Pastores gregis FR 44

Style pastoral de gouvernement et communion diocésaine

44 La communion ecclésiale vécue conduira l'Évêque à un style pastoral toujours plus ouvert à la collaboration de tous. Il y a une sorte de circularité entre les décisions que l'Évêque est appelé à prendre en engageant sa responsabilité personnelle pour le bien de l'Église qui lui est confiée et l'apport que les fidèles peuvent lui offrir par le biais des organismes de consultation, tels le synode diocésain, le conseil presbytéral, le conseil épiscopal et le conseil pastoral.170

Les Pères synodaux n'ont pas manqué d'évoquer ces modalités d'exercice du gouvernement épiscopal, grâce auxquelles l'action pastorale s'organise dans le diocèse.171 En effet, l'Église particulière ne renvoie pas seulement au triple ministère épiscopal (munus episcopale), mais aussi à la triple fonction prophétique, sacerdotale et royale de tout le peuple de Dieu. Tous les fidèles, en raison de leur baptême, participent, d'une manière qui leur est propre, au triple munus du Christ. Leur égalité réelle en dignité et dans l'action fait que tous sont appelés à coopérer à l'édification du Corps du Christ, et donc à mettre en oeuvre la mission que Dieu a confiée à l'Église dans le monde, chacun selon sa condition et ses devoirs.172

Toute espèce de différenciation parmi les fidèles, selon leurs charismes, leurs fonctions ou leurs ministères, est ordonnée au service des autres membres du peuple de Dieu. La différenciation ontologique et fonctionnelle, qui place l'Évêque « face » aux autres fidèles en raison de la plénitude du sacrement de l'Ordre qu'il a reçue, se comprend comme un être pour les autres fidèles, qui ne le sépare en rien de son être avec eux.

L'Église est une communion structurée, qui se réalise dans la coordination des divers charismes, ministères et services, et est ordonnée à l'obtention du but commun qui est le salut. L'Évêque est responsable de la réalisation de cette unité dans la diversité, favorisant, comme cela a été dit dans l'Assemblée synodale, la synergie des divers acteurs, de telle sorte qu'il soit possible de parcourir ensemble le chemin de foi et de mission qui est commun à tous.173

Mais, cela dit, il faut ajouter que le ministère de l'Évêque ne peut en aucune manière être réduit au rôle d'un simple modérateur. Par sa nature même, le munus episcopale implique un droit et un devoir clairs et irrévocables de gouvernement, qui comprennent aussi l'aspect juridictionnel. Les Pasteurs sont des témoins publics et leur potestas testandi fidem atteint sa plénitude dans lapotestas iudicandi: l'Évêque n'est pas seulement appelé à témoigner de la foi mais aussi à évaluer et à discipliner ses manifestations de la part des croyants confiés à sa sollicitude pastorale. En accomplissant cette tâche, il fera tout son possible pour susciter le consentement de ses fidèles, mais en fin de compte il devra savoir assumer la responsabilité des décisions qui apparaîtront nécessaires à sa conscience de Pasteur, préoccupé par-dessus tout du futur jugement de Dieu.

La communion ecclésiale, dans son caractère organique, met en cause la responsabilité personnelle de l'Évêque, mais elle suppose aussi la participation de toutes les catégories de fidèles en tant que coresponsables du bien de l'Église particulière qu'ils forment eux-mêmes. Ce qui garantit l'authenticité de cette communion organique, c'est l'action de l'Esprit; c'est lui qui agit aussi bien dans la responsabilité personnelle de l'Évêque que dans la participation des fidèles à cette responsabilité. C'est en effet l'Esprit Saint qui, en fondant l'égalité de tous les fidèles par le baptême en même temps que la diversité des charismes et des ministères de chacun, est à même de mettre en oeuvre la communion de manière efficace. Ces principes servent de fondement pour la tenue des Synodes diocésains, dont le profil canonique, décrit dans les canons 460-468 duCode de Droit canonique, a été précisé par l'Instruction interdicastérielle du 19 mars 1997.174 Les autres assemblées diocésaines, que l'Évêque présidera sans jamais abdiquer sa responsabilité spécifique, devront elles aussi s'en tenir à la substance de ces normes.

Si, par le baptême, tout chrétien reçoit l'amour de Dieu à travers l'effusion de l'Esprit Saint, l'Évêque – comme l'a rappelé à juste titre l'Assemblée synodale – reçoit en son coeur, par le sacrement de l'Ordre, la charité pastorale du Christ. Cette charité pastorale a pour objectif de créer la communion.175 Avant de traduire cet amour de communion en lignes d'action, l'Évêque doit s'efforcer de le rendre présent dans son coeur et dans celui de l'Église en menant une vie authentiquement spirituelle.

La communion étant l'expression de l'essence de l'Église, il est normal que la spiritualité de communion tende à se manifester sur le plan personnel comme sur le plan communautaire, suscitant des formes toujours nouvelles de participation et de coresponsabilité au sein des différentes catégories de fidèles. L'Évêque s'efforcera donc de susciter dans son Église particulière des structures de communion et de participation telles qu'elles permettent d'écouter l'Esprit qui vit et parle dans les fidèles, afin de les amener ensuite à mettre en oeuvre ce que ce même Esprit suggère pour le bien authentique de l'Église.

170 Cf. Code de Droit canonique, cann.
CIC 204, § 1; CIC 208 CIC 212, §§2, 3; Code des Canons des Églises orientales, cann. CIO 7, § 1; CIO 11 CIO 15, §§2, 3.
171 Cf. Proposition 35.
172 Cf. Conc. oecum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. LG 32; Code de Droit canonique, cann. CIC 204, § 1; CIC 208.
173 Cf. Proposition 35.
174 Cf. AAS 89 (1997), pp. 706-727; La Documentation catholique 94 (1997), pp. 826-834. Il faut en dire autant pour les Assemblées éparchiales, dont traitent les canons 235-242 du Code des Canons des Églises orientales.
175 Cf. Proposition 35.


Les articulations de l'Église particulière

45 De nombreuses interventions des Pères synodaux ont évoqué divers aspects et différents moments de la vie du diocèse. Ainsi, on a prêté une juste attention à la Curie diocésaine, structure qui permet à l'Évêque de manifester sa charité pastorale sous ses divers aspects.176 On a rappelé en particulier qu'il convenait de confier l'administration économique du diocèse à des personnes non seulement honnêtes mais aussi compétentes, de manière qu'elle puisse être proposée comme exemple de transparence pour toutes les autres institutions ecclésiastiques analogues. Si dans le diocèse la spiritualité de communion est vivante, on ne pourra pas ne pas accorder une attention privilégiée aux paroisses et aux communautés les plus pauvres, et l'on fera en outre tout ce qui est possible pour réserver une part des disponibilités économiques du diocèse en faveur des Églises démunies, spécialement dans les terres de mission et de migration.177

Mais c'est sur la paroisse que les Pères synodaux ont estimé qu'il convenait de fixer leur attention, se souvenant que l'Évêque est le premier responsable de cette communauté, qui a un rôle éminent parmi toutes celles qui sont présentes dans un diocèse; c'est donc surtout à elle qu'il doit réserver sa sollicitude.178 En effet, la paroisse – comme beaucoup l'ont affirmé – reste encore le noyau fondamental de la vie quotidienne du diocèse.

176 Cf. Proposition 36.
177 Cf. Proposition 39.


La Visite pastorale

46 Dans cette perspective apparaît clairement l'importance de la Visite pastorale, temps authentique de grâce, moment spécial, et même unique, où l'Évêque rencontre les fidèles et dialogue avec eux.179 Dans son oeuvre classique Stimulus pastorum, très appréciée de saint Charles Borromée lui-même, l'Évêque Bartholomeu dos Martires, que j'ai béatifié quelques jours après la clôture du Synode, définit la Visite pastorale quasi anima episcopalis regiminis et il la décrit avec justesse comme une expansion de la présence spirituelle de l'Évêque parmi ses fidèles.180

Quand il accomplit sa Visite pastorale dans une paroisse, laissant à des délégués le soin d'examiner les questions de caractère administratif, que l'Évêque privilégie la rencontre avec les personnes, en commençant par le curé et les autres prêtres! C'est là le moment où il exerce de plus près pour son peuple le ministère de la Parole, de la sanctification et du gouvernement pastoral, entrant en contact plus direct avec les inquiétudes et les préoccupations, les joies et les espoirs des personnes, et ayant l'occasion d'adresser à tous une invitation à l'espérance. Là, surtout, l'Évêque entre en contact direct avec les personnes pauvres, âgées ou malades. Quand elle est accomplie de cette manière, la Visite pastorale se révèle telle qu'elle est: un signe de la présence du Seigneur qui visite son peuple dans la paix.

178 Cf. Proposition 37.
179 Cf. ibid.
180 Cf. Rome 1572, p. 52v.


L'Évêque avec son presbytérium

47 Ce n'est pas sans raison que, quand le décret conciliaire Christus Dominus donne une description de l'Église particulière, il la fait apparaître comme une communauté de fidèles confiée à la sollicitude pastorale de l'Évêque « cum cooperatione presbyterii ».181 Il existe en effet entre l'Évêque et les prêtres une communio sacramentalis en raison du sacerdoce ministériel ou hiérarchique, qui est une participation à l'unique sacerdoce du Christ et, de ce fait, même si c'est à des degrés divers, en raison de l'unique ministère ecclésial ordonné et de l'unique mission apostolique.

Les prêtres, et parmi eux spécialement les curés, sont donc les collaborateurs les plus proches du ministère de l'Évêque. Les Pères synodaux ont renouvelé les recommandations et les invitations, qui se trouvent déjà dans les documents conciliaires et qui ont été reprises plus récemment dans l'exhortation apostolique Pastores dabo vobis,182 à veiller tout spécialement à la qualité des relations entre l'Évêque et ses prêtres. L'Évêque cherchera toujours à se comporter avec ses prêtres comme un père et un frère qui les aime, qui les écoute, les accueille, les corrige et les réconforte, qui suscite leur collaboration et qui, autant que possible, se dépense pour leur bien-être humain, spirituel, ministériel et économique.183

L'affection privilégiée dont l'Évêque entoure ses prêtres se manifeste par l'accompagnement paternel et fraternel qu'il leur donne aux étapes fondamentales de leur vie ministérielle, depuis leurs premiers pas dans le ministère pastoral. La formation permanente des prêtres demeure fondamentale; elle représente pour tous comme une « vocation dans la vocation », car, dans ses différentes dimensions complémentaires, elle vise à aider le prêtre à être et à agir en prêtre selon le style de Jésus.

Parmi les premiers devoirs de tout Évêque diocésain se trouve le soin spirituel de son presbytérium: « Le geste du prêtre qui place ses mains dans les mains de l'Évêque, le jour de l'ordination sacerdotale, en lui professant “respect filial et obéissance”, peut à première vue sembler un geste à sens unique. Ce geste, en réalité, les engage tous les deux: le prêtre et l'Évêque. Le jeune prêtre choisit de se confier à l'Évêque et, pour sa part, l'Évêque s'engage à préserver ces mains ».184

Je voudrais ajouter que, en deux autres circonstances, le prêtre peut normalement s'attendre à une manifestation de proximité spéciale de la part de son Évêque. La première est lorsque lui est confiée une mission pastorale, soit parce que cela survient pour la première fois, comme c'est le cas pour un prêtre nouvellement ordonné, soit lorsque survient un changement de ministère, ou parce que lui est confié un nouveau mandat pastoral. L'attribution d'une charge pastorale est, pour l'Évêque lui-même, un moment significatif de responsabilité à l'égard de l'un de ses prêtres. Saint Jérôme a des paroles qui peuvent bien s'appliquer à cette situation: « Le rapport même qui existait entre Aaron et ses fils, nous savons qu'il existe entre l'Évêque et ses prêtres. Un seul est Seigneur, un seul le temple: qu'il y ait de même une unité dans le ministère! [...] La gloire d'un père n'est-elle pas la sagesse du fils? Que l'Évêque se félicite lui-même d'avoir eu une bonne intuition dans le choix de tels prêtres pour le Christ! ».185

L'autre circonstance concerne le moment où un prêtre, en raison de son âge avancé, laisse de manière effective la conduite pastorale d'une communauté ou les charges d'une responsabilité directe. Dans ces circonstances et dans d'autres analogues, l'Évêque a le devoir de faire en sorte que le prêtre sente, d'une part, la gratitude de l'Église particulière pour les charges apostoliques qu'il a exercées jusqu'alors, et d'autre part la valeur spécifique de sa nouvelle situation au sein du presbytérium diocésain: il conserve en effet, et même d'une manière accrue, la possibilité de contribuer à l'édification de l'Église par le témoignage exemplaire d'une prière plus assidue et d'une généreuse mise à disposition de l'expérience acquise, au bénéfice de ses confrères plus jeunes. Aux prêtres qui se trouvent dans la même situation en raison d'une grave maladie, ou pour une autre forme de faiblesse persistante, l'Évêque manifestera sa proximité fraternelle, les aidant à conserver vivante la conviction « d'être toujours des membres actifs dans l'édification de l'Église, spécialement en raison de leur union à Jésus Christ souffrant et à tant d'autres frères et soeurs qui dans l'Église participent à la passion du Seigneur ».186

L'Évêque suivra aussi par la prière et par une compassion effective les prêtres qui, pour une raison quelconque, ont remis en question leur vocation et leur fidélité à l'appel du Seigneur, et qui ont de quelque manière manqué à leurs devoirs.187

Il ne manquera pas enfin d'examiner les signes des vertus héroïques qui se seraient éventuellement manifestés parmi les prêtres diocésains et, lorsqu'il le considérera opportun, il procédera à leur reconnaissance publique, effectuant les démarches nécessaires pour introduire la cause de canonisation.188

181 N.
CD 11.
182 Cf. nn. PDV 16-17: AAS 84 (1992), pp. 681-684; La Documentation catholique 89 (1992), pp. 460-461.
183 Cf. Proposition 40.
184 Jean-Paul II, Discours à un groupe d'Évêques nommés récemment (23 septembre 2002), n. 4:L'Oss. Rom., 23-24 septembre 2002, p. 5; La Documentation catholique 99 (2002), p.903.
185 Lettre au prêtre Népotien, LII, 7: PL 22, 534.
186 Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Pastores dabo vobis (25 mars 1992), n. PDV 77: AAS 84 (1992), p. 795: La Documentation catholique 89 (1992), p. 498.
187 Cf. Conc. oecum. Vat. II, Décr. Christus Dominus, n. CD 16.
188 Cf. Proposition 40.


La formation des candidats au sacerdoce

48 Approfondissant le thème du ministère presbytéral, les Pères synodaux ont en particulier porté leur attention sur la formation des candidats au sacerdoce, qui se déroule dans le séminaire.189 Avec ce que cela comporte de prière, de dévouement, de difficultés, la formation des prêtres constitue pour l'Évêque une préoccupation de premier plan. À ce sujet, sachant parfaitement que le séminaire est pour le diocèse un des biens les plus précieux, les Pères synodaux se sont attachés à y réfléchir avec attention, et ils ont rappelé la nécessité indiscutable du grand séminaire, sans pour autant oublier l'importance que le petit séminaire revêt lui aussi pour la transmission des valeurs chrétiennes dans la perspective de la vie à la suite du Christ.190

Chaque Évêque manifestera donc son attention, avant tout en choisissant avec un soin tout particulier les éducateurs des futurs prêtres et en établissant les formes les plus opportunes et les plus appropriées pour la préparation qui leur est nécessaire en vue d'accomplir leur ministère dans un cadre aussi fondamental pour la vie chrétienne. L'Évêque ne manquera pas de faire de fréquentes visites au séminaire, même lorsque des circonstances particulières l'auraient conduit, avec d'autres Évêques, à faire le choix, rendu nécessaire et véritablement préférable dans bon nombre de cas, d'un séminaire interdiocésain.191 La connaissance personnelle et approfondie des candidats au ministère presbytéral dans son Église particulière est un élément que l'Évêque ne peut jamais laisser de côté. Sur la base de ces contacts directs, il s'engagera à faire en sorte que dans les séminaires soient formées des personnalités matures et équilibrées, capables d'établir de solides relations humaines et pastorales, bien préparées sur le plan théologique, avec une forte vie spirituelle et aimant l'Église. Il s'efforcera également de promouvoir et de susciter des initiatives à caractère économique pour le soutien et l'aide des jeunes candidats au ministère.

Il est cependant évident que la force qui suscite et qui forme les vocations est en premier lieu la prière. Les vocations ont besoin d'un réseau répandu d'intercesseurs auprès du « Maître de la moisson ». Plus le problème des vocations sera affronté dans un contexte de prière, plus la prière aidera le candidat à écouter la voix de Celui qui l'appelle.

Au moment de conférer les Ordres sacrés, tout Évêque fera les scrutins prévus.192 À ce sujet, conscient de sa grave responsabilité dans l'administration de l'Ordre presbytéral, c'est seulement après une recherche soignée et une large consultation selon les normes du droit que l'Évêque accueillera dans son diocèse des candidats provenant d'un autre diocèse ou d'un Institut religieux.193

189 Cf. Proposition 41.
190 Cf. ibid.; Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Pastores dabo vobis (25 mars 1992), nn.
PDV 60-63: AAS 84 (1992), pp. 762-769; La Documentation catholique 89 (1992), pp.487- 489.
191 Cf. ibid, n. PDV 65: AAS, l.c., pp. 771-772; La Documentation catholique, l.c., pp. 489-490.
192 Cf. Code de Droit canonique, can. CIC 1051.
193 Cf. Proposition 41.


L'Évêque et les diacres permanents

49 En tant que dispensateurs des Ordres sacrés, les Évêques ont aussi une responsabilité directe en ce qui concerne les diacres permanents, que l'Assemblée synodale reconnaît comme d'authentiques dons de Dieu pour annoncer l'Évangile, instruire la communauté et promouvoir le service de la charité dans la Famille de Dieu.194

C'est pourquoi, chaque Évêque prendra grand soin de ces vocations, étant lui-même le responsable ultime de leur discernement et de leur formation. Bien qu'il doive normalement exercer cette responsabilité par l'intermédiaire de collaborateurs de grande confiance, soucieux d'agir conformément aux dispositions du Saint-Siège,195 l'Évêque cherchera, dans la limite du possible, à connaître personnellement ceux qui se préparent au diaconat. Après les avoir ordonnés, il continuera à être pour eux un vrai père, les encourageant à l'amour envers le Corps et le Sang du Christ, dont ils sont les ministres, et envers la sainte Église qu'ils ont accepté de servir; et il exhortera ceux qui sont mariés à une vie familiale exemplaire.

194 Cf. Proposition 42.
195 Cf. Congrégation pour l'Éducation catholique, Ratio fundamentalis institutionis Diaconorum permanentium (22 février 1998): AAS 90 (1998), pp. 843-879; La Documentation catholique 95 (1998), pp. 409-424; Congrégation pour le Clergé, Directorium pro ministerio et vita Diaconorum permanentium (22 février 1998): AAS 90 (1998), pp. 879-926; La Documentation catholique 95 (1998), pp. 425-447.


L'attention de l'Évêque envers les personnes de vie consacrée

50 L'exhortation apostolique post-synodale Vita consecrata a déjà mis en relief l'importance de la vie consacrée pour le ministère de l'Évêque. Faisant référence à ce texte durant le dernier Synode, les Pères ont rappelé que dans l'Église-communion l'Évêque doit apprécier et promouvoir la vocation spécifique et la mission de la vie consacrée, qui appartient de manière stable et ferme à la vie et à la sainteté de l'Église.196 Dans l'Église particulière aussi, elle remplit le devoir d'une présence et d'une mission charismatique exemplaires. L'Évêque examinera donc attentivement si, parmi les personnes consacrées présentes dans le diocèse, il y a eu des témoignages de pratique héroïque des vertus et, s'il le juge opportun, il engagera le procès de canonisation.

Dans son attention prévenante envers toutes les formes de vie consacrée, attention qui s'exprime aussi bien par l'encouragement que par la vigilance, l'Évêque devra réserver une place spéciale à la vie contemplative. À leur tour, les personnes consacrées accueilleront cordialement les directives pastorales de l'Évêque, visant à une pleine communion avec la vie et la mission de l'Église particulière où elles demeurent. L'Évêque est en effet le responsable de l'activité apostolique dans son diocèse: les personnes consacrées doivent collaborer avec lui de manière à enrichir, par leur présence et par leur ministère, la communion ecclésiale. On tiendra compte à ce sujet du document Mutuae relationes et de ce que prescrit le droit en vigueur.

Il a été recommandé d'avoir une attention particulière envers les Instituts de droit diocésain, surtout ceux qui sont affrontés à de sérieuses difficultés: l'Évêque prendra un soin tout paternel de ces derniers. Enfin, dans la démarche d'approbation de nouveaux Instituts nés dans son diocèse, l'Évêque veillera à agir en conformité avec ce qui est indiqué et prescrit dans l'exhortation Vita consecrata et dans les autres instructions des Dicastères compétents du Saint-Siège.197

196 Cf. Conc. oecum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n.
LG 44.
197 Cf. Proposition 43.


Les fidèles laïcs dans la sollicitude pastorale de l'Évêque

51 Chez les fidèles laïcs, qui constituent la majorité du peuple de Dieu, doit se manifester la force missionnaire du Baptême. Pour cela, ils ont besoin du soutien, de l'encouragement et de l'aide de leurs Évêques, qui doivent les inciter à exercer leur apostolat selon leur propre caractère séculier, puisant à la grâce des sacrements de Baptême et de Confirmation. Il sera nécessaire pour cela de promouvoir des parcours spécifiques de formation qui leur permettent d'assumer des responsabilités dans l'Église au sein des structures de participation diocésaines et paroissiales, sans oublier les différents services d'animation de la liturgie, de la catéchèse, de l'enseignement de la religion catholique dans les écoles, etc.

Il revient surtout aux laïcs – et on doit les encourager en ce sens – d'évangéliser les cultures, de faire pénétrer la force de l'Évangile dans les réalités de la famille, du travail, des médias, du sport, du temps libre, et d'animer chrétiennement l'ordre social et la vie publique, nationale et internationale. En raison de leur position dans le monde, les fidèles laïcs sont en effet en mesure d'exercer une grande influence sur le milieu qui les entoure, élargissant pour beaucoup d'hommes et de femmes les perspectives et les horizons de l'espérance. D'autre part, engagés comme ils le sont en raison de leur choix de vie au sein des réalités temporelles, les fidèles laïcs sont appelés, selon la manière qui correspond à leur caractère séculier spécifique, à rendre compte de leur espérance (cf.
1P 3,15) dans leurs domaines respectifs de travail, faisant grandir dans les coeurs « l'attente d'une nouvelle terre ».198 Les Évêques, quant à eux, seront proches des fidèles laïcs qui, engagés au plus fort des problèmes complexes du monde, sont particulièrement exposés au doute et aux souffrances, et ils les soutiendront pour qu'ils soient des chrétiens de grande espérance, solidement enracinés dans la certitude que le Seigneur est toujours aux côtés de ses fils.

On doit aussi considérer l'importance de l'apostolat laïc associatif, tant celui qui est de tradition plus ancienne que celui qui est réalisé par les nouveaux mouvements ecclésiaux. Toutes ces réalités associatives enrichissent l'Église, mais elles ont toujours besoin du service de discernement qui est le propre de l'Évêque, dont la mission pastorale est de favoriser la complémentarité entre les mouvements d'inspirations diverses, veillant sur leur développement, sur la formation théologique et spirituelle des animateurs, sur l'insertion des nouvelles réalités dans la communauté diocésaine et dans les paroisses, dont ils ne doivent pas se séparer.199 L'Évêque cherchera aussi à faire en sorte que les associations laïques soutiennent la pastorale des vocations du diocèse, favorisant l'accueil de toutes les vocations, spécialement des vocations au ministère ordonné, à la vie consacrée et à l'engagement missionnaire.200

198 Conc. oecum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n. GS 39.
199 Cf. Propositions 45, 46 et 49.
200 Cf. Proposition 52.


La sollicitude de l'Évêque envers la famille

52 De nombreuses voix de Pères synodaux se sont élevées en faveur de la famille, appelée précisément « église domestique », espace ouvert à la présence du Seigneur Jésus, sanctuaire de la vie. Fondée sur le sacrement de mariage, elle apparaît comme la communauté d'importance primordiale, puisque, en elle, les conjoints comme leurs enfants vivent leur vocation et se perfectionnent dans la charité. La famille chrétienne – comme il a été souligné au Synode – est une communauté apostolique, ouverte à la mission.201

C'est le propre de l'Évêque de faire en sorte que, dans la société civile, soient soutenues et défendues les valeurs du mariage au moyen de justes choix politiques et économiques. Par ailleurs, au sein de la communauté chrétienne, il ne manquera pas d'encourager la préparation des fiancés au mariage, l'accompagnement des jeunes couples et la formation de groupes de familles qui soutiennent la pastorale familiale et qui soient surtout en mesure d'aider les familles en difficulté. La proximité de l'Évêque avec les conjoints et leurs enfants, même à travers des initiatives de différents types à caractère diocésain, sera pour eux un soutien assuré.

Examinant les tâches éducatives de la famille elle-même, les Pères synodaux ont unanimement reconnu la valeur des écoles catholiques pour la formation intégrale des nouvelles générations, pour l'inculturation de la foi et pour le dialogue entre les diverses cultures. Il est donc nécessaire que l'Évêque soutienne et qualifie l'action des écoles catholiques, en favorisant leur installation là où elles n'existent pas et en pressant les institutions civiles, pour autant qu'il lui soit possible, de promouvoir une liberté effective d'enseignement au sein du pays.202

201 Cf. Proposition 51.
202 Cf. ibid.


Les jeunes, une priorité pastorale en vue de l'avenir

53 L'Évêque, pasteur et père de la communauté chrétienne, prendra un soin particulier de l'évangélisation et de l'accompagnement spirituel des jeunes. Un ministère d'espérance ne peut manquer de construire l'avenir avec ceux – les jeunes précisément – auxquels est confié l'avenir. Comme « sentinelles du matin », les jeunes attendent l'aurore d'un monde nouveau. L'expérience des Journées mondiales de la Jeunesse, que les Évêques encouragent cordialement, nous montre combien sont nombreux les jeunes disponibles pour s'engager dans l'Église et dans le monde, si on leur propose une authentique responsabilité et si on leur offre une formation chrétienne intégrale.

Dans cette perspective, me faisant l'interprète de la pensée des Pères synodaux, j'adresse un appel spécial aux personnes de vie consacrée des nombreux Instituts engagés dans le domaine de la formation et de l'éducation des enfants, des adolescents et des jeunes, pour qu'elles ne se laissent pas décourager par les difficultés du moment et qu'elles ne renoncent pas à leur oeuvre méritoire, mais qu'elles l'intensifient, s'efforçant toujours de développer leurs compétences.203

On incitera les jeunes, à travers une relation personnelle avec leurs pasteurs et leurs formateurs, à grandir dans la charité, on les éduquera à une vie généreuse, disponible pour le service d'autrui, surtout des pauvres et des malades. Il sera ainsi plus facile de leur parler aussi des autres vertus chrétiennes, spécialement de la chasteté. Sur ce chemin, ils parviendront à comprendre qu'une vie est « belle » lorsqu'elle est donnée, à l'exemple de Jésus. Ils pourront ainsi réaliser des choix responsables et définitifs, soit dans le mariage, soit dans le ministère sacré ou la vie consacrée.

203 Cf. Proposition 53.


La pastorale des vocations

54 La promotion d'une culture vocationnelle dans son sens le plus large est déterminante: il convient d'éduquer les jeunes à la découverte de la vie elle-même comme vocation. Il faudra donc que l'Évêque fasse appel aux familles, aux communautés paroissiales et aux instituts d'éducation, pour qu'ils aident les enfants et les jeunes à découvrir le projet de Dieu sur leur vie et à accueillir l'appel à la sainteté que Dieu, de manière originale, adresse à chacun.204

À ce propos, il est très important de raffermir la dimension vocationnelle de toute l'action pastorale. C'est pourquoi l'Évêque sera attentif à ce que la pastorale des jeunes et des vocations soit confiée à des prêtres et à des personnes capables de transmettre, avec enthousiasme et par l'exemple de leur vie, l'amour pour Jésus. Il sera de leur devoir d'accompagner les jeunes à travers une relation personnelle d'amitié et, si possible, de direction spirituelle, pour les aider à accueillir les signes de l'appel de Dieu et à chercher la force d'y répondre dans la grâce des sacrements et dans la vie de prière, qui est avant tout écoute de Dieu qui parle.

Tels sont quelques-uns des domaines dans lesquels tout Évêque exerce son ministère de gouvernement et exprime envers la portion du peuple de Dieu qui lui est confiée la charité pastorale qui l'anime. Une des formes caractéristiques de cette charité est la compassion, à l'imitation du Christ, Souverain Prêtre, qui a su compatir aux fragilités humaines, car lui-même a été éprouvé en toute chose comme nous, même si, à la différence de nous, ce ne fut pas dans le péché (cf.
He 4,15). Cette compassion est toujours associée à la responsabilité que l'Évêque a reçue devant Dieu et devant l'Église. C'est ainsi qu'il réalise les promesses et les engagements pris le jour de son Ordination épiscopale, quand il a librement donné son assentiment à la demande de l'Église de prendre soin, avec un amour de père, du peuple saint de Dieu et de le guider sur le chemin du salut; d'être toujours accueillant et miséricordieux, au nom du Seigneur, envers les pauvres, les malades et tous ceux qui ont besoin de réconfort et d'aide, et aussi, comme bon pasteur, d'aller à la recherche des brebis perdues pour les ramener au bercail du Christ.205

204 Cf. Proposition 52.
205 Cf. Pontifical romain, Rite de l'Ordination de l'Évêque, n. 43: engagement du prêtre choisi pour l'épiscopat, Paris (1996), n. 40, p. 34.




CHAPITRE VI


DANS LA COMMUNION DES ÉGLISES


« Le souci de toutes les Églises »

(2Co 11,28)
55 Écrivant aux chrétiens de Corinthe, l'Apôtre Paul rappelle tout ce qu'il a souffert pour l'Évangile: « Souvent à pied sur les routes, avec les dangers des fleuves, les dangers des bandits, les dangers venant des Juifs, les dangers venant des païens, les dangers de la ville, les dangers du désert, les dangers de la mer, les dangers des faux frères. J'ai connu la fatigue et la peine, souvent les nuits sans sommeil, la faim et la soif, les journées sans manger, le froid et le manque de vêtements, sans compter tout le reste: ma préoccupation quotidienne, le souci de toutes les Églises » (2Co 11,26-28). La conclusion à laquelle il aboutit est une interrogation passionnée: « Qui est faible, que je ne sois faible? Qui vient à tomber, qu'un feu ne me brûle? » (2Co 11,29). C'est cette même interrogation qui avive la conscience de tout Évêque, en tant que membre du Collège épiscopal.

Le Concile Vatican II le rappelle expressément quand il affirme que tous les Évêques, en tant que membres du Collège épiscopal et légitimes successeurs des Apôtres, de par l'institution et le précepte du Christ, sont tenus d'étendre leur sollicitude à toute l'Église. « En effet, tous les Évêques doivent promouvoir et protéger l'unité de la foi et la discipline commune à l'ensemble de l'Église, former les fidèles à l'amour à l'égard de tout le Corps mystique du Christ, surtout envers ses membres pauvres, souffrants, et envers ceux qui endurent la persécution pour la justice (cf. Mt 5,10), enfin promouvoir toute activité commune à toute l'Église, surtout pour que la foi connaisse l'accroissement et que la lumière de la pleine vérité se lève sur tous les hommes. Du reste, il est clairement établi que, en gouvernant correctement leur Église propre comme une portion de l'Église universelle, ils contribuent efficacement au bien de tout le Corps mystique, qui est aussi le Corps des Églises ».206

Ainsi, il se trouve que tout Évêque est en rapport à la fois avec son Église particulière et avec l'Église universelle. En effet, l'Évêque lui-même, qui est le principe visible et le fondement de l'unité de son Église particulière, est aussi le lien visible de la communion ecclésiale entre son Église particulière et l'Église universelle. Par conséquent, tous les Évêques, résidant dans leurs Églises particulières dispersées à travers le monde, mais conservant toujours la communion hiérarchique avec le Chef du Collège épiscopal et avec le Collège lui-même, donnent à la catholicité de l'Église sa consistance et son expression, et en même temps ils confèrent à leurs Églises particulières ce caractère de catholicité. Tout Évêque est ainsi comme un point de jonction entre son Église particulière et l'Église universelle, et un témoignage visible de la présence de l'unique Église du Christ dans son Église particulière. Dans la communion des Églises, l'Évêque représente donc son Église particulière et, en celle-ci, il représente la communion des Églises. Par le ministère épiscopal, en effet, les portiones Ecclesiae participent à la totalité de l'Une-Sainte, tandis que celle-ci, toujours par ce même ministère, se rend présente dans la Ecclesiae portio.207

La dimension universelle du ministère épiscopal est pleinement manifestée et mise en oeuvre quand tous les Évêques, en communion hiérarchique avec le Pontife romain, agissent comme Collège. Réunis solennellement en Concile oecuménique ou dispersés à travers le monde, mais toujours en communion hiérarchique avec le Pontife romain, ils constituent la succession du Collège apostolique.208 Mais il y a aussi d'autres formes par lesquelles tous les Évêques collaborent entre eux et avec le Pontife romain in bonum totius Ecclesiae, et cela se réalise pour que l'Évangile soit annoncé sur toute la terre et aussi pour affronter toutes les questions qui assaillent les diverses Églises particulières. En même temps, l'exercice du ministère du Successeur de Pierre pour le bien de toute l'Église et de chaque Église particulière, de même que l'action du Collège en tant que tel, constituent une aide efficace pour que, dans les Églises particulières confiées à la sollicitude pastorale des Évêques diocésains, soient sauvegardées l'unité de la foi et la discipline commune à toute l'Église. Dans la Chaire de Pierre, les Évêques, individuellement ou unis entre eux comme Collège, trouvent le principe perpétuel et visible ainsi que le fondement de l'unité de la foi et de la communion.209

206 Const. dogm. Lumen gentium, n. LG 23.
207 Cf. Paul VI, Discours d'ouverture de la IIIe session du Concile Vatican II (14 septembre 1964): AAS 56 (1964), p.813; La Documentation catholique 61 (1964), col. 1225; Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Lettre Communionis notio (28 mai 1992), nn. 9. 11-14: AAS 85 (1993), pp. 843- 845; La Documentation catholique 89 (1992), pp. 731-732.
208 Cf. Conc. oecum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. LG 22; Code de Droit canonique, cann. CIC 337 CIC 749, § 2; Code des Canons des Églises orientales, cann. CIO 50 CIO 597, § 2.
209 Cf. Conc. oecum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. LG 23.



Pastores gregis FR 44