Augustin, Cité de Dieu 1844
1844 Quelqu'un fera cette objection Comment saurai-se ce que Jonas a dit en effet aux Ninivites et s'il leur a dit: «Encore trois jours», ou bien: «Encore quarante jours, et Ninive sera détruite 1?» Il est clair en effet que ce prophète, envoyé pour menacer Ninive d'une ruine imminente, n'a pu assigner deux termes différents et qu-i s'excluent l'un l'autre. Si l'on me demande lequel des deux il a marqué, je crois que c'est plutôt quarante jours, comme le porte l'hébreu. Car les Septante, qui sont venus longtemps après, ont très bien pu attribuer à Jonas d'autres paroles, lesquelles toutefois se rapportent parfaitement au sujet et expriment, quoique en d'autres termes, un seul et même sens, et cela pour inviter Je lecteur à s'élever -au-dessus de l'histoire et à, chercher ce qu'elle signifie, sans mépriser d'ailleurs en rien ni l'autorité des Septante ni celle de l'hébreu, Les événements prédits par Jonas se sont effectivement accomplis dans Ninive, mais ils en figuraient d'autres qui ne convenaient pas à cette ville; tout comme il est vrai que ce prophète fut effectivement trois jours dans le ventre de la baleine, et néanmoins il figurait un autre personnage qui devait demeurer dans l'enfer pendant ce temps, et celui-là est le Seigneur
1. Jon 3,4
de tous les prophètes. C'est pourquoi, si par Ninive était figurée l'Eglise des Gentils, qui a été détruite en quelque façon par la pénitence, en ce qu'elle n'est plus ce qu'elle était, comme c'est Jésus-Christ qui a opéré en elle ce changement, c'est lui-même qui est signifié, soit par les trois jours, soit par les quarante; par les quarante, parce qu'il demeura cet espace de temps avec ses disciples après sa résurrection, avant que de monter au ciel; et par les trois jours, parce qu'il ressuscita le troisième jour. Ainsi il semble que les Septante aient voulu réveiller l'esprit du lecteur qui se serait arrêté au récit historique, pour le porter à approfondir la prophétie qu'il contient, et lui aient dit en quelque sorte Cherchez dans les quarante jours celui-là même en qui vous pourrez aussi trouver les trois jours; et vous verrez que l'un des deux termes assignés s'est accompli dans son ascension, et l'autre dans sa résurrection. - Il a donc fort bien pu être désigné par l'un et par l'autre nombre dans le prophète Jouas d'une façon, dans la prophétie des Septante de l'autre, mais toujours par un seul et même Esprit. J'abrége, et ne veux pas rapporter beaucoup d'autres exemples où l'on croirait que les Septante se sont éloignés de la vérité hébraïque, quoique, bien entendu, on les y trouve parfaitement conformes. Aussi les Apôtres se sont-ils servis indifféremment de l'hébreu et de la version des Septante, en quoi j'ai cru devoir les imiter, parce que ce n'est qu'une même autorité divine. Mais poursuivons, selon nos forces, l'oeuvre que nous avons à coeur d'accomplir.
1845 Du moment que les Juifs cessèrent d'avoir des prophètes, ils devinrent pires qu'ils n'étaient, bien que ce fût le temps où, la captivité de Babylone ayant pris fin et le temple étant rétabli, ils se flattaient de devenir meilleurs. C'est ainsi que ce peuple charnel entendait cette prophétie d'Aggée «La gloire de cette dernière maison sera plus grande que celle de la première 1». Mais ce qui précède fait bien voir que le prophète parle ici du Nouveau Testament, lorsque,
1. Ag 2,10
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promettant clairement le Christ, il dit: «J'ébranlerai toutes ces nations, et celui que tous les peuples désirent viendra 1». Les Septante, de leur autorité de prophètes, ont rendu ces paroles dans un autre sens qui convient mieux au corps qu'à la tête, c'est-à-dire à l'Eglise qu'à Jésus-Christ. «Ceux, disent-ils, que le Seigneur a élus parmi toutes les nations, viendront»; suivant cette parole du Sauveur dans l'Evangile «Il y en a beaucoup d'appelés, mais peu d'élus 2». En effet, c'est de ces élus des nations, comme de pierres vivantes, que la- maison de Dieu est bâtie par le Nouveau Testament, maison bien plus illustre que le temple construit par Salomon et rétabli après la captivité de Babylone. Les Juifs ne virent donc plus de prophètes depuis ce temps-là, et eurent même beaucoup à souffrir des rois étrangers st des Romains, afin qu'on ne crût pas que cette prophétie d'Aggée eût été accomplie par le rétablissement du temple.
Peu de temps après, ils furent assujétis à l'empire d'Alexandre; et quoique ce prince n'ait pas ravagé leur pays, parce qu'ils n'osèrent lui résister, toutefois la gloire de cette maison, pour parler comme le prophète, n'était pas alors si grande que sous la libre domination de ses rois. Il est vrai qu'Alexandre immola des victimes dans le temple de Dieu, mais il le fit moins par une véritable piété que par une vaine superstition, croyant qu'il devait aussi adorer le Dieu des Juifs comme il adorait les autres dieux. Après la mort d'Alexandre, Ptotémée, fils de Lagus, emmena les Juifs captifs en Egypte, et ils ne retournèrent en Judée que sous Ptolémée-Philadelphe, son successeur, celui qui fit traduire l'Ecriture par les Septante. Ensuite ils eurent sur les bras les guerres rapportées aux livres des Machabées. Ils furent vaincus par Ptolémée Epiphane, roi d'Alexandrie, et contraints par les cruautés inouïes d'Antiochus, roi de Syrie, d'adorer les idoles; leur temple fut souillé de toutes sortes d'abominations, jusqu'à ce qu'il fût purifié de toute cette idolâtrie par la valeur de Judas Machabée, grand capitaine, qui défit les chefs de l'armée d'Antiochus.
Peu de temps après, un certain Alcimus usurpa la souveraine sacrificature, quoiqu'il ne fût pas de la lignée sacerdotale, ce qui était un attentat. Cinquante ans s'écoulent, pendant lesquels, malgré quelques succès heureux, les
1. Ag 2,8 -2. Mt 29,14
Juifs ne furent pas en paix; Aristobule prend le diadème et se fait roi et grand prêtre tout ensemble. - C'est le premier roi que les Juifs aient eu après la captivité de Babylone, tous les autres depuis ce temps-là n'ayant porté que la qualité de chefs. ou de princes. Alexandre succéda à Aristobule dans le sacerdoce et la royauté, et l'on dit qu'il maltraita fort ses sujets. Sa femme Alexandra fut après lui reine des Juifs; et depuis, leurs maux augmentèrent toujours. Comme ses deux fils Aristobule et Hircan se disputaient l'empire, ils attirèrent les forces romaines contre les Juifs, parce que Hircan leur demanda secours contre son frère. Rome alors avait déjà dompté l'Afrique et la Grèce, et porté ses armes victorieuses en beaucoup d'autres parties du monde, en sorte qu'elle était comme accablée du poids de sa propre grandeur 1 . (Elle avait été tourmentée de furieuses séditions, qui furent suivies de la révolte des alliés et ensuite de guerres civiles, et les forces de la république étaient tellement abattues qu'elle ne pouvait encore subsister longtemps. Pompée, l'un des plus grands capitaines de Rome, étant entré en Judée, prit la ville de Jérusalem, ouvrit le temple comme vainqueur, et entra dans le Saint des saints; ce qui n'était permis qu'au grand prêtre. Après avoir confirmé le pontificat d'Hircan et établi Antipater gouverneur de la Judée, il emmena avec lui Aristobule prisonnier. Depuis ce temps, les Juifs devinrent tributaires des Romains; ensuite Cassius pilla le temple, et quelques années après, les Juifs eurent même pour roi un étranger qui fut Hérode, sous le règne duquel naquit le Messie. Le temps prédit par le patriarche Jacob en ces termes: «Les princes ne manqueront point dans la race de Juda, jusqu'à ce que vienne celui à qui la promesse est faite; et il sera l'attente des nations l»; ce temps, dis-je, était déjà accompli. Les Juifs ne manquèrent donc point de rois de leur nation jusqu'à cet Hérode; et ainsi, le moment était venu où celui en qui reposent les promesses du Nouveau- Testament et qui est l'attente des nations devait paraître dans le monde. Or, les nations ne pourraient pas attendre, comme elles font, cet événement suprême où tous les hommes seront jugés par Jésus-Christ dans l'éclat de sa puissance, si elles ne croyaient à cet autre avénement où il a daigné, dans l'humilité de sa patience, subir le jugement des hommes.
1. Ces expressions sont relies de Tite-Live dans le préambule de son Histoire
2. Gn 49,10
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1846 Hérode régnait en Judée, et l'empereur Auguste avait donné la paix au monde, après que toute la constitution de la république eut été changée, quand le Messie, selon la parole du prophète cité tout à l'heure 1, naquit à Bethléem, ville de Juda: homme visible, né humainement d'une vierge comme homme, Dieu caché, divinement engendré de Dieu le Père. Un autre prophète l'avait prédit en ces termes: «Voici venir le temps qu'une vierge concevra ou enfantera un fils qui sera appelé Emmanuel, c'est-à-dire Dieu avec nous 2». Il fit plusieurs miracles pour rendre sa divinité manifeste, et l'Evangile en rapporte quelques-uns qu'elle croit suffisants pour la prouver. Le premier est celui de sa naissance; le dernier est celui de sa résurrection et de son ascension au ciel. Peu après, les Juifs, qui l'avaient fait mourir et qui n'avaient pas voulu croire en lui, parce qu'il fallait qu'il mourût et qu'il ressuscitât, ont été chassés de leur pays par les Romains et dispersés dans toute la terre. Et ainsi, par leurs propres Ecritures, ils nous rendent ce témoignage, que nous n'avons pas inventé les prophéties qui parlent de Jésus-Christ. Plusieurs même d'entre eux les ayant considérées avant la passion, mais surtout après la résurrection, ont cru en lui, et c'est d'eux qu'il est dit: «Quand le nombre des enfants d'Israël égalerait le sable de la mer, les restes seront sauvés 2». Les autres ont été aveuglés, suivant cette prédiction: «Qu'en récompense, leur table devienne pour eux un piége et une pierre d'achoppement; que leurs yeux soient obscurcis, afin qu'ils ne voient point, et faites que leur dos soit toujours courbé 4». Ainsi, par cela même qu'ils n'ajoutent point foi à nos Ecritures, les leurs s'accomplissent en eux, encore qu'ils soient assez aveugles pour ne le pas voir. Quelqu'un dira peut-être que les chrétiens ont supposé les prophéties des sibylles touchant
1. Mi 5,2 -2. Is 7,14 -3. Is 10,22 -4. Ps 68,27
Jésus-Christ, ainsi que quelques autres qui ne sont pas d'origine juive; mais, sans nous arrêter à celles-là, nous nous contentons de celles que nos ennemis nous fournissent malgré eux, et dont ils sont eux-mêmes les dépositaires; d'autant mieux que nous y trouvons prédite cette dispersion même dont les Juifs nous fournissent le témoignage éclatant. Chaque jour, ils peuvent lire dans les psaumes cette prophétie: «C'est mon Dieu; il me préviendra par sa miséricorde, Mon Dieu m'a dit en me parlant de mes ennemis: Ne les tuez pas, de peur qu'ils n'oublient votre loi; mais dispersez-les par votre puissance 1». Dieu donc a fait voir sa miséricorde à l'Eglise dans les Juifs ses ennemis, parce que, comme dit l'Apôtre: «Leur crime «est le salut des Gentils 2». Et il ne les a pas tués, c'est-à-dire qu'il n'a pas entièrement détruit le judaïsme, de peur qu'ayant oublié la loi de Dieu, ils ne nous pussent rendre le témoignage dont nous parlons. Aussi ne s'est-il pas contenté de dire: «Ne les tuez pas, de peur qu'ils n'oublient votre loi»; mais il ajoute: «Dispersez-les». Si avec ce témoignage des Ecritures ils demeuraient dans leur pays, sans être dispersés partout, l'Eglise, qui est répandue dans le monde entier, ne les pourrait pas avoir de tous côtés pour témoins des prophéties qui regardent Jésus-Christ.
1847 Si d'autres que des Juifs ont prophétisé le Messie, c'est pour nous un surcroît de preuves; mais nous n'avons pas besoin de leur témoignage. En effet, nous ne l'alléguons que pour montrer qu'il y a eu probablement parmi les autres peuples des hommes à qui ce mystère a été révélé, et qui ont été poussés à le prédire, soit qu'ils aient participé à la même grâce que les prophètes hébreux, soit qu'ils aient été instruits par les démons, que nous savons avoir confessé Jésus-Christ présent, tandis que les Juifs ne le connaissaient pas. Aussi je ne crois pas que les Juifs mêmes osent soutenir que nul, hors de leur race, n'a servi le vrai Dieu depuis l'élection de Jacob et la réprobation d'Esaü. A la vérité, il n'y a point eu
1. Ps 58,10 -2. Rm 11,2
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d'autre peuple que le peuple israélite qui ait été proprement appelé le peuple de Dieu; mais ils ne peuvent nier qu'il n'y ait eu parmi les autres nations quelques hommes dignes d'être appelés de véritables Israélites, en tant que citoyens de la céleste patrie. S'ils le nient, il est aisé de les convaincre par l'exemple de Job, cet homme saint et admirable, qui n'était ni juif ni prophète, mais un étranger originaire d'Idumée, à qui l'Ecriture néanmoins accorde ce glorieux témoignage que nul homme de son temps ne lui était comparable pour la piété 1. Bien que l'histoire ne dise pas en quel temps il vivait, nous conjecturons par son livre placé par les Juifs entre les canoniques, à cause de son excellence, qu'il est venu au monde environ trois générations après le patriarche Jacob. Or, je ne doute point que ce ne soit un effet de la providence de Dieu de nous avoir appris par l'exemple de Job qu'il a pu y avoir parmi les autres peuples des membres de la Jérusalem spirituelle. Mais il faut croire que cette grâce n'a été faite qu'à ceux à qui l'unique médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme, a été révélé, et que son incarnation leur était prédite avant qu'elle arrivât, comme elle nous a été annoncée depuis qu'elle est arrivée, en sorte qu'une seule et même foi conduise par lui à Dieu tous ceux qui sont prédestinés pour être sa cité, sa maison et son temple. Quant aux autres prophéties de Jésus-Christ qu'on produit d'ailleurs, on peut penser que les chrétiens les ont inventées. C'est pourquoi il n'est rien de plus fort contre tous ceux qui voudraient révoquer en doute notre foi, ni de plus propre pour nous y affermir, si nous prenons les choses comme il faut, que les prophéties de Jésus-Christ tirées des livres des Juifs, qui, ayant été arrachés de leur pays et dispersés dans tout le monde pour servir de témoignage à la foi de l'Eglise, ont contribué à la faire partout fleurir.
1848LA PROPHÉTIE D'AGGÉE TOUCHANT LA SECONDE MAISON DE DIEU, QUI DOIT ÊTRE PLUS ILLUSTRE QUE LA PREMIÈRE, NE DOIT PAS S'ENTENDRE DU TEMPLE DE JÉRUSALEM, MAIS DE L'ÉGLISE.
Cette maison de Dieu, qui est l'Eglise, est bien plus auguste que la première, bâtie de
1. Jb 1 Ez 14,20
bois précieux et toute couverte d'or. La prophétie d'Aggée n'a donc pas été accomplie par le rétablissement de ce temple, puisque, depuis le temps où il fut rebâti, il fut moins fameux que du temps de Salomon, On peut dire même qu'il perdit beaucoup de sa gloire, d'abord par les prophéties qui vinrent à cesser, et ensuite par les diverses calamités qui affligèrent les Juifs jusqu'à leur entière désolation. Il en est tout autrement de cette nouvelle maison qui appartient au Nouveau Testament; elle est d'autant plus illustre qu'elle est composée de pierres meilleures, de pierres vivantes, c'est-à-dire des fidèles renouvelés par le baptême. Mais elle a été figurée par le rétablissement du temple de Salomon, parce qu'en langage prophétique ce rétablissement signifie le Testament nouveau. Ainsi, lorsque Dieu a dit par le prophète dont nous parlons: «Je donnerai la paix en ce lieu 1», comme ce lieu désignait l'Eglise qui devait être bâtie par Jésus-Christ, on doit entendre: J'établirai la paix dans le lieu que celui-ci figure. En effet, toutes les choses figuratives semblent en quelque sorte tenir la place des choses figurées. C'est ainsi que l'Apôtre a dit: «La pierre était Jésus-Christ 2», parce que la pierre dont il parle en était la figure. La gloire de cette maison du Nouveau Testament est donc plus grande que celle de l'Ancien, et elle paraîtra telle quand on en-fera la dédicace. C'est alors que «viendra celui que tous les peuples désirent 3», comme le porte le texte hébreu, parce que son premier avénement ne pouvait pas être désiré de tous les peuples, qui ne connaissaient pas celui qu'ils devaient désirer, et par conséquent ne croyaient point en lui. C'est aussi alors que, selon la version des Septante, dont le sens est pareillement prophétique, «les élus du Seigneur viendront de tous les endroits de l'univers». A partir de cette époque, il ne viendra rien que ce qui a été élu et dont l'Apôtre dit: «Il nous a élus en lui avant la création du monde 4», Le grand Architecte qui a dit: «Il y en a beaucoup d'appelés, mais peu d'élus 5», n'entendait pas que ceux qui, ayant été appelés au festin, avaient mérité qu'on les en chassât, dussent entrer dans l'édifice de cette maison dont la durée sera éternelle, mais seulement les élus. Or, maintenant que ceux qui doivent être
1. Ag 2,10 -2. 1Co 10,4 -3. Ag 2,8 -4. Ep 1,4 -5. Mt 21,14
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séparés de l'aire à l'aide du van, remplissent l'Eglise, la gloire de cette maison ne paraît pas si grande qu'elle paraîtra, quand chacun sera toujours où il sera une fois.
1849 Dans ce siècle pervers, en ces tristes jours où l'Eglise, par des humiliations passagères, s'acquiert une grandeur immortelle pour l'avenir et est exercée par une infinité de craintes, de douleurs, de travaux et de tentations, sans avoir d'autre joie que l'espérance, si elle se réjouit comme il faut, beaucoup de réprouvés sont mêlés avec les élus, et les uns et les autres renfermés en quelque sorte dans ce filet de l'Evangile 1, nagent pêle-mêle à travers l'océan du monde, jusqu'à ce que tous arrivent au rivage, où les méchants seront séparés des bons, alors que Dieu habitera dans les bons comme dans son temple, pour y être tout en tous 2. Ainsi, nous voyons s'accomplir cette parole de celui qui disait dans le psaume: «J'ai publié et annoncé partout, et ils se sont «multipliés sans nombre 3». C'est ce qui arrive maintenant, depuis qu'il a publié et annoncé, d'abord par la bouche de Jean-Baptiste son précurseur 4 et en second lieu par la sienne propre: «Faites pénitence, car le royaume des cieux est proche 5». Le Seigneur donc fit choix de quelques disciples qu'il nomma apôtres, sans naissance, sans considération, sans lettres, afin d'être et de faire en eux tout ce qu'ils seraient et feraient de grand. Parmi eux se trouva un méchant; mais le Sauveur, usant bien d'une mauvaise créature, se servit d'elle pour accomplir ce qui était ordonné touchant sa passion, et pour apprendre, par son exemple, à son Eglise à supporter les méchants. Ensuite, après avoir jeté les semences de l'Evangile, il souffrit, mourut et ressuscita, montrant par sa passion ce que nous devons endurer pour la vérité, et par sa résurrection ce que nous devons espérer pour l'éternité, sans parler du profond mystère de son sang répandu pour la rémission des péchés. Il conversa quarante jours sur la terre avec ses disciples, et monta au ciel devant leurs yeux; et dix jours après, il leur envoya,
1. Mt 13,47 -2. 1Co 15,28 –3. Ps 39,6 –4. Mt 2,2 –5. Mt 4,17
suivant sa promesse, l'Esprit-Saint de son père, dont la venue sur les fidèles est marquée par ce signe suprême et nécessaire qu'ils parlaient toute sorte de langues 1, figure de l'unité de l'Eglise catholique, qui devait se répandre dans tout l'univers et parler les langues de tous les peuples.
1850 Ensuite, selon cette prophétie: «La loi sortira de Sion, et la parole du Seigneur, de Jérusalem 2», et suivant la prédiction du Sauveur même, quand après sa résurrection il ouvrit l'esprit à ses disciples étonnés, pour leur faire entendre les Ecritures, et leur dit: «Il fallait, selon ce qui est écrit, que le Christ souffrît, et qu'il ressuscitât le troisième jour, et qu'on prêchât en son nom la pénitence et la rémission des péchés dans toutes les nations, en commençant par Jérusalem 3»; et encore, quand il répondit à ses disciples qui s'enquéraient de son dernier avénement: «Ce n'est pas à vous à savoir les temps ou les moments dont mon Père s'est réservé la disposition; mais vous recevrez la vertu du Saint-Esprit qui viendra en vous, et vous me rendrez témoignage à Jérusalem, et dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'aux extrémités de la terre 4»; suivant, dis-je, toutes ces paroles, l'Eglise se répandit d'abord à Jérusalem, et de là en Judée et en Samarie; et l'Evangile fut ensuite porté aux Gentils par
le ministère de ceux que Jésus-Christ avait lui-même allumés comme des flambeaux pour éclairer toute la terre, et embrasés du Saint-Esprit. Il leur avait dit: «Ne craignez point ceux qui tuent le corps, mais qui ne peuvent tuer l'âme 5»; et le feu de la charité qui brûlait leur coeur étouffait en eux toute crainte. Il ne s'est pas seulement servi pour la prédication de l'Evangile de ceux qui l'avaient vu et entendu avant et après sa passion et sa résurrection; mais il a suscité à ces premiers disciples des successeurs qui ont aussi porté sa parole dans tout le monde, parmi de sanglantes persécutions, Dieu se déclarant en leur faveur par plusieurs prodiges
1. Ac 2,6 -2. Is 2,3 –3. Lc 24,46-47 –4. Ac 1,7-8 –5. Mt 10,28
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et par divers dons du Saint-Esprit, afin que les Gentils, convertis à celui qui a été crucifié pour les racheter, prissent en vénération, avec un amour digne de chrétiens, le sang des martyrs qu'ils avaient répandu avec une fureur digne des démons, et que les rois mêmes, dont les édits ravageaient l'Eglise, se soumissent humblement à ce nom que leur cruauté s'était efforcée d'exterminer, et tournassent leurs persécutions contre les faux dieux, pour l'amour desquels ils avaient auparavant persécuté les adorateurs du Dieu véritable.
1851 Mais le diable, voyant qu'on abandonnait les temples des démons, et que le genre humain courait au nom du Sauveur et du Médiateur, suscita les hérétiques pour combattre la doctrine chrétienne sous le nom de chrétiens. Comme s'il pouvait y avoir dans la Cité de Dieu des personnes de sentiments contraires, à l'exemple de ces philosophes qui se contredisent l'un l'autre dans la cité de confusion! Quand donc ceux qui dans l'Eglise de Jésus-Christ ont des opinions mauvaises et dangereuses, après en avoir été repris, y persistent opiniâtrement, et refusent de se rétracter de leurs dogmes pernicieux, ils deviennent hérétiques, et une fois sortis de l'Eglise, elle les regarde comme des ennemis qui servent à exercer sa vertu. Or, tout hérétiques qu'ils sont, ils ne laissent pas d'être utiles aux vrais catholiques qui sont les membres de Jésus-Christ, Dieu se servant bien des méchants mêmes, et toutes choses contribuant à l'avantage de ceux qui l'aiment 1 . En effet, tous les ennemis de l'Eglise, quelque erreur qui les aveugle ou quelque passion qui les anime, lui procurent, en la persécutant corporellement, l'avantage d'exercer sa patience, ou, s'ils la combattent seulement par leurs mauvais sentiments, ils exercent au moins sa sagesse mais, de quelque façon que ce soit, ils lui donnent toujours sujet de pratiquer la bienveillance ou la générosité envers ses ennemis, soit qu'elle procède avec eux par des conférences paisibles, soit qu'elle les frappe de châtiments redoutables. C'est pourquoi le diable, qui est le prince de la cité des impies, a beau soulever ses esclaves contre la Cité de
1. Rm 8,28
Dieu étrangère en ce monde, il ne lui saurait nuire. Dieu ne la laisse point sans consolation dans l'adversité, de peur qu'elle ne s'abatte, ni sans épreuve dans la prospérité, de crainte qu'elle ne s'exalte, et ce juste tempérament est marqué dans cette parole du psaume
«Vos consolations ont rempli mon âme de joie, à proportion des douleurs qui affligent mon coeur 1»; ou encore dans ces mots de l'Apôtre: «Réjouissez-vous en espérance, et portez avec constance les afflictions 2».
Le docteur des nations dit aussi que «tous ceux qui veulent vivre saintement en Jésus- Christ seront persécutés 3»; il ne faut donc pas s'imaginer que cela puisse manquer en aucun temps; car alors même que l'Eglise est à couvert de la violence des ennemis du dehors, ce qui n'est pas une petite consolation pour les faibles, il y en a toujours beaucoup au dedans qui affligent cruellement le coeur des gens de bien par leur mauvaise conduite, en ce qu'ils sont cause qu'on blasphème la religion chrétienne et catholique; et cette injure qu'ils lui font est d'autant plus sensible aux âmes pieuses qu'elles l'aiment davantage et qu'elles voient qu'on l'en aime moins. Un autre sujet de douleur, c'est de penser que les hérétiques qui se disent aussi chrétiens et ont les mêmes sacrements que nous et les mêmes Ecritures, jettent dans le doute plusieurs esprits disposés à embrasser le christianisme, et donnent lieu de calomnier notre religion, Ce sont ces déréglements des hommes qui font souffrir une sorte de persécution à ceux qui veulent vivre saintement en Jésus-Christ, lors même que personne ne les tourmente en leur corps. Aussi le Psalmiste fait sentir que cette persécution est intérieure, quand il dit: «A proportion des douleurs qui affligent mon coeur». Mais au surplus, comme on sait que les promesses de Dieu sont immuables, et que l'Apôtre dit: «Dieu connaît ceux qui sont à lui 4», de sorte que nul ne peut périr de ceux «qu'il a connus par sa prescience et prédestinés pour être conformes à l'image de son fils5», le Psalmiste ajoute: «Vos consolations ont rempli mon âme de joie 6». Or, cette douleur qui afflige le coeur des gens de bien à cause des moeurs des mauvais ou des faux chrétiens, est utile à ceux qui la ressentent, parce qu'elle naît de la charité, qui
1. Ps 113,19 –2. Rm 12,12 –3. 2Tm 3,12 –4. 1Tm 2,19 -5. Rm 8,9 –6. Ps 93,19
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s'alarme pour ces misérables et pour tous ceux dont ils empêchent le salut. Les fidèles reçoivent aussi beaucoup de consolations, quand ils voient s'amender les méchants, et leur conversion leur donne autant de joie que leur perte leur causait de douleur. C'est ainsi qu'en ce siècle, pendant ces malheureux jours, non seulement depuis Jésus-Christ et les Apôtres, mais depuis Abel, le premier juste égorgé par son frère, jusqu'à la fin des siècles, l'Eglise voyage parmi les persécutions du monde et les consolations de Dieu.
1852 C'est pourquoi je ne pense pas qu'on doive croire légèrement ce que quelques-uns avancent, que l'Eglise ne souffrira plus jusqu'à l'Antéchrist aucune autre persécution, après les dix qu'elle a souffertes, et que c'est lui qui suscitera la onzième. Ils placent la première sous Néron, la seconde sous Domitien, la troisième sous Trajan, la quatrième sous Antonin, la cinquième sous Sévère, la sixième sous Maximin, la septième sous Décius, la huitième sous Valérien, la neuvième sous Aurélien, et la dixième sous Dioclétien et Maximien. Ils disent que les dix plaies d'Egypte qui précédèrent la sortie du peuple de Dieu sont les figures de ces dix persécutions, et que la dernière, celle de l'Antéchrist, a été figurée par la onzième plaie d'Egypte, qui arriva lorsque les Egyptiens, poursuivant les Hébreux jusque dans la mer Rouge qu'ils passèrent à pied sec, furent engloutis par le retour de ses flots. Pour moi, je ne puis voir dans ces anciens événements une figure des persécutions de l'Eglise, quoique ceux qui sont de ce sentiment 1 y trouvent des rapports fort ingénieux, mais qui ne sont fondés que sur des conjectures de l'esprit humain, fort sujet à prendre l'erreur pour la vérité.
Que diront-ils en effet de cette persécution où le Sauveur même fut crucifié? à quel rang la mettront-ils? S'ils prétendent qu'il ne faut compter que les persécutions qui ont atteint le corps de l'Eglise et non celle qui en a frappé
1. Saint Augustin paraît ici faire allusion à Orose. Voyez Hist., lib. 7,cap. 27, et comp. Sulpice Sévère, Hist., Sacr., lib. 2,cap. 33
et retranché la tête, que diront-ils de celle qui s'éleva à Jérusalem après que Jésus-Christ fut monté au ciel, et où saint Etienne fut lapidé, où saint Jacques, frère de saint Jean, eut la tète tranchée, où l'apôtre saint Pierre fut mis en prison et délivré par un ange, où les fidèles furent chassés de Jérusalem, où Saul, qui allait devenir l'apôtre Paul, ravagea l'Eglise et souffrit ensuite pour elle ce qu'il lui avait fait souffrir, parcourant la Judée et toutes les autres nations où son zèle lui faisait prêcher Jésus-Christ? Pourquoi donc veulent-ils faire commencer à Néron les persécutions de l'Eglise, puisque ce n'est que par d'horribles souffrances, qu'il serait trop long de raconter ici, qu'elle est arrivée au règne de ce prince? S'ils croient que l'on doit mettre au nombre des persécutions de l'Eglise toutes celles qui lui ont été suscitées par des rois, «érode était roi, et il lui en fit souffrir une des plus cruelles après l'ascension du Sauveur. D'ailleurs, que deviendra celle de Julien, qu'ils ne mettent pas entre les dix? Dira-t-on qu'il n'a point persécuté l'Eglise, lui qui défendit aux chrétiens d'apprendre ou d'enseigner les lettres humaines 1, lui qui fit perdre à Valentinien, depuis empereur, la charge qu'il avait dans l'armée, pour avoir confessé la foi chrétienne 2,et je ne dis rien de ce qu'il avait commencé de faire à Antioche, quand. il s'arrêta effrayé par la constance admirable d'un jeune homme qui chanta tout le jour des psaumes au milieu des plus cruels tourments, parmi les ongles de fer et les chevalets 3. Enfin le frère de ce Valentinien, l'arien Valens, n'a-t-il pas exercé de notre temps en Orient une sanglante persécution contre l'Eglise? Comme notre religion est répandue dans tout le monde, elle peut être persécutée dans un lieu sans qu'elle le soit dans un autre; est-ce à dire que cette persécution ne doive pas compter? Il ne faudra donc pas mettre au nombre des persécutions celle que le roi des Goths dirigea dans son pays contre les catholiques 4, durant laquelle plusieurs souffrirent le martyre, ainsi que nous l'avons appris de quelques-uns de nos frères, qui se souvenaient de l'avoir vue, lorsqu'ils étaient encore enfants. Que dirai-je
1. Voyez Ammien Marcellin, livre 22,ch. 10.
2. Socrate, Hist. eccl., lib. 3,cap. 13
3. Ibid. cap. 19
4. Il s'agit de la persécution d'Athanaric, qui eut lieu l'an 370. Voyez Orose, lib. 7,cap. 38
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de celle qui vient de s'élever en Perse 1, et qui n'est pas encore bien apaisée? N'a-t-elle pas été si forte qu'un certain nombre de chrétiens ont été contraints de se retirer dans les villes romaines? Plus je réfléchis sur tout cela, plus il me semble qu'on ne doit pas déterminer le nombre des persécutions de l'Eglise. Mais aussi il n'y aurait pas moins de témérité à assurer qu'elle en doit souffrir d'autres avant celle de l'Antéchrist dont ne doute aucun chrétien. Laissons donc ce point indécis, le parti le plus sage et le plus sûr étant de ne rien assurer positivement.
1853Pour cette dernière persécution de l'Antéchrist, le Sauveur lui-même la fera cesser par sa présence. Il est écrit «qu'il le tuera du «souffle de sa bouche, et qu'il l'anéantira par l'éclat de sa présence 2». On demande d'ordinaire, et fort mal à propos, quand cela arrivera . Mais s'il nous était utile de le savoir, qui nous l'aurait pu mieux apprendre que Jésus-Christ, notre Dieu et notre maître, le jour où ses disciples l'interrogèrent là-dessus? Loin de s'en taire avec lui, ils lui firent cette question, quand il était encore ici-bas: «Seigneur, si vous paraissez en ce temps, quand rétablirez-vous le royaume d'Israël 3?» Mais il leur répondit: «Ce n'est pas à vous à savoir «les temps dont mon père s'est réservé la dis. «position». Ils ne demandaient pas l'heure, ni le jour, ni l'année, mais le temps; et toutefois Jésus-Christ leur fit cette réponse. C'est donc en vain que nous tâchons de déterminer les années qui restent jusqu'à la fin du monde, puisque nous apprenons de la Vérité même qu'il ne nous appartient pas de le savoir. Cependant, les uns en comptent quatre cents, d'autres cinq cents, et d'autres mille, depuis l'ascension du Sauveur jusqu'à son dernier avénement. Or, dire maintenant sur quoi chacun d'eux appuie son opinion, ce serait trop long et même inutile. Ils ne se fondent que sur des conjectures humaines, saris alléguer rien de certain des Ecritures canoniques. Mais celui qui a dit: «Ils ne vous appartient pas
1. C'est la persécution du roi des Perses Isdigerde et de son successeur Vararane, vers l'an 420. Voyez Théodoret, Hist. eccl., lib. 5,cap. 38, et Socrate, lib. 7,cap. 18
2. 1Th 2,8 -3. Ac 1,6
de savoir les temps dont mon père s'est réservé la disposition», a tranché court toutesces suppositions et nous commande de nous tenir en repos là-dessus.Comme néanmoins cette parole est de l'Evangile, il n'est pas surprenant qu'elle n'ait pas empêché les idolâtres de feindre des réponses des démons touchant la durée de la religion chrétienne. Voyant que tant de cruelles persécutions n'avaient servi qu'à l'accroître au lieu de la détruire, ils ont inventé je ne sais quels vers grecs, qu'ils donnent pour une réponse de l'oracle, et où Jésus-Christ, à la vérité, est absous du crime de sacrilége, mais, en revanche, saint Pierre y est accusé de s'être servi de maléfices pour faire adorer le nom de Jésus-Christ pendant trois cent soixante-cinq ans, après quoi son culte sera aboli 1 . O la belle imagination pour des gens qui se piquent de science! Et qu'il est digne de ces grands esprits qui ne veulent point croire en Jésus-Christ, de croire de lui de semblables rêveries, et de dire que Pierre, son disciple, n'a pas appris de lui la magie, mais que néanmoins il a été magicien et qu'il a mieux aimé faire adorer le nom de son maître que le sien, s'exposant pour cela à une infinité de périls et à la mort même. Si Pierre magicien a fait que le monde aimât tant Jésus, qu'a fait Jésus innocent pour être tant aimé de Pierre? Qu'ils se répondent à eux-mêmes là-dessus, et qu'ils comprennent, s'ils peuvent, que la même grâce de Dieu qui a fait aimer Jésus-Christ au monde pour la vie éternelle, l'a fait aimer à saint Pierre pour la même vie éternelle, jusqu'à souffrir la mort temporelle en son nom. Quels sont d'ailleurs ces dieux qui peuvent prédire tant de choses, et qui ne les sauraient empêcher, ces dieux obligés de céder aux enchantements d'un magicien et d'un scélérat qui a tué, dit-on 2,un enfant d'un an, l'a mis en pièces, et l'a enseveli avec des cérémonies sacriléges, ces dieux enfin qui souffrent qu'une secte qui leur est contraire ait subsisté si longtemps, surmonté tant d'horribles persécutions, non pas en y résistant, mais en les subissant, et détruit leurs idoles, leurs temples, leurs
1. Sur cette accusation de magie élevée contre les chrétiens, voyez Eusèbe, Praep. Evang.. lib. 3,cap. 8
2. Nous savons par Tertullien que le soupçon d'infanticide était fort répandu contre les chrétiens. Peut-être avait-il un prétexte dans tes pratiques secrètes et sanglantes de certains hérétiques de la famille du gnosticisme. Voyez l'Apologétique de Tertullien, et comp. saint Augustin (De haeres., haer. 26 et 27) et Eusèbe (Hist. Eccl., lib. 3,cap. 8)
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sacrifices et leurs oracles? Quel est enfin le dieu, leur dieu, à coup sûr, et non le nôtre, qu'un si grand crime a pu porter ou contraindre à souffrir tout cela? Car ce n'est pas à un démon, mais à un dieu que s'adressent ces vers où Pierre est accusé d'avoir im posé la loi chrétienne par son art magique. Certes, ils méritent bien un tel dieu, ceux qui ne veulent pas reconnaître Jésus-Christ pour Dieu.
Augustin, Cité de Dieu 1844