2002 Magistère Mariage 1376
qui unit les époux
15 septembre 1982
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1. Nous avons sous les yeux Ep 5,22-33 que, depuis quelque temps, nous soumettons à une analyse en raison de son importance pour le problème du mariage et du sacrement. Dans son ensemble, à commencer par le premier chapitre, l'épître traite surtout du mystère caché en Dieu depuis des siècles, comme don éternellement destiné à l'homme. "Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ qui nous a bénis par toutes sortes de bénédictions spirituelles, aux cieux, dans le Christ. C'est ainsi qu'il nous a élus en Lui, dès avant la création du monde, pour être saints et immaculés en sa présence, dans l'amour, déterminant d'avance que nous serions pour Lui des fils adoptifs par Jésus-Christ. Tel fut le plaisir de sa volonté à la louange de gloire dans sa grâce dont il nous a gratifiés dans le Bien-aimé" Ep 1,3-6.
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2. Jusqu'ici on a parlé du mystère caché en Dieu "depuis des siècles" Ep 3,9. Les phases successives introduisent le lecteur dans la phase de réalisation de ce mystère dans l'histoire de l'homme: le don qui depuis des siècles lui est destiné dans le Christ devient partie réelle de l'homme dans le Christ lui-même: "... dans lequel nous trouvons la Rédemption par son sang, la rémission des péchés selon la richesse de sa grâce, qu'il nous a prodiguée en toute sagesse et intelligence: il nous a fait connaître le mystère de sa volonté, ce dessein bienveillant qu'il avait formé en lui par avance, pour le réaliser quand les temps seraient accomplis: ramener toutes choses sous un seul chef, le Christ, les êtres célestes comme les terrestres" Ep 1,7-10.
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3. Le mystère éternel est passé ainsi de l'état de caché en Dieu à la phase de réalisation et d'actualisation. Le Christ dans lequel l'humanité a été depuis des siècles élue et bénie par toutes sortes de bénédictions spirituelles du Père - le Christ qui, selon le dessein éternel de Dieu, était destiné à ce que toutes choses soient ramenées sous Lui comme sous un seul chef, les êtres célestes comme les terrestres, dans la perspective eschatologique - le Christ donc, révèle l'éternel mystère et le réalise parmi les hommes. C'est pourquoi l'auteur de l'épître aux Ephésiens exhorte, dans la suite de son texte même, ceux qui ont reçu cette révélation et tous ceux qui l'ont accueillie avec foi, à conduire leur vie d'après l'esprit de la vérité connue. Il y exhorte tout particulièrement les époux chrétiens, maris et femmes.
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4. Dans la plus grande partie du contexte, l'épître devient instruction, c'est-à-dire parénèse. Il semble que l'auteur parle surtout des aspects moraux de la vocation des chrétiens, en se référant sans cesse au mystère qui opère déjà en eux, en vertu de la Rédemption du Christ - et opère efficacement surtout en vertu du baptême. Il écrit en effet: "C'est en lui que vous aussi, après avoir entendu la Parole de vérité, la Bonne Nouvelle de votre salut, et y avoir cru, vous avez été marqués d'un sceau par l'Esprit-Saint qui avait été promis " Ep 1,13. Et ainsi donc, les aspects moraux de la vocation chrétienne restent liés non seulement à la révélation de l'éternel mystère divin dans le Christ, et à son acceptation dans la foi, mais aussi à l'ordre sacramentel qui, même s'il n'est jamais mis au premier plan dans l'épître, semble toutefois y être bien présent. Du reste il ne saurait en être autrement pour la raison que l'Apôtre écrivait à des chrétiens qui, grâce au baptême, étaient devenus membres de la communauté ecclésiale. De ce point de vue, Ep 5,22-33 que nous avons analysé jusqu'à présent semble avoir une importance particulière. Il jette en effet une lumière spéciale sur le rapport essentiel du mystère avec le sacrement et spécialement sur la sacramentalité du mariage.
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5. Au centre du mystère, il y a le Christ. En Lui - précisément en Lui - l'humanité a été bénie par toutes sortes de bénédictions spirituelles. En Lui, l'humanité a été élue dès avant la création du monde, élue dans l'amour, et destinée à devenir fils adoptifs. Quand, par la suite, avec l'accomplissement des temps, ce mystère éternel s'est réalisé dans le temps, ce fut également en Lui et par Lui. C'est par le Christ qu'a été révélé le mystère de l'amour divin. C'est par Lui et en Lui qu'est advenu son accomplissement: "En Lui nous avons la Rédemption par son sang, la rémission des péchés ..." Ep 1,7. Et ainsi les hommes qui, moyennant la foi, acceptent le don qui leur est offert dans le Christ, ont réellement part au mystère éternel, même s'il opère en eux sous le voile de la foi. Cette attribution surnaturelle des fruits de la Rédemption accomplie dans le Christ acquiert, suivant Ep 5,22-33, le caractère d'un don de soi conjugal du Christ lui-même à l'Eglise, à la ressemblance du rapport conjugal entre le mari et la femme. Donc ce ne sont pas seulement les fruits de la Rédemption qui sont un don: le don, c'est surtout le Christ: Il s'est donné à l'Eglise comme à son Epouse.
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6. Nous devons nous demander si en ce point cette analogie ne nous permet pas de pénétrer plus profondément et avec plus de précision dans le contenu essentiel du mystère. Il importe d'autant plus de se le demander que ce passage classique de Ep 5,22-33 n'apparaît ni abstraitement ni isolément mais constitue une continuité; en un certain sens, il s'agit d'une suite des énoncés de l'Ancien Testament qui présentaient suivant la même analogie l'amour de Dieu - Yahvé pour le peuple-Israël qu'il avait élu. Il s'agit en premier lieu des textes des prophètes qui ont introduit dans leurs discours lu comparaison de l'amour conjugal pour caractériser de manière particulière l'amour que Yahvé nourrissait pour le peuple-Israël, l'amour qui ne trouva ni compréhension ni réponse mais au contraire infidélité et trahison. L'expression de cette infidélité, de cette trahison fut surtout l'idolâtrie, le culte rendu aux dieux étrangers.
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7. A vrai dire, il s'agissait dans la plupart des cas de relever de manière dramatique cette trahison et cette infidélité appelées adultère d'Israël; toutefois, à la base de tous ces énoncés des prophètes, il y a la conviction explicite que l'amour de Yahvé pour le peuple élu peut et doit être comparé à l'amour qui unit l'époux à l'épouse, l'amour qui doit unir les conjoints. Ici il conviendrait de citer de nombreux passages des textes d'Isaïe, d'Osée, d'Ezéchiel (nous en avons déjà rappelé quelques-uns précédemment, lorsque nous avons analysé le concept d'adultère avec, comme toile de fond, le Sermon du Christ sur la montagne). On ne saurait oublier qu'au patrimoine de l'Ancien Testament appartient aussi le Cantique des Cantiques où l'image de l'amour conjugal a été tracée - il est vrai - sans l'analogie typique des textes des prophètes qui présentaient dans cet amour l'image de l'amour de Yahvé pour Israël, mais également sans cet élément négatif qui constitue dans le autres textes le motif d'adultères ou d'infidélité. Ainsi donc l'analogie de l'époux et de l'épouse qui a permis à l'auteur de l'épître aux Ephésiens de définir le rapport qui unit le Christ avec l'Eglise, possède une riche tradition dans les livres de l'Ancienne Alliance. Analysant cette analogie dans le texte classique de l'épître aux Ephésiens, nous ne pouvions manquer de nous référer à cette tradition.
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8. Pour illustrer cette tradition nous nous limiterons pour le moment à citer un passage du texte d'Isaïe. Le prophète dit: "Ne crains rien, car tu n'auras plus à rougir; ne soit pas confuse, car tu ne seras plus déshonorée; au contraire tu oublieras la honte de ta jeunesse et tu ne te souviendras plus de l'opprobre de ton veuvage. Car ton époux est ton créateur; Seigneur des armées est son nom; ton rédempteur est le Saint d'Israël qui s'appelle le Dieu de toute la terre. Telle une femme abandonnée dont l'esprit est affligé, le Seigneur t'a rappelée. "La femme épousée dans la jeunesse, pourrait-elle être répudiée?" a dit ton Dieu. Je t'avais abandonnée pendant un court instant, mais je te reprendrai avec immense amour (...). Mon affection ne s'écartera jamais de toi et mon alliance de paix ne faillira jamais, a dit le Seigneur qui a pitié de toi" Is 54,4-7 Is 54,10
Durant notre prochaine rencontre nous entreprendrons l'analyse de ce texte d'Isaïe.
22 septembre 1982
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1. L'épître aux Ephésiens par sa comparaison des rapports entre le Christ et l'Eglise à ceux, conjugaux, entre époux, se réfère à la tradition des prophètes de l'Ancien Testament. Pour l'expliquer, citons ce texte d'Isaïe: "Ne crains rien, car tu n'auras plus à rougir; ne sois pas confuse, car tu ne seras plus déshonorée; au contraire tu oublieras la honte de ta jeunesse et tu ne te souviendras plus de l'opprobre de ton veuvage. Car ton époux est ton créateur; Seigneur des armées est son nom; ton rédempteur est le Saint d'Israël qui s'appelle le Dieu de toute la terre. Telle une femme abandonnée dont l'esprit est affligé, le Seigneur t'a rappelée. "La femme épousée dans la jeunesse, pourrait-elle être répudiée?" a dit ton Dieu. Je t'avais abandonnée pendant un court instant, mais je te reprendrai avec immense amour. Dans un débordement de colère, je t'avais un instant caché ma face; mais avec une bienveillance durable j'aurai pitié de toi, a dit ton rédempteur, le Seigneur. Ce sera pour moi comme aux jours de Noé lorsque j'ai juré que les eaux de Noé n'inonderaient plus la terre: de même je jure de ne plus me mettre en colère contre toi et de ne plus te menacer. Car les montagnes peuvent se déplacer et les collines trembler, mais mon affection ne s'écartera jamais de toi et mon alliance de paix ne faillira pas, a dit le Seigneur qui use de miséricorde envers toi". Is 54,4-10.
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2. Dans ce cas-là, le texte d'Isaïe ne contient aucun des reproches adressés à Israël comme à une épouse infidèle, auxquels font si hautement écho les autres textes, ceux d'Osée et d'Ezéchiel en particulier. Grâce à cela transparaît plus clairement le contenu essentiel de l'analogie biblique: l'amour de Dieu-Yahvé envers Israël-peuple élu est exprimé comme l'amour de l'homme-époux envers la femme élue pour être son épouse en vertu du pacte conjugal. C'est ainsi qu'Isaïe explique les événements qui forment le cours de l'histoire d'Israël, remontant au mystère caché, pour ainsi dire, dans le coeur même de Dieu. En un certain sens, il nous conduit dans la même direction où, de nombreux siècles plus tard, nous conduira l'auteur de l'épître aux Ephésiens qui - se basant sur la Rédemption déjà accomplie dans le Christ - dévoilera d'une manière infiniment plus pleine la profondeur de ce mystère.
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3. Le texte du prophète a tous les accents de la tradition et de la mentalité des hommes de l'Ancien Testament. Parlant au nom de Dieu et presque avec ses paroles, le prophète s'adresse à Israël comme un époux à l'épouse qu'il a élue. Ces paroles débordent d'amour vrai et ardent et, en même temps, elles mettent en relief tout ce que présentent de spécifique tant la situation que la mentalité propres à cette époque. Elles soulignent que le choix de l'homme arrache la femme au déshonneur qui, suivant l'opinion de la société, semblait inhérent à l'état nubile soit originaire (la virginité) soit secondaire (le veuvage), soit enfin celui qui découle de la répudiation de l'épouse non aimée Dt 24,1 ou éventuellement de la femme infidèle. Toutefois, le texte cité ne fait pas mention de l'infidélité, mais il relève le motif de l'amour miséricordieux (*), indiquant par là non seulement la nature sociale du mariage dans l'Ancienne Alliance, mais aussi le caractère même de don qu'est l'amour de Dieu envers Israël-épouse: don qui provient entièrement de l'initiative de Dieu. En d'autres termes: en indiquant la dimension de la grâce qui depuis l'origine est contenue dans cet amour. Voilà peut-être la plus forte déclaration d'amour de la part de Dieu, liée au solennel serment de fidélité à jamais.
Note (*) - Dans le texte hébreu, nous avons les mots hesed-rahamim qui, plusieurs fois, apparaissent ensemble.
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4. L'analogie de l'amour qui unit les conjoints est très nettement relevée dans ce passage. Isaïe dit: "Ton épouse", constituant ainsi un fondement inébranlable à l'Alliance de paix avec lui. C'est ainsi que le motif de l'amour conjugal et du mariage se trouve lié au motif de l'Alliance. En outre le Seigneur des armées se définit lui-même, non seulement créateur, mais aussi rédempteur. Ce texte possède un contenu théologique d'une extraordinaire richesse.
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5. Confrontant le texte d'Isaïe avec l'épître aux Ephésiens et constatant la continuité en ce qui concerne l'analogie de l'amour conjugal et du mariage, nous devons en même temps relever une certaine différence d'optique théologique. Déjà, dans le premier chapitre de l'épître, l'auteur parle du mystère de l'amour et de l'élection par lesquels le Dieu Père de notre Seigneur Jésus-Christ embrasse tous les hommes en son Fils, et il en parle surtout comme mystère caché dans le coeur de Dieu. C'est là le mystère de l'amour paternel, mystère de l'élection à la sainteté: pour être saints et immaculés en sa présence" Ep 1,4, et de l'élection à l'adoption comme fils en le Christ "déterminant d'avance que nous serions pour lui des fils adoptifs par Jésus-Christ" Ep 1,5. Dans ce contexte, l'analogie au sujet du mariage que nous avons trouvée en Isaïe: "ton époux est ton créateur, Seigneur des armées est son nom" Is 54,5 semble être un raccourci faisant partie de la perspective théologique. La première dimension de l'amour et de l'élection, comme mystère caché depuis toujours en Dieu, est une dimension "paternelle" et non conjugale. Selon l'épître aux Ephésiens, la première note caractéristique de ce mystère reste liée à la paternité même de Dieu, mise particulièrement en relief par les prophètes Os 11,1-4 Is 63,8-9 Is 64,7 Ml 1,7
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6. L'analogie de l'amour conjugal et du mariage apparaît seulement quand le créateur, le Saint d'Israël du texte d'Isaïe, se manifeste comme rédempteur. Isaïe dit: "Ton époux est ton créateur; Seigneur des armées est son nom; ton rédempteur est le Saint d'Israël" Is 54,5. Déjà dans ce texte il est, en un certain sens, possible de lire le parallélisme entre l'époux et le rédempteur. Passant à l'épître aux Ephésiens, nous devons observer que précisément cette pensée y est pleinement développée. La figure du rédempteur (*) y est déjà tracée dans le premier chapitre comme figure spécifique de celui qui est le premier "Fils bien-aimé" du Père Ep 1,6, bien-aimé de toute éternité: de celui en qui le Père nous a tous aimés depuis des siècles. Le Fils est de la même substance que le Père, en qui "nous trouvons la Rédemption, par son sang, la mission des fautes, selon la richesse de sa grâce" Ep 1,7. Et c'est ce Fils, en tant que Christ, c'est-à-dire en tant que Messie, qui "a aimé l'Eglise et s'est donné pour elle". Ep 5,25.
Note (*) - Bien que dans les plus anciens livres bibliques le rédempteur (en hébreu go'el) signifie la personne obligée à cause des liens du sang à venger le parent tué Nb 35,19, à venir en aide au parent infortuné Rt 4,6 et spécialement à racheter de l'esclavage Lv 25,48, avec l'écoulement des temps cette analogie vint s'appliquer à Yahvé "qui a racheté Israël de sa condition d'esclavage, le libérant de la main de Pharaon, roi d'Egypte" Dt 7,8. -- Particulièrement dans le Deutero-Isaïe, l'accent se déplace de l'action du rachat à la personne du Rédempteur qui sauve personnellement Israël, pour ainsi dire, par sa seule présence et "non pas contre paiement ni contre une récompense". Is 45,13. -- C'est pourquoi le passage du Rédempteur de la prophétie d' Is 54 à l'épître aux Ephésiens a les mêmes motifs que l'application, dans l'épître précitée, des textes du Poème du Serviteur de Yahvé Is 53,10-12 Ep 5,23-26. -- Cette merveilleuse présentation de l'épître aux Ephésiens synthétise et en même temps met en relief les éléments du Poème du Serviteur de Yahvé et du Chant de Sion Is 41,1 Is 53,8-12 Is 54,8.
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Et ainsi, ce don de soi fait à l'Eglise équivaut à l'accomplissement de l'oeuvre de Rédemption. De cette manière le créateur, Seigneur des armées, du texte d'Isaïe devient le Saint d'Israël, du nouvel Israël, en tant que rédempteur. Dans l'épître aux Ephésiens, la perspective théologique du texte prophétique est conservée et, en même temps, approfondie et transformée. Y entrent de nouveaux moments révélés: le moment trinitaire, le moment christologique (**) et enfin le moment eschatologique.
Note (**) - Au lieu de la relation Dieu-Israël, Paul introduit le rapport Christ-Eglise appliquant au Christ tout ce qui, dans l'Ancien Testament, se réfère à Yahvé (Adonaï- Kyrios). Le Christ est Dieu, mais Paul lui applique également tout ce qui se réfère au Serviteur de Yahvé dans les quatre Poèmes Is 42 Is 49 Is 50 Is 52-53, interprétés dans le sens messianique durant la période inter-testamentaire. -- Le motif de la tête et du corps n'est pas d'origine biblique mais probablement hellénistique (stoïcienne?). Dans l'épître aux Ephésiens, ce thème a été utilisé dans le contexte du mariage, tandis que dans la première épître aux Corinthiens le thème du corps sert à démontrer l'ordre qui règne dans la société. -- Au point de vue biblique l'introduction de ce motif est une nouveauté
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7. Ainsi donc, en écrivant sa lettre au peuple de Dieu de la Nouvelle Alliance et précisément à l'Eglise d'Ephèse, saint Paul ne répétera pas: " Ton époux est ton créateur ", mais il indiquera de quelle manière le rédempteur qui est le Fils premier-né, de toute éternité le Bien-aimé du Père, révèle en même temps son amour salvifique qui consiste en la donation de lui-même pour l'Eglise, comme amour conjugal avec lequel il épouse l'Eglise et en fait son propre corps. L'analogie des textes prophétiques de l'Ancien Testament (en ce cas-là, principalement ceux du livre d'Isaïe) est ainsi conservée dans l'épître aux Ephésiens et, en même temps, évidemment transformée. A l'analogie correspond le mystère: elle l'exprime et en un certain sens l'explique. Dans le texte d'Isaïe ce mystère est à peine esquissé, comme entrouvert; par contre, dans l'épître aux Ephésiens, il est pleinement dévoilé (sans cesser d'être un mystère, cela s'entend). Dans l'épître aux Ephésiens sont explicitement distinctes la dimension éternelle du mystère en tant qu'il est caché en Dieu, Père de notre Seigneur Jésus-Christ, et la dimension de sa réalisation historique suivant sa dimension à la fois christologique et ecclésiologique. L'analogie du mariage se réfère surtout à la seconde dimension. Chez les prophètes également (chez Isaïe), l'analogie du mariage se réfère directement à une dimension historique: elle était liée à l'histoire du peuple élu de l'Ancienne Alliance, à l'histoire d'Israël; dans la réalisation vétéro- testamentaire du mystère, la double dimension, christologique et eschatologique, se trouvait seulement à l'état embryonnaire: elle était seulement annoncée.
Il est néanmoins évident que le texte d'Israël nous aide à mieux comprendre l'épître aux Ephésiens et la grande analogie de l'amour conjugal du Christ et de l'Eglise.
29 septembre 1982
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1. Dans Ep 5,22-33, nous trouvons - comme chez les prophètes de l'Ancien Testament (par exemple chez Isaïe) - la grande analogie du mariage ou de l'amour sponsal entre le Christ et l'Eglise.
Quelle fonction remplit cette analogie par rapport au mystère révélé dans l'Ancienne et dans la Nouvelle Alliance? A cette question il importe de répondre graduellement. Avant tout l'analogie de l'amour conjugal ou sponsal aide à pénétrer l'essence même du mystère. Il aide à le comprendre jusqu'à un certain point - de manière analogique, cela s'entend. Il est évident que l'analogie de l'amour terrestre, humain, du mari envers sa femme, de l'amour sponsal humain ne peut offrir une compréhension adéquate et complète de cette réalité absolument transcendante qu'est le mystère divin, qu'il soit caché depuis les siècles en Dieu, ou qu'il soit réalisé historiquement dans le temps quand "le Christ a aimé l'Eglise et s'est donné pour elle" Ep 5,25. Le mystère ne cesse d'être transcendant à l'égard de cette analogie comme à l'égard de n'importe quelle autre analogie par laquelle nous cherchons à l'exprimer en langage humain. Toutefois, cette analogie offre en même temps la possibilité d'une certaine pénétration cognitive dans l'essence même du mystère.
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2. L'analogie de l'amour sponsal nous permet de comprendre d'une certaine manière le mystère qui, depuis des siècles, est caché en Dieu et qui a été réalisé dans le temps par le Christ comme l'amour qui est le propre du don de soi, total et irrévocable, que Dieu a fait à l'homme dans le Christ. Il s'agit de l'homme dans sa dimension personnelle et en même temps communautaire (cette dimension communautaire est exprimée dans le livre d'Isaïe, et chez les prophètes, comme Israël, dans l'épître aux Ephésiens comme Eglise; on peut dire: peuple de Dieu de l'Ancienne et de la Nouvelle Alliance). Ajoutons que dans chacune des deux conceptions la dimension communautaire est mise, en un certain sens, au premier plan, mais pas au point de voiler totalement la dimension personnelle qui, d'ailleurs, appartient simplement à l'essence même de l'amour sponsal. Dans les deux cas, il s'agit plutôt d'une significative réduction de la communauté à la personne (*): l'époux-personne (Yahvé et le Christ) considère respectivement comme épouse-personne Israël et l'Eglise. Chaque 'je' concret doit se retrouver dans ce 'nous' biblique.
Note (*) Il ne s'agit pas seulement de la personnification de la société humaine qui constitue un phénomène assez commun dans la littérature mondiale, mais aussi d'une corporate personality spécifique de la Bible, marquée par un continuel rapport réciproque de l'individu avec le groupe (cf. H. WHEELER ROBINSON, The Hebrew Conception of Corporate Personality, BZAW 66, 1936, p. 49-62; cf. également J.-L. Mc KENSIE, Aspects of Old Testament Thought, dans The Jérôme Biblical Commentary, Londres, 1970, t. 2, p. 748).
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3. Ainsi donc l'analogie dont il est question ici permet de comprendre, à un certain degré, le mystère révélé du Dieu vivant qui est Créateur et Rédempteur (et, en tant que tel, il est en même temps le Dieu de l'Alliance): elle permet de comprendre ce mystère à la manière d'un amour sponsal, de même qu'elle permet de le comprendre également à la manière d'un amour miséricordieux (selon le texte du livre d'Isaïe) ou encore comme un amour paternel (suivant l'épître aux Ephésiens, principalement le chapitre premier). Du reste, ces manières de comprendre le mystère sont, elles aussi, analogiques. L'analogie de l'amour sponsal comprend une caractéristique du mystère qui n'est mise directement en relief ni par l'analogie de l'amour miséricordieux ni par l'analogie de l'amour paternel (ni par n'importe quelle autre analogie tirée de la Bible, à laquelle nous aurions pu nous référer).
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4. L'analogie de l'amour des époux (ou amour sponsal) semble mettre surtout en relief le moment du don de soi que Dieu fait à l'homme, choisi depuis des siècles dans le Christ (littéralement:
Israël, à l'Eglise) - don total (ou plutôt radical) et irrévocable dans son caractère essentiel, à savoir comme don. Ce don est certainement radical et donc total. On ne peut parler ici de totalité au sens métaphysique. L'homme n'est pas, en effet, comme créature, capable d'accueillir le don de Dieu dans la plénitude transcendante de sa divinité. Un tel don total (non créé), Dieu lui-même ne le partage que dans la communion trinitaire des personnes. En revanche, le don de soi que Dieu fait à l'homme - dont parle l'analogie de l'amour - ne peut avoir que la seule forme de la participation à la nature divine 2P 1,4 comme la théologie l'a précisé avec la plus grande clarté. Néanmoins, suivant cette mesure, le don que Dieu a fait à l'homme dans le Christ est un don total, à savoir radical, comme l'indique précisément l'analogie de l'amour sponsal: il est, en un certain sens, tout ce que Dieu a pu donner de lui-même à l'homme, si l'on considère les facultés limitées de l'homme- créature. De cette manière, l'analogie de l'amour sponsal indique le caractère radical de la grâce; de tout l'ordre de la grâce créée.
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5. Il semble que l'on puisse dire tout cela en ce qui concerne la première fonction de notre grande analogie qui, des écrits des prophètes de l'Ancien Testament, est passée à l'épître aux Ephésiens où, comme on l'a déjà noté, elle a subi une significative transformation. L'analogie du mariage, comme réalité humaine dans laquelle vient s'incarner l'amour sponsal, aide, jusqu'à un certain point et dans une certaine mesure, à comprendre le mystère de la grâce comme éternelle réalité en Dieu et comme fruit historique de la Rédemption de l'humanité dans le Christ. Toutefois, comme nous l'avons dit précédemment, cette analogie biblique, non seulement explique le mystère, mais, d'autre part, le mystère définit et détermine la manière adéquate de comprendre l'analogie, et précisément cet élément dans lequel les auteurs bibliques voient l'image et la ressemblance du mystère divin. Ainsi donc, la comparaison du mariage (en raison de l'amour sponsal) au rapport Yahvé-Israël dans l'Ancienne Alliance et Christ-Eglise dans la Nouvelle Alliance, décide en même temps de la manière dont il faut comprendre le mariage et détermine cette manière.
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6. C'est la deuxième fonction de notre grande analogie. Et, dans la perspective de cette fonction, nous nous rapprochons en fait du problème sacrement et ministère, c'est-à-dire, dans un sens général et fondamental, du problème du caractère sacramentel du mariage. Cela semble tout particulièrement justifié à la lumière de l'analyse de Ep 5,22-33. En effet, en présentant le rapport du Christ avec l'Eglise à l'image de l'union sponsale du mari et de la femme, l'auteur de l'épître parle de manière plus générale et, en même temps, plus fondamentale, non seulement de la réalisation de l'éternel mystère divin, mais aussi de la manière dont ce mystère s'est exprimé dans l'ordre visible, de la manière dont il est devenu visible et, de ce fait, est entré dans le domaine du signe.
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7. Par le terme signe nous entendons ici simplement la visibilité de l'invisible. Le mystère caché en Dieu depuis des siècles - ou invisible - est devenu visible avant tout dans l'événement historique même du Christ. Et le rapport du Christ avec l'Eglise qui, dans l'épître aux Ephésiens, est défini comme mysterium magnum constitue l'accomplissement et la concrétisation de la visibilité de ce mystère. Du reste, le fait que l'auteur de l'épître aux Ephésiens compare l'indissoluble rapport du Christ avec l'Eglise au rapport du mari et de la femme, c'est-à-dire au mariage - faisant en même temps référence aux paroles de Gn 2,24 qui, avec l'acte créateur de Dieu, instituent originairement le mariage -, ramène notre réflexion à ce qui a été déjà précédemment présenté (dans le contexte du mystère même de la création) comme visibilité de l'invisible; il la ramène à l'origine même de l'histoire théologique de l'homme.
On peut dire que le signe visible du mariage dès son commencement, en tant que lié au signe visible du Christ et de l'Eglise au sommet de l'économie salvifique de Dieu, transpose l'éternel plan d'amour dans la dimension historique et en fait le fondement de tout l'ordre sacramentel. C'est le mérite particulier de l'auteur de l'épître aux Ephésiens d'avoir rapproché ces deux signes, faisant d'eux le grand signe unique - c'est-à-dire un grand sacrement (sacramentum magnum).
6 octobre 1982
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1. Nous continuons l'analyse du texte classique de Ep 5,22-33 A ce propos il convient de citer quelques phrases contenues dans l'une des analyses précédentes consacrées à ce thème: "L'homme paraît dans le monde visible comme la plus haute expression du don divin car il porte en soi la dimension intérieure du don. Et, avec celle-ci, il apporte dans le monde sa ressemblance particulière avec Dieu, grâce à laquelle il transcende et domine également sa propre visibilité dans le monde, sa dimension corporelle, sa masculinité ou féminité, sa nudité. Autre reflet de cette ressemblance, la conscience primordiale de la signification conjugale du corps, conscience pénétrée du mystère de l'innocence originaire". (*) Ces phrases résument en quelques mots le résultat des analyses consacrées aux premiers chapitres de la Genèse, en relation avec les paroles par lesquelles le Christ, dans son entretien avec les pharisiens au sujet du mariage et de son indissolubilité, se référait à l'origine. D'autres phrases de cette analyse posent le problème du sacrement primordial: "Et ainsi, dans cette dimension se constitue un sacrement primordial, entendu comme signe qui transmet efficacement dans le monde visible le mystère invisible caché en Dieu de toute éternité. Voilà le mystère de la vérité et de l'amour, le mystère de la vie divine à laquelle l'homme participe réellement ... C'est l'innocence originaire qui ouvre cette participation ... (**) "
Notes - (*) J.P. II, 20/2/1980 (**)J.P. II, 20/2/1980
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2. Il convient de revoir le contenu de ces affirmations à la lumière de la doctrine paulinienne exprimée dans l'épître aux Ephésiens, et en tenant principalement compte de Ep 5,22-33 inséré dans le contexte général de l'épître. Du reste, cet écrit nous le permet, car son auteur lui-même se réfère, au verset 31 de ce chapitre 5, à l'origine et précisément aux paroles instituant le mariage dans le livre de la Gn 2,24. En ce sens pouvons-nous entrevoir dans ces paroles un énoncé concernant le sacrement primordial? Ces précédentes analyses de l'origine biblique nous ont menés progressivement à cela, en considération du don de l'existence fait à l'homme et dans la grâce qu'était l'état d'innocence et de justice primordiales. L'épître aux Ephésiens nous amène à aborder ces situations - c'est-à-dire l'état de l'homme avant le péché originel - en nous plaçant au point de vue du mystère caché en Dieu de toute éternité. En effet, dans les premières phrases de l'épître nous lisons par toutes sortes de bénédictions spirituelles, aux cieux, dans le Christ. C'est ainsi qu'il nous a élus en lui, dès avant la création du monde pour être saints et immaculés en sa présence, dans l'amour... " Ep 1,3-4.
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3. L'épître aux Ephésiens nous ouvre le monde surnaturel de l'éternel mystère, des desseins éternels de Dieu le Père à l'égard de l'homme. Ces desseins sont antérieurs à la création de l'homme. En même temps, ces desseins divins commencent déjà à se réaliser dans toute la réalité de la création. Si au mystère de la Création appartient également l'état d'innocence originaire de l'homme créé, comme homme et comme femme, à l'image de Dieu, cela signifie que le don primordial que Dieu confère à l'homme contient le fruit de l'élection, dont nous parle l'épître aux Ephésiens: "Il nous a élus ... pour être saints et immaculés en sa présence" Ep 1,4 C'est cela que les paroles du livre de la Genèse semblent souligner, quand le Créateur-Elohim trouve que l'être humain, homme et femme, paru en sa présence, est un bien digne de le satisfaire: "Dieu vit tout ce qu'il avait fait, et voilà que c'était très bien" Gn 1,31. Ce n'est qu'après le péché, après la rupture de l'alliance originaire avec le Créateur, que l'homme éprouva le besoin de se cacher du Seigneur Dieu: "J'ai entendu ta voix dans le jardin et j'ai eu peur, parce que je suis nu, et je me suis caché" Gn 3,10
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4. Au contraire, avant le péché, l'homme portait dans l'âme le fruit de l'éternelle élévation dans le Christ, Fils éternel du Père. Par la grâce de cette élection, l'être humain - homme et femme - était saint et immaculé en présence de Dieu. Cette sainteté et cette pureté primordiales (ou originaires) s'exprimaient également dans le fait que, même si tous deux "étaient nus, ils n'en avaient point honte" Gn 2,25 ainsi que nous avons cherché à le mettre en évidence dans les analyses précédentes. Confrontant le témoignage de l'origine, décrite dans les premiers chapitres du livre de la Genèse, et le témoignage de l'épître aux Ephésiens, il faut en déduire que la réalité de la création de l'homme "était déjà", imprégnée, de l'éternelle élection de l'homme "dans le Christ ": appelé à la sainteté par la grâce de l'adoption comme fils: étant "déterminé d'avance" que nous serions "pour Lui des fils adoptifs par Jésus-Christ. Tel fut le plaisir de sa volonté, à la louange de gloire de sa grâce dont il nous a gratifiés dans le Bien-aimé" Ep 1,5-6.
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5. L'être humain - homme et femme - participa dès l'origine à ce don surnaturel. Ce don a été donné en considération de Celui qui de toute éternité était, comme Fils, le Bien-aimé, même si - selon la dimension du temps et de l'histoire - elle a précédé l'incarnation de ce Fils bien- aimé et également la "Rédemption" que nous trouvons en lui, "par son sang" Ep 1,7. La Rédemption devait devenir la source de la gratification surnaturelle de l'homme après le péché et, en un certain sens, malgré le péché. Cette gratification surnaturelle qui eut lieu avant le péché originel, c'est-à-dire la grâce de la justice et de l'innocence originaires - gratification qui était le fruit de l'élection de l'homme dans le Christ avant les siècles - s'est accomplie précisément par égard pour Lui, pour ce "Bien-aimé" unique, tout en anticipant chronologiquement sa venue dans le corps. Dans les dimensions du mystère de la Création, l'élection à la dignité de fils adoptif fut le propre seulement du premier Adam, c'est-à-dire de l'être humain créé à l'image et à la ressemblance de Dieu en tant qu'homme et femme.
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6. Dans ce contexte, comment s'établit la réalité du sacrement, du sacrement primordial? Dans l'analyse de l'origine dont nous avons cité un passage, nous avons dit que le sacrement, entendu comme signe visible, se constitue avec l'homme en tant que corps, moyennant sa visible masculinité et féminité. Le corps en effet, et seulement lui est capable de rendre visible ce qui est invisible: le spirituel et le divin. Il a été créé pour transférer dans la réalité visible du monde le mystère, caché en Dieu de toute éternité et ainsi d'en être le signe J.P. II, 20/2/1980 .
Ce signe a, en outre, sa propre efficacité, comme je l'ai également dit: "L'innocence originaire liée à la signification conjugale du corps" fait que l'être humain "se sent dans son corps d'homme ou de femme, sujet de sainteté" J.P. II, 20/2/1980 . Se sent et il l'est "depuis l'origine". Cette sainteté conférée originairement à l'homme par le Créateur appartient à la réalité du sacrement de la création. Les paroles de Gn 2,24 "l'homme... s'attachera à sa femme et ils deviendront une seule chair" prononcées sur le fond de cette réalité originaire au sens théologique constituent le mariage comme partie intégrante et, en un certain sens, centrale du sacrement de la création. Elles constituent - ou plutôt, confirment peut-être simplement - le caractère de son origine. Selon ces paroles, le mariage est sacrement en tant que partie intégrante et, dirais-je, point central du sacrement de la création. En ce sens il est un sacrement primordial.
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7. L'institution du mariage exprime, selon Gn 2,24, non seulement le début de la communauté humaine fondamentale qui, par la force de procréation qui lui est propre ("Fructifiez et multipliez-vous", Gn 1,28), sert à continuer l'oeuvre de création, mais en même temps elle exprime l'initiative salvifique du Créateur, correspondant à l'éternelle élection de l'homme dont parle l'épître aux Ephésiens. Cette initiative salvifique vient de Dieu-Créateur et son efficacité surnaturelle s'identifie avec l'acte même de la création de l'homme à l'état de l'innocence originaire. C'est dans cet état que l'élection éternelle de l'homme dans le Christ fructifia dès l'acte même de sa création. Et, ainsi, il faut reconnaître que le sacrement originaire de la création tire son efficacité du "Fils bien-aimé" Ep 1,6 (où il est question de "la grâce qu'il nous a donnée dans son Fils bien-aimé"). Puis, s'il s'agit du mariage, on peut déduire que - institué dans le contexte du sacrement de la création pris globalement, c'est-à-dire à l'état de l'innocence originelle - il devait servir non seulement à prolonger l'oeuvre de la création, c'est-à-dire de la procréation, mais aussi à répandre sur les générations humaines successives le même sacrement de la création, c'est- à-dire les fruits de l'élection éternelle de l'homme par le Père dans le Fils éternel: ces fruits dont Dieu a gratifié l'homme dans l'acte même de la création.
L'épître aux Ephésiens nous permet, semble-t-il, de comprendre ainsi le livre de la Genèse et la vérité sur l'origine de l'homme et du mariage qui y est contenue.
2002 Magistère Mariage 1376