2002 Magistère Mariage 1406

Le sacrement de mariage est le signe visible de tout le

mystère d'alliance

13 octobre 1982

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1. Dans nos considérations précédentes nous avons cherché à approfondir - à la lumière de l'épître aux Ephésiens - l'origine sacramentelle de l'homme et du. mariage dans l'état de la justice (ou innocence) originelle.
On sait toutefois que l'héritage de la grâce a été rejeté par le coeur humain au moment de la rupture de la première Alliance avec le Créateur. La perspective de la procréation, au lieu d'être illuminée par l'héritage de la grâce originelle, accordée par Dieu au moment même où fut donnée l'âme raisonnable, a été voilée par l'héritage du péché originel. On peut dire que le mariage, en tant que sacrement primordial, a été privé de cette efficacité surnaturelle qu'il puisait, au moment de son institution, dans le sacrement de la création globale. Néanmoins, même dans cet état - c'est-à-dire celui de la culpabilité héréditaire de l'homme - le mariage ne cesse d'être la figure de ce sacrement dont il est question dans Ep 5,22-33, et que l'auteur de l'épître n'hésite pas à qualifier de "mystère de grande portée". Ne pouvons-nous pas en déduire que le mariage est encore et toujours cette plate-forme de la réalisation des desseins éternels de Dieu, selon lesquels le sacrement de la création a rapproché les hommes et les a préparés au sacrement de la Rédemption, les introduisant dans la dimension de l'oeuvre du salut? L'analyse de l'épître aux Ephésiens et particulièrement du texte classique Ep 5,22-33 semble pencher vers cette solution-là.

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2. Quand, au verset 31, l'auteur se réfère aux paroles de l'institution du mariage que nous trouvons dans Gn 2,24 "C'est pourquoi l'homme laissera son père et sa mère, s'attachera à sa femme et ils deviendront une seule chair", puis qu'il déclare aussitôt après "c'est un mystère de grande portée". Il semble indiquer non seulement le mystère caché en Dieu de toute éternité mais aussi cette continuité dans la réalisation qui existe entre le sacrement primordial connexe à la gratification surnaturelle de l'homme dans la création même et le don nouveau advenu quand le Christ "a tant aimé l'Eglise qu'il s'est livré pour elle; pour la rendre sainte ..." Ep 5,25-26 - don que l'on peut définir dans son ensemble comme sacrement de la Rédemption. Dans ce don rédempteur de lui-même pour l'Eglise, se trouve également compris - suivant la pensée de saint Paul - le don de soi que le Christ a fait à l'Eglise, à la ressemblance de la relation conjugale qui, dans le mariage, unit l'homme et la femme. De cette manière, le sacrement de la Rédemption revêt en un certain sens la figure et la forme du sacrement primordial. Au mariage du premier mari et de la première femme, en tant que signe de la gratification surnaturelle de l'homme dans le sacrement de la création, correspondent les épousailles ou, plutôt, l'analogie des épousailles du Christ avec l'Eglise comme grand signe fondamental de la gratification surnaturelle de l'homme dans le sacrement de la Rédemption - de la gratification dans laquelle se renouvelle de manière définitive l'alliance de la grâce d'élection, rompue à l'origine à cause du péché.

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3. L'image que présente le passage de l'épître aux Ephésiens semble parler surtout du sacrement de la Rédemption en tant que réalisation définitive du mystère caché en Dieu de toute éternité. Dans ce mysterium magnum se réalise définitivement en effet tout ce dont l'épître aux Ephésiens a traité en son premier chapitre. En effet, elle nous dit non seulement - comme nous nous en souvenons - "C'est ainsi qu'il nous a élus en lui (c'est-à-dire dans le Christ) dès avant la création du monde, pour être saints et immaculés en sa présence dans l'amour ..." Ep 1,4, mais encore: "En lui (le Christ), nous trouvons la Rédemption par son sang, la rémission des fautes, selon la richesse de sa grâce qu'il nous a prodiguée en toute sagesse et intelligence ..." Ep 1,7-8 La nouvelle gratification surnaturelle de l'homme dans le sacrement de la Rédemption est également une réalisation nouvelle du mystère caché en Dieu de toute éternité - nouvelle par rapport au sacrement de la création. En ce moment, la gratification est, en un certain sens, une nouvelle création. Elle est toutefois différente du sacrement de la création du fait que la gratification originelle liée à la création de l'homme constituait cet homme depuis l'origine, moyennant la grâce, en l'état de l'innocence, de la justice originaire. La nouvelle gratification de l'homme dans le sacrement de la Rédemption lui donne, au contraire, avant tout la rémission des péchés. Toutefois, ici, peut également surabonder la grâce comme du reste le dit saint Paul: "Là où le péché s'est multiplié, la grâce a surabondé" Rm 5,20.

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4. Le sacrement de la Rédemption - fruit de l'amour rédempteur du Christ - devient, sur la base de son amour nuptial "pour l'Eglise", une dimension permanente de la vie même de l'Eglise, dimension fondamentale et vivifiante. C'est le mysterium magnum du Christ et de l'Eglise: mystère éternel réalisé par le Christ qui "s'est livré pour elle" Ep 5,25; mystère qui se réalise continuellement dans l'Eglise parce que comme objet de la foi, celui-ci reste voilé également à travers ce qui l'exprime et le réalise. La visibilité de l'invisible appartient donc à l'ordre des signes, et le signe indique seulement la réalité du mystère, mais il ne la dévoile pas. Comme le premier Adam, l'être humain - homme et femme - créé à l'état d'innocence originaire et appelé en cet état à l'union conjugale (en ce sens, nous parlons du sacrement de la création) fut le signe de l'éternel mystère, ainsi le second Adam, le Christ, uni à l'Eglise, par le sacrement de la Rédemption, grâce à un lien indissoluble, analogue à l'alliance indissoluble des époux, est un signe définitif du même mystère éternel. En parlant donc de la réalisation de l'éternel mystère, nous parlons également du fait que celui-ci devient visible par la visibilité du signe. C'est pourquoi nous parlons également de la nature sacramentelle de tout l'héritage du sacrement de la Rédemption par référence à toute l'oeuvre de la création et de la Rédemption et, d'autant plus, par référence au mariage institué dans le contexte du sacrement de la création; et de même par référence à l'Eglise comme Epouse du Christ, dotée d'une alliance quasi conjugale avec Lui.



Le mariage, partie intégrante de la nouvelle économie

sacramentelle

20 octobre 1982

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1. Mercredi dernier, nous avons parlé de l'héritage intégral de l'Alliance avec Dieu, et de la grâce unie originairement à l'oeuvre divine de la création. Faisait également partie de cet héritage intégral - comme il convient de le déduire de Ep 5,22-33 - le mariage comme sacrement primordial, institué dès l'origine et lié au sacrement de la création considérée globalement. Le caractère sacramentel du mariage n'est pas seulement modèle et figure du sacrement de l'Eglise (du Christ et de l'Eglise) mais constitue également une part essentielle du nouvel héritage: l'héritage du sacrement de la Rédemption, dont l'Eglise a été gratifiée dans le Christ. Ici, il importe une fois de plus de se reporter aux paroles du Christ dans Mt 19,3-9 Mc 10,5-9 où, répondant à la demande des pharisiens au sujet du mariage et de son caractère spécifique, Jésus se réfère uniquement, exclusivement, à l'institution originaire - à l'origine donc -, par le Créateur. Réfléchissant sur la signification de cette réponse, à la lumière de l'épître aux Ephésiens (en particulier Ep 5,22-33), nous pouvons conclure à une relation, double en un certain sens, entre le mariage et tout l'ordre sacramentel qui, dans la Nouvelle Alliance, émerge de ce même sacrement de la Rédemption.

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2. Comme sacrement primordial, le mariage constitue d'une part la figure (et donc: la ressemblance, l'analogie), suivant laquelle s'édifie la structure portante fondamentale de la nouvelle économie du salut et de l'ordre sacramentel où trouve son origine le don conjugal que l'Eglise a reçu du Christ en même temps que tous les biens de la Rédemption (on pourrait dire en reprenant les premières paroles de l'épître aux Ephésiens: "bénis par toutes sortes de bénédictions spirituelles" Ep 1,3. De cette manière, le mariage est, en tant que sacrement primordial, assumé et inséré dans la structure intégrale de la nouvelle économie sacramentelle, issue de la Rédemption sous forme de prototype, dirais-je: le mariage est assumé et inséré à partir de ses bases mêmes. Dans son entretien avec les pharisiens Mt 19,3-9, le Christ lui-même reconfirme avant tout son existence. A bien réfléchir sur cette dimension il faudrait conclure que tous les sacrements de la Nouvelle Alliance trouvent en un certain sens leur prototype dans le mariage en tant que sacrement primordial. Cela semble s'annoncer dans le passage classique déjà cité de l'épître aux Ephésiens, comme nous le dirons encore bientôt.

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3. Toutefois la relation du mariage avec tout l'ordre sacramentel, issue de la relation de l'Eglise avec les biens de la Rédemption, ne se limite pas seulement à la dimension du modèle. Dans son entretien avec les pharisiens Mt 19, le Christ non seulement confirme l'existence du mariage institué par le Créateur dès l'origine, mais le déclare aussi partie intégrante de la nouvelle économie sacramentelle, du nouvel ordre des signes salvifiques qui tire son origine du sacrement de la Rédemption, de même que l'économie originaire est issue du sacrement de la création; et en réalité le Christ se limite à l'unique sacrement qu'avait été le mariage institué à l'état d'innocence et de justice originaires de l'être humain, créé comme homme et femme à l'image et à la ressemblance de Dieu.

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4. La nouvelle économie sacramentelle, qui se constitue sur la base du sacrement de la Rédemption émergeant de la gratification nuptiale de l'Eglise de la part du Christ, est différente de l'économie originaire. En effet, elle s'adresse, non pas à l'homme, à la justice et innocence originelles, mais à l'homme chargé de l'héritage du péché originel, en état de culpabilité (status naturae lapsae). Elle s'adresse à l'homme à la triple concupiscence, suivant les paroles classiques de 1Jn 2,16, à l'homme "en qui la chair convoite contre l'esprit et l'esprit contre la chair" Ga 5,17, suivant la théologie (et l'anthropologie) de saint Paul, auxquelles nous avons réservé une large place dans nos réflexions précédentes.

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5. Ces considérations, basées sur une analyse approfondie de la signification de l'énoncé du Christ dans le Sermon sur la Montagne au sujet du regard concupiscent en tant qu'adultère dans le coeur, préparent à comprendre le mariage comme partie intégrante du nouvel ordre sacramentel qui tire son origine du sacrement de la Rédemption, c'est-à-dire de ce grand mystère qui, comme mystère du Christ et de l'Eglise, détermine le caractère sacramentel de l'Eglise elle-même. En outre, ces considérations préparent à comprendre le mariage comme sacrement de la Nouvelle Alliance, dont l'oeuvre salvifique s'unit organiquement à l'ensemble de cet éthos qui a été défini, dans les analyses précédentes, éthos de la Rédemption. L'épître aux Ephésiens exprime à sa manière la même vérité: en effet, elle parle du mariage comme d'un grand sacrement, dans un ample contexte parénétique, c'est-à- dire dans le contexte des exhortations de caractère moral concernant précisément l'éthos qui doit qualifier la vie des chrétiens, c'est-à-dire des hommes conscients de l'élection qui se réalise dans le Christ et dans l'Eglise.

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6. Sur cet ample fond de réflexions qui ressortent de la lecture de l'épître aux Ephésiens (plus particulièrement de Ep 5,22-33), on peut et l'on doit, enfin, toucher encore le problème des sacrements de l'Eglise. Le texte précité de l'épître aux Ephésiens en parle indirectement et, dirais-je, de manière secondaire bien que suffisante pour que ce problème ait également sa place dans nos considérations. Il convient toutefois de préciser au moins brièvement, le sens que nous adoptons dans l'emploi du terme sacrement, ce qui est important pour nos considérations.

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7. Jusqu'à présent en effet nous avons utilisé le terme sacrement, (conformément d'ailleurs à toute la tradition biblico-patristique (*)) en un sens plus ample que celui qui est le propre de la terminologie théologique traditionnelle et contemporaine. Par le terme sacrement celle-ci indique les signes institués par le Christ et administrés par l'Eglise qui expriment la grâce divine et la confèrent aux personnes qui reçoivent ce sacrement. En ce sens, chacun des sept sacrements de l'Eglise est caractérisé par une action liturgique déterminée, constituée à travers la parole (forme) et la spécifique matière sacramentelle, suivant la théorie hilémorphique provenant de Thomas d'Aquin et de toute la tradition scolastique.
Note (*) Cf. LEON XIII, Acta, t. 2, 1881, p. 22.

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8. En relation avec la signification circonscrite de cette manière, nous nous sommes servis, dans nos considérations, d'un sens plus large et peut-être aussi plus ancien et fondamental du terme sacrement (*). L'épître aux Ephésiens, et spécialement les versets 22-23 du chapitre 5, semblent tout particulièrement nous le permettre. Ici sacrement signifie le mystère de Dieu, caché depuis l'éternité, non pas toutefois dans un secret éternel, mais dans sa révélation et réalisation mêmes (également dans la révélation réalisation). On a parlé encore en ce sens du sacrement de sa création et du sacrement de la Rédemption. C'est sur la base du sacrement de la création qu'il faut comprendre le caractère sacramentel originaire du mariage (sacrement primordial). Puis, sur la base du sacrement de la Rédemption, on peut comprendre la nature sacramentelle de l'Eglise, ou plutôt la nature sacramentelle de l'union du Christ avec l'Eglise que l'auteur de l'épître aux Ephésiens présente dans la comparaison du mariage, de l'union conjugale du mari et de la femme. Une analyse attentive du texte démontre que, dans ce cas, il ne s'agit pas seulement d'une comparaison au sens métaphorique, mais d'un renouvellement réel (ou d'une recréation c'est-à- dire d'une nouvelle création) de ce qui constitue le contenu salvifique (en un certain sens, la substance salvifique) du sacrement primordial. Cette constatation a une importance essentielle tant pour expliquer la nature sacramentelle de l'Eglise (et à ceci se réfèrent les paroles très significatives de LG 1) que pour comprendre le caractère sacramentel du mariage entendu précisément comme un des sacrements de l'Eglise.
note (*). A ce propos, voir l'Allocution lors de l'Audience générale du 8 septembre 1982, J.P.II 8/9/1982 note



L'indissolubilité du mariage

27 octobre 1982

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1. Ep 5,22-33 parle des sacrements de l'Eglise, en particulier du baptême et de l'eucharistie, mais seulement de manière indirecte et, dans un certain sens, de manière allusive, en développant l'analogie du mariage en référence au Christ et à l'Eglise. C'est ainsi que nous lisons d'abord que le Christ, qui "a aimé l'Eglise et qui s'est livré pour elle" Ep 5,25, a fait cela pour "la sanctifier en la purifiant par le bain d'eau qu'une parole accompagne" Ep 5,26 Il s'agit ici incontestablement du sacrement de baptême qui, par l'institution du Christ, se trouve conféré depuis l'origine à ceux qui se convertissent. Les paroles citées montrent avec beaucoup de relief de quelle manière le baptême atteint sa signification essentielle et sa force sacramentelle à travers cet amour sponsal du Rédempteur par lequel se constitue surtout la sacramentalité de l'Eglise elle-même, qui est un grand sacrement. On peut peut-être dire la même chose de l'eucharistie à laquelle s'appliqueraient les paroles suivantes sur l'action de nourrir et de prendre soin du corps "comme le fait le Christ avec l'Eglise puisque nous sommes les membres de son corps" Ep 5,29-30. En effet, le Christ nourrit l'Eglise de son corps, précisément dans l'eucharistie.

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2. On voit cependant que, ni dans le premier ni dans le second cas, nous ne pouvons parler d'une sacramentalité amplement développée. On ne peut même pas en parler quand il s'agit du sacrement de mariage comme un des sacrements de l'Eglise. En exprimant la relation sponsale du Christ avec l'Eglise, l'épître aux Ephésiens permet de comprendre que, sur la base de cette relation, l'Eglise elle-même est le grand sacrement, le nouveau signe de l'alliance et de la grâce qui tire ses racines des profondeurs du sacrement de la Rédemption, de même que des profondeurs du sacrement de la création est sorti le mariage, signe primordial de l'alliance et de la grâce. L'auteur de l'épître aux Ephésiens proclame que ce sacrement primordial se réalise d'une manière nouvelle dans le sacrement du Christ et de l'Eglise. C'est même pour cette raison que l'apôtre, dans Ep 5,21-33, s'adresse aux conjoints pour qu'ils soient "soumis les uns aux autres dans la crainte du Christ" Ep 5,21 et qu'ils modèlent leur vie conjugale en la fondant sur le sacrement institué à l'origine par le Créateur: sacrement qui a trouvé sa grandeur et sa sainteté définitives dans l'alliance sponsale de grâce entre le Christ et l'Eglise.

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3. Bien que l'épître aux Ephésiens ne parle pas directement et immédiatement du mariage comme d'un des sacrements de l'Eglise, la sacramentalité du mariage s'y trouve cependant particulièrement confirmée et approfondie. Dans le grand sacrement du Christ et de l'Eglise, les conjoints chrétiens sont appelés à modeler leur vie et leur vocation sur le fondement sacramentel.

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4. Après l'analyse de Ep 5,21-33, adressé aux conjoints chrétiens, où Paul annonce le grand mystère (le grand sacrement) de l'amour sponsal du Christ et de l'Eglise, il importe de revenir à ces paroles significatives de l'Evangile que nous avons déjà analysées précédemment, en y voyant les énoncés clés pour la théologie du corps. Le Christ prononce ces paroles, pour ainsi dire, à partir de la profondeur divine de la "Rédemption du corps" Rm 8,23. Toutes ces paroles ont une signification fondamentale pour l'être humain en ce qu'il est précisément corps, en ce qu'il est homme et femme. Elles ont une signification pour le mariage où l'homme et la femme s'unissent de manière que les deux deviennent "une seule chair", selon l'expression de Gn 2,24 bien que, dans le même temps, les paroles du Christ indiquent aussi la vocation à la continence "à cause du Royaume des Cieux" Mt 19,12


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5. Dans chacune de ces voies, la Rédemption du corps n'est pas seulement la grande attente de ceux qui possèdent "les prémices de l'Esprit" Rm 8,23, mais aussi une source permanente d'espérance que la création sera "libérée de la servitude de la corruption pour entrer dans la liberté de la gloire des fils de Dieu" Rm 8,21. Les paroles du Christ, prononcées à partir de la profondeur divine du mystère de la Rédemption et de la Rédemption du corps, portent en elle le levain de cette espérance: elles lui ouvrent une perspective aussi bien dans la dimension eschatologique que dans la dimension de la vie quotidienne. En effet, les paroles adressées aux auditeurs immédiats sont adressées en même temps à l'homme historique des différents temps et des différents lieux. Cet homme qui possède précisément les prémices de l'Esprit "gémit en attendant la Rédemption du corps" Rm 8,23. En lui se concentre aussi l'espérance cosmique de toute la création qui "attend avec impatience la révélation des fils de Dieu" Rm 8,19.

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6. Le Christ s'entretient avec les pharisiens qui lui demandent: "Est-il permis à un homme de répudier sa femme pour n'importe quel motif?" Mt 19,3. Ils l'interrogent précisément de cette manière, parce que la loi attribuée à Moïse admettait ce que l'on appelle l' "acte de répudiation" Dt 24,1. Voici la réponse du Christ: "N'avez-vous pas lu que le Créateur, dès l'origine, les fit homme et femme et qu'il a dit: Ainsi l'homme quittera son père et sa mère pour s'attacher à sa femme, et les deux ne feront qu'une seule chair? Ainsi, ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Eh bien, ce que Dieu a uni, l'homme ne doit point le séparer" Mt 19,4-6. Quant à la lettre de répudiation, le Christ répond ainsi: "C'est à cause de votre caractère intraitable que Moïse vous a permis de répudier vos femmes; mais à l'origine, il n'en fut pas ainsi. Or, je vous le dis: quiconque répudie sa femme - je ne parle pas de la fornication - et en épouse une autre, commet un adultère" Mt 19,8-9 "Qui épouse une femme répudiée par son mari commet un adultère" Mc 10,11.

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7. L'horizon de la Rédemption du corps s'ouvre par ces paroles qui constituent la réponse à une question concrète de caractère juridique et moral. Il s'ouvre avant tout par le fait que le Christ se place sur le plan de ce sacrement primordial, dont ses interlocuteurs héritaient de manière singulière, puisqu'ils héritaient aussi du mystère de la création, contenu dans les premiers chapitres du livre de la Genèse.
Ces paroles contiennent en même temps une réponse universelle, adressée à l'homme historique de tous les temps et de tous les lieux, puisqu'elles sont décisives pour le mariage et son indissolubilité. Elles se réfèrent en effet à ce qu'est l'être humain, homme et femme, à ce qu'il est devenu de manière irréversible par le fait qu'il a été créé à l'image et à la ressemblance de Dieu: l'homme qui ne cesse d'être tel, même après le péché originel, bien que celui-ci l'ait privé de l'innocence originelle et de la justice. Le Christ qui, dans sa réponse à la question des pharisiens, se réfère à l'origine, semble souligner particulièrement de cette manière le fait qu'il parle de la profondeur du mystère de la Rédemption et de la Rédemption du corps. La Rédemption signifie en effet presque une nouvelle création, elle signifie l'assomption de tout ce qui est créé pour exprimer dans la création la plénitude de justice, d'équité et de sainteté choisie par Dieu, et pour exprimer cette plénitude surtout dans l'être humain, créé comme homme et femme à l'image de Dieu.
Dans l'optique des paroles du Christ adressées aux pharisiens sur ce qu'était le mariage dès l'origine, relisons aussi Ep 5,22-33 comme témoignage de la sacramentalité du mariage, fondée sur le grand mystère du Christ et de l'Eglise.



La sacramentalité du mariage à la lumière de l'Evangile

24 novembre 1982

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1. Nous avons analysé l'épître aux Ephésiens et surtout Ep 5,22-33, du point de vue de la nature sacramentelle du mariage. Maintenant nous examinerons encore ce même texte selon l'optique de la parole de l'Evangile.
Les paroles que le Christ adresse aux pharisiens Mt 19 se réfèrent au mariage en tant que sacrement, soit donc à la révélation primordiale de la volonté et de l'action salvifiques de Dieu à l'origine, dans le mystère même de la création. En vertu de cette volonté et de cette action salvifiques de Dieu, l'homme et la femme s'unissant et devenant ainsi "une seule chair" Gn 2,24 étaient en même temps destinés à être unis "dans la vérité et dans la charité" comme fils de Dieu GS 24, fils adoptifs dans le Fils premier-né, bien-aimé de toute éternité. C'est à cette unité et à cette communion de personnes, à la ressemblance de l'union des personnes divines GS 24, que sont dédiées les paroles du Christ qui se réfèrent au mariage comme sacrement primordial et qui confirment en même temps ce sacrement sur la base du mystère de la Rédemption. En effet, l'originaire unité dans le corps de l'homme et de la femme ne cesse de former l'histoire de l'homme sur la terre bien qu'elle ait perdu la limpidité du sacrement, du signe du salut qu'elle possédait à l'origine.

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2. Si, dans Mt 19 Mc 10, le Christ confirme, en présence de ses interlocuteurs, qu'à l'origine le Créateur a institué le mariage en tant que sacrement - et si en raison de ceci il exige son indissolubilité - par cela même il ouvre le mariage à l'action salvifique de Dieu, aux forces qui jaillissent de la Rédemption du corps et qui aident à surmonter les conséquences du péché et à édifier l'unité de l'homme et de la femme selon le dessein éternel du Créateur. L'action salvifique qui découle du mystère de la Rédemption endosse l'originaire action sanctifiante de Dieu dans le mystère même de la Création.

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3. Mt 19,3-9 Mc 10,2-12 ont en même temps un accent éthique très expressif. Ces paroles confirment - sur la base du mystère de la Rédemption - le sacrement primordial et en même temps établissent un éthos adéquat que nous avons déjà dans nos réflexions précédentes appelé éthos de la Rédemption. L'éthos évangélique et chrétien est, dans son essence théologique, l'éthos de la Rédemption. Certes, pour cet éthos, nous pouvons trouver une interprétation rationnelle, une interprétation philosophique de caractère personnaliste: toutefois, dans son essence théologique, il est un éthos de la Rédemption, et mieux: un éthos de la Rédemption du corps. La Rédemption devient en même temps la base permettant de comprendre la dignité particulière du corps humain, enracinée dans la dignité personnelle de l'homme et de la femme. La raison de cette dignité se trouve précisément à la racine de l'indissolubilité de l'alliance conjugale.

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4. Le Christ se réfère au caractère indissoluble du mariage en tant que sacrement primordial et, confirmant ce sacrement sur la base du mystère de la Rédemption, il en tire en même temps des conclusions de nature éthique: "Quiconque répudie sa femme et en épouse une autre, commet un adultère à l'égard de la première, et si une femme répudie son mari et en épouse un autre, elle commet un adultère" Mc 10,11 Mt 19,9 On peut affirmer que de cette manière la Rédemption est donnée à l'homme comme grâce de la Nouvelle Alliance avec Dieu dans le Christ - et qu'en même temps elle lui est assignée comme éthos: comme forme de la morale correspondant à l'action de Dieu dans le mystère de la Rédemption. Si, comme sacrement, le mariage est un signe efficace de l'action salvifique de Dieu dès l'origine, ce sacrement constitue en même temps - à la lumière des paroles du Christ que nous méditons ici - une exhortation adressée à l'être humain, homme et femme, pour qu'ils participent consciencieusement à la Rédemption du corps.

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5. La dimension éthique de la Rédemption du corps se dessine de manière particulièrement nette quand nous méditons les paroles que le Christ prononça dans le Sermon sur la Montagne au sujet du commandement: "Tu ne commettras pas d'adultère": "Vous avez appris qu'il a été dit "Tu ne commettras pas l'adultère". Et bien, moi je vous dis: quiconque regarde une femme pour la désirer a déjà commis, dans "son coeur", l'adultère avec elle" Mt 5,27-28. Précédemment nous avons largement commenté cet énoncé lapidaire du Christ, dans la conviction qu'il a une signification fondamentale pour toute la théologie du corps, surtout dans la dimension de l'homme historique. Et, bien que ces paroles ne se réfèrent pas directement et immédiatement au mariage comme sacrement, il est cependant impossible de les séparer de tout le substrat sacramentel dans lequel, en ce qui regarde le pacte conjugal, se trouve placée l'existence de l'être humain comme homme et femme: soit dans le contexte originaire du mystère de la Création soit également, par la suite, dans le contexte du mystère de la Rédemption. Ce substrat sacramentel concerne toujours les personnes concrètes, il pénètre en ce qu'est l'homme et la femme (ou plutôt en qui est l'homme et la femme), dans leur originaire dignité propre d'image et ressemblance de Dieu en raison de la création et, en même temps, dans la dignité même héritée malgré le péché, et de nouveau, sans cesse, assignée comme tâche à l'homme moyennant la réalité de la Rédemption.

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6. Dans son Sermon sur la Montagne, le Christ donne sa propre interprétation du commandement "Tu ne commettras pas l'adultère" - interprétation qui constitue le nouvel éthos; par les mêmes paroles lapidaires il assigne comme tâche à tout homme la dignité de toute femme; et en même temps (bien que cela ne résulte du texte qu'indirectement), il assigne à toute femme la dignité de tout homme (*). Il assigne enfin à chacun - tant à l'homme qu'à la femme - sa propre dignité - en un certain sens, le "sacrum" de la personne, et cela en considération de sa féminité ou masculinité, en considération du "corps". Il n'est pas difficile de relever que les paroles que le Christ a prononcées dans son Sermon sur la Montagne regardent l'éthos. En même temps, il n'est pas difficile d'affirmer, après une réflexion approfondie, que ces paroles jaillissent du fond même de la Rédemption du corps. Bien qu'elles ne se réfèrent pas directement au mariage comme sacrement, il est facile de constater que c'est par rapport au sacrement qu'elles acquièrent leur propre et entière signification: soit au sacrement primordial qui est uni au mystère de la Création, soit à celui dans lequel l'homme historique, après le péché et en raison de sa nature héréditaire de pécheur, doit retrouver la dignité et la sainteté de l'union conjugale dans le corps, sur la base du mystère de la Rédemption.
Note - (*) Le texte de saint Marc qui parle de l'indissolubilité du mariage affirme clairement que la femme, elle aussi, commet un adultère quand elle répudie son mari et en épouse un autre Mc 10,11

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7. Dans le Sermon sur la Montagne - et de même dans l'entretien avec les pharisiens sur l'indissolubilité du mariage - le Christ parle du fond de ce mystère divin. Et en même temps, il pénètre dans la profondeur même du mystère humain. C'est pourquoi il fait appel au coeur, à ce lieu intime où se combattent chez l'homme le bien et le mal, la concupiscence et la sainteté. Parlant de la concupiscence (du regard concupiscent: Mt 5,28. Le Christ rend ses auditeurs conscients du fait que chacun porte en soi, avec le mystère du péché, la dimension intérieure de l'homme de la concupiscence (qui est triple: convoitise de la chair, convoitise des yeux, orgueil de la vie: 1Jn 2,16). C'est précisément à cet homme de la concupiscence qu'est donné dans le mariage le sacrement de la Rédemption en tant que grâce, et signe de l'alliance avec Dieu - et qu'il lui est assigné comme éthos. Et en même temps, en rapport avec le mariage comme sacrement, il est assigné comme éthos à chaque être humain, homme et femme: il est assigné à son coeur, à sa conscience, à ses regards et à son comportement. Le mariage, selon les paroles du Christ Mt 19,4, est sacrement depuis l'origine même; et en même temps, sur la base de la nature historique coupable, il est un sacrement issu du mystère de la Rédemption du corps.



Le mariage-sacrement s'accomplit en perspective de

l'espérance eschatologique

1er décembre 1982

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1. Nous avons fait l'analyse de l'épître aux Ephésiens et

surtout Ep 5,22-33, dans l'optique du caractère sacramentel du mariage. Maintenant, nous allons chercher une nouvelle fois de considérer ce même texte à la lumière des paroles de l'Evangile et des épîtres de saint Paul aux Corinthiens et aux Romains.
Comme sacrement né du mystère de la Rédemption et, en un certain sens, né à nouveau de l'amour nuptial du Christ et de l'Eglise, le mariage est une expression efficace de la puissance salvifique de Dieu qui réalise son dessein éternel, même après le péché et malgré la triple concupiscence cachée dans le coeur de chaque être humain, homme et femme. Comme expression sacramentelle de cette puissance salvifique, le mariage est également une exhortation à dominer la concupiscence (comme en parle le Christ dans le Sermon sur la Montagne). Les fruits de cette domination sont l'unité et l'indissolubilité du mariage, et en outre le sens approfondi de la dignité de la femme dans le coeur de l'homme (comme également de la dignité de l'homme dans le coeur de la femme), soit dans la coexistence conjugale, soit dans tout autre cadre des relations mutuelles.

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2. La vérité selon laquelle le mariage, en tant que sacrement de la Rédemption, est donné à l'homme de la concupiscence, comme grâce et en même temps comme éthos, a trouvé une expression particulière également dans l'enseignement de saint Paul, spécialement 1Co 7. L'apôtre, confrontant le mariage avec la virginité (c'est-à-dire avec la continence pour le Royaume des Cieux) et se déclarant pour la supériorité de la virginité, constate également que "chacun reçoit de Dieu son don particulier, l'un celui-ci, l'autre celui-là" 1Co 7,7. Sur la base du mystère de la Rédemption, au mariage correspond donc un "don" particulier, c'est-à-dire la grâce. Dans le même contexte, l'Apôtre, donnant des conseils à ses destinataires, recommande le mariage "en raison du péril d'impudicité" 1Co 7,2 et, par la suite, il recommande aux époux: "Que le mari s'acquitte de son devoir envers sa femme et pareillement la femme envers son mari" 1Co 7,3. Et il poursuit: "Mieux vaut se marier que de brûler" 1Co 7,9.

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3. Ces énoncés pauliniens ont donné naissance à l'opinion que le mariage constitue un spécifique remedium concupiscentiae. Toutefois, saint Paul qui enseigne explicitement, comme nous avons pu le constater, qu'au mariage correspond un don particulier et que, dans le mystère de la Rédemption, le mariage est donné à l'homme et à la femme comme une grâce, exprime simplement dans ces paroles, à la fois suggestives et paradoxales, la pensée que le mariage est assigné aux époux comme éthos. Dans la phrase de saint Paul: "Mieux vaut se marier que de brûler", le verbe brûler signifie le désordre des passions provenant de la concupiscence même de la chair (dans l'Ancien Testament, le Siracide présente la concupiscence de manière analogue - Si 23,17 Le mariage, par contre, signifie l'ordre éthique, introduit consciemment dans ce cadre. On peut dire que le mariage est un lieu de rencontre de l'éros et de l'éthos et de leur compénétration réciproque dans le coeur de l'homme et de la femme, et de même dans toutes leurs relations mutuelles.

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4. Cette vérité - que le mariage en tant que sacrement issu du mystère de la Rédemption est donné à l'homme historique à la fois comme grâce et comme éthos - détermine en outre le caractère du mariage, celui d'être un des sacrements de l'Eglise. Comme sacrement de l'Eglise, le mariage est indissoluble par nature. Comme sacrement de l'Eglise, il est aussi parole de l'Esprit qui exhorte l'homme et la femme à modeler toute leur coexistence en tirant leur force du mystère de la Rédemption du corps. De cette manière, ils sont appelés à la chasteté comme état de vie "selon l'Esprit" qui leur est propre Rm 8,4-5 Ga 5,25. La Rédemption du corps signifie, en ce cas, également cette espérance qui, dans la dimension du mariage, peut être définie comme espérance du quotidien, espérance du temporel. C'est sur la base d'une telle espérance que vient à être dominée la concupiscence de la chair, comme source de la tendance à un assouvissement égoïste, et que, dans l'alliance sacramentelle de la masculinité et de la féminité, la chair elle-même devient le substrat spécifique d'une communion durable et indissoluble des personnes (communio personarum), d'une manière digne des personnes.

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5. Ceux qui, comme conjoints, s'unissent selon l'éternel dessein divin de sorte qu'en un certain sens ils deviennent une seule chair, sont également appelés à leur tour, en vertu du sacrement à une vie "selon l'Esprit" qui corresponde au don reçu dans le sacrement. En vertu de ce don, ils sont capables, en vivant comme conjoints une vie selon l'Esprit, de redécouvrir le don particulier qui leur a été donné en partage. Autant la concupiscence obscurcit l'horizon de la vision intérieure, et dépouille le coeur de la limpidité des désirs et des aspirations, autant la vie selon l'Esprit (c'est-à-dire la grâce du mariage) permet à l'homme et à la femme de retrouver la vraie liberté du don, unie à la conscience du sens conjugal du corps dans sa masculinité et féminité.

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6. La vie selon l'Esprit s'exprime donc également dans l'union réciproque, par laquelle les époux, devenant une seule chair, soumettent leur masculinité et féminité à la bénédiction de la procréation: "Adam s'unit à Eve, sa femme qui conçut et enfanta ... et dit: "J'ai acquis un homme grâce au Seigneur" " Gn 4,1. La vie selon l'Esprit s'exprime également ici dans la conscience du don de la dignité des époux eux-mêmes en qualité de parents; c'est-à- dire qu'elle s'exprime dans la profonde conscience de la sainteté de la vie (sacrum), à laquelle tous deux donnent l'origine en participant - comme fondateurs d'une famille - aux forces du mystère de la Création. A la lumière de cette espérance qui est liée au mystère de la Rédemption du corps Rm 8,19-23 et de cette nouvelle vie humaine, l'homme nouveau conçu et né de l'union conjugale de son père et de sa mère, s'ouvre aux "prémices de l'Esprit" Rm 8,23 " pour entrer dans la liberté des enfants de Dieu" Rm 8,21. Et si toute la création jusqu'à ce jour "gémit en travail d'enfantement" Rm 8,22, une espérance particulière accompagne la femme dans les douleurs de l'accouchement, c'est-à-dire l'espérance de la "révélation des fils de Dieu" Rm 8,19, espérance dont tout nouveau-né porte en soi une étincelle en venant au monde.

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7. Cette espérance qui, pénétrant toute la création, est dans le monde, n'est pas en même temps du monde comme l'enseigne saint Paul. Plus encore: elle doit lutter dans le coeur humain avec ce qui est du monde, avec ce qui est dans le monde. Car tout ce qui est dans le monde - la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l'orgueil de la richesse - "vient non pas du Père, mais du monde" 1Jn 2,16. Le mariage, comme sacrement primordial, et en même temps comme sacrement né de l'amour nuptial du Christ et de l'Eglise dans le mystère de la Rédemption du corps, vient du Père. Il n'est pas du monde, mais du Père. Par conséquent le mariage en tant que sacrement constitue également la base de l'espérance pour la personne, c'est-à-dire pour l'homme et pour la femme, pour les parents et pour les fils, pour les générations humaines. D'une part, en effet, "le monde passe avec ses convoitises" et, d'autre part "celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement" 1Jn 2,17. Au mariage en tant que sacrement est unie l'origine de l'homme dans le monde, et dans le mariage également est inscrit son avenir, non seulement dans sa dimension historique mais également dans sa dimension eschatologique.

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8. C'est à cela que se réfèrent les paroles du Christ faisant appel à la résurrection des corps - paroles rapportées par les trois Synoptiques Mt 22,23-32 Mc 12,18-27 Lc 20,34-39 "A la résurrection, en effet, on ne prend ni femme ni mari, mais on est comme des anges dans le ciel". C'est ce que dit Matthieu et, de manière semblable, Marc; et voici Luc: "Les enfants de ce monde prennent femme ou mari; mais ceux qui auront été jugés dignes d'avoir part à l'autre monde et à la résurrection d'entre les morts ne prennent ni femme ni mari; aussi bien ne peuvent-ils plus mourir car ils sont pareils aux anges, et ils sont fils de Dieu, étant fils de la résurrection" Lc 20,34-36. Ces textes ont été soumis précédemment à une analyse détaillée.

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9. Le Christ affirme que le mariage - sacrement de l'origine de l'homme dans le monde visible temporaire - n'appartient pas à la réalité eschatologique du monde futur. Toutefois, l'homme appelé à participer à cet avenir eschatologique grâce à la résurrection du corps est le même être humain, homme et femme, dont l'origine dans le monde visible temporaire est liée au mariage en tant que sacrement primordial du mystère même de la Création. Et mieux, tout homme, appelé à participer à la réalité de la future résurrection porte cette vocation dans le monde; le mariage en tant que sacrement sert immuablement pour que l'être humain - homme et femme - fasse la volonté du Père: "Celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement" 1Jn 2,17


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10. En ce sens le mariage contient également, en tant que sacrement, le germe de l'avenir eschatologique de l'homme, c'est-à-dire la perspective de la Rédemption du corps dans la dimension de l'espérance eschatologique à laquelle correspondent les paroles du Christ concernant la résurrection: "A la résurrection ... on ne prend ni femme ni mari" Mt 22,30; toutefois, même ceux qui "sont pareils aux anges et ... sont fils de Dieu, étant fils de la résurrection" Lc 20,36 doivent leur propre origine dans le monde visible temporaire au mariage et à la procréation de l'homme et de la femme. Comme sacrement de l'origine humaine, comme sacrement de la temporalité de l'homme historique, le mariage accomplit un irremplaçable service à l'égard de son avenir extra-temporel, à l'égard de la Rédemption du corps dans la dimension de l'espérance eschatologique.




2002 Magistère Mariage 1406