exercice du charisme de la vérité que l'Esprit vous a accordé. Je vous assure de mes prières alors que vous continuez à guider dans l'amour les troupeaux confiés à vos soins. Unis dans notre proclamation de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, renouvelés dans l'enthousiasme des premiers chrétiens et guidés par l'exemple des saints, nous avançons dans l'espérance! En cette année du Rosaire, puisse Marie, Mère de l'Eglise, être votre guide sûr alors que "vous cherchez à faire ce que Jésus vous dit" (cf. Jn 2,5)! En vous confiant à sa protection maternelle, je vous donne de tout coeur, ainsi qu'aux prêtres, aux religieux et aux fidèles laïcs de vos diocèses ma Bénédiction apostolique!




Discours 2003 - Jeudi 27 mars 2003