L’Eucharistie et la Trinité Michael F. Hull
Parler de l’Eucharistie et de la Trinité signifie creuser dans les profondeurs mêmes du mystère de Dieu. D’une part, si l’Eucharistie est sainte, ce n’est pas parce qu’elle est ordonnée à la sainteté, mais parce qu’elle est la sainteté même : l’Eucharistie est la présence réelle, substantielle du Christ. La participation à l’Eucharistie est une participation à la vie divine elle-même. D’autre part, la Trinité est la vie divine elle-même. Elle est la relation entre les trois Personnes de Dieu : Père, Fils et Esprit Saint. La participation à la trinité est la vie divine elle-même. Ni l’Eucharistie, ni la Trinité ne peuvent être connues de nous au moyen de la raison humaine naturelle. Ces deux mystères nous sont révélés en Jésus-Christ, Dieu et homme, l’Incarnation, dont la présence dans l’Eucharistie – corps, sang, âme et divinité – n’altère pas sa relation avec le Père et l’Esprit dans la Trinité et dont la kénose ne diminue en rien l’existence trinitaire.
L’Eucharistie nous permet d’établir une intimité étroite avec le Christ, une intimité avec sa vie et avec la vie future. Jésus a dit : "Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui. De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé et que je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi" (Jn, 6, 56-57). La vie en Jésus-Christ est le fondement des sacrements. C’est à l’Eucharistie que les six autres sacrements sont ordonnés et c’est en elle qu’ils sont pleinement réalisés (Presbyterorum Ordinis, n. 5, et saint Thomas d’Aquin, Summa Theologiae, III, q. 73, art. 3). Dans l’Incarnation, l’humanité a été élevée par le sacrifice obéissant du Christ afin de pouvoir partager sa vie divine, ne faire qu’un avec la deuxième Personne de la Trinité, et entrer ainsi mystérieusement dans la vie intérieure de Dieu. En participant à la sainte communion, les hommes participent à la vie de la Trinité.
La Trinité est l’auteur de l’économie divine, laquelle a pour fin dernière l’union avec cette même Trinité. C’est ce qu’exprime le Fils lorsqu’il prie le Père "afin que tous soient un" (Jn 17, 21-23), tandis que le fruit de la parousie est que "Dieu soit tout en tous" (1 Cor 15, 28). La vie chrétienne est donc un effort à la fois individuel et collectif pour établir la communion entre les hommes et avec les Personnes divines, dont la relation est le paradigme de toutes les relations du cosmos. Ainsi, non seulement la sainte communion opère ce qu’elle signifie, mais elle est effectivement ce qu’elle signifie : communion sainte entre Dieu et les hommes. Dans l’Eucharistie les hommes mangent la chair et boivent le sang de Jésus-Christ, dont la personne et le sacrifice introduisent l’homme à la communion avec la Trinité.
L’Eucharistie et la Trinité sont parfaitement unies dans l’économie divine. C’est une économie à laquelle les hommes participent effectivement, quoique mystérieusement. Dire que nous prenons part mystérieusement ne signifie pas que nous prenons part incidemment, immatériellement ou superficiellement – c’est le contraire qui est vrai – mais plutôt que notre expression humaine ne peut pas contenir la réalité divine dans laquelle nous nous trouvons en communion avec Dieu : Créateur, Rédempteur et Sanctificateur. La deuxième Personne de la Trinité s’est incarnée parmi les hommes pour pouvoir ramener l’humanité à la communion avec la Trinité. Cette communion s’établit dans le sacrifice de la messe, dans lequel nous représentons le calvaire et partageons son corps et son sang, afin qu’il puisse réconcilier toute chose avec lui-même et qu’il nous présente, immaculés et irréprochables, devant le Dieu trinitaire (Col 1, 20-22).