L’ÉTAT ÉTHIQUE SELON LA PHILOSOPHIE DE HEGEL

P. Paolo Scarafoni, L.C.

Recteur de l’Athénée Pontifical

Regina Apostolorum

 

" L’État est la substance éthique consciente de soi, l’union des principes de la famille et de la société civile ".

" Les lois expriment les déterminismes du contenu de la liberté objective ".

" L’État, en tant qu’esprit vivant, est en quelque sorte une totalité organisée et distincte en activités particulières, lesquelles, en procédant de l’unique concept de la volonté rationnelle, produisent perpétuellement le résultat de cette organisation. […] La Constitution est la structuration du pouvoir de l’État. […] La Constitution est la justice existante ; comme réalité de la liberté dans la manifestation de tous ses déterminismes rationnels ".

Ces expressions de Hegel résument sa pensée sur l’État et la loi. L’État est la seule entité qui exprime pleinement la rationalité et de la libre volonté à travers la formulation des lois et l’exercice du pouvoir. Les individus, les familles et la communauté religieuse sont entièrement subordonnés à la loi et au pouvoir de l’État. L’application des théories de Hegel jusqu’à leurs ultimes conséquences a conduit au siècle dernier aux abus des totalitarismes nazi et communiste : camps de concentration, nettoyage ethnique, sélection génétique et élimination de la religion de la vie publique.

Hegel ne fut pas le premier à formuler la théorie du totalitarisme d’État. Ces principes étaient déjà présents dans le monde grec, souvent en opposition avec la primauté de l’individu, de la famille et de la communauté religieuse. Dans le livre de l’Exode, les accoucheuses qui craignaient Dieu et la fille du pharaon n’appliquent pas l’édit du pharaon ordonnant de supprimer tous les petits garçons hébreux, et sauvèrent la vie de Moïse. Dans le premier livre des Chroniques, le roi David voulut recenser les familles et le peuple pour disposer d’eux, mais il fut sévèrement puni par Dieu, ainsi que tout son peuple.

La primauté de la personne, de la famille et de la communauté religieuse sur l’État se traduit par la primauté de la loi naturelle sur la loi positive. C’est pourquoi le législateur doit toujours observer la loi naturelle et faire en sorte que la dignité et la liberté des personnes, de la famille et des Églises soit garantie.

La liberté religieuse et celle de l’Église représentent la référence ultime et la garantie de la dignité de l’homme et du respect des droits humains.

Cette conception totalitaire de l’État peut aussi se manifester de manière déguisée dans le système démocratique, notamment à travers l’affirmation inconditionnelle de la loi positive. C’est ainsi que les parlements approuvent à la majorité le meurtre des enfants, des vieux et des malades, la manipulation génétique, la mainmise sur le corps humain et sur la vie sexuelle, les unions homosexuelles. Cette volonté explicite de légiférer contre la famille traditionnelle, contre l’inviolabilité de la personne et de la vie humaine, et contre la liberté de l’Église, cache en fait la volonté d’acquérir une domination absolue sur l’homme.

L’exercice d’un pouvoir absolu est recherché aujourd’hui par certaines entités supranationales et par des grands groupes transnationaux du secteur de l’économie et des communications qui arrivent bien souvent à influer sur les législations nationales ou locales, et donc à parvenir à leurs fins.