Discours 1981





Janvier 1981

AU TRIBUNAL DE LA ROTE ROMAINE POUR L'INAUGURATION DE L'ANNÉE JUDICIAIRE

Samedi, 24 janvier 1981


1 ? Je suis heureux de pouvoir vous rencontrer aujourd'hui, à l'occasion de l'inauguration de la nouvelle année judiciaire de ce tribunal. Je remercie vivement votre doyen des nobles paroles qu'il m'a adressées et des sages propositions qu'il a formulées touchant les méthodes de travail. Je vous salue tous avec une affection paternelle, tout en vous exprimant ma sincère estime pour votre travail, si délicat et pourtant si nécessaire, qui est une partie intégrante et qualifiée de la mission pastorale de l'Eglise.

La compétence spécifique de la S. Rote romaine dans les causes matrimoniales touche de très près le sujet si actuel de la famille, qui a fait l'objet de l'étude du récent Synode des évêques. Eh bien, c'est de la protection juridique de la famille dans l'activité judiciaire des tribunaux ecclésiastiques que je voudrais maintenant vous entretenir.

2 — Avec un profond sens évangélique, le Concile oecuménique Vatican II nous a habitués à regarder l'homme pour le connaître dans tous ses problèmes et l'aider à résoudre les questions existentielles qu'il se pose, à la lumière de la vérité que le Christ nous a révélée et avec l'aide de la grâce que nous offrent les divins mystères du salut.

Parmi les problèmes qui préoccupent le plus le coeur de l'homme, et donc le cadre humain, qu'il soit familial ou social, dans lequel il vit et agit, figure de façon prééminente et inéluctable celui de l'amour conjugal qui lie deux êtres humains, distincts par le sexe, en constituant une communauté de vie et d'amour, autrement dit en les unissant dans le mariage.

Du mariage naît la famille, «lieu de rencontre — souligne le Concile — de plusieurs générations qui s'aident mutuellement à acquérir une sagesse humaine plus étendue et à harmoniser les droits des personnes avec les autres exigences de la vie sociale». Et c'est ainsi que la famille «constitue le fondement de la société». En vérité, ajoute le Concile, «la santé de la personne et de la société, tant humaine que chrétienne, est étroitement liée à la prospérité de la communauté conjugale et familiale». Mais, avec le Concile lui-même, nous devons reconnaître que «la dignité de cette institution ne brille pas partout du même éclat puisqu'elle est ternie par la polygamie, l'épidémie du divorce, l'amour soi-disant libre ou d'autres déformations.

De plus, l'amour conjugal est trop souvent déformé par l'égoïsme, l'hédonisme et par des pratiques illicites entravant la génération» (Gaudium et spes GS 47).

Pourtant, en dépit des graves difficultés que, parfois avec violence, provoquent les profondes transformations de la société actuelle, l'institution matrimoniale continue de manifester sa valeur irremplaçable et la famille reste une «école d'enrichissement humain» (ibid., GS GS 52).

Face aux maux si graves qui frappent aujourd'hui presque partout ce grand bien qu'est la famille, il a été également suggéré d'élaborer une Charte des droits de la famille, universellement reconnue, dans le but d'assurer à cette institution une juste protection, dans l'intérêt même de la société tout entière.



L'apport du christianisme

3 — L'Eglise, de son côté et dans le cadre de sa compétence, a toujours cherché à protéger la famille, y compris par le moyen d'une législation appropriée, sans compter qu'elle l'a favorisée et aidée par diverses initiatives pastorales.

J'ai déjà cité le récent Synode des évêques. Mais il est bien connu que, dès le début de son magistère, l'Eglise, fortifiée par la parole de l'Evangile (cf. Mt 19,5 Mt 5,32), a toujours enseigné et explicitement confirmé le précepte de Jésus sur l'unité et l'indissolubilité du mariage, précepte sans lequel il ne saurait jamais y avoir de famille solide, saine et vraie cellule vitale de la société. Contre la pratique gréco-romaine et judaïque qui facilitait assez largement le divorce, l'apôtre Paul déclarait déjà: «A ceux qui sont mariés, j'ordonne, non pas moi mais le Seigneur, que la femme ne se sépare pas de son mari [...] et que le mari ne répudie pas sa femme.» (1Co 7,10-11) Puis ce fut la prédication des Pères de l'Eglise qui, face à la multiplication des divorces, affirmèrent avec insistance que le mariage, de par la volonté divine, est indissoluble.

Le respect des lois voulues par Dieu pour la rencontre de l'homme et de la femme et pour la stabilité de leur union a donc été l'élément nouveau que le christianisme a introduit dans l'institution matrimoniale. Vatican II dira à ce propos: «La communauté profonde de vie et d'amour que forme le couple a été fondée et dotée de ses lois propres par le Créateur; elle est établie sur l'alliance des conjoints, c'est-à-dire sur leur consentement personnel irrévocable. Une institution, que la loi divine confirme, naît ainsi, au regard même de la société, de l'acte humain par lequel les époux se donnent et se reçoivent mutuellement.» (Gaudium et spes GS 48)

Cette doctrine a guidé dès le début la pastorale, la conduite des époux chrétiens, l'éthique matrimoniale et la discipline juridique. Et l'action catéchétique et pastorale de l'Eglise, soutenue et valorisée par le témoignage des familles chrétiennes, a introduit des modifications jusque dans la législation romaine qui, avec Justinien, n'admit plus le divorce sine causa et accueillit progressivement l'institution matrimoniale chrétienne. Ce fut une grande conquête pour la société, car l'Eglise, ayant redonné leur dignité à la femme et au mariage, par le moyen de la famille, a contribué à sauver le meilleur de la culture gréco-romaine.



Le laxisme dans les sentences de nullité matrimoniale

4 — Dans le contexte social actuel, l'Eglise est de nouveau confrontée à la tâche de poursuivre l'effort des origines sur le plan de la doctrine et de la pastorale, de la conduite et de la pratique, du législatif et du judiciaire.

Le bien de la personne humaine et de la famille dans laquelle l'individu réalise pour une bonne part sa dignité, ainsi que le bien de la société elle-même, exigent que l'Eglise, aujourd'hui plus encore que dans le récent passé, entoure d'une particulière protection l'institution matrimoniale et familiale.

L'effort pastoral, demandé également par le dernier Synode des évêques, pourrait s'avérer pratiquement vain s'il n'était accompagné d'une action législative et judiciaire correspondante. Pour le réconfort de tous les pasteurs, nous pouvons dire que la nouvelle codification canonique prévoit de traduire, par le moyen de sages normes juridiques, tout ce qu'a déclaré le dernier Concile oecuménique en faveur du mariage et de la famille. L'intervention faite au cours du récent Synode des évêques sur l'augmentation alarmante des causes matrimoniales dans les tribunaux ecclésiastiques sera sans nul doute prise en compte dans les séances de révision du Code de droit canonique. Il est également certain que les pasteurs, y compris par leurs réponses aux demandes pressantes du Synode, sauront, dans un engagement pastoral accru, favoriser la préparation appropriée des futurs époux à la célébration du mariage. La stabilité du lien conjugal et l'heureux maintien de la communauté familiale dépendent en effet pour une bonne part de la préparation des fiancés à leur union. Mais il est tout aussi vrai que la préparation elle-même au mariage serait influencée de façon négative par les déclarations ou sentences de nullité matrimoniale si celles-ci étaient obtenues avec trop de facilité. Si aux maux du divorce venait s'ajouter celui de rendre moins sérieuse et moins lourde d'engagement une célébration du mariage qui a déjà perdu auprès de bien des jeunes l'estime qui lui est due, il serait à craindre qu'ils regardent dans la même perspective existentielle et psychologique les sentences de déclaration de nullité matrimoniale, au cas où celles-ci viendraient à se multiplier de manière facile et hâtive. Mon vénéré prédécesseur Pie XII lançait cet avertissement: «Le juge ecclésiastique ne doit pas se prononcer trop facilement sur la nullité du mariage, mais plutôt s'efforcer avant tout de valider ce qui a été contracté invalidement, surtout lorsque les circonstances du cas particulier le conseillent.» Pour expliquer cette mise en garde, il avait déclaré, quelques lignes plus haut: «En ce qui concerne les déclarations de nullité des mariages, personne n'ignore que l'Eglise ne soit, sur ce point, très réservée et bien éloignée de les favoriser. De fait, si la tranquillité, la stabilité et la sécurité de la société humaine en général exigent que les contrats ne soient pas à la légère proclamés nuls, a fortiori cela vaut-il pour un contrat d'une importance telle que le mariage, dont la solidité et la stabilité sont requises pour le bien commun de la société humaine et pour le bien privé des époux et des enfants, et dont la dignité de sacrement interdit que ce qui est sacré et sacramentel ne soit avec légèreté exposé au danger d'être profané.» (Supra, p. 14) Par son travail sage et prudent de vigilance, le Tribunal suprême de la Signature apostolique s'emploie louablement à conjurer ce danger. Tout aussi précieuse m'apparaît l'action judiciaire du tribunal de la S. Rote romaine. A la vigilance du premier et à la sainte jurisprudence du second doivent correspondre les tribunaux inférieurs.

Le rôle des tribunaux ecclésiastiques

5 — A la nécessaire protection de la famille contribuent dans une grande mesure l'attention et la prompte disponibilité des tribunaux diocésains et régionaux à suivre les directives du Saint-Siège, la constante jurisprudence de la Rote et l'application fidèle des normes déjà codifiées ayant trait soit au fond soit au procès, sans recourir à des innovations présumées ou probables, à des interprétations sans correspondant objectif dans la norme canonique et non soutenues par une jurisprudence qualifiée quelconque. Est en effet téméraire toute innovation du droit, qu'il s'agisse du fond ou du procès, qui ne trouve aucune correspondance dans la jurisprudence et la pratique des tribunaux et des dicastères du Saint-Siège. Nous devons nous persuader qu'un examen serein, attentif, réfléchi, complet et exhaustif des causes matrimoniales exige la pleine conformité avec la droite doctrine de l'Eglise, avec le droit canonique et avec la saine jurisprudence canonique, telle qu'elle s'est élaborée surtout grâce à l'apport de la S. Rote romaine. Comme le disait déjà Paul VI, tout cela apparaît comme «un moyen de sagesse», «comme une voie de circulation, dont l'axe est précisément la recherche de la vérité objective et dont le point d'arrivée est la correcte administration de la justice» (supra, p. 154).

Dans cette recherche, tous les membres du tribunal ecclésiastique — chacun dans le respect de son rôle et de celui d'autrui — doivent apporter une attention particulière, constante et consciencieuse à la formation d'un libre et valide consentement matrimonial, une attention qui doit toujours aller de pair avec le souci, pareillement constant et consciencieux, de la protection du sacrement du mariage. A l'acquisition de la connaissance de la vérité, c'est-à-dire de l'existence du lien matrimonial validement contracté ou de son inexistence, contribuent à la fois l'attention aux problèmes de la personne et l'attention aux lois qui, de par le droit naturel ou divin ou de par le droit positif de l'Eglise, sont sous-jacents à la célébration valide du mariage et à la stabilité du mariage. La justice canonique que, pour reprendre la belle expression de saint Grégoire le Grand, nous appelons de manière plus significative la justice sacerdotale, naît de l'ensemble de toutes les preuves du procès, soupesées en conscience à la lumière de la doctrine et du droit de l'Eglise et avec le soutien de la jurisprudence la plus qualifiée. Cela est exigé par le bien de la famille, sans oublier que toute protection de la famille légitime est toujours en faveur de la personne. Par contre, la préoccupation unilatérale en faveur de l'individu peut se traduire par un dommage pour la personne humaine elle-même et, de plus, porte tort au mariage et à la famille, qui sont des biens de la personne et de la société. C'est dans ces perspectives que s'ordonnent les dispositions du Code en vigueur concernant le mariage.



6 — Le message du Synode aux familles chrétiennes a souligné le grand bien que la famille, surtout la famille chrétienne, constitue et réalise pour la personne humaine. La famille «aide ses membres à entrer activement dans l'histoire du salut et à devenir des signes vivants du plan d'amour de Dieu sur le monde» (n° 8). L'activité judiciaire, elle aussi, pour être une activité de l'Eglise, doit avoir présente devant les yeux cette réalité — non seulement naturelle, mais aussi surnaturelle — du mariage et de la famille qui tire son origine du mariage. La nature et la grâce nous révèlent, encore que selon des manières et des mesures diverses, un projet divin sur le mariage et la famille, un projet qui est toujours pris en charge, protégé et favorisé, selon les tâches propres à chaque activité dans l'Eglise, de manière qu'il soit accueilli le plus largement possible par la société humaine.

En conséquence, l'Eglise, y compris par son droit et par l'exercice de la potestas iudicialis, peut et doit sauvegarder les valeurs du mariage et de la famille pour promouvoir l'homme et valoriser sa dignité.

L'activité judiciaire des tribunaux ecclésiastiques matrimoniaux, tout comme l'activité législative, devra aider la personne humaine à rechercher la vérité objective et donc à affirmer cette vérité, afin que la personne elle-même puisse être en mesure de connaître, de vivre et réaliser le projet d'amour que Dieu lui a assigné.

L'invitation que Vatican II a adressée à tous, en particulier à ceux qui «exercent une influence sur les communautés et les groupes sociaux», engage donc la responsabilité des ministres des tribunaux ecclésiastiques pour les causes matrimoniales, afin qu'eux aussi, en servant bien la vérité et en administrant correctement la justice, collaborent «au bien du mariage et de la famille» (Gaudium et spes GS 52).



7 — Je vous adresse donc à vous-même, M. le doyen, ainsi qu'aux prélats auditeurs et aux officiers de la S. Rote romaine, mes voeux de travail serein et fécond, accompli à la lumière des considérations que je vous ai faites aujourd'hui.

Tout en vous redisant avec joie mon estime pour la précieuse et infatigable activité de ce tribunal, je vous accorde à tous du fond du coeur une bénédiction apostolique particulière, gage de la divine assistance et signe de ma constante bienveillance.



AUX RECTEURS DE SANCTUAIRES DE FRANCE, BELGIQUE ET PORTUGAL

Jeudi, 22 janvier 1981


  Chers amis,



EN VOUS ACCUEILLANT ce matin avec une joie particulière, je ne puis m’empêcher de songer aux foules qui rejoignent à longueur d’année les sanctuaires dont vous assurez la garde et l’animation. C’est pourquoi j’attache à cette brève rencontre une importance qui s’ajoute à l’agrément d’un contact personnel avec vous. Permettez-moi de saluer spécialement votre guide, Monseigneur l’Evêque de Laval, si attentif au rayonnement du sanctuaire de Notre-Dame de Pontmain.

Vos études personnelles et vos congrès de Recteurs vous ont révélé que les pèlerinages sont une constante de l’histoire des religions. Le christianisme a également repris à son compte cette pratique profondément ancrée dans la mentalité populaire et qui répond à un besoin de rejoindre un espace religieux où le divin s’est manifesté. Il y aurait sans doute une histoire fort intéressante à écrire sur les pèlerinages chrétiens, depuis les tout premiers qui eurent pour objectif Jérusalem et les lieux saints jusqu’à ceux de notre époque, qu’ils se déroulent à Rome, à Assise, à Lourdes, à Fatima, à Guadalupe, à Czestochowa, à Knock, à Lisieux, à Compostelle, à Altötting et en tant d’autres endroits.

Recteurs des sanctuaires de France, comme vos confrères des autres nations, vous êtes les héritiers et les gestionnaires d’un patrimoine religieux considérable, dont l’impact sur la vie du peuple chrétien et sur bien des gens demeurés aux frontières de la foi semble actuellement en pleine remontée. Vous en avez une vive conscience. Vous pouvez certainement la faire partager à beaucoup d’autres. En ces quelques instants, je voudrais seulement affermir vos convictions sur quelques points essentiels de votre ministère particulier.

Toujours et partout, les sanctuaires chrétiens ont été ou ont voulu être des signes de Dieu, de son irruption dans l’histoire humaine. Chacun d’eux est un mémorial du Mystère de l’Incarnation et de la Rédemption. N’est-ce pas votre poète Péguy, qui disait dans son style original que l’Incarnation est la seule histoire intéressante qui soit jamais arrivée? Elle est l’histoire de l’amour de Dieu pour tout homme et pour l’humanité entière[1]. Et, si de nombreux sanctuaires romans, gothiques ou modernes ont été dédiés à Notre-Dame, c’est que l’humble Vierge de Nazareth a enfanté, par l’action de l’Esprit Saint, le propre Fils de Dieu, Sauveur universel, et que son rôle est toujours de présenter aux générations qui se succèdent le Christ “ riche en miséricorde ”. En notre temps qui connaît à des degrés divers la tentation de la sécularisation, il importe que les hauts lieux spirituels, bâtis au cours des âges et souvent à l’initiative des saints, continuent de parler à l’esprit et au coeur des hommes, croyants ou non croyants, qui ressentent tous l’asphyxie d’une société close sur elle-même et quelquefois désespérée. Est-ce rêver que de souhaiter ardemment que les sanctuaires les plus fréquentés deviennent ou redeviennent comme autant de maisons de famille où chacun de ceux qui y passent ou y séjournent retrouvent le sens de leur existence, le goût à la vie, parce qu’ils auront fait une certaine expérience de la présence et de l’amour de Dieu? La vocation traditionnelle et toujours actuelle de tout sanctuaire est d’être comme une antenne permanente de la Bonne Nouvelle du Salut.

Une condition du rayonnement évangélique des sanctuaires est qu’ils soient très accueillants. Et d’abord très accueillants en eux-mêmes. Quels que soient leur âge ou leur style, leur richesse artistique ou leur simplicité, chacun d’eux doit affirmer sa personnalité originale en évitant aussi bien l’accumulation hétéroclite des objets religieux que leur mise à l’écart systématique. Les sanctuaires sont faits pour Dieu, mais aussi pour le peuple, qui a droit au respect de sa sensibilité propre, même si son bon goût a besoin d’être patiemment éduqué. L’ordre parfait et l’authentique beauté de la plus célèbre basilique ou d’une chapelle plus modeste sont déjà une catéchèse, qui contribue à ouvrir l’esprit et le coeur des pèlerins ou hélas! à le refroidir. Mais si les pierres et les objets ont leur langage et leur part d’influence sur les êtres, que dire des équipes pastorales vouées à l’animation des sanctuaires? Votre rôle, mes amis, peut être déterminant, compte tenu du mystère de la grâce de Dieu. Qu’il s’agisse de recevoir les groupes annoncés et organisés ou des visiteurs anonymes et isolés – venus demander instamment une grâce ou en remercier –, qu’il s’agisse d’aider au bon déroulement des pèlerinages préparés par vos confrères et leurs auxiliaires ou d’assurer les exercices du culte propres au sanctuaire dont vous avez la responsabilité, qu’il s’agisse de veiller au recueillement des lieux ou d’en expliquer l’histoire aux visiteurs, qu’il s’agisse de proposer un moment de prière ou d’accepter le dialogue demandé par certains pèlerins, chaque membre de l’équipe doit faire preuve d’amabilité et de patience, de compétence et de perspicacité, de zèle et de discrétion, et surtout laisser humblement transparaître sa foi, être témoin de l’invisible. Votre ministère de choix est très exigeant. Il y va, en quelque sorte, de l’ouverture des âmes à Dieu, de leur conversion, et, pour ceux qui sont seulement en recherche, de leur premier pas vers la lumière et l’amour du Seigneur.

Tous ces efforts d’accueil et de prise en charge d’enfants, d’étudiants, de gens du troisième âge, de malades et d’handicapés, de catégories socio-professionnelles très diverses, de chrétiens fervents et de chrétiens en difficulté, doivent converger vers un but unique: évangéliser! Mon grand et cher Prédécesseur Paul VI a pris soin, dans l’Exhortation apostolique Evangelii Nuntiandi, de rappeler clairement et simplement le contenu essentiel et les éléments secondaires de l’évangélisation[2]. Que chaque sanctuaire continue à y puiser ses orientations! Une pastorale christocentrique! Oh oui, aidez les chrétiens à rejoindre vraiment le Christ, à s’unir à lui, à comprendre “ les rapports concrets et permanents qui existent entre l’Evangile et la vie, personnelle et sociale, de l’homme ”[3]. Aidez les mal croyants à se tourner vers Celui qui s’est présenté comme “ le Chemin, la Vérité et la Vie ”[4]. Aidez les pèlerins à mieux s’insérer dans la Tradition vivante de l’Eglise, toujours faite de fidélité à la Foi et d’adaptation pastorale, depuis le temps des Actes des Apôtres jusqu’au Concile Vatican II. Voyez même s’il n’est pas possible de faire donner, au moins de temps à autre, des conférences spirituelles et doctrinales judicieusement adaptées aux différents auditoires de pèlerins. Bien des enseignements importants du Magistère sont pratiquement ignorés ou confusément perçus.

Par-dessus tout, que toute la vie des sanctuaires favorise le mieux possible la prière personnelle et communautaire, la joie et le recueillement, l’écoute et la méditation de la Parole de Dieu, la célébration vraiment digne de l’Eucharistie et la réception personnelle du sacrement de la Réconciliation, la fraternité entre personnes qui se rencontrent pour la première fois, le souci d’aider de leurs offrandes les régions pauvres et les Eglises pauvres, la participation à la vie des paroisses et des diocèses.

Que la Vierge Marie, toujours à l’honneur dans vos sanctuaires qui lui sont dédiés, fasse fructifier votre important travail pastoral, et qu’elle aide tous les pèlerins à entrer davantage dans la volonté du Seigneur! Et moi-même, dans le souvenir très cher des nombreux pèlerinages qu’il m’a été donné d’accomplir ou de guider, je vous donne mon affectueuse Bénédiction.


[1] Cfr. Ioannis Pauli PP. II Redemptor Hominis, RH 13.
[2] Cfr. Pauli VI Evangelii Nuntiandi, EN 25-39.
[3] Ibid. EN 29.
[4] Jn 14,6.






AUX SECRÉTAIRES REGIONAUX DE LA JEUNESSE ÉTUDIANTE CATHOLIQUE INTERNATIONALE ET AUX MEMBRES DU CONSEIL DIRECTEUR DU MOUVEMENT INTERNATIONAL DES ÉTUDIANTS CATHOLIQUES

Vendredi, 16 janvier 1981


  Chers amis,



C’EST POUR MOI une joie de vous recevoir et de vous saluer ce matin, vous tous qui participez aux réunions de l’équipe mondiale de la Jeunesse étudiante catholique internationale (JECI) et du Conseil directeur du Mouvement international des étudiants catholiques (MIEC).



1. Notre rencontre prend place parmi celles, fréquentes et variées, que j’ai avec de nombreux groupes de jeunes, mais elle a une importance particulière à cause de la responsabilité qui incombe à vos mouvements par rapport à la vie chrétienne de leurs membres et à l’évangélisation du milieu étudiant. Vous en êtes conscients. Je sais que vous avez voulu tenir vos journées d’étude auprès de Rome pour manifester clairement la foi catholique et le sens de la communion ecclésiale qui animent vos mouvements, pour les approfondir, et aussi pour en apporter le témoignage au Successeur de Pierre et demander ses orientations.

Si l’Eglise porte une attention privilégiée aux jeunes, c’est qu’ils sont, à toutes les époques, l’espérance à la fois du monde et de l’Eglise. Ceci est particulièrement vrai en notre temps, car il vous revient d’être les témoins, et surtout les artisans de la mise en oeuvre du Concile dans l’Eglise. Elle vit son éternelle jeunesse, qu’elle tient du Seigneur, dans la fraîcheur du renouveau, reprenant les énergies toujours vivantes de sa tradition, animée par la grâce du Saint-Esprit, pour être toujours plus fidèle à la bonne nouvelle de l’Evangile.



2. Et pourtant, votre vie n’est pas facile; je connais vos inquiétudes et vos espérances. Vous assisterez à la fin du second millénaire, où les immenses progrès de l’humanité sont inextricablement mêlés à des menaces croissantes sur lesquelles, à différentes reprises, j’ai attiré l’attention. Mais ce monde agité est aussi celui d’une grande espérance. L’action évangélisatrice de l’Eglise a pour but de faire pénétrer le message du Christ au coeur de chaque homme et au coeur des peuples car il est le principe de la construction d’une civilisation de l’amour. Les jeunes pressentent cela. Ils devraient être, ils désirent être, à l’avant-garde d’un élan vers la fraternité humaine, vers la paix, la justice et la vérité, exprimées d’une façon privilégiée à travers la solidarité envers les plus petits, les pauvres, les opprimés. Dans son exhortation apostolique Evangelii Nuntiandi, mon prédécesseur le Pape Paul VI a indiqué les principes, l’esprit et les voies de l’action évangélisatrice. Suivez de tels enseignements.



3. Pour vous, qui êtes dans le monde étudiant, vos inquiétudes, comme vos espérances et votre action, sont marquées par votre situation particulière, transitoire par définition. Vous vivez en effet une période de formation dans laquelle les préoccupations personnelles immédiates comme celles de votre avenir professionnel, familial et social ne peuvent pas ne pas avoir une grande place. Elles vous rendent aussi particulièrement aptes à saisir les changements en cours et les appels de notre monde.

En tant qu’étudiants, vous vivez aussi dans des milieux scolaires et universitaires dont le but est la diffusion et le progrès du savoir et de la culture, mais qui sont en même temps le lieu où vous vous trouvez affrontés à une multiplicité quasi indéfinie de techniques, de messages, de propositions, d’idéologies. C’est là que vous êtes appelés à vous former, à motiver votre choix, et à porter témoignage de votre foi au Seigneur Jésus-Christ, qui nous donne, comme je l’ai montré à plusieurs reprises et en particulier dans mes deux encycliques, la vérité de l’homme indissolublement reliée à la vérité de Dieu.



4. C’est pourquoi je vous donne comme consigne, chers amis, de vous fixer d’abord sur l’essentiel. Par votre baptême et la profession de la foi de l’Eglise, vous êtes des hommes nouveaux, selon la parole de saint Paul. Soyez vraiment convertis au Seigneur, imprégnés, jusque dans vos choix de vie, de l’esprit des béatitudes, soucieux d’une intense vie spirituelle, surtout eucharistique. Voici le fondement: programmes, discussions, débats de vos mouvements ne serviraient à rien sans ce profond enracinement religieux et spirituel.

Soyez des témoins de la vérité. Vous la recherchez dans vos études et dans la discipline qu’elles imposent. Puissent-elles contribuer à votre développement intellectuel le plus large possible, vous donner le sens de la complexité du réel non seulement physique mais humain, la capacité et la volonté de ne pas vous arrêter à des positions trop simples. Approfondissez aussi, comme je viens de le dire, votre identité de jeunes intellectuels catholiques. Une des tâches qui vous reviennent, c’est de surmonter, dans la pensée et dans l’action, la dichotomie mise par les divers courants de pensée, anciens aussi bien que contemporains, entre Dieu et l’homme, entre théocentrisme et anthropocentrisme. Plus votre action, comme celle de l’Eglise, veut se centrer sur l’homme, plus elle doit trouver ouvertement son centre en Dieu, c’est-à-dire s’orienter en Jésus-Christ vers le Père[1]. Ceci, chers amis, fonde la nécessaire docilité au magistère de l’Eglise. Par cette fidélité à la vérité entière, vous vous mettrez à l’abri des tentations de la pure idéologie et de son agitation, des slogans simplificateurs, des mots d’ordre de la violence qui détruit et ne construit rien.



5. Voilà quelques principes que je voulais vous rappeler pour guider votre désir d’approfondissement et d’action. En vous y référant, vous annoncerez inlassablement l’évangile à vos camarades, et vous collaborerez à l’implantation de communautés chrétiennes vivantes dans vos milieux; vous ferez croître aussi la participation des jeunes à vos mouvements. Ainsi, vous mettrez vraiment en oeuvre la communion ecclésiale, en contact étroit avec vos pasteurs, ouverts à la collaboration avec d’autres mouvements catholiques et bien insérés dans les réseaux communautaires, paroissiaux et diocésains, de la vie de l’Eglise. Dès maintenant aussi, et plus encore lorsque vous serez engagés dans une vie professionnelle responsable, vous serez des chrétiens et des chrétiennes capables d’apporter une contribution originale à l’évangélisation de la culture de vos pays, au service du développement intégral, matériel et spirituel, de tous les hommes.

J’ai été sensible, chers amis, à votre désir de me rencontrer. Je voudrais que vous emportiez, pour vous et pour tous les membres de vos mouvements, la certitude que le Pape vous encourage et vous fait confiance pour devenir toujours davantage le ferment évangélique dans votre milieu. Souvenez-vous que le Seigneur nous a promis que le ferment ferait lever toute la pâte. Il nous parlait alors de sa parole et de sa grâce. Soyez-leur toujours fidèles. Je recommande vos intentions apostoliques à la Vierge Marie. Parce qu’elle a donné au monde le Christ Sauveur, il convient que nous passions par elle pour aller vers le Seigneur. Qu’il bénisse votre volonté de travailler pour lui! En son nom, je vous donne la bénédiction apostolique, pour vous, vos familles et tous ceux que vous représentez.


[1] Cfr. Lc 18,16.


POUR LES VOEUX AU CORPS DIPLOMATIQUE

Lundi, 12 janvier 1981




Excellences,
Mesdames, Messieurs,

1. LE TRÈS DIGNE DOYEN des Ambassadeurs vient d’exprimer les sentiments qui emplissent vos coeurs, vous tous membres du Corps Diplomatique accrédité près le Saint-Siège, en cette rencontre toujours si solennelle et si significative du début de l’année nouvelle. Je le remercie de grand coeur de ses nobles expressions et, avec lui, je vous remercie tous de votre présence pour cet échange de voeux. Je salue avec vous vos épouses, qui vous ont accompagnés pour cette aimable démarche que j’apprécie beaucoup. Je veux saluer aussi de loin toutes vos familles. Je salue vos collaborateurs, qui forment l’équipe efficace et organisée de chacune de vos Ambassades. Et je salue surtout les populations de vos pays, que vous représentez si dignement dans votre délicate fonction. Oui, ils sont ici, spirituellement proches de nous – et j’aime les sentir ainsi –, tous les peuples du monde, même ceux qui, malheureusement, n’ont pas de représentant officiel auprès de l’humble successeur de Pierre. Je les sens tout proches, et je revis par la pensée les rencontres que j’ai eu la joie d’avoir avec certains d’entre eux au cours de mes voyages, spécialement en l’année qui vient de se terminer. Tous les peuples devraient se trouver ici, parce que c’est ici la maison de tous. La vocation universelle de l’Eglise concerne en effet chacun des peuples. C’est donc à tous que j’adresse mon salut et mes voeux pour une nouvelle année sereine et active, riche des bénédictions du Dieu tout puissant.

2. Il me plaît de revoir en cette occasion, avec les physionomies bien connues des Ambassadeurs accrédités depuis quelques années, les nouveaux Chefs de Mission qui ont commencé officiellement leur mission diplomatique auprès du Saint-Siège au cours de l’année écoulée, et jusqu’à ces tout derniers jours. Ils sont au nombre de vingt-trois et représentent la République Dominicaine, le Gabon, la Jamaïque, l’Ouganda, l’Indonésie, le Nicaragua, Saint-Marin, la République Populaire du Congo, la Grande-Bretagne, la Grèce, l’Irlande, l’Australie, la République Centrafricaine, le Venezuela, l’Egypte, la Belgique, l’Espagne, la Colombie, le Madagascar, l’Irak, le Mali, le Japon et l’Autriche. Parmi eux, comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner devant le Sacré Collège avant Noël, il y a des Ambassadeurs de pays qui, pour la première fois dans leur histoire, ont établi des relations diplomatiques avec le Saint-Siège. Ils viennent se joindre à votre grande famille – car, je le sais bien, le Corps Diplomatique près le Saint-Siège est une véritable famille –, et ils s’inscrivent ainsi dans la ligne de continuité qui donne une signification toute particulière à la présence officielle, dans la maison du Pape, de représentants des peuples du monde entier auprès de lui et de ses collaborateurs directs. C’est une continuité qui persiste et s’approfondit, une continuité qui favorise la compréhension mutuelle entre le Siège de Pierre et chacun de vos gouvernements et de vos peuples, une continuité qui encourage le soutien réciproque dans la cause de la paix, de la défense de l’homme, du développement de la vie des nations. Une telle continuité exprime bien les rapports d’amitié, d’estime, de collaboration avec toutes les nations du monde que le Saint-Siège veut entretenir, dans un esprit pacifique et respectueux, avec les responsables de la vie publique.



3. La venue au Vatican de quelques Chefs d’Etat met bien en lumière cette réalité. J’évoque avec grand plaisir les visites accomplies l’année dernière par le Président de la République du Sénégal, le Grand-Duc et la Grande-Duchesse de Luxembourg, le Président de la République de Chypre, le Président de la République de Tanzanie, le Roi Hassan du Maroc, le Président de la République du Portugal, le Président des Etats-Unis d’Amérique, le Grand-Maître de l’Ordre Souverain Militaire de Malte, le Roi Hussein de Jordanie, les Capitaines-Régents de la République de Saint-Marin, le Président de la République du Zaïre, le Président de la République du Mali, la Reine Elizabeth d’Angleterre, le Prince Régnant du Liechtenstein, le Prince et la Princesse de Suède, le Président de la République de Sierra Leone, le Président de la Présidence de la République de Yougoslavie.

Je me rappelle également les visites d’autres personnalités des gouvernements de divers Etats et d’Organisations internationales.

Dans la variété des situations historiques, ces présences de hautes autorités auprès de l’humble successeur de saint Pierre soulignent le désir mutuel d’approfondir les liens d’une entente dont bénéficient les peuples au milieu desquels l’Eglise vit et veut servir l’homme.



4. Je pense donc que cette rencontre annuelle avec vous, membres illustres du Corps Diplomatique, représente un moment particulièrement significatif de mon ministère pastoral. Par votre présence, j’ai en effet sous les yeux toute la communauté internationale, à la physionomie et à la composition si variées. Vous êtes un véritable “ forum ” qui me remet en mémoire mes rencontres avec les représentants des peuples à l’ONU, à la FAO, à l’UNESCO; ce sont bien vos propres communautés, et aussi la communauté entière des diverses nations du monde, que j’ai devant les yeux.

Lors des voyages pastoraux que j’accomplis dans les différentes régions du monde, je ressens l’expérience d’une double réalité: d’un côté, les populations qui se rencontrent, apportant leur poids d’histoire et de vie qui s’exprime dans la foi religieuse, la culture, les convictions, les espérances et même les souffrances, toutes choses dans lesquelles l’Eglise, communauté de croyants, est profondément insérée comme une part, plus ou moins étendue, de cette réalité humaine; d’un autre côté, les représentants et les responsables de la vie institutionnelle de chaque pays, les Autorités gouvernementales, avec lesquels j’ai pu avoir chaque fois des rencontres et des conversations utiles.

Cette double réalité correspond au double dialogue que, dans ma mission de Pasteur universel, je me sens le devoir d’entretenir constamment: l’un se fait avec l’homme de la vie concrète, pour raviver en lui la force animatrice de la parole évangélique, ou au moins pour la lui annoncer afin qu’il la connaisse et détermine son attitude à son égard; l’autre dialogue s’adresse aux responsables de la vie politique et sociale, pour offrir une simple coopération, désintéressée, aux grandes causes qui touchent la vie de l’humanité: la paix, la justice, les droits de la personne, le bien commun.



5. Je suis convaincu qu’en agissant ainsi le Saint-Siège, loin de se mêler de domaines qui ne seraient pas siens, ne fait que donner une expression concrète à la mission universelle de l’Eglise, qui s’adresse à tous les hommes, qui est répandue dans toutes les régions de la terre, et qui est par nature solidaire de tous les êtres humains, hommes et femmes, spécialement des pauvres et de ceux qui souffrent.

Ses vicissitudes historiques durant près de deux millénaires, à travers tant de générations, et l’expérience vécue parmi les groupes humains les plus divers, d’origine et de civilisations si différentes, donnent à l’Eglise une grande facilité d’approche et de dialogue sur bien des problèmes.

Il est vrai que la société civile ne coïncide pas avec la société religieuse, et que les deux missions, celle de l’Eglise et celle de l’Etat, doivent rester nettement distinctes. Mais il est vrai aussi que l’Eglise et l’Etat sont ordonnés au bien – spirituel d’une part, temporel de l’autre – des personnes humaines, et que leur dialogue mutuel, respectueux et loyal, loin de troubler la société, l’enrichit au contraire.

Que vient offrir l’Eglise? Dans le dialogue bilatéral, avec les gouvernements, elle met à leur disposition l’apport d’une institution qui tient en honneur les plus hautes valeurs de l’homme et qui ne peut jamais se sentir étrangère à aucun des problèmes débattus dans quelque contexte social que ce soit. Même lorsqu’elle trouve des obstacles devant elle, lorsqu’elle subit des contraintes ou lorsqu’elle est persécutée, l’Eglise ne cesse pas d’être “ interne ”, bien enracinée dans la réalité globale du pays dans lequel elle vit et solidaire avec elle. Et c’est là le motif pour lequel le Saint-Siège, comme je l’ai dit, se sent uni à chaque peuple, à chaque nation. C’est aussi le motif pour lequel les représentants diplomatiques accrédités près le Saint-Siège ne peuvent pas – même s’ils ne sont pas catholiques ou chrétiens – se sentir “ étrangers ” dans la maison du Pasteur universel; de même que le Pape, lorsqu’il visite les divers pays, se sent “ chez lui ” dans chaque nation qui l’accueille.



6. Cette réalité globale que l’Eglise a toujours devant les yeux et qui constitue le dénominateur commun de la vie de chacun des peuples du monde, c’est leur culture, leur vie spirituelle, sous quelque forme qu’elle se manifeste. En parlant de réalité globale, de vie spirituelle, ma pensée voudrait s’arrêter cette année, dans ce colloque avec vous, sur le devoir qui incombe à tous les responsables de défendre et de garantir à tout prix la culture entendue en ce sens très vaste.

La culture est la vie de l’esprit; c’est la clef qui donne accès aux secrets les plus profonds et les plus jalousement gardés de la vie des peuples; c’est l’expression fondamentale et unificatrice de leur existence, parce que dans la culture se rencontrent les richesses, je dirais quasi inexprimables, des convictions religieuses, de l’histoire, du patrimoine littéraire et artistique, du substrat ethnologique, des attitudes et de la “ forma mentis ” des peuples. Bref, dire “ culture ”, c’est exprimer en un seul mot l’identité nationale qui constitue l’âme de ces peuples et qui survit malgré les conditions adverses, les épreuves de tout genre, les cataclysmes historiques ou naturels, en demeurant une et compacte à travers les siècles. En fonction de sa culture, de sa vie spirituelle, chaque peuple se distingue de l’autre, qu’il est par ailleurs appelé à compléter en lui fournissant l’apport spécifique dont l’autre a besoin.



7. Dans mon discours au siège de l’UNESCO, le 2 juin à Paris, j’ai mis en relief cette réalité: si la culture est l’expression par excellence de la vie spirituelle des peuples, elle ne doit jamais être séparée de tous les autres problèmes de l’existence humaine, que ce soit ceux de la paix, de la liberté, de la défense, de la faim, de l’emploi, etc. La solution de ces problèmes dépend de la façon correcte de comprendre et de situer les problèmes de la vie spirituelle, qui conditionne ainsi tous les autres et s’en trouve conditionnée.

C’est la culture, entendue dans ce sens large, qui garantit la croissance des peuples et préserve leur intégrité. Si on l’oublie, on voit tomber les barrières qui sauvegardent l’identité et la véritable richesse des peuples. Comme je l’ai dit à cette occasion, “ la Nation est en effet la grande communauté des hommes qui sont unis par des liens divers, mais surtout, précisément, par la culture. La Nation existe “par” la culture et “pour” la culture, et elle est donc la grande éducatrice des hommes pour qu’ils puissent “être davantage” dans la communauté. Elle est cette communauté qui possède une histoire dépassant l’histoire de l’individu et de la famille. C’est aussi dans cette communauté, en fonction de laquelle toute famille éduque, que la famille commence son oeuvre d’éducation par ce qui est le plus simple, la langue, permettant ainsi à l’homme qui en est à ses débuts d’apprendre à parler pour devenir membre de la communauté qu’est sa famille et sa nation... Mes mots traduisent une expérience particulière, un témoignage particulier en son genre. Je suis fils d’une nation qui a vécu les plus grandes expériences de l’histoire, que ses voisins ont condamnée à mort à plusieurs reprises, mais qui a survécu et qui est restée elle-même. Elle a conservé, malgré les partitions et les occupations étrangères, sa souveraineté nationale, non en s’appuyant sur les ressources de la force physique, mais uniquement en s’appuyant sur sa culture.

Cette culture s’est révélée en l’occurrence d’une puissance plus grande que toutes les autres forces. Ce que je dis ici concernant le droit de la nation au fondement de sa culture et de son avenir n’est donc l’écho d’aucun “nationalisme”, mais il s’agit toujours d’un élément stable de l’expérience humaine et des perspectives humaines du développement de l’homme. Il existe une souveraineté fondamentale de la société qui se manifeste dans la culture de la nation. Il s’agit de la souveraineté par laquelle, en même temps, l’homme est suprêmement souverain. Et quand je m’exprime ainsi, je pense également, avec une émotion intérieure profonde, aux cultures de tant de peuples antiques qui n’ont pas cédé lorsqu’ils se sont trouvés confrontés aux civilisations des envahisseurs: et elles restent encore pour l’homme la source de son “être” d’homme dans la vérité intérieure de son humanité. Je pense aussi avec admiration aux cultures des nouvelles sociétés, de celles qui s’éveillent à la vie dans la communauté de la propre nation – tout comme ma nation s’est éveillée à la vie il y a dix siècles – et qui luttent pour maintenir leur propre identité et leurs propres valeurs contre les influences et les pressions de modèles proposés de l’extérieur ”[1].

En ce sens on peut dire que la culture est le fondement de la vie des peuples, la racine de leur identité profonde, le support de leur survivance et de leur indépendance.



8. Mais ceci vaut d’autant plus pour les peuples que la culture est l’expression la plus élevée de la vie de chacun des hommes. L’homme, ai-je dit encore à l’UNESCO, “est le fait primordial et fondamental de la culture ”[2]. C’est elle qui unifie les éléments dont l’homme est composé et qui se complètent mutuellement tout en étant parfois dans une tension réciproque profonde: esprit et corps. L’un ne peut dépasser ses limites au détriment de l’autre; et ce qui garantit ce difficile équilibre – avec la grâce de Dieu –, c’est précisément la vie globale de l’homme, la culture, que j’aimais définir à Paris comme “système humain, synthèse splendide de l’esprit et du corps”[3].

L’histoire bimillénaire de l’Eglise, nous le savons, s’entrecroise avec les plus hautes expressions de la vie spirituelle et culturelle des diverses nations de l’ancien et du nouveau monde, et l’Eglise suit aujourd’hui avec une particulière attention, comme je l’ai souligné dans mon voyage en Afrique, le délicat processus de valorisation des cultures autochtones. Voilà pourquoi elle prend à coeur la plus large gamme de valeurs que le mot “ culture ” contient et signifie. Dans le discours que j’ai adressé à vos collègues du Corps Diplomatique au Kenya, j’ai tenu à relever que “ le chemin que toute communauté humaine doit suivre dans sa recherche du sens profond de son existence, c’est le chemin de la vérité sur l’homme dans sa totalité ”[4].

Eh bien, chers Messieurs, de même que pour vous et pour vos gouvernements, c’est tout l’homme, formé d’esprit et de corps, qui tient à coeur à l’Eglise, de par la mission reçue de son Fondateur: cela englobe ses problèmes et ses intérêts, aussi bien sur le plan spirituel que sur le plan matériel, car sans ce dernier le premier ne peut se développer de façon adéquate.



9. Dans cette grandiose vision unitaire, le Saint-Siège se sent solidaire de toutes les grandes initiatives qui cherchent à résoudre les problèmes de l’humanité: avant tout, pour ce qui est du plan matériel, les secours généreux et efficaces apportés aux peuples des régions qui souffrent de la faim, de la soif ou d’autres calamités – et j’exprime à nouveau ici toute ma solidarité avec la région éprouvée du Sahel, que je ne cesse de regarder avec une attention particulière –; l’impulsion donnée à l’accroissement de l’agriculture pour assurer une alimentation suffisante; l’action sanitaire contre les maladies, spécialement en faveur de l’enfance et des gens les plus pauvres; la distribution plus équitable des ressources, non seulement matérielles, mais technologiques et scientifiques, pour offrir aux populations des possibilités toujours plus concrètes d’être les artisans de leur propre vie et de leur développement.

Matériellement, le Saint-Siège a des moyens bien limités d’y concourir; plus considérable est la contribution que sont en mesure d’apporter les organisations catholiques des divers pays, ou celles qui ont un caractère international. Mais je crois que l’ensemble des peuples attend constamment et avant tout du Saint-Siège l’apport d’une force spirituelle visant à encourager et à susciter de manière plus efficace la coopération internationale qui est déjà à l’oeuvre dans les instances appropriées, comme la FAO, l’UNESCO et l’OMS.



10. Précisément, c’est sur le plan spirituel que s’exerce spécialement la sollicitude de l’Eglise, parce que c’est là que se joue le destin éternel des hommes et la vie ordonnée des peuples.

Il faut citer avant tout le problème fondamental de la paix; il polarise tous les efforts des hommes de bonne volonté et l’Eglise lui apporte ses encouragements par tous les moyens dont elle dispose, surtout en sensibilisant les consciences au plan mondial sur le devoir de défendre ce bien fragile et menacé, qui est pourtant prioritaire à tous les niveaux. Dans le discours aux Cardinaux de décembre dernier, j’ai longuement parlé de l’action accomplie par l’Eglise en ce domaine. Qu’il me soit permis de rappeler encore ici la célébration annuelle de la Journée de la Paix: elle m’offre d’ailleurs l’occasion de vous remercier publiquement de la collaboration que vous avez apportée à vos Gouvernements et de la présence que vous assurez pratiquement tous chaque année en célébrant cette Journée avec moi dans la basilique Saint-Pierre.

En matière de défense de la paix, le rôle du Saint-Siège s’exerce dans les tensions et dans les crises de la vie internationale. Là encore, il veut s’inspirer toujours d’une vision globale du bien commun. Cela ne se fait pas sans difficultés, à cause des positions contraires que tiennent les parties. D’une part, le Saint-Siège veut être plein d’attention et de respect pour les raisons subjectives dont chacune des parties se réclame ou qu’elle met en évidence; par ailleurs il y a aussi la complexité des aspects hautement techniques, ou le manque de données véritables. Tout cela fait que le Saint-Siège doit assez souvent s’abstenir d’exprimer un jugement concret sur les thèses en présence. C’est le cas, entre autres, du désarmement.

Le Saint-Siège est profondément convaincu – et il a pu le répéter en maintes occasions – que la course aux armements est ruineuse pour l’humanité et que, bien loin de diminuer la menace qui pèse sur la sécurité et la paix mondiale, elle l’accroît. Il met l’accent sur les éléments fondamentaux rendant possible et réaliste un accord qui ferait renoncer à la course aux moyens de destruction toujours nouveaux et plus puissants. Ces éléments sont notamment un climat de plus grande confiance, qui peut naître d’une détente effective et globale dans les rapports internationaux; le respect des prérogatives de tous les peuples, même s’ils sont petits et désarmés, prérogatives fondées sur leur identité culturelle; la collaboration sincère pour améliorer “ la composante humaine de la paix ”, représentée avant tout par le respect des droits de l’homme.

Dans ce contexte, il est parfaitement logique de se demander si vraiment la paix doit se mesurer seulement à l’absence d’affrontement direct entre les plus grandes Puissances. La communauté internationale peut-elle se résigner à la prolongation d’une guerre aussi âpre que celle qui dure depuis quelques mois entre l’Irak et l’Iran? Les victimes qui y laissent leur vie, les peuples soumis à des souffrances et à des privations, les ressources qui s’appauvrissent dans l’un et l’autre pays, tout cela ne suffit-il pas pour en appeler à la conscience des gouvernants et des peuples qui assistent sans réagir à ce drame?



11. Le Saint-Siège est donc convaincu que c’est avant tout “ l’âme de la paix ” qui doit être renforcée, c’est-à-dire un meilleur rapport entre les Etats, obtenu en améliorant la condition humaine des personnes et des peuples dans la jouissance de leurs libertés et de leurs droits fondamentaux, tels qu’ils sont présentés par les diverses civilisations. Pour cela, tout comme il avait été amené à participer à la Conférence d’Helsinki sur la sécurité et la coopération en Europe, le Saint-Siège participe de la même façon à la réunion qui se tient actuellement à Madrid comme auparavant à Helsinki et à Belgrade, la voix du Saint-Siège s’élève en faveur du respect de la liberté religieuse, élément fondamental pour la paix des esprits. J’ai voulu consacrer à ce thème une réflexion particulière dans un document envoyé aux Chefs d’Etat des pays signataires de l’Acte final d’Helsinki, réflexion que j’estime applicable aussi dans un domaine international plus vaste, pour d’autres pays et d’autres continents.

On ne peut pas parler de la liberté religieuse, forme la plus élevée de liberté spirituelle qui puisse germer de l’humus de la civilisation et de la culture, si on fait abstraction du principe que j’ai plusieurs fois rappelé, à savoir que l’homme intégral est le premier sujet de la culture, comme il est son unique objet et sa fin [5]. En violant la liberté religieuse, en l’opprimant, en la limitant, en l’étouffant, on fait à l’homme le plus grand des affronts, car la dimension spirituelle et religieuse est celle à partir de laquelle se mesure toute autre grandeur humaine. Effectivement, un lien fondamental unit la religion en général, et particulièrement le christianisme, aux formes les plus hautes de la culture [6].

En font foi les témoignages innombrables parmi lesquels il suffit de rappeler, pour l’Europe, l’influence déterminante que la figure et l’oeuvre des saints patrons de notre continent eurent sur le développement spirituel et matériel de peuples si divers, et pourtant intimement unis par des intérêts spirituels communs, auxquels consacrèrent leur vie ces hommes extraordinaires que furent saint Benoît en Occident, les saints Cyrille et Méthode en Orient. Et il me plaît d’évoquer leur souvenir ici, au cours de la rencontre de ce jour, alors qu’on a célébré le premier en diverses circonstances solennelles au cours de l’année écoulée, à l’occasion du quinzième centenaire de sa naissance, et que les seconds ont été récemment proclamés eux aussi patrons de l’Europe, événement favorablement accueilli en ce continent et dans le monde.

D’ailleurs, il faut le souligner, l’héritage qui caractérise les autres continents – avec toutefois des modèles culturels et historiques différenciés – trouve lui aussi son origine et son explication dans l’inspiration religieuse, humaniste et éthique, des différentes religions, comme je l’ai encore souligné à l’UNESCO [7].



12. Je voudrais ajouter une autre réflexion au sujet du plan spirituel, qui intéresse le développement de l’homme dans son intégralité comme aussi le progrès des peuples. Dans ma récente encyclique Dives in Misericordia, j’ai relevé que, parmi les causes d’inquiétude qui assaillent l’homme contemporain, il y a “ une sorte d’abus de l’idée de justice ” et même “ une altération pratique ” dus au fait que “ souvent, les programmes fondés sur l’idée de justice et qui doivent servir à sa réalisation dans la vie sociale des personnes, des groupes et des sociétés humaines, subissent en pratique des déformations. Bien qu’ils continuent toujours à se réclamer de cette même idée de justice, l’expérience démontre que souvent des forces négatives, comme la rancoeur, la haine, et jusqu’à la cruauté, ont pris le pas sur elle. Alors, le désir de réduire à rien l’adversaire, de limiter sa liberté, ou même de lui imposer une dépendance totale, devient le motif fondamental de l’action; et cela s’oppose à l’essence de la justice qui, par nature, tend à établir l’égalité et l’équilibre entre les parties en conflit ”[8].

Une telle “ altération ” de la justice est une expérience que l’humanité fait encore aujourd’hui à travers les guerres, les révolutions ou les crises internationales, et qui rend difficile, sinon impossible, de faire progresser des solutions pacifiques adéquates, stables et conformes à la dignité naturelle des peuples. On pourrait appliquer ce critère à presque toutes les crises, et en particulier à celles qui apparaissent comme insolubles ou chroniques. Parmi celles-ci, il faut citer comme typique le problème du Moyen-Orient. Comment peut-on penser, en effet, à l’établissement d’une paix stable si on ne tient pas compte, dans une mesure égale, des exigences de tous les peuples intéressés, de leur existence et de leur sécurité, comme de la possibilité de poser les bases d’une collaboration future?

Ici, il est évident que la revendication, avec des prétentions absolues, de son propre droit ne conduira jamais à la paix, parce que cette revendication présuppose la négation, ou la diminution excessive, du droit d’autrui; alors que seule l’équité, c’est-à-dire la capacité d’équilibrer avantage et renonciations de la part de toutes les parties intéressées, peut ouvrir la voie à un accord global pour vivre en commun. Cela signifie que, comme je le disais dans l’encyclique, il n’y a pas de justice si elle n’est pas complétée par l’amour. Une telle attitude d’esprit est facilitée si on se rend compte que les peuples comme les personnes ont des biens propres et des biens communs, et que ces derniers ne sont pas divisibles, mais qu’on peut seulement en jouir ensemble, en faisant l’expérience d’une collaboration loyale et confiante.



13. Une altération de la justice se remarque aussi dans le processus de certaines révolutions lorsque, pour transformer une situation sociale jugée injuste, et qui l’est effectivement souvent, on prétend imposer un régime idéologique qui est en contradiction avec les convictions religieuses et éthiques, anciennes et profondes, des peuples intéressés. Mais, mis à part le fait qu’on ne peut pas échanger des biens spirituels contre des biens matériels, il s’agit d’un faux dilemme, parce que c’est un devoir de conscience, pour celui qui s’inspire d’une conception chrétienne, de promouvoir efficacement la justice en sauvegardant la foi et la liberté, ainsi que les autres biens spirituels d’un peuple. On ne peut trahir l’identité et la souveraineté des peuples, car elles naissent du patrimoine spirituel propre à chacun d’eux, qui en fonde la dignité et la noblesse, supérieures à tout intérêt de parti. Je forme des vaeux pour que certaines régions tourmentées du monde, telles que l’Amérique latine, trouvent dans leurs racines spirituelles et humaines la sagesse et la force de s’avancer vers un sain progrès, qui ne renie pas le passé et qui soit garant d’une véritable civilisation.

Parlant de l’Amérique latine, je ne puis pas ne pas attirer l’attention de tous sur les tractations en cours entre l’Argentine et le Chili, deux nations qui ont souhaité la médiation du Siège Apostolique pour la solution d’un problème délicat touchant la concorde réciproque entre ces deux grands et nobles pays. La demande de médiation a été un signe de bonne volonté notoire. C’est pourquoi je forme des souhaits et je demande de prier pour qu’une solution heureuse vienne couronner définitivement tant de tractations qui ont abouti, au cours de l’audience du 12 décembre dernier, à la remise solennelle de propositions précises aux deux Ministres des Affaires Etrangères accompagnés de leurs Délégations respectives.



14. Excellences, Mesdames et Messieurs, les problèmes que je viens de passer en revue avec vous, en les considérant à la lumière supérieure de la culture, âme et vie des peuples, requièrent une solidarité universelle, surpassant toutes les hostilités préconçues, les incompréhensions ou les spéculations économiques qui rendent aujourd’hui si difficile et pleine d’angoisse la vie de la communauté internationale. L’Eglise est disposée à accomplir la part qui lui revient, comme elle s’efforce de l’accomplir habituellement, grâce aux meilleurs de ses hommes. Et je veux citer ici spécialement les missionnaires qui travaillent sous toutes les latitudes, dans le monde entier, et aussi les hommes engagés dans les organisations internationales et dans divers organismes sociaux.

Ce travail immense, que l’Eglise et vos responsables veulent accomplir ensemble, se résume en un seul mot: le service de l’homme. Voilà quelle doit être l’inspiration d’aujourd’hui, la raison fondamentale de la promotion de la paix, du respect réciproque, de la concorde internationale, que l’Eglise veut favoriser de toutes ses forces sous le regard de Dieu, et qu’elle appelle à accomplir par amour de l’homme.

Tel est le voeu que je vous adresse, au début de cette année qui commence à peine, et que je vous prie de transmettre à vos gouvernements. Puisse l’année nouvelle voir la communauté internationale s’engager toujours plus sincèrement et plus efficacement au service de l’homme, du bien public, et non pas d’intérêts privés, dans une fraternité toujours plus réelle, celle qui est fondée pour tous les peuples sur les liens communs du respect mutuel, et qui a pour les chrétiens un unique fondement: le Christ, son Incarnation, la Rédemption qu’il a opérée pour ses frères les hommes.

A vous tous encore, à vos familles, aux nations que vous représentez, mes voeux les plus cordiaux et les plus affectueux.

Bonne année!

[1] Ioannis Pauli PP. II Allocutio ad eos qui conventui Consilii ad exsecutione internationalis organismi compendiariis litteris UNESCO nuncupati affuere, 14, die 2 iun. 1980: Insegnamenti di Giovanni Paolo II, III, 1 (1980) 1647-1648.
[2] Ibid.: l.c., p. 1641.
[3] Ibid.: l.c., p. 1642.
[4] Eiusdem Allocutio Nairobiae, ad exterarum civitatum Legatos in aedibus Apostolicae Nuntiaturae coram admissos, habita, 3, die 6 maii 1980: Insegnamenti di Giovanni Paolo II, III, 1 (1980) 1189.
[5] Cfr. Eiusdem Allocutio ad eos qui conventui Consilii ad exsecutione internationalis organismi compendiariis litteris UNESCO nuncupati affuere, 7, die 2 iun. 1980: Insegnamenti di Giovanni Paolo II, III, 1 (1980) 1640.
[6] Cfr. ibid. 9: l. c., p. 1642.
[7] Cfr. ibid. 9: l. c., p. 1643.
[8] Eiusdem Dives in Misericordia, DM 12.







Discours 1981